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La postérité de « Batman v Superman »

Le film de Zack Snyder, Batman v Superman : l’Aube de la Justice, a fait couler beaucoup d’encre, réelle ou virtuelle, et continue d’alimenter, près de deux ans et demi après sa sortie de nombreux débats. Les raisons sont multiples : le long-métrage est sans cesse analyser sous de nouveaux prismes, il est réévalué suite à sa version longue sortie en Blu-Ray ainsi qu’avec les multiples déclarations et révélations de Snyder sur le réseau social Vero et, bien évidemment, depuis l’échec de Justice League (également réalisé par Zack Snyder mais, in fine, devenu un film hybride davantage chapeauté par Joss Whedon et la Warner Bros).

Cet article (plus ou moins le prolongement de cet autre long papier) se veut à mi-chemin entre l’analyse objective (factuelle, technique, sourcée, chiffrée…) et subjective (réflexions personnelles, points de vue exclusifs, avis individuel…), mais aussi compilation des nombreux petits éclairages apportés par Zack Snyder au fil des mois qui ont suivi la sortie de Batman v Superman (une liste qui sera donc actualisée si besoin).

Conjoncture au lancement du film

Il est nécessaire de situer le contexte de départ. En mars 2016, contre toute attente, Deadpool (sorti en février) vient de casser la baraque avec son ton original et son humour noir. La production de la Fox a récolté plus qu’espéré et la Warner a sans doute quelques craintes. D’autant plus que Captain America : Civil War est prévu quelques semaines après Batman v Superman (en avril), et que X-Men : Apocalypse suivra également dans la foulée (en mai). Quatre films de super-héros en quatre mois. Qui plus est, Bat v Sup se veut fer de lancement du nouvel univers partagé de DC Comics, appelé DCEU (pour DC Extented Universe) à l’époque de façon non-officielle — et a priori devenu depuis juillet 2018 « The Worlds of DC ». Les premiers retours presse (l’avant-première eut lieu la veille de la sortie du film — ce qui n’est jamais bon signe) sont très négatifs et Warner annonce d’emblée qu’une version longue verra le jour lors de la sortie DVD et Blu-Ray (là aussi ce n’est pas forcément un bon signe). Sans surprise, Batman v Superman réussit une belle percée lors de ses premiers jours d’exploitation avant de chuter drastiquement. Néanmoins, si le succès critique n’est pas au rendez-vous (on y revient juste après), le long-métrage de Snyder n’est pas forcément un flop économique (à terme, il rapportera près de 875 millions de dollars pour 250 de budget, hors marketing et promo — mais il n’atteint pas le milliard espéré et récolte « seulement » 330 millions sur le territoire américain).

Le bouche-à-oreilles très négatif n’aide évidemment pas Bat v Sup à se forger une belle réputation. Jugé trop long, trop compliqué, trop noir, trop sombre (ce qui avait pourtant réussi à Christopher Nolan et sa trilogie The Dark Knight)… seuls quelques éléments sont critiqués positivement (de façon presque unanime) : la prestation de Ben Affleck dans la peau du Chevalier Noir (il succède à Christian Bale et tout le monde craignait qu’il ne lui arrive pas à la hauteur — ce fut l’inverse pour certains, Affleck s’avérant meilleur que Bale), la présence de Wonder Woman grâce au charisme de son interprète, Gal Gadot, peu connue jusqu’alors, et un certain soin apporté à la photographie et la composition de plans. Mais Bat v Sup récolte sur l’agrégateur de critiques Rotten Tomatoes la douloureuse note de 4,9/10 (là où le public accorde 7/10). Sur l’IMDb 6,6/10 et, enfin, en France sur AlloCiné 2,6/5 par la presse et 3,5 par le public. On constate donc des spectateurs moins sévères que la critique dite « spécialisée ». Sur ComicsBatman.fr, la critique du film lorgnait vers une note de 3,5/5 également — loin d’un chef-d’œuvre donc, mais loin d’un ratage total également. La conclusion était même « un parti pris certain qu’on va, au mieux apprécier, au pire détester, mais peu de chances de l’adorer ». Est ensuite venu le lynchage massif envers le film, jugé (par l’auteur de ces lignes) plutôt inapproprié et injuste, ce qui a conduit à avoir cœur à le « défendre » . Enfin, la version longue de Batman v Superman a gommé beaucoup de défauts de sa version cinéma et vaudrait (toujours selon la perception de ce site) un bon 4,5/5 pour son approche relativement original d’un film de genre qui conserve tout de même des gros soucis (introduction maladroite de la Justice League, bouillie numérique lors d’un combat final trop grandiloquent…). Une seconde critique, plus enthousiaste, avait alors été ajoutée sur ce site.

Hypothèse : un autre titre et une promotion plus mystérieuse pour une meilleure attente

Dès le début du projet, le problème qui se pose est dans le titre. « Batman v Superman : l’Aube de la Justice ». La première partie est souvent « confondue » avec « Batman VS Superman », donc un « versus », donc un affrontement. Ce n’est pas tout à fait faux puisque le « v » se veut être le diminutif de « vs » mais il peut également se traduire par une association plus ambigüe entre deux êtres, symbolisé par un « v » (aux États-Unis). Point de départ bancal donc, puisqu’une simple esperluette aurait été une approche plus logique pour le film. Un « Batman & Superman », accentuant donc une association qui se serait d’abord corrélée par une confrontation. Car personne n’est dupe : si un combat peut avoir lieu entre l’homme d’acier et l’homme chauve-souris, on sait qu’aucun ne va périr sous les coups de l’autre et, surtout, qu’à terme les deux seront dans le même camp. La seconde partie du titre, « l’Aube de la Justice » (qui connaît plusieurs dérives syntaxiques avec la majuscule appliquée parfois qu’à « Justice » ou à « L’aube », ou encore « L’Aube », peu importe…) est à la fois poétique et annonciatrice (de la Justice League entre autres). Encore une fois, ce terme reste maladroit, un peu « cliché » et, surtout, voulant afficher bien trop tôt l’idée d’un rassemblement de super-héros (esquissée à la toute fin du métrage et dont les potentiels membres sont brièvement exposés au milieu). Il y avait sans doute quelque chose à trouver avec le terme « justice », c’est indéniable. Puisque Superman pense rendre justice à sa façon et Batman à la sienne. Un petit « Batman & Superman : Justice Paradox » aurait certainement été plus judicieux, plus malin…

Mais ce qu’il fallait proposer est tout simplement la suite de Man of Steel. Même si le premier du nom n’a joui que d’un semi-succès (critique et public), un des meilleurs titres aurait été, pour ce nouveau segment mettant Superman au centre du récit, « Man of Steel 2 : The Batman Complex » ou « Man of Steel 2 : The Batman Paradox ». Avec bien sûr, des petites variantes avec un tiret (-) au lieu des deux points (:), ou bien le chiffre 2 en latin (II), voire la mention d’un chapitre (« Man of Steel – Chapitre II : The Batman Complex » par exemple). En renommant le film ainsi, les spectateurs savent seulement deux choses : il s’agit de la suite de Man of Steel, donc de Superman, Batman y sera présent mais « différent » de ce qu’on a l’habitude de voir. Et c’est justement là un des aspects pointés du doigt par certains fans : la violence ultime dont fait preuve Batman, quitte à tuer (ou sous-entendre qu’il tue) et son ton nihiliste, désabusé. Même s’il s’est inspiré de The Dark Knight Returns (de Frank Miller), Zack Snyder a été « plus loin » que l’auteur et dessinateur de comics puisqu’il a montré une ligne que Batman ne franchit pas dans ses aventures papier (en réalité, c’est arrivé lors de ses débuts). Cela est d’ailleurs accentué dans TDKR avec une case spécifiant bien que le Chevalier Noir n’utilise pas d’armes à feu et, dans une moindre mesure, dans la trilogie de Nolan — principalement The Dark Knight où le justicier souligne à nouveau son souhait de ne pas tuer (même si dans les premiers films de Tim Burton, on constate aussi que le Chevalier Noir ne s’encombre pas de « sauver » des assaillants et leur sort, souvent hors-champ, fait peu de doutes même si ce n’est pas montrer à l’écran). Dans les faits, on ne voit pas réellement Batman « tuer » quelqu’un de sang-froid dans Batman v Superman mais il n’hésite pas à tirer sur plusieurs criminels depuis sa Batmobile, à laisser des grenades exploser dans un endroit confiné où d’autres ennemis étaient et, enfin, à marquer au fer rouge des coupables enfermés en prison afin qu’ils soient tabassés voire assassinés par d’autres incarcérés. Bien sûr, à froid comme cela, c’est très choquant et inadmissible sauf que le film apporte des justifications mais ne les prononcent peut-être pas assez pour certains spectateurs. Deux explications sont à mettre en avant : la mort de Robin (Snyder a confirmé fin juillet 2018 qu’il s’agissait de Richard Dick Grayson, soit le premier Robin, qui n’a a priori jamais été remplacé ensuite par un autre allié) sous les coups du Joker (et de Harley Quinn, comme le confirme le film Suicide Squad). Cela a profondément affecté et choqué le Chevalier Noir qui exerce depuis plus de vingt ans son activité de justicier. Et c’est là la seconde explication : le Caped Crusader le dit lui-même : sa croisade est inutile, il n’y croit plus du tout, c’est (aussi) pour ça qu’il est plus radical. Peut-être qu’ajouter un carton en début du film revenant et insistant sur ces éléments aurait été bénéfique.

