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Environ 330 titres retirés du catalogue d’Urban Comics + FàQ de l’éditeur

L’information est principalement passée sur les réseaux sociaux et YouTube (par exemple les vidéos de Max Faraday et Guillaume du comptoir du rêve comics) : l’éditeur Urban Comics a retiré de son catalogue plus de 300 titres ! Dont certains qui ont moins de deux ans… Concrètement, qu’est-ce que ça veut dire ? Quels ouvrages – et notamment ceux autour de Batman – sont concernés ? On explique.
(Une mise à jour avec quelques couvertures sera faîte prochainement – la lisibilité de cet article sur ordinateur est plutôt agréable mais via smartphone ce n’est peut-être pas l’idéal on en convient !)

MàJ 29 août 2025 : Urban Comics a également partagé une très (trèèèèès) longue foire aux questions sur son site, on en parle en bas de cet article avec les informations essentielles à retenir.

1. Un parcours malheureusement « normal » dans la chaîne du livre

Quand un livre sort en librairie, il a un coût multiple : la licence tout d’abord (donc celle de DC Comics), un « package d’adaptation » (qu’on pourrait regrouper sous ces trois tâches : traduction, lettrage, adaptation graphique – maquette, découpage des chapitres, choix de couverture, mise en page…), impression, distribution, diffusion (commerciaux) et évidemment des « coûts indirects » (salaires et charges).

Le « package d’adaptation » est un coût unique car une fois effectué, il n’y a plus besoin de le repayer pour les rééditions/impressions – il est important de le préciser.

Il existe un autre coût « invisible » (aux yeux du lecteur/acheteur) : le stockage ! En effet, les livres invendus ne restent pas ad vitam eternam en librairies et grandes surfaces (ils sont renvoyés à l’éditeur au bout de plusieurs mois s’ils ne sont pas venus), ils doivent donc être stockés quelque part (à la charge de l’éditeur donc).

Lorsqu’un ouvrage est imprimé, il l’est en plusieurs milliers d’exemplaires (en moyenne 5.000 pour les comics – davantage pour du Batman bien entendu mais restons sur une moyenne). Trois scénarios ensuite peuvent se dérouler. Dans le meilleur des cas, le comic se vend (énormément) et doit être réimprimé (car il y a de la demande) et reste tout le temps disponible (le cas de la majorité des titres Batman du Black Label ou la série de Scott Snyder par exemple). Dans le pire des cas, le comic ne se vend pas ou très peu et l’éditeur se voit dans l’obligation de le stocker (et – à terme – le brader ou l’envoyer au pilon (en destruction)). Quand ça arrive dès le premier tome d’une nouvelle série, cela cause son « annulation » ; deux exemples concrets (le plus ancien célèbre et un récent) : la série Supergirl des New 52/Renaissance [juin 2013], souvent évoquée dans les commentaires des réseaux sociaux d’Urban, et la série Batman & Robin – Dynamic Duo [mars 2024] – qui n’a pas du tout fonctionné selon François Hercouët (et qui reconnaît à demi-mot ne pas savoir si la suite va être publiée…). Enfin, il reste un cas entre les deux : le comic s’est vendu intégralement (son premier tirage – et son éventuelle réimpression – est épuisé) mais la demande n’est pas assez conséquente pour générer un nouveau coût d’impression, distribution, etc. Au bout de quelques années, les deux derniers cas évoqués  débouchent sur une conclusion triste de la chaîne du livre : ils sont « officiellement » retirés des ventes (même si certains ne se trouvaient déjà plus en rayon ou en ligne depuis un bon moment).

En synthèse : il est tout à fait normal qu’au bout de plusieurs années, un livre ne soit plus disponible chez un éditeur… Encore plus dans un secteur de niche (les comics représentent environ 4% des ventes de bandes dessinées en France – même si c’est à nuancer car des comics se vendent très bien mais ne sont pas catégorisés comme tel (jeunesse – comme les Picsou de Don Rosa –, romans graphiques, etc.), mais c’est un autre et vaste débat ; on parle de 8% environ sinon).

