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All Star Batman – Tome 3 : Le premier allié

Dernier volume de la série écrite par Scott Snyder ; après un premier tome sympathique mais oubliable puis un second plutôt raté malgré sa proposition graphique singulière, cette conclusion rehausse-t-elle le niveau global ?

[Résumé de l’éditeur]
Le Chevalier Noir affronte un nouvel ennemi insaisissable, capable de contrer chacune des attaques du héros. En enquêtant Batman déterre un mystère qui s’étend sur plusieurs générations et lié à l’un de ses plus proches et de ses plus anciens alliés. Alors que ce douloureux secret est révélé, Batman voit la technologie Genesis risquer de tomber entre de mauvaises mains !

[Histoire]
Batman poursuit Silence dans Gotham et arrive à l’arrêter puis le retient prisonnier. Il se fait ensuite passer pour Tommy Elliot, donc pour un « sosie de Bruce Wayne » afin de se rapprocher de la technologie Genesis.

Tombant sur un héritier d’un pirate et le trio « les blancs et les noirs » (Le Pingouin, Black Mask et Le Grand Blanc). En parallèle, Alfred comprend qu’un de ses anciens alliés du passé se cache probablement derrière la mystérieuse technologie Genesis. Plusieurs années auparavant il avait lui-même était embarqué dans le programme Nemesis visant à créer une sorte de super soldat !

Le majordome décide donc de rejoindre son maître pour l’aider.

[Critique]
Le titre se démarque clairement des deux précédents (seul le trio emmené par Le Pingouin ainsi que Genesis avaient été montrés auparavant). Ce n’est guère surprenant, chaque volume suivait une histoire assez indépendante. Après le road-trip sanglant et les voyages dépaysants, Scott Snyder livre ici une immersion mi-urbaine, mi-aquatique ! Surtout : il offre à Alfred une rôle de premier plan, aussi bien dans les flash-backs (nombreux) que le présent – impossible de ne pas penser à la série télé Pennyworth qui explore la jeunesse du célèbre majordome.

L’allié historique du Dark Knight lui vole même la vedette, révélant des secrets (in fine, pas si incroyables que ça) et lui conférant une profonde empathie – avec une pointe d’émotion « parfaite » à la toute fin. Malgré les originalités du scénario (et la chouette proposition graphique – cf. plus loin), Le premier allié pêche sur quelques points. Le plus évident est que ce passif d’Alfred sort un peu de nulle part. Bien qu’il n’est jamais vraiment été dévoilé, il se connecte comme par hasard avec la filature du moment de Batman. Un protagoniste fait ses premiers pas dans le passé et le présent, une création pour la narration qui fonctionne plus ou moins bien. L’insistance – pénible – des mythes autour de la piraterie n’apporte rien non plus au déroulé de la bande dessinée.

Néanmoins, en mettant cela de côté, on apprécie de suivre pour une fois le justicier avec son majordome, sortant ainsi des sentiers battus et dévoilant des éléments improbables (l’identité de l’ennemi en armure). Même s’il n’y aura pas de conséquences (il n’y en a toujours pas eu quatre après sa publication) et si la série a définitivement abandonné Duke Thomas, ce troisième et dernier tome est sans trop de difficulté le meilleur. Attention, c’est loin d’être un coup de cœur mais au moins il y a une approche un peu inédite et quelques bons moments : utiliser l’identité de Silence, comprendre la relation entre Alfred et ses parents, etc.

Cette fois, c’est Rafael Albuquerque qui dessine la majorité du comic. L’artiste propose des planches dynamiques et efficaces, bénéficiant de la colorisation de Jordie Bellaire (à l’œuvre sur les sublimes Joker War – Tome 2 et Batman Imposter). Entre les scènes d’action et les phases plus calmes (toujours trop bavardes, on reste sur un titre de Snyder…), le duo fait mouche.

En plus des cinq chapitres de l’histoire principale Le premier allié, le tome contient Tueurs par alliance, constitué de cinq back-ups formant un récit d’une grosse trentaine de pages. On y suit Batman en infiltration dans une mafia en Russie, de quoi poursuivre la « formule All Star » avec une contrée encore éloignée de Gotham. L’occasion de voir son alliance avec Vik, fille d’un mafieux (cf. dernière image de cet article). Enfin huit dernières pages offrent un des cinq segments ici de l’annual #1 de la série Batman (ère Rebirth), Douce Nuit (publié dans le quatrième hors-série du magazine Batman Rebirth « Noël à Gotham » en décembre 2017), complètement anecdotique.

