Injustice 2 – Intégrale 3

Dernier tome d’Injustice 2 qui poursuit le très bon travail des deux intégrales précédentes (volume 1 et volume 2) et achève la grande saga Injustice (à l’exception de la suite de l’histoire dans le jeu vidéo bien sûr et deux volumes un peu à part – cf. index).

[Résumé de l’éditeur]
Condamné sur une planète prison par les Gardiens d’Oa, Hal Jordan finit par accepter sa part de responsabilité dans le régime du tyran Superman. Alors qu’il est hanté par des visions du passé et malmené par sa gardienne, Soranik, l’ancien Green Lantern se voit assigné son éternel ennemi – Sinestro – comme compagnon de cellule. Mais la prison est la cible d’Atrocitus et de son redouté Corps des Red Lantern

[Début de l’histoire]
Supergirl et Blue Beetle se retrouvent sur la Lune tandis que le camp de Batman et celui (partiel) de Wonder Woman et Black Adam sont en Inde suite à l’attaque d’Amazo (cf. tome précédent). Les deux groupes mettent leur différends de côté afin de sauver le plus de monde possible.

Du côté de Ra’s al Ghul, sa fille Talia vient à la rescousse de ses deux enfants : Athanasia et Damian, ce dernier emprisonné pour trahison.

Au Manoir Wayne, Alfred et Selina reçoivent une visite inattendue…

[Critique]
Dernier volume pour Injustice 2 qui, comme pour la dernière intégrale de la première série d’Injustice laisse un peu sur sa faim… Forcément, ce qu’il se déroule ensuite est à découvrir dans le jeu vidéo éponyme et non en bandes dessinées. De quoi être frustré de ne pas avoir la suite et conclusion de cet univers. C’est aussi le tome le plus paradoxal : il offre d’excellents moments d’intimité et de justesse (les dialogues entre Blue Beetle et Booster Gold, Clark et Bruce, Alfred et Athanasia – on y reviendra – ainsi qu’avec Bruce, les parents de Clark Kent à plusieurs reprises avec différents personnages : Jon, Clark, Bruce…) mais aussi des pans cosmiques, démesurés voire ubuesques qui font perdre un temps précieux.

L’opus se divise en trois parties. La première se déroule surtout au Manoir Wayne avec différents évènements qu’on ne dévoilera pas et qui auront une suite en fin de tome (avec une nouvelle frustration : quid d’Alfred ? Où peut-on lire ce qu’il va faire ensuite ? On ne le saura probablement jamais…). On en apprend en revanche davantage sur Athanasia, l’autre fille de Bruce (et donc la sœur de Damian) ! Apparue de façon soudaine (voire inexpliquée), elle prend un peu plus d’importance ici. L’on perçoit que c’est Ghul qui l’a prise sous son aile mais sans trop savoir pourquoi ni comment (et malheureusement elle sera absente du jeu vidéo, cela fait donc un second « pétard mouillé », pourquoi ne pas sortir une série sur Alfred et Athanasia vu leur destin commun dans l’ouvrage ?!).

La deuxième partie du livre (la plus grande, environ huit chapitres sur douze, hors annual) se concentre presque exclusivement au parcours d’Hal Jordan. Un chemin de rédemption très intéressant pour un des grands absents de cette seconde saga (le précédent volume ramenait Wonder Woman, au tour de Green Lantern et Sinestro) ! L’occasion pour Tom Taylor de convoquer quelques têtes inédites dont Starro le conquérant, Brainiac (le grand ennemi du jeu vidéo Injustice 2, parfaitement amené ici) et quelques retours amusants (Lobo notamment) ainsi que les Teen Titans. L’auteur continue d’explorer les filiations, après les Ghul, c’est Soranik, fille de Sinestro, qui a aussi une part importante du récit. Si l’ensemble est passionnant bien qu’un peu balisé, il s’étale malheureusement inutilement au détriment des actions et de l’évolution sur la Terre (Unie).

Justement, la troisième et dernière partie se recentre sur cette Terre et montre la dominance croissante de Gorilla Grood à la cité des singes en parallèle des évènements divers liés à Ra’s al Ghul. De quoi être préparé pile pour le jeu vidéo. C’est à la fois le point fort et le point faible de l’œuvre, elle introduit merveilleusement bien le jeu (et accentue le plaisir quand on y joue après avoir lu tout ceci) mais peine à s’auto-contenir, au risque de frustrer et décevoir. Par ailleurs, Injustice 2 en comics est une lecture presque indispensable tant l’histoire du jeu n’expliquait pas plusieurs éléments cruciaux (l’ascension de Grood notamment, le retour de Black Canary et Green Arrow – pourtant décédés –, Wonder Woman, Hal Jordan, Supergirl avec Black Adam, etc.).

Pour information/rappel : le jeu s’ouvre sur la destruction de Krypton et le sauvetage de Kara (comme dans le premier tome) mais ensuite on ne sait pas pourquoi elle se retrouve avec Black Adam et Wonder Woman (ce qui était montré et expliqué dans la seconde intégrale), faisant donc d’Injustice 2 (la série de comics), un complément majeur du jeu. Il s’avère évidemment très plaisant d’y jouer après après avoir tout lu. Le jeu vidéo se poursuit avec un autre flash-back, inédit cette fois, se déroulant dans les débuts d’Injustice du point de vue de Batman et Damian avant de « réellement » revenir à la transition entre fin de cette troisième intégrale et sa suite directe (inédite en comics et uniquement dans le jeu donc – à découvrir dans cet article si jamais).