2. Une absence de communication ? Oui car aucune obligation légale…

L’éditeur Urban Comics n’a pas du tout communiqué sur cet arrêt de commercialisation. Tout à fait, car rien ne l’y oblige… Partager ce genre d’informations est toujours délicat. D’un côté on peut saluer la transparence et réactivité de ceux qui le font, d’un autre cela peut générer une colère et frustration (bien légitime !) de la part des lecteurs (principalement ceux qui ont acheté/commencé des séries qu’ils ne peuvent plus trouver). Cela peut aussi déclencher des ventes d’occasion onéreuses, accentuer la spéculation, etc. Par ailleurs, la majorité des titres n’étant plus disponibles depuis des années, cela est presque une « non actualité » car banalement une confirmation.

3. Quel avenir pour les titres concernés ?

Plusieurs options tristement simples :

  • Il est désormais (à mi-août 2025) impossible de les commander en librairie – ce qui était déjà le cas pour la majorité des comics
  • On peut encore en commander une poignée sur les sites de la Fnac et amazon (probablement durant encore quelques semaines)
  • Si vous trouvez un titre en librairie, vous pouvez tout à fait l’acheter à son prix indiqué
  • Le libraire peut renvoyer le livre à son fournisseur (afin de se faire « rembourser ») jusqu’au 31 octobre (date à confirmer)
  • Si un titre retiré du catalogue reste en rayon les prochains mois (et années) dans les librairies et enseignes culturelles, vous pourrez toujours l’acheter (au prix indiqué)
  • Il faudra se tourner vers le marché de l’occasion pour se procurer (probablement à prix d’or) les titres retirés…
  • … ou espérer qu’Urban les réédite dans un autre format (Paperback notamment, possiblement Nomad ou encore dans les Chronicles)

4. Quels sont les titres retirés du catalogue ?!

La liste est accessible sur le site d’Urban Comics sous forme de PDF de 8 pages. On fait le point sur ce qui concerne Batman.

I – Des titres retirés MAIS toujours disponibles car réédités dans le Black Label ou sous forme d’intégrale donc dans un format très similaire (pas de problèmes pour se le procurer donc) :

II – Des titres retirés MAIS toujours disponibles dans la collection Nomad (petit format souple) :

III – Des titres retirés MAIS réédités (intégralement ou partiellement) dans le format Paperback (et/ou dans les Batman Chronicles – ou à terme dedans)

  • Batman – No Man’s Land [6 tomes] : réédité dans Paperback (et, à terme, dans les Batman Chronicles)
  • Batman – Detective Comics [7 tomes] : les deux premiers tomes sont réédités sous le titre L’envol des Batmen, sortie le 3 octobre prochain (les cinq suivants ne sont pas annoncés pour l’instant mais Urban confirme dans sa FàQ – cf. bas de cette page – que tout le run de l’auteur, James Tynion IV, sur cette série sera publiée)
  • Batman – Année Deux : déjà dans Batman Chronicles 19

IV – Des titres retirés mais qui ont de grandes chance d’être réédités (Nomad, Paperback, Chronicles…) (attention, il n’y a aucune confirmation ici, il s’agit uniquement « d’intuition » basée sur la qualité et popularité des récits).

V – Des titres retirés qu’on ne retrouvera sans doute jamais…
(liste qui sera évidemment mise à jour en cas de changement de la part d’Urban)

VI – D’autres titres qu’on ne retrouvera sans doute jamais : la collection Urban Link (petit format souple pour jeune public – cf. les 5 premiers titres de la liste ci-dessous), les titres Justice League, Harley Quinn et Suicide Squad mais aussi quelques crises DC sont également retirés

  • Harley Quinn – Breaking Glass
  • Catwoman – Under the Moon
  • Batman – Nightwalker
  • Victor & Nora – A Gotham Love Story
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  • Justice League – Faute d’un clou
  • Justice League – Dark Infinite
  • Crisis on Infinite Earth – Le Compagnon [édité sous le titre Crisis Compagnon]
  • DC Univers Rebirth
  • Justice League of America [7 tomes]
  • Justice League Rebirth [6 tomes]
  • Future State : Justice League [2 tomes]
  • Justice League International [2 tomes]
  • Joe Kelly présente Justice League [3 tomes]
  • Justice Society of America – Le Nouvel Âge [2 tomes]
  • Injustice – Ground Zero [2 tomes]
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  • Harley Quinn Rebirth [10 tomes] (disponibles en intégrale)
  • Harley Quinn Infinite [4 tomes]
  • Harley Quinn – Little Black Book
  • Birds of Prey – Harley Quinn
  • Suicide Squad Rebirth [7 tomes]
  • Suicide Squad – Blaze
  • Suicide Squad – Get Joker !
  • Deadshot & les Secret Six [4 tomes]
  • Les archives de la Suicide Squad [4 tomes même si seulement les trois premiers sont dans la liste]
  • La cible de Deadshot
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  • Earth 2 [6 tomes]
  • Future’s End [4 tomes]
  • Le Monde de Flashpoint [4 tomes]