La série All Star Batman est très accessible, globalement bien dessinée (si on apprécie les styles de chaque artiste bien sûr : John Romita Jr., Jock et Rafael Albuquerque), offre une certaine originalité dans ses tomes 1 et 3 mais ne révolutionnera rien dans la mythologie du Chevalier Noir. Les amoureux d’Alfred se doivent de lire ce troisième opus (Le premier allié) et les fans de Romita Jr. et/ou qui veulent voir le petit délire de poursuite rapide de Scott Snyder (plus terre-à-terre qu’habituellement) peuvent jeter un œil au premier volet (Mon pire ennemi) – assez proche d’un jeu vidéo. On retient aussi l’évolution un peu détaillée de Duke Thomas avant qu’il soit curieusement absent (on ne sait donc pas comment il devient le justicier The Signal). On s’étonne aussi du choix de couverture, parmi la myriade de celles disponibles (dont quelques unes en galerie en bonus à la fin) mais ce n’est pas très important.

 

[À propos]
Publié par Urban Comics le 29 juin 2018.
Précédemment publié dans Batman Rebirth #12 à #16 (mai à septembre 2018)

Contient All-Star Batman #10-14 et Batman Annual #1

Scénario : Scott Snyder (#10-14 + Annual #1), Ray Fawkes (Annual #1), Rafael Albuquerque et Rafael Scavone (back-ups)
Dessin : Rafael Albuquerque, Sebastian Fiumara, Declan Shalvey
Couleur : Jordie Bellaire, Trish Mulvihill, Lee Loughridge, Cris Peter

Traduction : Jérôme Wicky
Lettrage : Stephan Boschat (studio MAKMA)

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All Star Batman – Tome 1 : Mon pire ennemi

Courte série (15 chapitres rassemblés en 3 tomes), All Star Batman est écrit par l’inépuisable Scott Snyder après sa fameuse série Batman et en marge de ses autres projets (Batman Metal, Last Knight on Earth…). Ouvrant l’ère Rebirth en même temps que Batman Rebirth (scénarisée par Tom King) et Batman Detective Comics (de James Tynion IV), que vaut cet All Star Batman ? Découverte et critique.

[Résumé de l’éditeur]
Batman est chargé de transporter Double-Face hors de Gotham City mais le criminel a plus d’un atout dans sa manche. En mettant un prix sur la tête du justicier, il lance à leurs trousses tous les assassins et chasseurs de primes du pays, sans compter les citoyens ordinaires ! Menottés l’un à l’autre, Batman et Double-Face n’ont plus qu’un objectif : survivre à ce « road trip » en enfer !

[Critique]
Inutile de détailler davantage l’histoire, Urban Comics résume efficacement ce récit au rythme effréné. Comme souvent avec le scénariste Scott Snyder, le concept initial est alléchant : une course contre la montre où le justicier est en fuite accompagné de l’un de ses ennemis emblématiques, face à des vilains très secondaires mais aussi face à la population locale, alléchée par une somme d’argent en échange de l’arrestation de Batman ! La fiction ne désemplit pas au cours de ces cinq chapitres qui se lisent rapidement.

Problème : les « méchants » croisés ne font que de la figuration, à l’exception de KGBeast (renommé ici KGBête – un antagoniste puissant croisé dans la saga Knightfall et plus récemment dans Batman Rebirth) et du trio « Les blancs et les noirs », c’est-à-dire Le Pingouin, Black Mask et Le Grand Blanc. Tous les autres, des plus connus (Killer Croc…) aux moins connus (Black Spider, Crotale…), en passant par quelques têtes parfois familières comme Killer Moth (cf. Batgirl – Année Un) ou les fameux ergots de la Cour des Hiboux, se contentent d’apparaître quelques cases le temps d’un combat expéditif et pour la majorité uniquement le temps des deux premiers épisodes.

Passé ce constat, il reste tout de même une aventure plutôt originale, ici Batman fait équipe avec Duke Thomas, un allié apparu dans L’An Zéro puis Mascarade notamment, adolescent au cœur du mouvement des « We are Robin » (dans une saga assez moyenne), il s’émancipe enfin ici en étant un co-équipier de choix, se démarquant des éternels Robin pour être « quelqu’un d’autre ». En somme, un duo héroïque peu vu auparavant qui traverse le pays avec un Double-Face plutôt empathique. Au passage, Duke Thomas bénéficie d’une histoire parallèle en back-up, où il affronte Zsasz (dessinée par Declan Shalvey).

