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Batman – New Gotham | Tome 02 : Un homme à terre

Batman New Gotham Gordon

New Gotham est une série de trois tomes se déroulant après la saga No Man’s Land (mais il n’est pas obligé de l’avoir lu pour découvrir ce nouveau run). Elle est principalement scénarisée par Greg Rucka, bénéficie d’un style graphique particulier et se focalise sur Gordon et Batman. Critique du second tome, Un homme à terre, qui contient douze chapitres répartis en deux parties bien distinctes.

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[Histoire]
Le volume se scinde en deux parties. La première (Turning Points en VO) propose cinq chapitres indépendants se déroulants à différents moments importants dans la mythologie de Batman, donc bien avant le fameux No Man’s Land (NML) — à l’exception du dernier chapitre. Cette partie permet d’introduire pus efficacement la seconde (Batman : Officer Down en VO, donc Un Homme à Terre en VF) : un chapitre de sept séries différentes pour suivre un protagoniste de l’univers de Batman après les évènements du NML.

Première partie – Turning Points (5 chapitres)

Jusqu’à ce que la mort nous sépare
Scénario : Greg Rucka | Dessin : Steve Lieber

[Se déroule juste après Année Un]
Gordon vient de se faire quitter par sa femme, Barbara, repartie vivre à Chicago avec leur fils James Jr. En cause : la vie à Gotham City et la relation infidèle entre Essen * et Gordon. Dans la foulée, le « capitaine » Gordon doit gérer une prise d’otage dans une église pendant un mariage. Batman, qui fait alors ses premiers pas de justicier, essaie d’aider tout en ayant l’approbation de Gordon.

Batman New Gotham Turning Points

D’une génération à l’autre, comme un cancer
Scénario : Ed Brubaker | Dessin : Joe Giella

[Se déroule entre Amère Victoire et Robin : Année Un]
Gordon apprend que Batman a un allié adolescent et n’approuve pas que ce jeune garçon soit en danger permanent. Mais le policier est amené à le rencontrer lors d’un affrontement face à Mister Freeze et va changer d’avis…

Batman Robin Turning Points

Hanté
Scénario : Ed Brubaker | Dessin : Dick Giordano

[Se déroule après Killing Joke et Un Deuil dans la Famille]
Un tueur en série du nom de L’Éboueur a assassiné une troisième personne dans Gotham City. Mais Batman laisse la police s’en charger, préférant utiliser d’autres cibles avec de nouvelle méthodes : plus furtif, plus violent et s’éclipsant rapidement après une action. Violence et solitude comme il le résume lui-même.

Gordon Batman New Gotham

Transformations
Scénario : Chuck Dixon | Dessin : Brent Anderson

[Se déroule durant Knightfall, lorsque Jean-Paul Valley reprend le costume de Batman]
Face aux agissements de plus en plus en violent et à la radicalité de Batman, Gordon soupçonne que ce ne soit plus le même homme sous le masque. Robin ne l’aide pas et le policier est contraint de se tourner vers Bane, emprisonné à vie.

Batman Azrael New Gotham

(Conclusion) Aussi vieux que les étoiles
Scénario : Greg Rucka | Dessin : Paul Pope

[Se déroule peut après No Man’s Land]
Un homme revient à Gotham City après plusieurs années en compagnie de sa femme et sa fille. Il souhaite voir Gordon et Batman. Ces deux derniers sont en charge de surveiller des personnes pouvant être la cible d’un attentat.

Batman Gordon New Gotham

Seconde partie – Un Homme à Terre / Batman : Officer Down (7 chapitres)

C’est l’anniversaire de Jim Gordon. Le policier fête cela dans un bar avec ses collègues et reparle de l’importance de leur métier, leur pouvoir de privatisation de la liberté de quelqu’un et l’obligation de se souvenir que chaque personne arrêtée a une famille. En rentrant chez lui pour retrouver sa fille Barbara, il croise Catwoman dans une ruelle et se fait tirer dessus. Trois balles dans le dos. Un homme à terre.

Le femme féline est vite suspectée et recherchée tandis que la police peine à trouver des témoins ou à retrouver Catwoman. La Bat-Family (Nightwing, Robin, Azrael et Batgirl) se réunit autour d’Oracle en attendant les consignes de Batman, fou de rage quand il apprend la nouvelle. Qui a tiré sur Gordon ? Celui-ci va-t-il s’en sortir sans séquelles ?