5 – Conclusion

Une certaine page se tourne… Une ère se termine… C’est triste mais c’est ainsi. L’inaccessibilité à de la culture est toujours terrible mais la réalité économique revient inéluctablement en pleine face. Ceux qui voient le verre à moitié vide rageront tout en conspuant (à tort) l’éditeur, là où ceux qui voient le verre à moitié plein s’estimeront heureux d’avoir vécu une grosse décennie avec des comics inédits accessibles. Dans quel camp vous situez-vous ? Un entre-deux ?

Urban Comics a mis en ligne une très longue foire aux questions de leurs lecteurs le vendredi 29 août. Un exercice de « transparence » appréciable mais qui génère autant de satisfaction que de frustration (les premiers retours sur les réseaux sociaux – Facebook et X/Twitter par exemple – vont également dans ce sens, même si ce n’est évidemment pas forcément représentatif de l’ensemble).

En effet, plusieurs points peuvent crisper. Tout d’abord l’éditeur partage cette masse d’informations clivantes un vendredi soir à 17h, ce qui minimise fortement sa visibilité, noyée dans d’autres publications (qu’on peut juger « moins importantes ») qui ont été mises en ligne dans les heures suivantes. Ensuite, les plus pointilleux pourraient évoquer la mise en page très sommaire de l’ensemble qui débouche sur un côté peu lisible/aéré malgré une démarcation par catégorie (mais c’est vraiment pour chipoter).

Enfin, et surtout, certaines réponses ne vont pas dans le sens de ce que les lecteurs aimeraient – ne pas publier la fin d’une série notamment – on en reparlera plus loin, et restent parfois nébuleuses : le succès d’une série dépend des ventes mais aussi de trop de facteurs divers, parfois logiques mais agaçant (une lecture n’a pas convaincu en interne donc il n’y aura pas de prise de risque de publication), parfois improbables (l’échec du film Justice League en 2017 aurait freiné l’éditeur à publier du Justice League !), parfois culpabilisantes pour le lecteur (à lui de faire un travail de commercial/représentant auprès de son libraire et son entourage !). D’autres réponses sur des sujets divers sont parfois condescendantes (« de mon temps, on se lançait dans Blackest Night sans rien connaître de DC et sans contexte, et ça ne faisait de mal à personne » en réponse à un reproche de manque de contextualisation/avant-propos éditorial – qui habituellement est un point fort d’Urban pourtant). De même, l’éditeur évoque bon nombre de séries qui ne sont pas prévues (Green Lantern, Flash, Wonder Woman…), ce qui n’est pas très rassurant pour l’avenir (l’industrie des comics est très très fragile depuis la période post-Covid). Urban Comics utilise aussi beaucoup de « réponses de Normands » à diverses sollicitations, donc des retours évasifs (« ce n’est pas prévu mais peut-être plus tard / pourquoi pas on verra / probablement non mais on ne sait jamais ») ou bottent en touche à plusieurs reprises (par exemple sur les envois de service de presse aux influenceurs en tous genres ou qui n’ont rien à voir avec le milieu – ce qui pourrait permettre de drainer un nouveau lectorat en effet mais il n’y a jamais de réelles critiques ou présentations derrière – au détriment de vrais passionnés). L’éditeur reconnait aussi ses failles dans leur communication (soit inexistante, soit volontairement floue ! – idem, on y revient aussi plus loin).

