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No Man’s Land – Tome 06

No Man’s Land est une longue saga constituée de plusieurs tomes : le volume unique Cataclysme, qui en était l’introduction, puis le récit « principal » de No Man’s Land en six tomes et, enfin, New Gotham en trois volumes. Voir la page récapitulative si besoin.
Afin d’établir des résumés et critiques plus visibles qu’un gros bloc reprenant l’ensemble de l’ouvrage, celles-ci sont divisées par les différentes (petites) histoires qui composent le tome. Le résumé est en italique sous le titre et la critique est précédée d’une petite flèche.

batman-no-mans-land-tome-6

Ground Zero
scénario : Jordan B. Gorfinkel / Greg Rucka | dessin : Greg Land
Batman : No Man’s Land #0

La vie à Gotham et, surtout, celle de Bruce avant le décret définitif du no man’s land. Le milliardaire est alors en excursion européenne (à Monaco) pour « jouer » le playboy mais il déteste ça. Huntress, quant à elle, profite de l’absence du Chevalier Noir pour arborer un nouveau costume, celui de Batgirl (sans l’accord donc de Batman). Elle adore la puissance que lui procure son alias héroïque et la peur qu’elle peut instaurer avec. Mais Wayne est bien décidé à revenir dans SA ville et utiliser ses planques, des mini « batcaves » qu’il a conçu dans tout Gotham suite à sa défaite face à Bane quelques temps avant (cf. Knightfall). L’occasion pour lui d’observer également les premiers pas de Huntress en tant que Batgirl pour juger si elle est apte à le porter.

Bruce Wayne No Mans Land

► Retour aux débuts de la saga avec ce chapitre introductif assez long et plutôt plaisant. Il vient répondre à plusieurs interrogations : l’état de Wayne quand il n’était pas à Gotham (une visite de Talia As Ghul et une agression physique semblent avoir déclenché la motivation du milliardaire pour revenir) et l’évolution de Huntress en Batgirl avec Batman qui le sait dès le début (ce qu’on pouvait suivre durant les premiers tomes et qui était un mystère de prime abord puisqu’on ne savait pas qui était cette nouvelle Batgirl). L’occasion de voir l’ennemie Ferak, copie conforme de Poison Ivy en version plus « mutante » (et forte à priori). Logique : c’est une plante créée par Ivy nous apprend Wayne.

Batgirl No Mans Land

Certains détails sont également pertinents, outre le traumatisme de la défaite face à Bane, régulièrement rappelée, le choix d’une autre ceinture, comportant plus de pochettes, est le genre d’anecdote continuant à contribuer à un certain « réalisme » dont nous fait part la saga depuis le début. Une bonne chose donc. En bref, ce Ground Zero se veut comme une bonne introduction, rappelant le chemin parcouru depuis le début et dynamitant d’entrée de jeu ce sixième et ultime tome.

Idylle de Plomb
scénario : Chuck Dixon | dessin : Scott McDaniel
Nightwing #38-39

Dick Grayson est toujours en convalescence chez Barbara Gordon. Les deux anciens amants ont une nouvelle relation particulière… En même temps, des soldats semblant appartenir au GCPD attaquent le repaire d’Oracle.

Barbara Dick Oracle Nightwing

► Ces deux chapitres centrés sur Nightwing permettent de voir son évolution aussi bien d’un point de vue sentimental (avec Barbara et… Huntress !) que physique (la tour de l’horloge est hors-service). Sans temps mort et avec des dialogues plutôt convaincants, Idylle de Plomb pêche par ses graphismes trop cartoony et aux traits bien trop gras (avis aux amateurs d’Ed McGuiness, le style de McDaniel s’en rapproche). Côte super-héroïne costumée, on a bien du mal à comprendre les motivations de Huntress puis son soudain revirement de situation. Le « flic » Petit reste quant à lui fidèle au personnage déjà croqué en amont dans de précédents tomes. Un petit scénario intéressant donc, mais une faiblesse au niveau des dessins.

Une curieuse alliance / Dettes
scénario : John Ostrander | dessin : Jim Balent
Catwoman #76-77

Le Pingouin a récupéré Catwoman, blessée et affaiblie. Lorsqu’elle se réveille, Copplebot lui propose une alliance : elle travaille pour lui et il la paie très cher. Sa mission : voler les biens de Luthor qui a débarqué dans Gotham et est bien préparé à chambouler la ville et la rebâtir à sa façon.