« Man of Steel 2 – The Batman Complex »

Zack Snyder ne voulait pas d’un Batman « classique » (et il a eu raison), il a voulu déconstruire le mythe (à l’instar de son confrère artistique éponyme Scott Snyder qui œuvre, lui, sur les comics — mais ceci est un autre débat) mais l’a sans doute traité maladroitement. Il avait opté pour un angle similaire sur le personnage de Superman (avec les doutes, le rapport à la divinité, à la justice… — et également un meurtre, là aussi comme, une fois de plus, dans certains comics méconnus) et cela s’inscrivait dans un certain cadre « réaliste » ou tout du moins plus moderne avec notre époque. Pour le Chevalier Noir, il a touché au sacré et cela n’a pas forcément séduit les spectateurs « lambda » ni les fans du super-héros. C’est dommage, car la fin du film axe précisément vers ce chemin de rédemption de Batman : il retrouve foi en l’humanité (et c’est ce qu’il devra explorer dans Justice League, avec à l’inverse un Superman déchu — ce qui n’a finalement pas vraiment eu lieu mais on y reviendra plus tard). Trop ambitieux ? Oui et non, encore un fois le titre (et la promotion comme nous allons le voir) est à pointer du doigt. D’où l’idée d’un « Batman Complex » ou d’un « Batman Paradox ». Le complexe de Batman serait celui d’avoir franchi sa ligne rouge, d’être devenu aussi nihiliste que les personnes qu’il combat et de ne voir en Superman qu’une menace au lieu d’un allié (même si cet aspect est tout de même très proche des comics récents). Le paradoxe de Batman rejoint cette idée avec un Chevalier Noir paradoxal dans son application de la justice (ça l’a toujours plus ou moins été). Deux mots (« Complex » et « Paradox ») qui sont peut-être plus mystérieux et plus en phase avec le propos du film. Des fans arguent que cette double déconstruction (de Superman et de Batman) ne rend pas hommage aux icônes et qu’il aurait mieux fallu concevoir ses propres super-héros (à la manière d’un Mark Millar sur Kick-Ass) au lieu de sacrifier l’homme d’acier et l’homme chauve-souris. Quelle erreur ! C’est justement cette « vision » de Snyder qui fait la force du film, de la même manière que chaque auteur de comics se réapproprie l’univers de Batman, certes codifié, mais n’hésite pas à le bousculer pour accoucher de certaines originalités (on pense à nouveau à Scott Snyder, adulé et décrié, ne laissant personne indifférent). Difficile de rester dans la postérité en convenant d’un classicisme banal qui, pourtant, gangrène petit à petit la plupart des productions de cinéma de genre.

Au-delà du titre, ce sont évidemment les affiches et vidéos promotionnelles qui ont été très mal gérées par Warner Bros. En effet, celles-ci dévoilaient la venue de Wonder Woman et de Doomsday ! Nul doute que si Wonder Woman avait été une réelle « surprise » avec sa découverte durant la vision de Batman v Superman, il y aurait eu un engouement voire un bouche-à-oreilles peut-être plus positif. Le combat final contre Doomsday, se voulant être LA véritable séquence d’action de fin de métrage, a été trop montrée aussi et nombreux sont les fans qui n’ont pas été étonnés. Bien évidemment, il ne faut pas analyser par le prisme des « fans », justement, ceux qui avaient suivi la production et la promotion du film avec intensité et qui avaient, de façon légitime, plusieurs attentes (qui causent donc des déceptions et font naître des critiques peut-être plus violentes que s’il n’y en avait pas eues). Et bien sûr, cela n’empêche pas Batman v Superman de comporter de flagrants défauts de rythme ou de cohérences. Sa version longue frôle la perfection là où sa version cinéma reste trop bancale. Des fans ont donc imaginé de nouveaux montages, allégés et allant à l’essentiel, ou carrément des fusions avec Man of Steel. Le résultat se trouve dépoussiéré d’enjeux secondaires et nettement plus rythmé. Mais, on l’a dit, la version longue, quant à elle, n’a quasiment rien à jeter sur le travail de l’écriture et la cohérence (oui on aimerait des changements de dialogue ou d’autres éléments mais qui sont impossibles pour le coup).

Alors, imaginez un peu. Retournons en juillet 2013, peu après la sortie de Man of Steel. Un indice donné au public : la suite s’officialise, elle s’intitulera « Man of Steel 2 – The Batman Complex ». Les mois s’écoulent, quelques rumeurs parlent d’un rôle féminin mystérieux mais ça s’arrête là. Zack Snyder et la Warner ne dévoilent pas des masses les coulisses du film. Les premières bandes-annonces arrivent : l’une montre le début du film (qui reprend la fin de Man of Steel mais d’un point de vue humain — celui de Bruce Wayne donc) et quelques scènes « calmes », avec un focus sur les dialogues et un peu de Lex Luthor (on avait caressé l’idée de voir Bryan Cranston en Luthor Sr. a minima mais tant pis…). Seconde bande-annonce, cette fois accès sur l’affrontement entre Superman et Batman et, éventuellement, une troisième avec leur dialogue où ils parlent de Wonder Woman mais sans qu’elle soit montrée à l’écran. Le tout restant majoritairement dans un ton sombre et violent pour ne pas tenir de fausses promesses (avec un film léger, fun et cool — plus proche de ce que fait la concurrence avec le MCU, et qu’essaiera de copier la Warner dans un second temps avec Suicide Squad puis Justice League). Enfin, bonus suprême : la version longue sort directement en salle, faisant un pied-de-nez aux diffuseurs et au studio de production lui-même qui prend un risque (moins de rentabilité) mais actant une vraie proposition de cinéma et d’auteur. Bref, même si on ne le saura jamais, il y a de fortes chances que ce projet renommé et markété différemment aurait jouit d’une meilleure réputation. Même s’il est compliqué de donner une seconde chance au film, certains l’ont fait en se procurant la version longue et celle-ci est unanimement saluée comme meilleure. L’un des producteurs de Bat v Sup avançait même dans une interview en juillet 2018 que le film faisait partie des 50 meilleures ventes de Blu-Ray de tous les temps mais impossible de vérifier cette information.

Quoiqu’il en soit, en à peine deux ans et demi, Batman v Superman continue son petit bonhomme de chemin et fait toujours parler de lui sur la Toile, où Snyder est relativement actif, via Vero, et dévoile ce qu’il avait en tête ou ce qu’il a montré dans le film (et que peu ont relevé). Il évoque l’univers qu’il bâtissait (à travers Batman v Superman et Justice League) mais qui a chuté. Snyder a reconnu, fin juillet, qu’il n’avait peut-être pas « tous » les détails qu’il annonce sur Vero au moment de la construction de sa saga (en cinq films — on y reviendra aussi). Il en « invente » donc certains, maintenant qu’il sait que tout ce qu’il avait entrepris ne verra jamais le jour (on reparlera aussi du fameux #ReleaseTheSnyderCut). Les débats enflamment les forums et les réseaux sociaux et, petit à petit, lentement mais sûrement, Batman v Superman trouve une seconde vie. À l’instar de Watchmen, déjà signé Snyder, qui n’avait pas convaincu la presse et le public lors de sa sortie avant de s’émanciper au fil des années, gonflé de plusieurs versions différentes (dont l’excellent Director’s Cut et un Ultimate Cut incluant un dessin animé) et finissant par devenir « culte » et dans de nombreux classements de meilleurs films (de super-héros, de science-fiction, etc.). Bat v Sup emprunte-t-il la même voie ? On aimerait y croire tant la suite du DCEU s’est révélée globalement décevante et plus que moyenne (paradoxalement à cause ce Batman v Superman justement).

Les errements de Warner Bros

Cette suite est connue (et récapitulée en détail dans cet autre long article) : Warner change son fusil d’épaule et livre un Suicide Squad hyper convenu, peu « violent et noir » à l’inverse de ce que promettaient les premières images. Le résultat est paradoxal : le film cartonne, récoltant près de 750 millions de dollars à travers le monde pour le « faible » budget de 175 (hors promo), gagne même un Oscar (pour les costumes et maquillages) mais essuie un four critique et se fait dégommer partout. Seul le personnage de Harley Quinn (parfaite Margot Robbie) est acclamée à juste titre. Vient ensuite Wonder Woman et son succès planétaire pour une formule plus classique (origines de super-héros) mais toujours avec la « patte » Snyderienne pour son traitement de l’image : photographie soignée, abus de ralentis, questionnement du divin, etc. Reste donc Justice League à mettre en place. Le studio ne sait toujours pas sur quel pied danser : lorgner vers le divertissement populaire « sympa » avec punchlines et humour léger ou poursuivre la veine sombre (mais devenant lumineuse par la cohérence de son scénario et l’évolution des personnes) et le ton plus adulte ? Si Zack Snyder tient toujours la barre et semble poursuivre son point de vue « réaliste » mâtinée de fantastique et de science-fiction, qu’il maîtrise avec un certain brio, une tragédie le met à l’écart de la post-production du film (le suicide de sa fille adoptive). Plusieurs mois après, on apprendra que Snyder avait déjà été viré par la Warner, ou tout du moins qu’ils avaient prévu de le faire avant que Justice League sorte en salles… On ne saura sans doute jamais. Les bandes-annonces ne reflètent pas le produit final, entaché de scènes retournées par Joss Whedon (le réalisateur des deux premiers Avengers qui a pris le relai sous l’approbation de Snyder soi-disant), d’une moustache maladroitement effacée numériquement et d’un côté grivois qui détonne avec le reste de l’univers qu’avait mis en place Zack Snyder. Tout n’est pas à jeter bien sûr, (cf. la critique sur le site et ce thread sur Twitter qui revient sur la beauté des compositions de certains plans) mais force est de constater qu’on est loin des promesses virales et, à défaut d’une réelle conclusion de la trilogie Snyderienne, d’un véritable film pivot et épique qui s’avère être le moins rentable des cinq films du DCEU alors qu’il aurait dû en être le point d’orgue. Warner en profite pour faire le ménage (parmi ses capitaines de ces projets et notamment les producteurs) et se calme : seuls Aquaman et Wonder Woman 2 continuent leur voie, s’y greffe un Shazam ! plus léger et un film sur le Joker se voulant hors continuité de l’univers partagé (à l’inverse des trois autres). À l’instar de Batman v Superman, Zack Snyder publie de temps en temps des informations sur « sa » version de Justice League et ce qu’il avait en tête (mais est donc tombée dans l’oubli).