Batman New Gotham Gordon GCPD

[Critique]
Voilà un tome qui va clairement rejoindre les coups de coeur voire… les indispensables des comics sur Batman ! Un livre qui peut se lire en totale indépendance de la saga No Man’s Land mais aussi de la série New Gotham ! Il n’y a d’ailleurs quasiment aucune connexion directe ou importante avec ces précédentes histoires (en tout cas rien d’obligatoire à connaître pour ne pas prendre de plaisir pour découvrir Un Homme à Terre). En revanche, il faut connaître les « incontournables » pour totalement apprécier la première partie de l’ouvrage (Turning Points), sur laquelle on va s’attarder quelque peu.

Si cette bande dessinée frôle en effet la perfection, c’est parce qu’elle [dans Turning Points donc] vient apporter des pièces de puzzle aux récits forts du Chevalier noir : Année Un, Amère Victoire, Robin : Année Un, Killing Joke, Un Deuil dans la Famille, Knightfall… Tous les moments blessant psychologiquement (et physiquement) Gordon et Batman se retrouvent donc entremêlés à de courtes histoires (dont la dernière rejoint la première de façon élégante et « boucle ainsi la boucle »). Ces cicatrices de combat que portent les deux hommes se répercutent à travers d’efficaces monologues alternés entre les deux. Une narration croisée qui rappelle les meilleurs moments des comics sur Batman, qui plus est dessinée avec un grand respect des styles de l’époque !

Batman New Gotham Oracle Bat Family

La seconde partie du tome, les sept chapitres formant donc l’arc Un Homme à Terre, est tout aussi réussie. L’histoire est digne d’un bon polar (difficile de trouver le coupable, un chouilla dommage que le lecteur ne le connaisse pas « vraiment » en amont). Plusieurs scénaristes officient à tour de rôle (comme pour la première partie) mais les connaisseurs reconnaîtront indéniablement le style de Greg Rucka (qui officiera ensuite sur l’excellent Gotham Central en reprenant justement l’univers qu’il met en place ici, celui centré sur la police de la ville) et Ed Brubaker (qui travaillera sur le même projet).

L’étonnant retrait de Batman durant l’enquête pour retrouver l’agresseur de Gordon est l’un des rares points un peu étrange de l’histoire. Il le dit : ses alliés sont capables de s’en sortir. Mais cette inactivité a des conséquences inattendues, à commencer par un sévère conflit avec… Alfred ! On peut ajouter le côté déjà-vu et un peu cliché sur les réflexions sur les notions de justice et vengeance mais elles sont réalistes et donc pas distrayantes pour autant. Le duo Allen/Montoya est particulièrement mis en avant et fédère immédiatement de l’empathie (dans la droite lignée de ce qu’on a aperçu dans NML pour Montoya et Évolution pour Allen). Qui plus est, comme évoqué plus haut, on tient là un tome quasiment indépendant qui vient compléter d’anciens récits et proposer une histoire one-shot axée sur Gordon. Aucune raison de s’en priver !

Batman New Gotham Alfred

Seule ombre au tableau : l’armée de dessinateurs différents qui s’occupent de ces sept chapitres. Deux d’entre eux sont plutôt faiblards : cases aux fonds colorés unis, visages parfois caricaturés… Rien de trop désagréable mais on peut tiquer (un peu) sur cet aspect. Le reste est vraiment brillant, on ne peut que conseiller ce tome, sans obligation d’avoir lu le premier ou No Man’s Land (mais idéalement les récits incontournables dans la chronologie du Dark Knight). L’ensemble apporte une pierre non négligeable à la mythologie du Chevalier Noir.

Batman New Gotham Catwoman Azrael

 

[À propos]

Publié en France en septembre 2017.

Contient en VO / Titres des chapitres :
– Batman Turning Points #1-5

Un Homme à Terre (7 chapitres)
– Batman #587 : voici vos droits
Scénario : Greg Rucka | Dessin : Rick Burchett
– Robin #86 : derrière les lignes
Scénario : Ed Brubaker | Dessin : The Pander Brothers
– Birds of Prey #27 : armé et dangereux
Scénario : Chuck Dixon | Dessin : N. Steven Harris
– Catwoman #90 : l’arme du crime
Scénario : Bronwyn Carlton | Dessin : Michael Lilly
– Nightwing #53 : incriminant
Scénario : Devin Grayson | Dessin : Rick Burchett
– Detective Comics #754 : le monstre dans la boîte
Scénario : Nunzio DeFilippis | Dessin : Michael Collins
– Batman:Gotham Knights #13 : conclusion
Scénario : Greg Rucka | Dessin : Rick Burchett

Traduction : Alex Nikolavitch
Lettrage : Moscow ★ Eye

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Batman – New Gotham | Tome 01 : Évolution

Batman New Gotham

New Gotham est une série de trois tomes se déroulant après la saga No Man’s Land (mais il n’est pas obligé de l’avoir lu pour découvrir ce nouveau run). Elle est principalement scénarisée par Greg Rucka, bénéficie d’un style graphique particulier et se focalise sur Gordon et Batman. Critique du premier tome, Évolution, qui contient douze chapitres de la série Detective Comics : du #742 à #753).

