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Batman – Face à Face (Face the Face)

De juin à septembre 2007, Panini Comics a publié le récit Face à Face (Face the Face en VO) dans les quatre premiers numéros de son magazine Superman & Batman (cf. index kiosque des anciens éditeurs). Une histoire écrite par James Robinson et dessinée par Don Kramer et Leonard Kirk, étalée sur huit numéros (Detective Comics #817-820 et Batman #651-654 – sortis entre mai et août 2006 aux États-Unis). Découverte d’un titre qui n’a jamais été reproposé par Urban Comics mais qui est disponible en relié en anglais, dans une première édition (septembre 2006) puis une seconde « deluxe », renommée Batman/Two-Face, en vente depuis mai 2017.

[Début de l’histoire]
Poison Ivy a pris en otage plusieurs chefs d’entreprise, responsables de ne pas limiter leur empreinte écologique.

Tandis que Gordon convoque Batman et Robin (Bruce et Tim) pour la première fois depuis leur retour à Gotham après un an autour du monde (dans la série 52 – voir contexte dans la critique), un mystérieux tueur s’en prend à différents ennemis de seconde zone.

Tout porte à croire qu’il s’agit de Double-Face, pourtant guéri…

Les justiciers mènent l’enquête dans une ville qui se réjouit de leur retour mais craignent aussi ceux des vilains.

[Critique]
Une enquête extrêmement bien rythmée, quelques rebondissements, des personnages secondaires intéressants et une évolution « parfaite » du duo Bruce/Tim et donc Batman/Robin, voilà les ingrédients du chouette Face à Face ! L’œuvre n’est évidemment pas sans défauts, à commencer par ses dessins (on y reviendra) et deux ou trois détails, mais elle est reste très efficace dans le genre polar urbain. La fiction est importante car c’est la première qui se déroule au retour à Gotham City de Batman, après son voyage autour du monde durant un an avec Dick et Tim (après les évènements d’Infinite Crisis, relatés dans la série 52 – pas encore chroniquée sur ce site).

On renoue donc avec les citoyens de la ville et le GCPD, nourris d’un nouvel espoir quand le Bat-Signal s’illumine dans le ciel. On retrouve aussi quelques ennemis habituels (Poison Ivy, Double-Face…), certains sont mentionnés (Le Pingouin…) et des très secondaires sont carrément tués ! Cela commence par KGBeast puis Magpie. Un troisième, nettement plus « célèbre » meurt aussi, un certain choc dans l’univers de Batman ! D’autant plus que cette incarnation du vilain (l’originel) ne reviendra pas à la vie « comme par magie », mais sera remplacé par d’autres personnes qui reprendront son costume.

Si le parcours d’Harvey Dent est assez balisé (d’abord guéri puis revenant à son alias maléfique Double-Face sans réelle surprise), ses pensées internes caractérisent bien le célèbre schizophrène et lui donnent de belles scènes. Tout tend à croire que Dent est coupable et cela semblerait « trop facile » si c’était le cas ; heureusement la vérité est toute autre. Sans la révéler, elle peut se révéler aussi bien déceptive que jouissive. Décevante car venant intervenir un inconnu et un ennemi très tertiaire, sympathique car peu prévisible, plausible et pouvant être anticipée si on est attentif.

Au-delà de tous ces antagonistes, Face à Face offre une très belle exposition à la relation entre Bruce et Tim ! L’écriture de James Robinson (Starman…) est soignée, montrant les qualités et défauts des deux, leur avancement réciproque dans leur vie privée et héroïque et une conclusion parfaite (qu’on détaille un peu plus loin). Les fans de Tim Drake ne doivent pas faire l’impasse sur ce titre ! Malheureusement Urban Comics ne l’a jamais réédité… Il y a de fortes chances qu’il soit dans les futurs Batman Chronicles dédiés à l’année 2006 mais cela sera donc dans très longtemps. Autre surprise : Harvey Bullock est très réussi, là aussi dans ses échanges avec le Chevalier Noir.

L’histoire propose aussi deux nouveaux alliés. Une policière, lieutenant Harper, qui n’a pas grand intérêt et ne reviendra pas vraiment ensuite. Un détective privé, Jason Bard, étonnant d’efficacité et embauché par Batman pour l’épauler dans l’investigation. De quoi offrir quelques back-ups consacrés à cet homme charismatique. Le rôle de Bard évolue différemment, il a été créé en mai 1969 et on a pu le voir, dans l’ère moderne dans Batgirl – Année Un et Batman Eternal notamment. Pour l’anecdote, dans les dialogues de la série, Batman tutoie Gordon, ce qui est assez rare dans les traductions françaises et, forcément, sonne un peu bizarrement en lecture.

Côté dessin, Leonard Kirk signe les quatre épisodes de Detective Comics et Don Kramer les quatre de Batman avec donc une alternance entre les deux lorsqu’on lit l’entièreté du titre à la suite. Heureusement, le style des deux artistes est relativement proche ainsi que l’encrage (malgré quatre personnes différentes, cf. bloc À propos). Visuellement, c’est satisfaisant sans faire d’éclat, faute à des visages parfois grossiers, principalement à cause de la colorisation de John Kalisz, probablement numérique et beaucoup trop lisse. Cela manque de relief et nuance et gâche un peu l’ambiance « film noir » qu’on pouvait un peu retrouver dans Face à face. De la même manière, trop de planches et cases sont beaucoup trop sombres. À l’instar des Derniers Jours du Chevalier Noir, on conseillerait plutôt de découvrir le titre en noir et blanc encré mais ce n’est pas possible…

En synthèse, à part la partie graphique un peu en deçà, tout le comic book est satisfaisant, s’inscrivant comme un pan assez « important » de la chronologie de Batman et la continuité, comme il s’agit de la première aventure au retour de Batman à Gotham, comme vu plus haut. Rien que pour ça, ça vaut le coup d’œil ! Citons aussi la mort d’un ennemi plutôt connu et qu’on ne reverra jamais ensuite. Mais, surtout (attention à la potentielle révélation – allez au paragraphe sinon), c’est dans Face à face que Bruce annonce à Tim qu’il va l’adopter et en faire son pupille. Un passage particulièrement touchant, avec une écriture très « juste » quant au rôle paternel de substitution, sans remplacer évidemment le vrai père de Tim (mort dans l’excellent Crise d’identité).

Face à face mériterait une réédition en librairie, aussi bien pour les fans de Double-Face, ceux de Tim Drake (à quand une collection consacrée à ce troisième Robin ? Il y a tellement de matière en VO à proposer !) ou simplement les lecteurs de Batman qui veulent une enquête palpitante, un récit bien écrit et globalement réussi. La fiction fait la part belle aussi bien aux alliés qu’aux ennemis, avec un bon équilibre. En attendant, on peut le retrouver dans le marché de l’occasion en prenant les quatre premiers numéros de Superman & Batman de Panini Comics – les suivants ont publié les runs de Paul Dini et Grant Morrison (en plus de celui de Geoff Johns sur Superman), cf. index des kiosques des anciens éditeurs.

[À propos]
Publié dans les magazines Superman & Batman #1-4 (juin-septembre 2007)
Contient : Detective Comics #817-820 et Batman #651-654

Scénario : James Robinson
Dessin : Leonard Kirk (#1, #3, #5 et #7) et Don Kramer (#2, #4, #6, #8)
Encrage : Andy Clarke (#1, #3, #5 et #7), Keith Champagne (#2), Wayne Faucher (#3, #4, #5, #6 et #8) et Michael Bair (#4, #6)
Couleur : John Kalisz

Traduction : Sophie Viévard
Lettrage : Christophe Semal

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