Zack Snyder : à l’ombre de Vero

Depuis qu’il a quitté Justice League en pleine post-production, Zack Snyder donne donc de temps en temps des informations sur Batman v Superman sur le réseau social Vero qu’il affectionne tant. Il a plusieurs fois confirmé qu’il n’avait toujours pas vu, justement, Justice League (finalisé par Joss Whedon) et évoque de temps à autre des éléments de ce film qu’il ne connaît pas, comme la famille russe à sauver par exemple. Au fil de ces publications, on perçoit ce que Snyder voulait bâtir. L’architecte d’un univers qui s’est effrité avant de réellement naître. Car Zack Snyder est donc associé à une trilogie, Man of Steel, Batman v Superman : l’Aube de la Justice et Justice League, mais initialement, il devait diriger cinq films dès la mise en place du second. En effet, il est souvent évoqué que dès la création de Man of Steel, Warner Bros avait dans l’idée de concevoir un univers partagé mais rien ne le justifie réellement dans le film (si ce n’est de mini easter eggs montrant les logos de Lexcorps et Wayne Enterprises) et qu’il est impossible de savoir si ces propos sont vrais ou s’ils ont été plus ou moins « improvisés » suite au succès (relatif) du film et la mise en chantier des suivants peu après. Toutefois, une fois le projet Batman v Superman sur les rails, il est vrai qu’il était prévu deux segments de Justice League (qu’on détaillera plus loin), mis en scène par Snyder et, c’est là la surprise, un cinquième film toujours réalisé par Snyder (sans doute Man of Steel 2 ou The Batman mais impossible de le savoir jusqu’à présent). Malheureusement, Snyder ne mettra pas intégralement en boîte « sa version » de Justice League, la seconde partie de ce film est (pour l’instant) annulée — et si elle voit le jour ce ne sera sans doute pas sous l’égide de Snyder, Le réalisateur quitte plus ou moins le DCEU (il reste producteur des Wonder Woman et, malgré lui, « créateur » de la version badass d’Aquaman campé par Jason Momoa).

Ses plans étaient plus ou moins simples et formaient un tout cohérent et palpitant, aperçu donc dans la version longue de Bat v Sup avant d’être sacrifiés par la Warner. De ce qu’on sait : Man of Steel présentait donc Superman et son arrivée sur Terre. Batman v Superman montrait la confrontation entre les deux, l’arrivée de Wonder Woman, les prémices de la construction d’une ligue, l’existence de Darkseid (on y revient peu après) puis la mort de l’homme d’acier. Le premier film Justice League mettait bien évidemment en avant la ligue de super-héros sans Superman d’abord, face à Steppenwolf et ses paradémons, puis associée à un Superman violent et radical (on ignore s’il l’était jusqu’à la fin du film ou s’il redevenait « bon » avant — a priori oui selon ce qu’on a pu voir dans le long-métrage). C’était aussi l’occasion d’introduire Green Lantern et explorer des pans mystiques du DC Universe. Ensuite, dans le second film Justice League, tous les justiciers s’associaient pour combattre Darkseid, grand ennemi de l’ombre teasé dans le cauchemar de Bruce dans Batman v Superman (dans la séquence intitulée Knightmare). Entre temps, plusieurs films étaient prévus (par d’autres réalisateurs), et on les imaginait « plus ou moins à tort » comme on va le constater comme un grand univers partagé chapeauté par Snyder (alors qu’il s’agissait surtout des pontes de Warner et non de lui) : Wonder Woman bien sûr, mais aussi Aquaman et Shazam (tous deux en pleine post-production), The Batman, qui devait explorer le « nouveau Batman » (Ben Affleck, aka Batfleck), vu aussi dans Suicide Squad, et moult projets dont on ignore encore leur aboutissement (The Batman compris) : Flash, Green Lantern, Cyborg, etc. Peut-être que Shazam devait apparaître dans la suite de Justice League. Pour le reste, peu d’informations… On le sait, un cinquième film mis en scène par Zack Snyder devait compléter les quatre autres. On peut légitimement penser à une suite de Man of Steel, qui s’intercalait soit entre les deux segments de Justice League (pour justement montrer le retour à la vie de l’homme d’acier et son évolution) ou bien après pour démarrer de nouvelles aventures, plus « classiques ».

Dans cet ambitieux projet, Zack Snyder a dévoilé, par exemple, fin juillet 2018 que le Robin mort (dont le costume tagué par le Joker est aperçu dans Batman v Superman) était… Richard Dick Grayson. C’est à dire le « premier » Robin (dans la chronologie de Batman) là où tout le monde pensait qu’il s’agissait de Jason Todd, le second Robin (qui est tué par le Joker et qui revient plus tard à la vie sous la forme de l’antagoniste Red Hood). Une théorie avançait même qu’il pouvait aussi s’agir de Dick Grayson qui serait devenu le Joker (comme dans… The Dark Knight Returns de Frank Miller). De plus, Snyder a révélé qu’il voulait instaurer un second Robin… féminin ! En la personne de Carrie Kelley, un personnage iconique toujours puisé dans le TDKR de Miller. De vieilles rumeurs avançait que l’actrice Jena Malone avait été casté pour ce rôle ou celui de Batgirl. Finalement, Malone était écartée du montage cinéma de Bat v Sup et apparaissait dans la version longue comme collègue journaliste de Lois Lane. Kelley serait sans doute intervenue dans le deuxième film Justice League ou le cinquième film de Snyder (Man of Steel 2 ou carrément… The Batman ?). Dans la foulée, Snyder a reconnu (ce qu’on évoquait plus haut), qu’il souhaitait avant tout à bâtir « sa trilogie » (ou ses cinq films, peu importe à ce stade) et non forcément « un univers partagé » avec d’autres films (donc les Wonder Woman, Cyborg, Flash, etc.). Une révélation étonnante mais qui ne change, in fine, pas grand chose puisque l’important pour les fans, et pour Snyder, était avant tout l’histoire de Superman, puis de Batman, puis de la Justice League, ainsi que leurs ennemis communs incluant Luthor et Darkseid bien sûr. Zack Snyder divulguait aussi, pêle-mêle ces derniers mois directement ou indirectement, que l’équation « anti-vie » devait être au cœur de la seconde partie de Justice League — un élément cohérent avec la venue de Darkseid (la scène du Knightmare était bien causée par la mort de Lois). Darkseid devait d’ailleurs apparaître dans une vision de Cyborg dans le premier Justice League, vision qui prolongeait ce fameux Knightmare. Plus anecdotique, on sait aussi que Victor Stone justement (Cyborg) faisait partie des joueurs de l’équipe de football américain de Metropolis et qu’il était abordé indirectement par Perry White dans Batman v Superman lorsque ce dernier somme Clark Kent d’écrire un papier pour les pages sport (au lieu d’enquêter sur le Batman de Gotham).

Début octobre 2018, une (nouvelle) révélation éclate : Snyder avait prévu de tuer Batman dans ses films. A priori peut-être à la fin du film The Batman (le mystérieux cinquième film souvent évoqué mais qui devait être réalisé par Ben Affleck à la base — désormais ce serait Matt Reeves et sans Affleck dans le rôle) ou dans Justice League 2. Pour cela, le réalisateur s’inspire de Final Crisis (de Grant Morrison), dans lequel le Chevalier Noir succombait sous les coups de Darkseid (en vrai il avait « seulement » voyagé dans le temps). L’âge avancée du Caped Crusader est un sujet qui revient dans Batman v Superman et, surtout, dans Justice League. L’idée que le justicier passe la relève semble évident et, connaissant les ambitions de Snyder, un homologue plus jeune voire une femme — comme évoqué plus haut : Carrie Kelley ? Batgirl ? — aurait sans doute été logique… Évidemment, on ne verra jamais cela mais il serait intéressant de publier sous forme de comics (ou de romans) toutes les idées de Snyder, quitte à proposer à nouveau ses deux premiers chapitres (MoS et BvS) sous la même forme. Attention toutefois, il est nécessaire de rappeler que Snyder étant désormais « libre » il peut inventer un peu ce qu’il veut « au fil de l’eau » pour justifier un plan qui n’était peut-être pas aussi établi et précis que ce qu’il avance.