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[Histoire]
Au lendemain de la fin du no man’s land, Gotham est à la reconstruction. Gordon, toujours endeuillée par la mort de sa femme par le Joker, reprend du service au GCPD. Batman veille et arpente sa ville…

La recrudescence du crime organisé complexifie la situation. Le commissaire et le Chevalier Noir mènent l’enquête sur un meurtre d’un policier récent. Les indices conduisent à un certain Vassili Kosov de la mafia russe.

Mais dans l’ombre, Ra’s Al Ghul dirige un plan secret, aidée de sa complice « Murmure De Défi »…

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[Critique]

Évolution est un tome très moyen, aussi bien sur son travail scénaristique (Rucka fut plus inspiré dans No Man’s Land et le sera davantage peu après dans Gotham Central) que graphique (sur lequel on s’attardera plus tard). S’il n’est nul besoin d’avoir lu la saga No Man’s Land (NML) pour apprécier ce premier volet (sur trois) de New Gotham, des références explicites ou non à cette ancienne situation particulière * apparaissent de nombreuses fois. À commencer par la dissociation entre les V.G. (Vrais Gothamiens) et les DEZ (Déserteurs) — dont est affublé Bruce Wayne — qui revient régulièrement et donne naissance à divers conflits. Malheureusement, ceux-ci ne seront pas exploités convenablement.

Le livre se scinde en effet en plusieurs parties et à peu près quatre fils rouges narratifs répartis sur douze chapitres. Le plus important, qui occupe plus de la moitié de l’ouvrage, est la relation entre Batman/Bruce et « Murmure de Défi » (sic). Cette dernière sert donc Ra’s Al Ghul, peu présent in fine. Son plan n’est pas très clair et les nombreux protagonistes issus de mafias et gangs différents n’aident pas du tout à la compréhension. Pire : les transformations en serpent ou en loup des sbires de l’immortel ennemi du Chevalier Noir cassent l’ambiance « hard boiled » qui était pas mal instaurée. C’est à dire un côté polar, urbain et relativement noir (à l’instar de la série Gotham Central, plus aboutie, du même Rucka). Les autres arcs sont plus captivants mais durent moins longtemps. L’un englobe ce qu’on voit en filigrane tout au long du récit (avec quelques mises en avant de temps en temps) : le retour de Gordon (endeuillé), la vie des flics (Crispus, Bullock, Montoya…), la politique à Gotham (un maire peu populaire), etc. bref, ce qui peut clairement se nommer « l’après NML ».

 Batman New Gotham

Batman New Gotham

Toujours dans cette optique post-NML, une histoires s’attarde sur Montoya et sa relation avec Harvey Dent/Double-Face (ce dernier étant tombée sous le charme de la policière dans NML) puis la lecture d’un comic-book écrit et dessiné par Dent lui-même le met en scène dans des aventures héroïques (un côté clairement WTF assumé et amusant). Enfin, pour conclure sur cet après NML, on retrouve Poison Ivy qui avait élu domicile dans un parc végétal durant un an où plusieurs orphelins l’avaient rejoint (pendant le no man’s land donc). On récapitule les quatre récits qui s’entrecroisent : Batman contre la mafia et Ra’s Al Ghul via sa sbire « Murmure De Défi », Gordon et ses équipes dans un Gotham qui se reconstruit, Montoya et sa relation ambigüe avec Harvey Dent et enfin Poison Ivy condamnée à quitter un parc où elle n’a jamais blessé ou tué qui que ce soit.

Comme évoqué, toute la partie avec « Murmure De Défi » occupe une place prédominante (la première moitié du livre puis un retour entre deux autres histoires). Celle-ci est plutôt frustrante car l’on retrouve un Batman axé en mode détective (même si pas mal de choses restent confuses dans les résolutions d’énigmes, les nombreux noms de mafieux…) mais avec des problèmes scénaristiques flagrants : manque d’empathie pour « Murmure De Défi » (ce nom…), transformations en animaux surréalistes, manque de clarté sur les enjeux et le plan à long terme de Ghul.