En somme, un ensemble mi-figue mi-raisin…
Mais voyons déjà ce qui nous attend et qui relève de bonnes nouvelles ! Côté Batman, on apprend – sans surprise – que :

  • La saga Knightfall sera bien présente dans les Batman Chronicles de l’année 1993 (actuellement nous en sommes à 1990). Dans un second temps, elle arrivera dans la collection DC Paperback. Au rythme de deux Batman Chronicles par an, cela amène très probablement la version Paperback en… 2030/2031 au plus tôt (même année que les Chronicles) – gasp !
  • (On peut d’ailleurs comprendre en lisant entre les lignes que la gamme Chronicles, justement, semble se vendre correctement mais pas non plus de façon flamboyante. Toutefois elle n’est pas abandonnée au profit de la collection Paperback (certains le pensaient visiblement !). Urban se fait même un devoir de la poursuivre et elle n’aura pas d’autres super-héros que Batman, Superman, Flash et JSA (donc pas de Wonder Woman, Green Lantern…))
  • Toujours en Batman Chronicles : 2 tomes sont prévus pour 2026 – et ce rythme de deux publications par an semble désormais être « la norme » –, le second de l’année 1990 est annoncé « tôt en 2026 » donc probablement durant le premier trimestre
  • Batman Cataclysme (introduction de No Man’s Land) sera aussi réédité en Paperback mais pas en 2026. Idem pour Batman – Un Deuil dans la Famille
  • The Dark Knight Returns est bien prévu parmi les trois titres annuels de la collection Urban Limited (décembre 2026)
  • La série Batman & Robin – Dynamic Duo n’aura probablement pas sa suite publiée (déjà évoqué en début de cet article), de même que la seconde intégrale de Batwoman Renaissance (ou alors en format Paperback)
  • Batman Contagion et Batman Legacy, tous deux inédits en France, devraient sortir à terme en Paperback mais pas en 2026

Enfin, citons deux réponses tranchées de l’éditeur qu’on a jugé pertinent de relayer ici (les passages en gras proviennent directement de la FàQ). Sur un sujet qui revient souvent (parfois corrélée à celle d’une « promesse non tenue » [1]) suite à cette question : « Pouvez-vous être l’éditeur qui commence une parution et certifie que tout sera publié en entier ? Par exemple, j’aimerais commencer les JSA Chronicles mais sans savoir s’il y aura une fin réelle de la collection, je n’ose pas me lancer dans l’achat des premiers tomes. » La Team Urban Comics (TUC) est entièrement transparente : « Au risque de vous décevoir, non, nous ne serons pas l’éditeur capable d’assurer que chacune de ses séries ira au bout. L’éditeur propose et le lecteur dispose. Si le nombre de lecteurs n’est plus suffisant pour assurer l’équilibre financier d’un titre, l’éditeur n’a pas d’autres choix que de ralentir le rythme de publication (mais au-delà de 2 ans, vous pouvez comprendre que la série est abandonnée) ou de simplement la stopper. » Le second point en gras est particulièrement intéressant, confirmant implicitement l’arrêt, par exemple, des Batman – The Dailies, dont le deuxième tome (sur trois prévus initialement) remonte à janvier 2021, soit 4 ans et demi…

Plus loin, une interrogation similaire : « De façon générale, pouvez-vous communiquer lorsque vous ne terminez pas une série ? ». L’éditeur reconnaît la difficulté de ce sujet touchy tout en assumant laisser volontairement « un flou » (!). Réponse : « Vous soulevez la problématique de communiquer sur les séries que nous ne poursuivons pas. C’est un sujet délicat car en ces temps un peu difficiles pour le secteur comics,  nous préférons axer notre communication sur ce qui fonctionne. Or, comme la plupart des médias ou relais de communication ont tendance à se focaliser sur le négatif, cela ne ferait que nourrir une spirale entropique. Et nous comprenons également parfaitement que vous laisser dans le flou n’a rien d’idéal. Bref, il n’y a pas de réponse simple à cette question. En tout cas, on ne l’a pas encore trouvée. Maintenant, si l’on raisonne de manière pratique : si le prochain tome de votre série met plusieurs années à paraître (surtout si la suite est déjà disponible en VO), il y a fort à parier pour que la série soit à l’arrêt en VF. » Même message martelé un peu plus tard à une question équivalente : « Dans le doute, gardez en tête cette règle générale : si cela fait plus d’un an que vous attendez la suite d’une série dont la suite est disponible en VO, c’est qu’elle a peu de chance d’avoir trouvé son public en France et que sa suite est grandement compromise. C’est injuste lorsqu’il s’agit d’une série que vous suivez mais on ne peut malheureusement pas publier un titre à perte. On essaie simplement de viser juste 51 fois sur 100. » (51 fois sur 100 ?!)