#ReleaseTheSnyderCut

La chimère éternelle depuis la sortie de Justice League… Puisque Batman v Superman a bénéficié d’une version longue et que Justice League a eu énormément de scènes tournées, dont certaines montrées dans les bandes-annonces, mais finalement pas utilisées, il était logique d’attendre une potentielle autre version du film, cette fois bien signée par Zack Snyder et non Joss Whedon. La croyance en cette version est légitime et est rapidement devenue un véritable objet de combat à travers le hashtag #ReleaseTheSnyderCut envoyé massivement tous les jours à la Warner sur Twitter ou par d’autres moyens. Snyder lui-même laisse planer le doute quant à son existence (il partageait, toujours sur Vero, une photo de son pouce avec une petite coupure (« cut ») et des images inédites de tournage, de là à imaginer un Snyder Cut il n’y a qu’un pas). Il est bien sûr évident qu’une version « de travail » existe, contenant des scènes non finalisées (en terme d’effets spéciaux) et brouillonnes. Mais les fans fantasment sur une version définitive. Il est peu problabe que Warner Bros finance la finalisation de tout cela et sa sortie physique.

[Crédit : @RameshDeSilva2]

De nombreuses rumeurs assuraient que Snyder s’en occupait dans son coin et compter en parler au Comic Con de San Diego de juillet 2018. Il n’en fut rien. Pire : l’existence de cette version a carrément été abordée dans The Wall Street Journal pour confirmer qu’elle… n’existait pas ! Certains acteurs ignorent aussi si elle existe (Henry Cavill) là où d’autres répondent, quelques jours après la mise en ligne de l’article du Wall Street Journal qu’elle existe (et qu’elle est même meilleure selon eux, Jason Momoa). Divers techniciens qui ont œuvré dans l’ombre ou des artistes spécifiques, comme Jay Oliva qui s’est occupé des story-boards, confirment aussi l’existence de cette version (avec ou sans effets spéciaux finalisés, à force on ne sait plus…). Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’une version « non-finalisée » existe, c’est une évidence puisqu’elle avait même été montrée aux producteurs de Warner Bros. Mais cette version ne correspond pas à la « Snyder Cut » puisque la musique n’était pas non plus accolée dessus (Junkie XL a été remplacée par Danny Elfman) et évidemment les effets spéciaux non terminées. Cette version ne sera (sans doute) jamais dévoilée au public, au mieux la publication du story-board initial, cher à Snyder — qui les dessine lui-même — et toujours très précis pourrait être publié. La « finalisation » de ce brouillon de « Snyder Cut » pourra-t-elle voir le jour ? Peut-être… il aura bien fallu près de 30 ans à Richard Donner pour livrer son Director’s Cut sur son second volet de Superman.

Youtube et Réseaux Sociaux

On pourrait lister les nombreuses personnes qui parlent de Batman v Superman sur les réseaux sociaux, avec plus ou moins de pertinence et plus ou moins d’influence. Ce serait fastidieux et, in fine, peu utile à écrire ici mais on peut évoquer une vidéo du célèbre Fossoyeur de films datée du… 15 novembre 2018 ! Lui aussi revient sur le film si longuement après sa sortie. Le sujet ? Le fameux « point Martha » qui a fait couler beaucoup d’encre. On en a peu parler sur le site car on ne l’a jamais trouvé risible, bien au contraire. Maladroitement exécuté certes mais plutôt pertinent. C’est ce qu’explique d’ailleurs le YouTubeur : ce n’était pas une idée stupide mais elle était mal exécutée, complémentée par d’autres idées similaires intéressantes mais pas forcément bien écrites. Il est curieux de voir ce vidéaste à la si large audience s’attarder sur ce détail alors qu’il n’est pas forcément féru de cinéma de super-héros et encore moins des adaptations DC.

On note aussi que ce « point Martha » trouve une autre résonance outre-Atlantique puisque, de notre prisme français, nous appelons à tout âge nos parents « maman » et « papa », on pouvait trouver surprenant que Clark ne dise pas « sauve ma mère » (ou « sauve ma maman ») mais directement « sauve Martha » ; hors aux États-Unis il est de coutume d’appeler ses parents par leurs prénoms une fois au stade adulte (voire dès l’adolescence). Ce qui donne à l’ensemble un aspect moins ridicule, davantage logique (même si un « sauve ma mère, sauve Martha » aurait été plus judicieux, indéniablement). Un autre YouTubeur a proposé, en 2020, une analyse plutôt juste sur la fiction et son « ambition démésurée » (tout en clamant, une fois de plus, que la version longue apporte bien plus d’éléments qualitatifs).

2020, DC(EU) Rebirth et l’année de tous les possibles !

Aussi inespéré qu’attendu (et l’occasion de reprendre la plume sur ce sujet deux ans après la dernière mise à jour de cette analyse), le fameux « Snyder Cut » de Justice League va être diffusée en 2021 ! Le mouvement #ReleaseTheSnyderCut a porté ses fruits et fait plier la Warner. Avec des intentions louables autant artistiques que pécuniaires bien sûr. Sans omettre non plus la minorité toxique qui se cache derrière le fameux hashtag (voir le billet d’humeur très argumenté de ComicsBlog pour l’occasion), cette victoire ouvre le champ des possibles pour conclure élégamment le DCEU de l’ère Snyder, corrélée à la pré-production actuelle du film The Flash. Explications.

20 mai 2020. Date historique : Zack Snyder révèle que la version longue de son film Justice League va voir le jour sur la plate-forme de streaming HBO Max en 2021. Le long-métrage devrait durer entre quatre et six heures et pourrait être découpé en plusieurs chapitres sous forme de mini-série. Trente millions de dollars au minimum seront injectés pour financer cette « nouvelle » post-production, qui s’intitule désormais Zack Snyder’s Justice League (ZSJL). Le metteur en scène visionnaire a déjà partagé une vidéo montrant Diana Prince (Gal Gadot) découvrir un vestige archéologique sur Darkseid puis ce dernier dans un flash-back (où il remplace Steppenwolf dans un plan déjà vu en 2017). Le tout sur une musique issue de Batman v Superman et une narration de Lex Luthor (Jesse Eisenberg), également puisé dans BvS. On devrait en (sa)voir plus fin août 2020 à l’occasion de l’évènement virtuel DC Fandom qui reviendra sur toute l’actualité DC Comics (jeux vidéo, séries TV, films, comics…).

Zack Snyder assure que le film sorti en 2017 ne contient environ qu’un quart de son travail. Rappelons que cette version durait 1h50 hors générique et qu’effectivement, en toute logique, le ZLJL devrait radicalement changer la donne malgré une ligne narrative certainement similaire. Il faut aussi évoquer qu’il était prévu une trilogie autour de Justice League. Avec (en gros) un premier volet qui montrait la constitution de l’équipe et leur défaite face à Darkseid, un second qui avec Superman davantage présent et la fiction qui s’aventurait dans le cosmique puis faisait suite au Knightmare de Batman v Superman. Enfin, le troisième et dernier opus aurait été l’apothéose finale avec la victoire de la ligue mais la mort de Batman (et pourquoi pas le renfort de Shazam (introduit au cinéma entre temps) et des Green Lantern). Il est évident que ces suites ne verront jamais le jour : l’univers partagé de DC a pris une orientation différente, l’acteur Ben Affleck a rendu définitivement sa cape de l’homme chauve-souris, etc. Néanmoins cet hypothétique « futur » de la Justice League pourrait être habilement mentionné puis conclut grâce au film The Flash.

Andy Muschietti (réalisateur des deux chapitres Ça/It) tournera en effet l’adaptation du justicier éponyme dans les prochains mois pour une sortie prévue en juin 2022 pour l’instant. Ezra Miller tiendra toujours le rôle de Barry Allen malgré ses performances décriées (dont le responsable n’est pas le comédien mais plutôt Zack Snyder qui a orienté le personnage ainsi). Serpent de mer au sein du DCEU, longtemps annulé, reporté, réécrit… un temps évoqué comme l’adaptation du comic-book Flashpoint (le long-métrage portait le même titre durant un moment), la fiction devrait permettre de relancer l’univers partagé de DC Comics au cinéma de multiples façons. Tout d’abord en faisant (presque) table rase du passé (comprendre Batman v Superman, éventuellement Suicide Squad et surtout Justice League) en jouant la carte du multivers. Grâce à cette notion, plusieurs super-héros issus de Terres différentes, d’univers différents, pourraient coexister en justifiant les changements d’acteurs et la remise à neuf de l’ensemble (même si cela n’a d’intérêt pour l’instant que pour Batman — on en reparle plus loin).

Ensuite, en repartant à zéro, l’on pourrait conserver malgré tout les « origin-stories » d’une bonne partie de la ligue : Aquaman, Wonder Woman, Shazam (s’il l’intègre) et Flash qui en bénéficiera durant ce film. On ne renierait donc pas le passé, comprendre les films qui ont marché, et on module plus ou moins élégamment ceux qui ont divisé (Man of Steel et Batman v Superman, donc Clark Kent/Superman et Bruce Wayne/Batman, peut-être à nouveau Suicide Squad qui aura aussi droit à une nouvelle adaptation prochainement — on aborde cet autre sujet après également). C’est là qu’intervient l’étrange rumeur du 22 juin 2020 avec… le retour de Michael Keaton dans le role de l’homme chauve-souris pour The Flash mais aussi pour d’autres futures productions (il est évoqué qu’il serait un peu l’équivalent de Nick Fury dans ce DCEU 2.0) ! Surprenant et audacieux. Plusieurs scénarios peuvent être envisagés. Le multivers évidemment, déjà évoqué et qui a fait ses preuves en version télé dans l’Arrowverse, mais aussi le voyage dans le temps et les paradoxes qui en découlent.