New Gotham Bullock

Du côté des graphismes, pas de demi-mesure : ça passe ou ça casse. Deux aspects à prendre en compte, une sur laquelle il est assez simple de faire l’unanimité : la colorisation, effectuée intégralement par le studio Wildstorm FX, qui est excellente puisqu’elle se concentre sur une couleur seulement par chapitre, le reste étant en nuances de gris ou de bleu. Ainsi on retrouve beaucoup de planches mélangeant une couleur froide principale (du bleuté) avec des variations colorisées d’une couleur chaude (orange, rouge…). Presque bichrome donc, ce pari graphique audacieux est réussi (rappelant parfois brièvement Sin City). Malheureusement, le second aspect sur lequel on est plus critique est tout simplement « le dessin ». Huit chapitres sur douze sont ainsi signés par Shawn Martinbrough. Ses traits anguleux et gras (pas tout à fait cartoony quand même mais presque — cf. les nombreuses images d’illustrations de cette critique), manquent cruellement de détails et ressemblent à des brouillons, fan-arts ratés ou des résumés grossiers. L’ensemble (dessins et couleurs) se rejoignent plutôt bien mais on tique quand même devant trop de cases pour apprécier le tout et être émerveillé. Dommage, il y avait clairement un coup à jouer. Heureusement, les quatre chapitres restant sont dessinés par quatre autres artistes et sont nettement plus réussis, ancrés dans un certain réalisme et plutôt élégant, avec toujours ce même jeu de couleur quasi bichromique qui sert à merveille l’ouvrage.

Anecdotiquement, sur le plan éditorial, on sera aussi rebuté par une police d’écriture assez illisible, choisie le temps de quelques planches. Trop de poins négatifs donc, pour véritablement apprécier Évolution. Mitigé aussi par quelques incohérences d’écriture qui sautent aux yeux. Par exemple, Bruce Wayne est affublée par Lucius Fox d’une garde du corps (Mlle Bordeaux). Sans tomber dans un sexisme primaire, on peut s’étonner de ne pas avoir choisi plutôt un voire deux hommes robustes pour ce travail. Peu importe, cette mise en situation inédite pourra déboucher sur des scènes intéressantes (à voir ce que donnera le tome deux). Seulement, dès l’arrivée de cette garde du corps, Bruce s’éclipse de son bureau juste devant elle et ressort peu après en Batman devant les fenêtres. La jeune femme est surprise mais ne fait pas le lien entre le milliardaire et le justicier…

Ras Al Ghul New Gotham

Il faut reconnaître à Rucka quelques idées novatrices ou en tant cas plutôt intéressantes. Wayne apparaît beaucoup en civil, décrit comme un homme à femme et un type maladroit. C’est quelque chose qu’on voit de moins en moins dans les comics sur Batman, c’est donc tout à fait plaisant de (re)trouver cela. On se focalise à nouveau sur lui et Gordon, un peu comme à l’époque d’Année Un, récit initiatique des (nouvelles) origines du Chevalier Noir. Ce retour aux sources parsème Évolution, durant lequel les autres figures d’alliées résonnent par leur absence notoire : quid de toute la Bat-Family qui peuplait NML ? Même Alfred n’officie qu’en figurant le temps de quelques cases.

Un premier tome plutôt moyen, avec des partis pris graphiques et scénaristiques alléchants mais pas forcément bien exploités ou finalisés. À suivre dans les deux volets suivant…

Batman New Gotham

* À noter également, des références aux évènements survenus dans La Tour de Babel et un affrontement avec Hugo Strange mentionné (on ignore de quelle histoire précise il s’agit, peut-être La Proie de Hugo Strange).

Gordon Bullock New Gotham

[À propos]
Publié en France chez Urban Comics le 16 juin 2017.
Publication originale en 2000 à 2001 dans Detective Comics #742 à #753.