Au Manoir Wayne, Gordon est à deux doigts de découvrir l’entrée la Batcave, forçant un Alfred réticent à contacter secrètement son maître (et à surprendre indirectement son lectorat d’une manière inédite). En synthèse, tout va vite (mais c’est cool), naviguant entre passé rapproché (à base de « Deux heures plus tôt », « Trois jours auparavant », ce genre de choses…) et présent, de manière assez fluide, loin de Gotham City (la suggestion imposée sur la série) pour un découpage très cinématographique (voire digne d’un jeu vidéo).

Tout ce « road trip » est dessinée par le célèbre John Romita Jr. (fils de Romita Sr. bien entendu), un artiste clivant par son style aux traits souvent anguleux (il avait déjà signé Dark Knight – The Last Crusade). Ses visages sont rarement réussis, conférant parfois à la caricature, au niveau des lèvres notamment, et aux corps disproportionnées, à la limite du grotesque. Dans Mon pire ennemi, le dessinateur s’en sort pourtant assez bien : la plupart des personnages avancent masqués ou à visage volontairement déformé, la patte Romita Jr. passe mieux que dans d’autres œuvres (on pense à l’excellent run de Straczinsky sur Spider-Man par exemple). Le look qu’il propose pour Double-Face est plutôt original aussi. Surtout : les planches sont colorisées par Dean White qui arrive à proposer des palettes chromatiques allant de pair avec l’histoire, comprendre : violentes, sales, épousant le propos à deux cent à l’heure.

Il faut dire que Scott Snyder se lâche et ne fait pas dans la dentelle, alternant excès de langage (familiarité, vulgarité, insultes…) et démonstration de force pour appuyer son propos. Dès qu’il sort de l’action, le titre est un peu trop verbeux et on lui préfère sa balade sanglante et atypique (même si l’on a jamais réellement peur pour les héros). L’auteur expliquant en préface s’être inspiré d’un voyage avec son fils quand il a eu besoin de se ressourcer après avoir terminé ses derniers chapitres sur Batman.

Initialement le label All-Star permettait à des artistes renommés de ne pas s’encombrer de la continuité et d’avoir une approche radicalement différente de la mythologie classique du héros concerné. On pense par exemple au décrié All Star Batman – Le jeune prodige de Frank Miller, généreusement fourni en violence, singularité et « hyper sexy » – même si ça fonctionne plutôt dans le genre – on attend toujours une réédition française et la suite et fin, dessinée par Jim Lee. Scott Snyder, lui, assume poursuivre son travail dans son univers du Chevalier Noir, offrant donc une suite en marge de son propre run et des autres séries de l’ère Rebirth.

Il ne faut donc pas chercher dans ce premier tome d’All Star Batman une complexité intellectuelle mais un « petit » délire où Snyder se lâche (si à l’époque il paraissait déjà en roue libre, ce n’est rien à côté de ce qu’il a proposait par la suite, dans la saga Metal et dans Last Knight on Earth notamment !), se faisant plaisir et emmenant ses fans avec lui. C’est là tout le problème : cette aventure (la première sur trois, les suivantes étant peu reliées à priori et dessinées par d’autres artistes) se lit une fois puis s’oublie. Le plaisir est (plus ou moins) là mais vaut-il 18€ ? Difficile à dire, on conseillerait plutôt un emprunt en médiathèque, un achat en occasion ou une lecture via les magazines Batman Rebirth de l’époque pour amorcer les frais. L’ouvrage se termine, comme toujours chez Urban, par une riche galerie de couvertures alternatives, avec de superbes illustrations de grands noms comme Jock, Lee Bermejo et Jae Lee notamment.

[À propos]
Publié par Urban Comics le 15 septembre 2017. Précédemment publié dans Batman Rebirth #3 à #7 (août à décembre 2017).

Contient All-Star Batman #1-5

Scénario : Scott Snyder
Dessin : John Romita Jr., Declan Shalvey
Encrage : Danny Miki, Declan Shalvey, Tom Palmer, Sandra Hope, Richard Friend
Couleur : Dean White, Jordie Bellaire

Traduction : Jérôme Wicky
Lettrage : Stephan Boschat (studio MAKMA)

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