On peut aisément imaginer Barry Allen remonter au meurtre des Wayne (vu en ouverture dans BvS) mais causer une faille temporelle dans laquelle c’est Bruce qui est tué et son père, Thomas, qui endosse la cape du justicier. C’est ce que laisse entendre une autre rumeur persistante sur le retour de Jeffrey Dean Morgan pour reprendre son rôle de Thomas Wayne (il a confirmé à plusieurs reprises être partant et très excité par le personnage) qui mettrait donc en avant ce nouvel anti-héros, toujours conçu dans le comic-book Flashpoint et revu récemment (surtout vers la fin) dans le long run Batman Rebirth. [Malgré tout, la venue de Keaton semble compromettre sérieusement cette information, portant déjà à trois Batman (Affleck, Pattinson et Keaton) dans un univers semi-partagé déjà bien compliqué… Un quatrième avec Dean Morgan embrouillerait sans doute le novice.] Afin de réparer ce paradoxe (le fameux Flashpoint donc), Barry Allen devra s’aider d’un ancien Batman, celui campé par Keaton dans les production de Tim Burton. A partir de là, le champs des possibles est sans limite, Ben Affleck pourrait juste dire quelques mots à l’oral afin de parler des suites (annulées) de Justice League. « On s’est battus, on a perdu, j’ai été un mauvais Batman… » c’est suffisant, pas besoin de plus. Le bolide écarlate le rassure en évoquant ses autres versions de lui-même, incluant celle, pourquoi pas, interprétée par Robert Pattinson dans la future trilogie The Batman de Matt Reeves. L’incorporation de cette dernière au sein du DCEU a toujours été floue, le scénariste/réalisateur évoquant à la fois une trilogie indépendante (à l’instar de celle de Christopher Nolan) sans lui aussi renier le DCEU avec de très brèves connexion. Sachant que les rôles de Gordon et évidemment du Chevalier Noir ne sont pas tenus par des mêmes acteurs, soit ça se justifiera par une Terre parallèle (multivers à nouveau donc), soit par une démarcation indépendante assumée (mais quel bazar pour les neophytes !).

Ces quelques pistes de réflexion permettraient de fermer une bonne fois pour toute le DCEU de l’ère Snyder, de passer à autre chose et de repartir sur des bases saines. Le film Flash pourrait donc tout à la fois faire référence à la Justice League du cinéma que celle de HBO (qui contiendra d’ailleurs une plus grande exploration de Barry Allen mais, là aussi, c’est quelque chose qui peut être effacé aisément par la suite grâce au long-métrage). Reste qu’avant cette adaptation cinéma du bolide écarlate, Warner sortira Wonder Woman 1984 (octobre 2020), The Suicide Squad, The Batman et Black Adam (tous trois prévus pour 2021) ! La suite des aventures de l’amazone ne devrait pas avoir d’impact majeur pour l’univers partagé, Black Adam non plus (qui se connectera à terme à Shazam). The Batman, comme on l’a dit, est toujours dans le brouillard concernant son incrustation dans le DCEU ou non. Qu’en est-il de The Suicide Squad ? Il est annoncé comme un semi-reboot, reprenant quelques rôles du premier film, à commencer par celui d’Harley Quinn par Margot Robbie bien sûr (qui a eu droit à son propre métrage dans Birds of Prey, sorte de Suicide Squad 1.5). Là aussi cette (fausse) suite ne reniera pas le premier film mais s’en démarquera. Réalisé par James « Les Gardiens de la Galaxie » Gunn, la succession à David Ayer semble évidente. Ce dernier espère toujours néanmoins proposer son cut (et son Joker Leto plus imposant que celui qu’on a vu) façon Snyder et HBO pour sa Justice League

Dans ce joyeux bordel, les aventures d’Harley Quinn et ses bandes (de mecs dans les deux Suicides Squad, de filles dans Birds of Prey) apparaissent un peu déconnectées du reste. Là aussi la solution du multivers rétroactivement permettrait d’achever convenablement ce mini-univers au sein d’un autre plus vaste tant les directions proposées par chaque metteur en scène semblent diversifiées. The Flash arrivant après, Warner pourrait corriger le tir prudemment en attendant les résultats au box-office de The Suicide Squad… Beaucoup d’hypothèses, de « si » et d’imagination durant ces derniers paragraphes, moins portés sur « les faits » mais une certaine stimulation à imaginer l’avenir DC au cinéma qui reste un objet d’étude passionnant à plusieurs niveaux. Si en 2017 Wonder Woman puis Justice League apparaissaient commes les fictions avec lequelles Warner « n’avait plus le droit à l’erreur » (pour reprendre le titre de cet article), c’est peut-être The Flash qui corrigera les loupées, sept ans environ après les premiers désastres critiques de 2016 de Suicide Squad et… Batman v Superman : l’aube de la Justice.

20 mai 2020. Date historique : Zack Snyder révèle que la version longue de son film Justice League va voir le jour sur la plate-forme de streaming HBO Max en 2021 ! Le mouvement #ReleaseTheSnyderCut a porté ses fruits et entre 20 et 30 millions de dollars (au plus bas) sont injectés pour financer cette « nouvelle » post-production.

14 février 2021. La bande-annonce définitive est mise en ligne (à découvrir ci-après). Le film d’une durée de quatre heures environ sera diffusé le 18 mars 2021 sur HBO Max et le 22 avril en France en VF et VOSTFR (on ignore sous quelle forme). Une version noir et blanc (Justice is Gray Edition) est également prévue. Le Joker incarné par Jared Leto a aussi été ajouté lors de tournages de nouvelles scènes (récapitulatif de toutes ces nouvelles informations sur cet article). Une photo de son nouveau look avait été dévoilée quelques jours plus tôt.

Gotham : l’insoluble équation qualitative

MàJ janvier 2019 – Une autre analyse de la série a été publié sur cet article. Il est à lire avant celui-ci (qui n’avait jamais vraiment été terminé) et qui vient le complémenter de façon très efficace.

Derrière ce titre un peu « pompeux » se cache une analyse de la série Gotham via ses quatre premières saison (l’article sera actualisé une fois la cinquième diffusée et chroniquée). Pour rappel, le show bénéficie déjà de plusieurs critiques par arcs de saisons sur cette page.

Un constat revient à chaque fois qu’on évoque Gotham : le déséquilibre flagrant entre le casting, l’écriture, le côté technique, la narration, etc. Dans l’idée de synthétiser au mieux tout cela, et surtout comprendre le succès relatif (ou l’échec en demi-teinte) de la série, deux tableaux comparatifs ont été conçus.

Le premier revient sur le côté « technique » de Gotham, c’est à dire ses qualités intrinsèques qu’on peut analyser de façon objective. Le résultat est sans appel : la série lorgne constamment entre le bof/moyen/pas mal, elle n’excelle jamais vers le très bien ou le nullissime. Mais… comme on peut le constater, certains aspects se retrouvent dans plusieurs catégories. En effet, bien difficile de trancher d’une façon définitive sur la petite centaine d’épisodes vus, tant la qualité entre eux oscille constamment. Qui plus est, trois éléments ont besoin d’être développés. Explications ci-dessous après le tableau.

 

TRÈS BIEN PAS MAL MOYEN / BOF NUL
Photographie soignée Rythme des épisodes Musique Casting (3)
Mise en scène Scénario (1)
Scénario (1) Respect des comics / de la mythologie Batman (2)
Respect des comics / de la mythologie Batman (2) Crédibilité (incohérences)
Costumes & maquillages Casting (3)
Casting (3) Trop de plans d’intérieur
Effets spéciaux Effets spéciaux

 

 

Sans surprise, un des éléments forts du show est sa photographie soignée, qui n’a pas à rougir d’une production cinématographique ou d’un show de HBO par exemple (Game of Thrones, Deadwood…). Il y a un travail esthétique notable pour montre la ville de Gotham et ses intérieurs. Aussi bien les décors que la lumière sont étudiées pour proposer un rendu alléchant et original, mi-rétro, mi-moderne. Le rythme des épisodes est lui aussi correct (à l’exception de la première saison, qui était encore très bancale sur ce point) puisqu’on s’ennuie rarement et qu’il n’y a pas de temps mort entre les scènes (attention, ça ne veut pas dire que ce qu’on voit est « bon » ou « intéressant » mais il faut reconnaître un rythme maintenu qui reste efficace). La mise en scène de Gotham est extrêmement classique voire convenue au possible. Il subsiste quelques plans originaux de temps en temps, de jolies compositions ou quelques effets de réalisation un brin novateur mais c’est très rare. Est-ce problématique ? Pas forcément, le travail est là et c’est suffisant pour regarder la série. Bien sûr, on (un amateur de productions « cinématographiques », ou un serievore) aimerait du « mieux » sur cet aspect, mais il n’est clairement pas primordial. Le budget ne permet sans doute pas une telle possibilité et le public visé de la chaîne n’y est peut-être pas réceptif (qui plus est — et ce fut là aussi le gros problème de la première saison surtout — la série ne savait pas à qui s’adressait entre le grand public familial ou les spectateurs plus adolescents et adultes enclins à un côté sombre et violent). Pour rester sur les bons aspects du show, évoquons les costumes et maquillages particulièrement réussis au global — disons que ça évolue de mieux en mieux, par exemple le look du dernier Épouvantail en saison 4 ou les meurtres d’Ivy par les plantes sont vraiment sublimes (on repassera sur Fish Mooney ou d’autres personnages secondaires…). D’une manière plus ou similaire les effets spéciaux sont soit réussis soit ratés. Les effets spéciaux englobent aussi bien les effets visuels (retouches numériques en post-production) que des effets « techniques » artisanaux (des explosions) ou bien de la création pure et dure par ordinateur. On commence à entrer dans ce qui varie en terme de qualité (avec un penchant positif global, principalement sur les dernières saisons). Certains sont clairement mal faits puisqu’on distincte qu’il s’agit d’une image numérique par exemple. C’est assez rare mais c’est dommage.