Titres des chapitres :
Honneur à nos morts [DC#742]
Évolution (Chapitre 1 à 4) [DC #743-746]
– Évolution I : Murmures dans les Ténèbres
– Évolution II : Unité de but
– Évolution III : Les Lois du Pays
– Évolution IV : Arrière-goût
– Joie-deux Anniversaire
[DC #747]
Rénovation Urbain (Chapitre 1 à 2) [DC #748-9]
Dépendance [DC #750]
Balade dans le Parc (Chapitre 1 à 2) [DC#751-2]
Les Aventures de Copernic Dent [#DC 753]

New Gotham Batman

Scénario : Greg Rucka
Dessin : Shawn Martinbrough | John Watkiss (+ DC #745-6), William Rosado (DC #747), Phil Hester (DC #748-9), Steve Mannion & Brad Rader (DC #753)
Encrage : Steve Mitchell | Hilary Barta & John Lowe(DC #753)
Couleurs : [Studio] Wildstorm FX
Traduction : Alex Nikolavitch
Lettrage : Moscow ★ Eye

Poison Ivy New Gotham

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Bruce Wayne Murmures de defi new gotham  Gordon Batman New Gotham

Ci-dessous, deux exemples des « transformations animales » de deux personnages…

New Gotham Snake  New Gotham Wolf Lycanthrope

No Man’s Land – Tome 06

No Man’s Land est une longue saga constituée de plusieurs tomes : le volume unique Cataclysme, qui en était l’introduction, puis le récit « principal » de No Man’s Land en six tomes et, enfin, New Gotham en trois volumes. Voir la page récapitulative si besoin.
Afin d’établir des résumés et critiques plus visibles qu’un gros bloc reprenant l’ensemble de l’ouvrage, celles-ci sont divisées par les différentes (petites) histoires qui composent le tome. Le résumé est en italique sous le titre et la critique est précédée d’une petite flèche.

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Ground Zero
scénario : Jordan B. Gorfinkel / Greg Rucka | dessin : Greg Land
Batman : No Man’s Land #0

La vie à Gotham et, surtout, celle de Bruce avant le décret définitif du no man’s land. Le milliardaire est alors en excursion européenne (à Monaco) pour « jouer » le playboy mais il déteste ça. Huntress, quant à elle, profite de l’absence du Chevalier Noir pour arborer un nouveau costume, celui de Batgirl (sans l’accord donc de Batman). Elle adore la puissance que lui procure son alias héroïque et la peur qu’elle peut instaurer avec. Mais Wayne est bien décidé à revenir dans SA ville et utiliser ses planques, des mini « batcaves » qu’il a conçu dans tout Gotham suite à sa défaite face à Bane quelques temps avant (cf. Knightfall). L’occasion pour lui d’observer également les premiers pas de Huntress en tant que Batgirl pour juger si elle est apte à le porter.

Bruce Wayne No Mans Land

► Retour aux débuts de la saga avec ce chapitre introductif assez long et plutôt plaisant. Il vient répondre à plusieurs interrogations : l’état de Wayne quand il n’était pas à Gotham (une visite de Talia As Ghul et une agression physique semblent avoir déclenché la motivation du milliardaire pour revenir) et l’évolution de Huntress en Batgirl avec Batman qui le sait dès le début (ce qu’on pouvait suivre durant les premiers tomes et qui était un mystère de prime abord puisqu’on ne savait pas qui était cette nouvelle Batgirl). L’occasion de voir l’ennemie Ferak, copie conforme de Poison Ivy en version plus « mutante » (et forte à priori). Logique : c’est une plante créée par Ivy nous apprend Wayne.

Batgirl No Mans Land

Certains détails sont également pertinents, outre le traumatisme de la défaite face à Bane, régulièrement rappelée, le choix d’une autre ceinture, comportant plus de pochettes, est le genre d’anecdote continuant à contribuer à un certain « réalisme » dont nous fait part la saga depuis le début. Une bonne chose donc. En bref, ce Ground Zero se veut comme une bonne introduction, rappelant le chemin parcouru depuis le début et dynamitant d’entrée de jeu ce sixième et ultime tome.

Idylle de Plomb
scénario : Chuck Dixon | dessin : Scott McDaniel
Nightwing #38-39

Dick Grayson est toujours en convalescence chez Barbara Gordon. Les deux anciens amants ont une nouvelle relation particulière… En même temps, des soldats semblant appartenir au GCPD attaquent le repaire d’Oracle.

Barbara Dick Oracle Nightwing

► Ces deux chapitres centrés sur Nightwing permettent de voir son évolution aussi bien d’un point de vue sentimental (avec Barbara et… Huntress !) que physique (la tour de l’horloge est hors-service). Sans temps mort et avec des dialogues plutôt convaincants, Idylle de Plomb pêche par ses graphismes trop cartoony et aux traits bien trop gras (avis aux amateurs d’Ed McGuiness, le style de McDaniel s’en rapproche). Côte super-héroïne costumée, on a bien du mal à comprendre les motivations de Huntress puis son soudain revirement de situation. Le « flic » Petit reste quant à lui fidèle au personnage déjà croqué en amont dans de précédents tomes. Un petit scénario intéressant donc, mais une faiblesse au niveau des dessins.