Mais revenons à ce dernier opus. Autre point dommageable : quelques personnages cultes sont absents de toute la série. Pas une seule fois Cyborg n’est mentionné ! On ne sait pas du tout où il est (en prison en toute logique) ni ce qui lui arrive. Idem pour Batwoman. Les deux furent pourtant très présents lors de la première saga. Aquaman survient juste à la fin dans un rôle très mineur alors que sa perception des choses aurait probablement été intéressante, dans sa gestion géopolitique et marine. De la même manière, Firestorm n’apparaît pas du tout alors qu’il occupera tout un chapitre dans le jeu.

Si Injustice et Injustice 2 ont toujours su savamment doser l’humour, l’étonnante relation entre Killer Croc et Orca (Grace Belin), une femme orque, prend un peu trop de place également (carrément un épisode dédié à leur mariage !). Si cela détonne et amuse, c’est étrangement touchant. Hélas, là aussi on peut déplorer une précieuse utilisation des planches au détriment d’autres protagonistes : Cyborg ou Batwoman comme déjà cités, ou encore Flash et sa culpabilité (évoquée rapidement mais si brillamment dans le volet précédent).

On aurait aussi aimé voir davantage Jefferson Pierce (Black Lightning) en Président des États-Unis (absent du jeu en civil (dans les cinématiques) ou en héros (jouable au combat) – sauf en skin optionnel d’un personnage lui-même optionnel/payant, Raiden de Mortal Kombatsic !). La dimension politique états-unienne ou à échelle terrestre aurait été palpitante après ses prémices en début d’Injustice 2 (on ne revoit d’ailleurs pas du tout Aqualad, un comble !). Idem, le point de vue de quelques antagonistes venant d’Arkham, par exemple, aurait probablement été pertinente. On pense à Poison Ivy, Bane et L’Épouvantail notamment, car tous trois sont jouables dans le jeu. Pour Ivy, son arc est cohérent car il poursuit ce qu’on voit s’instaurer dans les comics d’Injustice 2. En revanche, les deux autres étaient quasiment inexistants dans la bande dessinée mais s’intègrent efficacement dans l’histoire du jeu complet.

En somme, cette troisième et dernière intégrale n’est pas inintéressante ni déplaisante mais un peu décevante. Faute de s’attarder sur des éléments moins importants que d’autres qu’on jugé plus pertinents dans le cadre de l’entièreté de la saga et, donc, du jeu vidéo qui poursuit et conclut (moyennement bien – cf. le résumé complet) cette seconde histoire. Cadenassée à cet autre médium, il est peut-être délicat pour les gamers non connaisseurs des comics de mieux comprendre ce qui se déroule durant le jeu (mais ceci n’est pas une critique négative de la bande dessinée pour autant, au contraire). La conclusion, même ouverte, est un très beau moment d’écriture et de « justesse », émouvant et parfait.

Côté dessins, tout l’album est plutôt solide, bien aidé par « seulement » trois artistes (et non une dizaine comme le volet précédent), à savoir Daniel Sempere, Bruno Redondo et Xermanico. S’il y a toujours quelques fonds de case assez pauvre et une colorisation certes éclatante mais parfois un peu lisse, la presque homogénéité graphique (de ce tome mais aussi des deux d’avant) nourrit la saga en lui apportant cette identité reconnaissable, pas forcément épique ou élégante, mais correcte et suffisante. On rappelle qu’avec une publication originelle en support numérique, les planches étaient divisées de moitié, formant presque des carrés (remis l’un en dessous de l’autre pour les versions librairies), empêchant des illustrations pleines pages.

Tom Taylor a su conserver tout au long d’Injustice 2 un équilibre entre personnages secondaires mis en avant, notamment un bestiaire plus jeune (Supergirl, Damian, les Teen Titans, Blue Beetle…) et protagonistes iconiques mis de côté (Batman, Superman…) ou inédits (Ra’s al Ghul, la Suicide Squad…) sans les dénaturer ou se faire voler la vedette par les premiers. Si l’auteur maîtrise sa narration (la richesse de son récit, ses rebondissements, son travail de caractérisation et son rythme haletant restent les qualités du titre), il fait l’impasse sur quelques têtes familières et se voit obliger de conclure presque abruptement son titre, à suivre dans le jeu vidéo éponyme ou bien… nulle part (Alfred, Jefferson, Athanasia, Aqualad, etc.).

Sans bouder son plaisir tout au long de cette incroyable saga (cf. index), Injustice aura réussi l’étrange pari d’être autant si ce n’est plus passionnant que les séries habituelles de DC Comics publiées en parallèle et se déroulant dans la chronologie dite « officielle ». Une aubaine pour le scénariste Tom Taylor qui s’est rapidement imposé chez l’éditeur et a signé d’autres comics inégalement qualitatifs : la saga DCEASED, Suicide Squad Renégats, Batman – La Dernière Sentinelle, Earth 2

À noter que cette intégrale regroupe donc les deux derniers tomes simples de la précédente édition (cinq et six). En plus du jeu vidéo Injustice 2, un ultime ouvrage un peu à part existe : Injustice vs. Les maîtres de l’univers ainsi qu’un film d’animation assez moyen. Année Zéro peut aussi se lire avant toute la saga, après la première série ou cette seconde (mais il est complètement dispensable). Retrouvez l’index de toute la saga Injustice sur cette page.

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 27 octobre 2023.
Contient : Injustice 2 #25 à 36 + Annual #2
Nombre de pages : 320

Scénario : Tom Taylor
Dessin : Daniel Sempere, Bruno Redondo, Xermanico
Encrage : Bruno Redondo, Xermanico, Juan Alabarran
Couleur : Rex Lokus, J. Nanjan, Gabe Eltaeb, John Kalisz

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Calix Ltd – Île Maurice

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