Attardons-nous sur trois aspects qui rentrent dans plusieurs catégories.
(1) Scénario : difficile d’avoir une homogénéité qualitative quand l’écriture de certains personnages n’a rien à voir avec d’autres. Par exemple, l’évolution de Jerome (le « proto Joker ») est globalement réussie et cohérente, idem avec le personnage du Chapelier Fou. Hélas pour d’autres, aussi bien ennemis que policiers, on ne peut en dire autant (James Gordon et Bruce Wayne restent en dessous d’une certaine qualité exigée et ne parlons même pas de Barbara). Jamais le scénario n’atteint des sommets d’écriture, ou bien à de rares petites touches mais avec toujours un ou deux petits éléments qui gâchent un peu le tout (le premier plan imaginé par le Pingouin, qui manipule tout le monde, est excellent mais la présence de Fish Mooney fait retomber le plaisir). Il serait mentir de dire que l’histoire ne flirte jamais avec du très très bon mais ça ne dure jamais bien longtemps ou, comme on vient de le voir, une ou plusieurs choses amenuisent tout ça. C’est pour cela, qu’en moyenne, le scénario est plutôt pas mal ou moyen, ce qui s’explique aussi par le traitement des personnages et donc le second tableau plus bas.
(2) Respect des comics / de la mythologie Batman : voilà l’aspect le plus « subjectif » possible parmi tous les éléments évoqués. En effet, seul un connaisseur de l’univers de Batman peut trouver respectueux le traitement des personnages et de l’univers. Bien évidemment, même dans les comics, les représentations de Batman convergent au grès des auteurs et des époques. Ce qui frappe dans Gotham est multiple à cet égard. Le plus « choquant » est que la série propose beaucoup trop en amont de la chronologie dite « classique » les émancipations des ennemis emblématiques de Batman et l’évolution de Bruce Wayne en jeune justicier. Quasiment toute la galerie de vilains existe une dizaine d’année avant les apparitions du Chevalier Noir. Cette précocité trouve son explication à divers degrés : volonté des scénaristes d’avancer en terrain connu pour séduire les fans (tout en proposant de nouvelles têtes conçues spécifiquement pour le show, mais souvent ratées), fan-service pur et simple (aucun développement construit et sur le long terme, mais de vagues apparitions de tel ou tel élément) ou « nouvelle version du mythe de Batman ». C’est ce dernier point qu’il faut prendre en compte pour mieux apprécier Gotham. Quasiment imaginer un elseworld, sorte de refonte des classiques, films et comics, jeux vidéo et séries d’animation, pour « accepter » les défauts (du respect des comics / de la mythologie Batman) de cette adaptation. Si l’on se convainc de cela, alors cette idée de montrer très tôt la montée en puissance de Bruce Wayne et de tous ses ennemis peut mieux passer. Cela n’empêche pas les errements improbables de certains protagonistes, parfois pour le meilleur (Alfred), parfois pour le pire (Poison Ivy). Au-delà du traitement des personnages — qui rejoignent donc à nouveau la catégorie scénario et le second tableau — il faut reconnaître à la série l’envie d’être au plus proche de certains comics récents. Ainsi le visage retiré du Joker (issu de Le Deuil de la Famille) est une réussite dans Gotham (et, comble de l’ironie, mieux justifiée que dans les livres !). S’il est plaisant de découvrir sur écran La Cour des Hiboux (des récits éponymes), on peine à la creuser et véritablement dévoiler le pouvoir de cette société secrète. À nouveau, on vacille entre du bon et du moyen, le déséquilibre reste flagrant et constant.
(3) Casting : Une ultime fois, on rejoint une problématique liée à la fois à l’écriture des personnages (scénario) mais aussi au charisme et à l’interprétation des acteurs (casting). Il faut se référer au second tableau pour les détails et on observe, encore, ce cruel déséquilibre mais avec deux tendances nettes qui se dégagent : du très bien et du nul, on est moins consensuel ou dans le « moyen/bof ». Malheureusement, cela ne contribue toujours pas à une homogénéité qualitative de Gotham sur plusieurs points.

Pour terminer, trois derniers points critique pas terrible. La musique est totalement oubliable, aucune partition originale qui reste en tête, c’est fort dommage, surtout pour une série de ce calibre. Le générique se réduisant à moins de cinq secondes, impossible d’être marqué par la ou les quelques musiques qui bercent le show. On note un léger mieux en saison 4 mais ce n’est pas suffisant. Le travail sur le son et les effets sonores est en revanche très correct. La crédibilité (incohérences) est un terme vaste et parfois flou. La crédibilité revient à la plausibilité de ce qui est montré à l’écran en fonction de l’univers dans lequel régissent les personnages et le registre propre à la série. De plus, la crédibilité englobe aussi les actions et réactions des personnages. De ces deux facettes peuvent naître des incohérences. C’est évidemment le cas pour Gotham. Pour le premier cas, il faut bien comprendre que la série n’embrasse pas une voie urbaine, policière et « réaliste » mais flirte avec la science-fiction (expériences, avancées technologiques…) et le fantastique (résurrections, potions magiques…). Ce triple registre est toujours un peu casse gueule et permet d’utiliser de nombreux ressorts scénaristiques un peu facile, comme les protagonistes qui ne meurent pas vraiment ou des improbables créatures. Par conséquent, le show perd indéniablement en qualité, ne sachant quelle direction prendre (une tendance ressentie dans certains comics mais qui est moins problématique sur papier que sur écran). De la même manière, des évolutions de protagonistes sont incohérents, comme celles du Dr. Lee Thompkins (qui est « gentille » puis « méchante » puis à nouveau « gentille » puis alliée avec des « méchants » et ainsi de suite, sans parler de son histoire d’amour avec James Gordon et ses réactions peu logiques — c’est d’autant plus dommage que le personnage était une valeur sûre de Gotham à ses débuts). Enfin, de manière un peu plus anecdotique, on note « trop de plans d’intérieur », c’est à dire qu’on étouffe un peu en voyant les mêmes pièces (le QG du Pingouin, les bureaux du GCPD, la cuisine et la bibliothèque du Manoir Wayne, etc.). Il manque des « vues d’ensemble » plus longue, plus originales (on nous ressort les mêmes vues aériennes ou lointaines) pour vraiment sentir LA différence avec une métropole quelconque ; Gotham mériterait d’être arpentée et fouillée davantage et autrement. Ce manque d’exploration visuelle n’est pas le point critique le plus dommageable mais ajouté à tous les autres, ça cumule pas mal…

Pour toutes ces raisons, globalement « objectives » (à l’exception notable du respect des comics / de la mythologie de Batman — et encore), la série en elle-même peine à être reconnue comme une réussite mais aussi comme un ratage complet. Car il y a toujours quelque chose à sauver tout comme il y a toujours quelque chose à supprimer. Très pénible car après les balbutiements de la première saison, Gotham avait gagné en maturité et semblait avoir tiré certaines leçons des retours critiques. Et c’est encore plus frustrant de constater que la galerie de personnages comporte quelques pépites (voir ci-après).

Au-delà des qualités intrinsèques de la série (cf. le premier tableau), les personnages forment évidemment un des intérêts les plus importants de Gotham. Ils nourrissent l’histoire mais sont, surtout, l’adaptation sur écran de ce que les fans des comics connaissent. Ce qui donne donc un autre prisme d’analyse.

Ce second tableau revient donc sur les personnages (compilant aussi bien les jeux d’acteurs que leur écriture et évolutions). Une fois encore, on constate que le travail est éparpillé un peu partout, ce qui peine à synthétiser un avis tranché. Le problème d’un protagoniste peut être multiple. Son interprète peut être bon mais si l’écriture n’est pas terrible, alors le personnage ne passionne pas. À l’inverse, un rôle bien écrit peut être loupé à l’écran si l’acteur ou l’actrice derrière joue mal ou n’est pas charismatique. Tous ces éléments ont donc été recensés pour dresser le classement suivant (qui reste évidemment subjectif). Un code couleur est également ajouté pour délimiter la catégorie des personnages, sommairement répartis en « gentils », antagonistes/ennemis, autres.