Une curieuse alliance / Dettes
scénario : John Ostrander | dessin : Jim Balent
Catwoman #76-77

Le Pingouin a récupéré Catwoman, blessée et affaiblie. Lorsqu’elle se réveille, Copplebot lui propose une alliance : elle travaille pour lui et il la paie très cher. Sa mission : voler les biens de Luthor qui a débarqué dans Gotham et est bien préparé à chambouler la ville et la rebâtir à sa façon.

Catwoman Le Pingouin No Mans Land

► Deux chapitres résolument modernes dans leur traitement graphique (avec une superbe couverture pour le numéro #76) et scénaristique. Il faut se remémorer le tome 3 de No Man’s Land pour retrouver Mercy, l’une des ennemies de Catwoman mais, surtout, une des fidèles alliées de… Luthor. Elle sera au centre de la seconde partie (la moins réussie) et permettra une revanche originale à Kyle. Une conclusion avec Deadman achèvera ce deuxième chapitre d’être vraiment « moyen ». Cela ne gâche pas la qualité de l’ensemble puisque la première partie est excellente, on y trouve une Catwoman maline, sexy (il n’y avait pas besoin de rendre ses seins énormes et de la montrer presque nue, dommage…), espiègle et indépendante. Toute l’essence du personnage est là, tiraillé entre « le bien et le mal » (qu’on retrouve aussi sur la fin). En bref c’est la conclusion de l’arc sur Catwoman, une histoire globalement bien écrite et dessinée. Quelques écarts fleurant avec le registre fantastique ou le voyeurisme gratuit mais une jolie performance où tous les ingrédients clés de la féline voleuse ont été réunis : relation ambigüe avec Batman, collaboration avec l’ennemi, traîtrise et manipulation, combats intenses, solitude et tristesse, etc. Un récit très marquant dans la mythologie des comics sur Catwoman.

Le Monde de l’Autre Côté
scénario : Chuck Dixon | dessin : N. Steven Harris
Robin #73

Jack Drake, père de Timothy, a joué de ses relations pour médiatiser la disparition de son fils perdu dans Gotham City. Batman voit cette soudaine mise en avant de la ville dans la presse de bonne augure, permettant d’accélérer les mouvements et décisions politiques liés à l’évolution du no man’s land. Tim (Robin) vit très mal cette médiatisation mais ne sait comment réagir face à la détresse de son paternel. Des agents fédéraux sont missionnés pour s’infiltrer dans Gotham et récupérer Tim.

Robin No Mans Land

► On continue de conclure les arcs par personnage. Ce chapitre sur Robin est plutôt prévisible et, surtout, pas très bien colorisé — à priori en numérique (c’était les prémices de cette technique) — tout est « fade » et presque uniformisé, dommage… Ce n’est clairement pas la meilleure histoire du tome, elle nécessite d’ailleurs un petit épilogue. Mais, et c’est là l’importance, on « sent » que pour la mythologie du troisième Robin, il y a un certain cap de franchi (qui s’accroîtra, cinq ans plus tard, dans l’excellent Crise d’identité).

Évacuation
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael : Agent of the Bat #60

Azrael et Batgirl sont chargés d’affronter le Joker par Batman.

Joker Azrael

► Un autre arc qui ne va pas tarder à se terminer, en tout cas on l’espère vu la fin risible de ce chapitre. Seul intérêt : l’alchimie éphémère entre la nouvelle Batgirl quasiment muette et Azrael. C’est sans réel surprise ni même intérêt, dommage… Qui plus est la majorité des fonds de case de couleur uni n’aident pas à rendre cette histoire plus palpitante et prenante malgré la présence du Joker.

Tour de Passe-Passe
scénario : Greg Rucka | dessin : Sergio Cariello
Batman #573 | Detective Comics #740

312ème jour du no man’s land : Luthor annonce en fanfare ses travaux pour reconstruire Gotham. Il trouve inacceptable et moralement condamnable ce qu’il s’est passé. Sans surprise, le Chevalier Noir n’en croit pas un mot et devine de sombres desseins derrière cet altruisme louche. Robin est chargé de surveiller Huntress et Petit (un ancien flic devenu très radical). Luthor peut compter, lui, sur les services de Bane pour assurer sa sécurité, que ce soit face à Batman mais aussi face… au Joker !