[1] Nettement plus loin dans la FàQ, Urban utilise ce mot promesse, qui faisait probablement écho à des citations de l’éditeur en début d’activité il y a une petite quinzaine d’années : « la promesse de conserver l’ensemble de nos titres disponibles (des milliers de références à date) n’est plus possible en raison d’un marché qui a beaucoup évolué sur cette période. »

Par ces quelques exemples, on revient à deux points, in fine : on communique effectivement dans ce long article sur du négatif (exactement ce qu’évoque Urban juste au-dessus) et… on retombe sur la vision du verre à moitié plein ou vide. Malgré l’inquiétude de l’avenir du secteur, ici on préfère saluer et remercier Urban Comics qui rendu ses lettres de noblesse au Chevalier Noir après des années d’errements éditoriaux avec enfin des titres cultes, accessibles et un soin tout particulier apporté aux livres <3 (mais… on reste très inquiet et pas forcément rassuré après avoir lu toute cette FàQ).

Justice League Unlimited – Tome 1 : L’ascension d’Inferno

C’est (enfin) le retour d’une nouvelle série Justice League ! Accessible, jolie, généreuse… la fiction est alléchante de prime abord mais sur la durée ? Critique.

[Résumé de l’éditeur]
Suite aux événements d’Absolute Power, la Ligue de Justice se reforme avec un objectif précis : ouvrir les portes de leur quartier général, la Tour de Garde, à tous les héros de l’univers DC pour une Ligue plus forte et unie que jamais ! Alors que nos héros tentent de percer le mystère de la disparition de Darkseid, une course se dessine entre héros et méchants pour contrôler les capacités métahumaines. Un combat qui menace de détruire tout ce que la Ligue a construit – à moins qu’un traître en leur sein ne les détruise en premier…

Pas besoin de détailler davantage le début de l’histoire, le résumé de l’éditeur suffit amplement.

[Critique]
Segmenté en trois histoires, le prélude Alpha, le récit principal qui donne son titre au livre (L’ascension d’Inferno) en quatre chapitres et l’épilogue Omega. C’est probablement « typiquement » le genre de comic book mainstream efficace et qui fonctionne à peu près, sans révolutionner quoique ce soit dans l’immédiat. Comprendre qu’on a un récit emmené, rythmé, coloré, qui fait intervenir (beaucoup) trop de protagonistes, on s’y perd un peu (connaisseur ou non de l’univers) mais c’est beau, c’est sympa, c’est divertissant… Est-ce suffisant ? Comme toujours, cela dépend de l’exigence du lecteur. On décrypte.

L’ascension d’Inferno évoque comme son titre l’indique, la montée en puissance du mystérieux Inferno, aux contours et allures encore flous à ce stade. En préambule, l’on nous propose un zoom sur Booster Gold, fraîchement intégré dans la Justice League Unlimited – une super équipe née des cendres de la semi-défaite face à Amande Waller (lors d’Absolute Power donc). Une ligue qui comprend quasiment tous les héros ou méta-humains « gentils » possibles avec même une carte de membre ! Projeté dans un futur imminent, Booster est carrément dans un monde où Darkseid règne en maître avec une mystérieuse légion (d’Inferno).

Retour au « présent » : Superman, Wonder Woman et Batman sauvent (ou tentent de le faire) différentes personnes aux quatre coins du monde, avec des anomalies comme un puissant feu dans l’Amazonie. L’occasion de tenter une collaboration entre Aquaman et Swamp Thing. Le récit se limitant à quatre épisodes, difficile d’en dire davantage sans trop en révéler. Comme dit plus haut, ça se lit bien, c’est suffisamment palpitant pour donner envie de savoir la suite même si, paradoxalement, il manque peut-être cette cohésion d’équipe qui prédominait dans d’anciennes séries Justice League (celle de Renaissance par exemple – souvent critiquée alors qu’il s’agit d’une œuvre divertissante totalement satisfaisante). Faute à une foule d’héros haut en couleur qui se croisent et échangent sporadiquement. Ce n’est pas bien grave.