Bien sûr, ce tableau reflète une sorte de moyenne des quatre saisons actuelles de Gotham. Dans une première version non publiée, les colonnes « Moyen » et « Bof » étaient regroupés en une seule catégorie (comme pour le premier tableau) ; dans le cas des personnages, il y a un réel besoin d’affiner davantage ce classement, d’où l’extension en deux colonnes. Attention, un protagoniste pourrait tout à fait être dans plusieurs catégories en fonction de chaque saison ou bien de son évolution d’un camp vers un autre mais le résultat se veut une moyenne si on évalue tout sur le long terme, car on penche quand même davantage d’un côté que d’un autre (sauf par exemple pour Ivy Pepper qui est clairement constituée de trois prestations distinctes). Quelques personnages très secondaires comme Valerie Vale, Tommy Elliot ou Mario Calvi ne sont pas inclus, ainsi que des ennemis de seconde zone (L’Électrocuteur, Flamingo…).

TRÈS BIEN PAS MAL MOYEN
BOF NUL
Oswald Cobblebot / Le Pingouin
(Robin Lord Taylor)
Harvey Bullock
(Donald Logue)
James Gordon
(Ben McKenzie)
Harvey Dent
(Nicholas D’Agosto)
Bruce Wayne
(David Mazouz)
Edward Nygma / The Riddler | L’Homme-Mystère
(Cory Michael Smith)
Theo Galavan / Azrael
(James Frain)
Selina Kyle
(Camren Bicondova)
Butch / Solomon Grundy
(Drew Powell)
Barbara Kean
(Erin Richards)
Alfred Pennyworth
(Sean Pertwee)
Bridgit Pike / Firefly
(Michelle Veintimilla / Camila Perez)
Sal Maroni
(David Zayas)
Victor Zsasz
(Anthony Carrigan)
Tabitha Galavan
(Jessica Lucas)
Lucius Fox
(Chris Chalk)
Carmine Falcone
(John Doman)
Leslie Thompkins
(Morena Baccarin)
Hugo Strange
(B.D. Wong)
Fish Mooney
(Jada Pinkett Smith)
Jerome / Jeremiah Valenska / le « proto Joker »
(Cameron Monaghan)
Ivy Pepper V3 [saison 04]
(Peyton List)
Jonathan Crane / L’Épouvantail V1 [saison 01]
(Charlie Tahan)
Ivy Pepper V2 [saison 03]
(Maggie Geha)
Renee Montoya
(Victoria Cartagena)
Sofia Falcone
(Crystal Reed)
Victor Fries / Mister Freeze
(Nathan Darrow)
Crispus Allen
(Andrew Stewart-Jones)
Jervis Tetch / Le Chapelier Fou
(Benedict Samuel)
Ra’s al Ghul
(Alexander Siddig)
Ivy Pepper V1 [saison 01]
(Clare Foley)
Nathaniel Barnes / L’Éxécuteur
(Michael Chiklis)
Silver St. Cloud
(Natalie Alyn Lind )
Sujet 514A [clone de Bruce Wayne]
(David Mazouz)
Lazlo Valentin / Professeur Pyg
(Michael Cerveris)
La Cour des Hiboux
Jonathan Crane / L’Épouvantail V2 [saison 04]
(Charlie Tahan / David W. Thompson)
Basil Karlo / Gueule d’Argile
(Brian McManamon)

À nouveau, le déséquilibre flagrant montre que Gotham sait tirer vers le haut comme le bas. Pour plus de détails, il faut se référer aux critiques par arcs narratifs de chaque saison (qui étayent davantage tout ce qui est écrit sur cette page avec plus d’exemples concrets).

Impossible de ne pas évoquer les deux personnages principaux quand on parle de Gotham : James Gordon (Ben McKenzie) et Bruce Wayne (David Mazouz). Les deux ne brillent pas par leur charisme tout d’abord, McKenzie et son air de chien triste, Mazouz et son côté gamin insolent, qui plus est leurs évolutions ne sont pas exceptionnels voire stagnent au fil des épisodes. Le premier reste flic « imperturbable » mais avec quelques bons moments : quand il est à la limite de la corruption ou quand il n’est plus flic et davantage en roue libre. Le second ne joue pas très bien et ne peut s’empêcher d’être déjà Batman bien avant l’heure… Quelle solution pour cela ? Aucune à part changer d’acteur (au moins Mazouz) ce qui n’est jamais arrivé et n’arrivera (sans doute) pas pour la dernière saison… Pourtant, dès les premières diffusions et les échos critiques négatifs envers le jeune Bruce Wayne, la chaîne aurait pu (sous réserve que ce soit possible d’un point de vue contractuel bien sûr) tenter de prendre un autre enfant acteur. On salue toutefois les rôles d’Alfred Pennyworth (Sean Pertwee) – plutôt inspiré par Batman Terre Un -, Lucius Fox (Chris Chalk), Harvey Bullock (Donald Logue) et Nathaniel Barnes (Michael Chiklis). Fox apporte un certain magnétisme parmi les alliés et Bullock est relativement proche de l’image globale des comics. Barnes fut l’une des rares nouveautés du côté des « gentils » à apporter un vrai « plus ». Campé par une valeur sûre (la série The Shield) avec une métamorphose à la fois cohérente mais malheureusement un peu risible (en Exécuteur). De la même manière, l’excellente et charismatique (et jolie) Morena Baccarin interprète une Leslie Thompkins inédite (on l’a toujours « lu » lorsqu’elle est âgée) dans un premier temps. Avant de suivre un chemin peu logique et même de devenir une ennemie de seconde zone… La quatrième saison semble lui redonner quelques lettres de noblesse mais seule sa fin de parcours en ultime saison décidera de l’intérêt général du personnage. De manière anecdotique, toujours chez les « alliés », citons le mauvais traitement d’Allen et Montoya, vite relayés à de la figuration (avant de disparaître définitivement) là où ces deux policiers apportent un réel enjeu plus humaniste dans certaines bandes dessinées (Gotham Central et No Man’s Land par exemple). Quant à Harvey Dent, mal choisi dès le départ (Nicholas D’Agosto n’est guère convaincant voire risible), son parcours est très mal écrit et, lui aussi, disparaît complètement au bout de plusieurs épisodes, dommage… Enfin, chez les plus jeunes, Camren Bicondova jouait une Selina Kyle plutôt intéressante en début du show avant de devenir une caricature grossière de son propre rôle et, elle également, d’être relayée en arrière-plan. Sa relation avec Bruce Wayne fascine peu même si cette romance était légitime.

C’est donc surtout dans la galerie de vilains qu’il faut piocher le meilleur de Gotham (mais aussi le pire). Il y a tout d’abord l’insupportable trio féminin composé de Barbara Kean (Erin Richards), Fish Mooney (Jada Pinkett Smith) et Tabitha Galavan (Jessica Lucas). On a à la fois un problème d’écriture mais aussi de casting. Les trois femmes jouent globalement mal et leurs rôles sont malheureusement insupportables. On ne sait pas trop si Barbara Kean était censée être « la » Barbara Gordon mais sa trajectoire est surréaliste (elle devient la reine du crime, la protégée de Ghul puis de la Ligue des Ombres, etc.). Jamais Barbara n’effraie spectateur ou la prend au sérieux. Idem avec Fish Mooney, créée spécialement pour le show, impossible de la trouver crédible malgré de beaux moments mais trop rares pour être marquants. Quant à Tabitha, si son arrivée fut bénéfique à la série (en saison 2), son histoire d’amour improbable avec Butch et sa piètre évolution. Il est incompréhensible que les showrunners tardent à les tuer tant les trois sont décriées et conspuées sur la Toile. Butch, justement, in fine Solomon Grundy (Drew Powell) a quelques belles envolées mais reste, en moyenne, peu intéressant et, lui aussi, plutôt ridicule. Même son de cloche pour Hugo Strange, pourtant interprété par B.D. Wong, ce n’est pas forcément son écriture qui fait tâche mais ses mimiques et son côté low-cost, bizarre… Victor Zsasz (Anthony Carrigan) a un problème inverse : son comédien est plutôt bon et particulièrement charismatique mais le criminel suit une voie totalement improbable, surtout par rapport à sa version comics. Gueule d’Argile (Brian McManamon) est complètement sous-exploité alors qu’il apportait une certaine originalité et de multiples possibilités d’histoires, là aussi c’est dommage. Victor Fries (Nathan Darrow) était un peu soigné au départ (reprenant sa tragique romance) avant de devenir un antagoniste de seconde zone. L’inverse pour Ra’s Al Ghul (Alexander Siddig), dans un premier temps plutôt pitoyable pour le grand immortel avant de (re)venir sous forme spectrale et zombiesque terrifiante (mais de façon trop éphémère). Quant à l’Épouvantail, sa première mouture était passage mais la seconde (en quatrième saison) est particulièrement réussie et effrayante, bien qu’un peu trop en retrait.

ARTICLE EN COURS D’ÉCRITURE, SUITE PROCHAINEMENT…

Fin de saison 3, un classement par préférence d’arcs de saison avait été dressé puis mis à jour avec la quatrième saison, le revoici avec les liens vers les critiques.