Batman vs Luthor

► Nettement plus passionnant que les derniers chapitres, ces deux nouveaux redonnent un coup de fouet à l’intrigue général avec la rivalité entre Luthor et Batman, les plans de chacun d’eux, la place de Bane dans tout cela, etc. Les dimensions politiques et économiques occupent davantage une place centrale, malgré quelques éléments confus. On notera aussi un amusant jeu de rôle entre Batman et Barbara appelant Lucius Fox, sous l’identité de Bruce et d’une masseuse. Graphiquement réussi (traits précis, cadrage hors-norme, découpage rythmé…) on apprécie aussi les séquences avec le Joker et le Pingouin, même si les « conclusions » avec ces deux derniers sont un peu expéditives.

On retrouve aussi un problème de cohérence puisque Robin (Timothy Drake) est présent ici alors qu’il a été évacué hors de la ville deux chapitres plus tôt (il s’agit en fait d’une curiosité éditoriale puisqu’il aurait sans doute fallu placer le chapitre sur Robin plus tard mais cela gâcher certainement la lecture de l’ensemble — le dernier chapitre du livre confirme que Tim fait des allers-retours dans la ville, ce qui n’était pas réellement explicite ici ; pourquoi pas). De la même manière, en étant pointilleux, on a du mal à comprendre pourquoi Luthor continue de s’adjoindre des services de Mercy plus qu’elle enchaîne défaite sur défaite sans que cela énerve son patron. Cette dernière a d’ailleurs l’occasion de tuer le Joker mais ne le fait pas préférant le laisser fuir car il a sans doute « compris le message » (sic) !

Fin de partie
scénario : Greg Rucka / Devin Grayson | dessin : Damion Scott / Dale Eaglesham
Batman : Legends of the Dark Knight #126 | Batman #574 | Detective Comics #741

Un mois. C’est le délai qu’il reste aux (derniers) habitants de Gotham pour rebâtir la ville pour que le décret no man’s land soit levé. Avec approbation du président des États-Unis, Lex Luthor s’occupe en grande partie de cette reconstruction. Les médias sont braqués sur lui, son image est extrêmement positive. En plus de LexCorp, Bruce Wayne Enterprises met évidemment aussi du sien, ainsi que les labos S.T.A.R., le Corps des Ingénieurs de l’Armée (et les citoyens de la ville). L’espoir renaît. Dans l’ombre, le Joker est irrité que ça évolue en ce sens : fini l’anarchie et les territoires contrôlés par des fous furieux. Dans Gotham, Noël se prépare…

Huntress no mans land

Douce nuit, sainte nuit… Tendre et à point puis Cet enfant sur la paille endormi sont les titres de ces trois chapitres qui se lisent d’une traite et se suivent directement. Huntress (en pleine rédemption) surveille Billy Petit, sombré dans la folie et paranoïa – en découlera le second chapitre, particulièrement réussi et haletant (un plan habile du Joker, un peu invraisemblable mais ça passe, un Petit dépassé et effrayant et une Huntress extrêmement touchante) -, la plupart des ennemis sont en prison ou peu dangereux (la chute du Pingouin, bien que soudaine, en est un bon exemple), seul le Joker reste donc LE fou furieux à arrêter en dernier parmi la galerie de vilains. Sur ce point, les dernières planches sont glaçantes. Toute la folie du Clown du Crime est montrée « à nouveau ». Bien sûr, l’ennemi revient souvent, mais il « marque » rarement la mythologie du Chevalier Noir dans des histoires qui laissent trace, à l’exception de la mort de Robin. Et bien, là aussi il tue un personnage (secondaire certes, mais important). Le Joker retrouve donc de « sa superbe » tout en étant détestable au plus haut point. Si No Man’s Land était déjà assuré de laisser une trace marquante dans la chronologie (et l’histoire) de Batman, cet ultime meurtre et méfait du Joker définit comme « culte » cette saga, ou tout du moins sa conclusion. Difficile de ne pas être touché, ému ou choqué en voyant certaines cases et les scènes qui suivent le crime. Le plaisir sadique du lecteur est aussi « récompensé », car il apparaissait surréaliste, dans le contexte extrêmement violent, perdu et sauvage de la ville, qu’il n’y ait pas plus de victimes (parmi les protagonistes connus) que cela (pas mal de figurants le sont tout de même). Seul reproche de cette fin de partie : la non-homogénéité des dessins. Il est normal d’avoir plusieurs dessinateurs différents (ici deux) dans ce genre de cas (3 chapitres de 3 séries différentes) mais les deux ont un style tellement différents que ça casse un peu l’immersion. Eaglesham va dans le réalisme pur et sale, là où Scott a un trait plus « cartoony », un chouilla dommageable mais ça passe quand même vu que le scénario prend le dessus aisément.