L’intérêt se situe chez un nouveau venu, Air Wave, apparemment infiltré dans la Tour de Garde. Un espion donc. Sans nul doute ce sera le fil rouge le plus intéressant à suivre. Du reste, l’épilogue (au style graphique radicalement différent, cf. image tout en bas de cette critique) nous conte surtout la création de l’univers Absolute (cf. Absolute Batman) ce qui est assez étrange puisque la communication de l’éditeur annonçait que ces itérations ne croiseront pas la continuité classique (celle du présent ouvrage donc, inaugurant la collection DC Prime, cf. article explicatif). Même si la gamme Absolute reste(ra) indépendante, il y a fort à parier que ces variations des figures emblématiques de DC viendront rendre visite et aider leurs homologues à terme.

Le scénariste « historique » de chez DC Mark Waid (Flash Chronicles et Justice League of America parmi ses titres phares anciens) a repris le flambeau récemment et a signé justement Absolute Power, Batman & Robin – Année Un et, entre autres, Batman Superman Worlds Finest – et Planète Lazarus). Il place tranquillement ses pions pour son plan narratif qu’on suivra assidument, en espérant quelques coups d’éclat après cette introduction un peu trop convenu.

Dan Mora (déjà à l’œuvre avec Waid sur Batman Superman Worlds Finest) livre de belles planches, détaillées, aux traits fins, presque épurées, superbement mises en couleur par Tamra Bonvillain. Il n’en faut pas plus pour être satisfait pour une fiction de ce genre, efficace et agréable. En synthèse, et comme déjà dit, un énième divertissement qui fait le taf, ni trop novateur, ni trop audacieux mais visuellement très joli et tout de même convaincant. On sera davantage sévère au second tome en fonction de l’évolution de tout ceci !

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 27 juin 2025.
Contient : DC All-In Special #1 + Justice League Unlimited #1-4
Nombre de pages : 160

Scénario : Mark Waid, Joshua Williamson, Scott Snyder
Dessin & encrage : Dan Mora, Daniel Sampere, Wes Craig
Couleur : Tamra Bonvillain, Alejandro Sanchez, Mike Spicer

Traduction : Yann Graf
Lettrage : MAKMA (Gaël Legeard, Sébastien Scalisi et Bryan Wetstein)

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Robin – The Boy Wonder

Un récit complet centré sur Damian et les anciens Robin ? Alléchant sur le papier mais vite déstabilisant à cause de sa partie graphique et un scénario mitigé. Découverte de cette nouvelle proposition du Black Label qui bénéficie d’une couverture alternative réservée dans les librairies du réseau CSA (Comic Shops Assemble – cf. bas de cette page pour les non connaisseurs).

 

[Résumé de l’éditeur]
Le jeune Damian Wayne a été élevé pour devenir l’héritier de la redoutable Ligue des Assassins – et ainsi marcher dans les pas de sa mère, Talia, et de la Tête de Démon elle-même, son grand-père Ra’s al Ghul. Mais lorsque son père, Batman, le récupère, le jeune Robin découvre alors qu’il n’est qu’un « prince » parmi d’autres, précédé dans ce rôle par ses « frères » Nightwing, Red Hood et Red Robin…Lorsque le Chevalier Noir est contraint de quitter la ville pour une affaire urgente et qu’une vague d’enlèvements survient à Gotham, Damian n’a d’autre choix que de se battre aux côtés de ses frères adoptifs et, ce faisant, à apprendre ce que le costume de Robin signifie vraiment !

Pas besoin de détailler davantage le début de l’histoire, le résumé de l’éditeur suffit amplement.

[Critique]
Une première moitié sympathique, une seconde bien en dessous, le tout servi par un style ultra clivant, voilà une proposition singulière qui ne laissera pas indifférent ! The Boy Wonder (non précédé de Robin en VO) s’attarde donc sur le dernier Robin en date, évidemment Damian Wayne. Sans rentrer dans des détails narratifs du début d’ouvrage (qui ne dévoileraient rien de particulier mais qu’on estime plus agréable à découvrir en lecture), l’on « revoit » donc la relation et les débuts de Damian avec Dick (Nightwing). Cela couvre le premier chapitre et ce n’est pas trop mal (en acceptant la partie graphique – sur laquelle on reviendra plus tard).