1. Saison 03 – Seconde partie : Épisodes 15 à 22 (Heroes Rise)
2. Saison 02 – Première partie : Épisodes 01 à 11 (Rise of the Villains)
3. Saison 04 – Deuxième partie : Épisode 12 à 22
4. Saison 03 – Première partie : Épisodes 01 à 14 (Mad City)
5. Saison 04 – Première partie : Épisodes 01 à 11
6. Saison 02 – Seconde partie : Épisodes 12 à 22 (Wrath of the Villains)
7. Saison 01 – Seconde partie : Épisodes 11 à 22
8. Saison 01 – Première partie : Épisodes 01 à 11

 

Gotham – Saison 03 (Première partie : Mad City)

Page récapitulative de la série Gotham.

Mad CityVille folle ») est le nom du segment formé par les 14 premiers épisodes de la troisième saison. Critique de l’ensemble.

La série débute six mois après les évènements survenus à la fin de la deuxième saison, c’est-à-dire l’évasion des expériences du Docteur Strange, donc majoritairement des humains métamorphosés (des « monstres ») ou dotés de pouvoirs — mais également un clone aux cheveux longs de Bruce Wayne, nommé Five, pour 514A — du complexe souterrain secret situé sous l’Asile d’Arkham : Indian Hill. Certains ont été arrêtés par la police, d’autres par des chasseurs de prime, ce qu’est devenu Jim Gordon. Oswald Copplebot (Le Pingouin) compte bien aider la population de Gotham en offrant 1 million de dollars à qui trouvera Fish Mooney qu’il juge (à raison) à la tête de ces criminels en liberté. Le Pingouin reste lié d’amitié avec Nygma (toujours prisonnier à Arkham). Selina Kyle s’est à nouveau associée à Fish Mooney dont le costume et les acolytes proches sont plutôt ridicules.

La suite divise les arcs narratifs par groupes de personnages : Bruce et Alfred enquêtent que la Cour des Hiboux, James Gordon la joue solo avant de réintégrer le GCPD, Le Pingouin et Nygma s’associent pour gagner des élections, divers électrons libres (Barbara, Tabitha, Butch, Lee, Ivy…) naviguent ici et là sans réel intérêt. C’est là tout le problème de cette première partie de saison trois : il y a du très très bon et du très très moyen.

Commençons par les aspects négatifs de l’histoire. Le triangle plus ou moins amoureux Barbara/Tabitha/Butch est complètement risible, il faut absolument tuer tous ces personnages pour que la série s’en sorte grandie. Ivy devient une jeune femme par une pirouette scénaristique peu crédible et son parcours est, lui aussi, guère plausible (on a du mal à « croire » en ses pouvoirs, le rendu à l’écran sonne faux ; déjà qu’il ne passe pas très bien dans les comics parfois). La mère de Selina, qui débarque de nul part, est un prétexte ridicule pour ralentir l’intrigue principale (avec la Cour des Hiboux — on y revient plus tard). Autre élément complètement surréaliste : la relation entre Lee (l’ex de Jim) et Mario Calvi. Ce dernier n’est autre que le fils de Carmine Falcone ! Ça ne colle pas entre les deux et on voit tout de suite que le Mario « n’est pas net ». Au rang des improbabilités également : Isabella, le parfait sosie de Kristen Kringle, grand amour de Nygma, qui noue exactement la même relation avec lui… La même actrice incarne les deux rôles avec une couleur de cheveux différente. À la rigueur, l’explication d’une sœur jumelle aurait pu tenir la route mais là pas du tout (toutefois cet élément déclenche un segment du récit qui s’avère nettement plus intéressant — idem, on y revient plus tard). Victor Zsasz, le tueur récurrent, séduit nettement moins qu’au début de ces apparitions. C’est un « banal » criminel usant d’armes à feu. On ne le voit jamais se scarifier (l’essence même de cet antagoniste), il est devenu un simple homme de main (du Pingouin ou de Falcone, dommage). Dernier élément peu convaincant : le clone de Bruce Wayne, campé à nouveau par le même acteur (donc double peine car le jeu est vraiment pauvre).

Sur les aspects du scénario un peu plus « moyen », citons la fameuse Cour des Hiboux et l’enquête de Bruce, pas mal en retrait durant ces 14 épisodes, ce qui n’est pas plus mal. Pour l’instant tout reste assez brumeux sur les véritables enjeux (ce n’est pas très grave) mais à l’exception d’une quelconque « société secrète », la Cour n’apporte (pour l’instant) pas grand chose d’autres — si ce n’est le plaisir de la voir sur écran ainsi que les fameux ergots pour les fans des comics. De façon anecdotique, citons un équivalent de Man-Bat plutôt convaincant mais peu vu à l’écran.

Heureusement, beaucoup d’autres éléments sont réussis, voire très réussis. Tout d’abord Jim Gordon en roue libre en tant que détective privé/chasseur de prime. Cela réconcilie avec l’acteur qui délivre enfin davantage d’expressions faciales et apporte une certaine « coolitude » au personnage (qui en manque cruellement). Il entame une romance avec Valerie Vale, qui est, pour l’anecdote, la tante de Vicky Vale (le show ne l’indique pas). Lucius Fox a rejoint le GCPD en tant qu’expert scientifique car Wayne Enterprises est trop moralement corrompu selon lui, il remplace donc Nygma à ce rôle (et c’est très bien ainsi, Fox amenant un certain magnétisme à chacune de ses apparitions). L’excellent Barnes est toujours à la tête du GCPD justement, son évolution est passionnante et bien écrite. La venue de Jervis Tech, alias le Chapelier Fou, un hypnotiseur amoureux de sa sœur Alice, est aussi une excellente chose. Benedict Samuel (The Walking Dead) livre un charismatique ennemi emblématique de Batman. C’est d’ailleurs ce qu’aurait dû faire Gotham depuis le début : se concentrer sur des vilains peut-être « moins connus » mais les conserver plusieurs épisodes au lieu d’en créer des nouveaux ridicules ou le temps d’un épisode (comme dans la première saison). Tech occupe une place importante dans cette première salve d’épisodes et il est accompagné des frères Tweeds. Tout est respectueux des comics, rappelle bien sûr Alice au Pays des Merveilles mais aussi la saga de films Saw !

Autre bonne trouvaille de la série : Le Pingouin candidat à la mairie et Edward Nygma en chef de cabinet. Mais le futur Sphinx n’est pas dupe et complote en amont pour faire cavalier seul. Sa vraie-fausse amitié dévoile même son extrême ingéniosité (donc intelligence) et le pathos touchant de Copplebot. Celui-ci allant même jusqu’à lui déclarer… son amour ! Une approche audacieuse, révélant une bisexualité ou homosexualité du Pingouin très crédible car très bien écrite. Il est évident que ça ne plaira pas à tout le monde, cette originalité étant totalement inédite mais scie à merveille à Copplebot, toujours brillamment interprété par Robin Lord Taylor. Le tournant de la relation ambigüe entre les deux (le meurtre du fameux sosie de Miss Kringle) permet d’admirer le jeu de Cory Michael Smith (Nygma), sombrant à nouveau dans cette étrange folie. Le duo devient l’une des forces du show, clairement. Il est d’ailleurs important de relever la fragile frontière qui sépare les fous (d’Arkham) des criminels (enfermés à Blackgate). Il est bien difficile de retranscrire cela dans les comics parfois (à commencer par le personnage du Joker par exemple). Ici, Gotham traite avec un bon équilibre cet aspect. De la même manière, il y a de bonnes notions (entamées la saison précédente), de justice et de vengeance. Avec des poncifs parfois un peu cliché mais qui restent efficace.

On apprécie également le rendu de la ville, jonglant entre la burlesque métropole gothique des films de Tim Burton et la folle inspiration « réelle » héritée de la trilogie de Nolan. Gotham étant un lieu où converge les pires des ordures dans des lieux sales et malfamés mais où vivent également le gratin de la ville, fortunés et influenceurs.

Mais le grand atout de ces nouveaux épisodes est le retour de Jérôme, le fameux « proto Joker » charismatique et passionant. La résurrection dudit Jérôme, parfaitement incarnée par Cameron Monaghan, est certes « facile » (la série ne s’embête pas à jongler entre les invraisemblances du registre thriller, fantastique et science-fiction pour que ça l’arrange) mais apporte un regain d’intérêt. Si les prestations des quelques épisodes où il était aperçu ne convainquaient qu’à moitié, cette fois c’est la bonne : toute la folie et l’intelligence du (futur) Clown du Crime est délicieusement fascinante. Les auteurs (incluant le showrunner et créateur de la série Bruno Heller, connu pour The Mentalist et Rome) ont même scrupuleusement respecté certains comics récents, où le Joker avait son visage complètement enlevé. Un régal ! La suite de ses aventures stimule nettement plus que celles de Bruce et Jim. Gotham a toujours davantage passionné par son écurie d’ennemis que ses héros.

Les nombreux points positifs gomment les autres (nombreux également) négatifs. Il est toujours dommage, arrivé à plus de deux saisons et demi, de constater que la série continue de se chercher sur quelques aspects, toujours dans cette volonté de séduire un « large public » ou des « spectateurs non connaisseurs de Batman ». Les audiences baissent, on ignore la corrélation avec l’écriture du show qui gagne en maturité et en qualité tout en étant plombé par des sous-intrigues et personnages secondaires dénués d’intérêt. Heureusement, le Chapelier Fou, le Pingouin, Nygma et Jérôme permettent d’y trouver un plaisir non négligeable et une certaine tension qui continue de donner envie de voir la suite !