Dons de l’esprit
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael : Agent of the Bat #61

Prolongement de Fin de partie en adoptant cette fois le point de vue d’Azrael et Batgirl, missionné par Batman pour retrouver les bébés kidnappés par le Joker. Le nouveau duo de justiciers en profite pour découvrir les traditions de Noël.

Batgirl Azrael

► Si les errances de Jean-Paul Valley ont toujours été un peu redondantes voire ennuyeuses, celles-ci, proposées comme les dernières (pour cette saga) sont plutôt plaisantes. On a clairement envie de savoir ce que va donner la relation Cassandra Cain/Jean-Paul Valley. Ce dernier contraste toujours autant avec l’univers « classique » de Batman mais c’est suffisamment bien écrit (dans ce chapitre) pour qu’on soit pris d’empathie pour le presque schizophrénique justicier. Placer cette histoire après les trois chapitres précédents est un peu dommage (elle « dévoile » le plan du Joker mais aurait pu s’insérer avant, quitte à casser la dynamique de Fin de partie au moment où celle-ci se déroule, pour mieux clore l’ensemble avec la conclusion épique et tragique qu’on vient juste de lire avant).

Ce n’est qu’un au revoir
scénario : Greg Rucka | dessin : Pablo Raimondi
Batman : Shadow of the Bat #94

31 décembre, dernier jour de l’année, dernier jour du no man’s land, un enterrement se déroule à Gotham City… Puis Batman et Oracle reprennent le travail, il apparaît que Luthor a mené habilement son jeu puisqu’il a racheté des propriétés de la ville pour 0,4% du prix du marché en trafiquant des documents. Mais Bruce Wayne était sur le coup grâce à Lucius Fox.

Batman VS Lex Luthor

► Conclusion douce-amère de toute la grande saga No Man’s Land. Touchante mais avec quelques éléments pas forcément tout à fait résolus (on ignore si Luthor est réellement à l’origine du cataclysme, ce qui était sous-entendu à une époque). Le reste semble assez « classique » pour une fin et un renouveau mais efficace pour conclure ce dernier tome : on y retrouve chaque héros, quelques choix finaux (Dick se dirigeant vers Helena plutôt que Barbara), des cases sans texte, etc. Et ça fonctionne suffisamment pour avoir eu le sentiment de lire un grand arc maîtrisé.

Conclusion : C’est un peu de cliché de dire que cette fin est avant tout un nouveau départ mais c’est assez vrai (la « suite » se nomme New Gotham et est à découvrir en trois tomes). Nettement plus passionnante que Knightfall, à qui elle est souvent comparée, cette très longue histoire aura eu le mérite d’apporter un statu quo extrêmement original et une plongée dans la survie et l’anarchie pour bon nombre de protagonistes. Un quasi retour à l’ère « primitif » avec une qualité d’écriture plutôt élevée malgré un côté « stagnant » régulier. Certains épisodes se révélant (forcément) moins passionnants que d’autres (Azrael, une partie de ceux de Catwoman et Robin sont parfois de moindre intérêt) mais la majorité se lit avec plaisir. On pense notamment aux évolutions des héros (Huntress et Batgirl), aux doutes des autres (Batman en premier) et aux folies des ennemis plus ou moins connus, avec le point d’orgue de ce volet grâce au Joker. Ce qui est à déplorer relève des dessins : une armée d’artistes différents livrent (forcément bis) un ensemble hétérogène. Si on se prête à nouveau au jeu de la comparaison, on observe que les planches de No Man’s Land vieillissent bien mieux que celles de Knightfall, elles sont plus modernes et même si parfois les styles sont radicalement différents, l’ensemble reste cohérent.

Difficile donc de trouver les « bons mots » pour évoquer six tomes (sept en vrai), même s’ils ont été lus « à la suite » (vivement recommandé), il y a sans doute quelques éléments qui peuvent échapper au lecteur (et au critique) mais le ressenti général est vraiment possible. Bien sûr, comme souvent, tout n’est pas parfait. C’était évoqué plus haut : peu de morts « réelles » parmi les emblématiques personnages de la mythologie de Batman, une année complète en no man’s land qui paraît surréaliste mais paradoxalement fascinante. Il y a un avant et un après cette saga qui est considérée comme culte à juste titre. C’est donc un gros coup de cœur et un conseil de lecture indispensable. Les deux derniers tomes sont sans doute les plus réussis !

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