Sans surprise, le deuxième épisode rejoue la même chose mais, cette fois, avec Jason (Red Hood) et, évidemment, le troisième avec Tim (Red Robin). C’est bien rythmé, bien écrit (les relations entre chaque Robin sont à la fois « convenues » – pour des lecteurs habituels en tout cas – et en même temps efficaces dans leur dualité respective). On pouvait s’attendre à ce que la suite soit une sorte d’émancipation ou la même formule avec Batgirl, Batman et/ou Alfred par exemple.

Que nenni ! Toute la seconde partie de l’œuvre renoue avec la dimension mi-ésotérique, mi-surréaliste de Talia et Ra’s al Ghul – mère et grand-père de Damian. La limpidité d’écriture du premier acte s’efface au détriment d’enchaînements textuels laborieux, abscons et peu passionnants, in fine. Quel dommage ! Le français Juni Ba livre donc un travail d’auteur mi figue mi raisin – on lui doit aussi les dessins, on y reviendra. Bref, on ressort de l’ensemble sans grande excitation : le fameux Boy Wonder n’a pas des masses évolué (ou, en tout cas, ça ne se ressent pas dans l’immédiat), faute à un récit cloisonné dans une semi-indépendance et continuité qui n’aura pas d’impact.

En cela, la fiction devrait plaire principalement (uniquement ?) aux fans de Damian Wayne (personnage qui divise de base le lectorat). Sur ce site, si l’on appréciait peu les premières moutures de Damian (colérique, tête à claque, insupportable…), on aimait les derniers titres autour du rejeton de Bruce, où le jeune homme avait gagné une certaine maturité ou contrastait parfois avec son paternel, ou bien, à l’inverse, affichait une chouette complicité. Dans The Boy Wonder c’est l’entre-deux qui prédomine, délicat donc de trancher objectivement.

Au-delà du scénario et des dialogues (ni ratés ni franchement réussis donc), la bande dessinée va segmenter à cause d’un autre aspect : ses dessins. Juni Ba a une patte atypique, entre le minimaliste et la caricature, sans oublier la colorisation globalement efficace et chromatiquement diversifié (de Chris O’Halloran) – où l’on voit quasiment les traces de feutres sur des cases (!). Bien loin de l’approche mainstream des comics, nous sommes donc face à une variation digne d’un roman graphique indépendant. Pour le meilleur ou pour le pire ?

Sur ce site, on a moyennement accroché sans pour autant détester, mais il est évident que cela peut rebuter (cf. les nombreuses illustrations qui parsèment cette chronique). Il y avait d’ailleurs peut-être quelque chose de plus pertinent à faire en mélangeant différents styles visuels d’un épisode à un autre (quelques planches changent radicalement sur la fin de récit). En l’état, on a parfois l’impression de voir des dessins d’un enfant en école primaire… et parfois une grande maitrise de l’espace et de l’action (cf. le parcours de l’artiste accompli en vidéo). En somme, il est indispensable de feuilleter avant l’achat pour se faire une idée si l’on adhère ou non à cette vision/version.

Faut-il acheter Robin – The Boy Wonder ? Si vous êtes fan de Damian Wayne ou de tout ce qui touche à Ghul, oui sans aucun doute. Sinon, passez votre chemin. Dans les deux cas : tout dépend principalement de votre adhésion ou non à la proposition graphique particulièrement clivante. Qu’on se rassure : le titre n’est pas du tout incontournable et ne bouleversera en rien ni le personnage principal, ni la chronologie de Batman (très en retrait dans le livre au passage). Une curiosité donc, qui – comme toutes les curiosités – vaut toujours un peu le détour en emprunt mais pas forcément en achat.

Urban semble capitaliser sur l’œuvre puisqu’elle sort en deux éditions (et pour une fois – avis totalement subjectif – la couverture limitée est moins élégante et aguichante que la classique). On est peut-être passé à côté de quelque chose alors… l’avenir nous le dira… On souhaite toutefois revoir l’auteur/dessinateur français sur d’autres fictions chez DC !

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 11 juillet 2025.
Contient : The Boy Wonder (#1-5)
Nombre de pages : 184

Scénario & dessin : Juni Ba
Couleur : Chris O’Halloran

Traduction : Benjamin Viette
Lettrage : Eric Montesinos

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