Catwoman Le Pingouin No Mans Land

► Deux chapitres résolument modernes dans leur traitement graphique (avec une superbe couverture pour le numéro #76) et scénaristique. Il faut se remémorer le tome 3 de No Man’s Land pour retrouver Mercy, l’une des ennemies de Catwoman mais, surtout, une des fidèles alliées de… Luthor. Elle sera au centre de la seconde partie (la moins réussie) et permettra une revanche originale à Kyle. Une conclusion avec Deadman achèvera ce deuxième chapitre d’être vraiment « moyen ». Cela ne gâche pas la qualité de l’ensemble puisque la première partie est excellente, on y trouve une Catwoman maline, sexy (il n’y avait pas besoin de rendre ses seins énormes et de la montrer presque nue, dommage…), espiègle et indépendante. Toute l’essence du personnage est là, tiraillé entre « le bien et le mal » (qu’on retrouve aussi sur la fin). En bref c’est la conclusion de l’arc sur Catwoman, une histoire globalement bien écrite et dessinée. Quelques écarts fleurant avec le registre fantastique ou le voyeurisme gratuit mais une jolie performance où tous les ingrédients clés de la féline voleuse ont été réunis : relation ambigüe avec Batman, collaboration avec l’ennemi, traîtrise et manipulation, combats intenses, solitude et tristesse, etc. Un récit très marquant dans la mythologie des comics sur Catwoman.

Le Monde de l’Autre Côté
scénario : Chuck Dixon | dessin : N. Steven Harris
Robin #73

Jack Drake, père de Timothy, a joué de ses relations pour médiatiser la disparition de son fils perdu dans Gotham City. Batman voit cette soudaine mise en avant de la ville dans la presse de bonne augure, permettant d’accélérer les mouvements et décisions politiques liés à l’évolution du no man’s land. Tim (Robin) vit très mal cette médiatisation mais ne sait comment réagir face à la détresse de son paternel. Des agents fédéraux sont missionnés pour s’infiltrer dans Gotham et récupérer Tim.

Robin No Mans Land

► On continue de conclure les arcs par personnage. Ce chapitre sur Robin est plutôt prévisible et, surtout, pas très bien colorisé — à priori en numérique (c’était les prémices de cette technique) — tout est « fade » et presque uniformisé, dommage… Ce n’est clairement pas la meilleure histoire du tome, elle nécessite d’ailleurs un petit épilogue. Mais, et c’est là l’importance, on « sent » que pour la mythologie du troisième Robin, il y a un certain cap de franchi (qui s’accroîtra, cinq ans plus tard, dans l’excellent Crise d’identité).

Évacuation
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael : Agent of the Bat #60

Azrael et Batgirl sont chargés d’affronter le Joker par Batman.

Joker Azrael

► Un autre arc qui ne va pas tarder à se terminer, en tout cas on l’espère vu la fin risible de ce chapitre. Seul intérêt : l’alchimie éphémère entre la nouvelle Batgirl quasiment muette et Azrael. C’est sans réel surprise ni même intérêt, dommage… Qui plus est la majorité des fonds de case de couleur uni n’aident pas à rendre cette histoire plus palpitante et prenante malgré la présence du Joker.

Tour de Passe-Passe
scénario : Greg Rucka | dessin : Sergio Cariello
Batman #573 | Detective Comics #740

312ème jour du no man’s land : Luthor annonce en fanfare ses travaux pour reconstruire Gotham. Il trouve inacceptable et moralement condamnable ce qu’il s’est passé. Sans surprise, le Chevalier Noir n’en croit pas un mot et devine de sombres desseins derrière cet altruisme louche. Robin est chargé de surveiller Huntress et Petit (un ancien flic devenu très radical). Luthor peut compter, lui, sur les services de Bane pour assurer sa sécurité, que ce soit face à Batman mais aussi face… au Joker !

Batman vs Luthor

► Nettement plus passionnant que les derniers chapitres, ces deux nouveaux redonnent un coup de fouet à l’intrigue général avec la rivalité entre Luthor et Batman, les plans de chacun d’eux, la place de Bane dans tout cela, etc. Les dimensions politiques et économiques occupent davantage une place centrale, malgré quelques éléments confus. On notera aussi un amusant jeu de rôle entre Batman et Barbara appelant Lucius Fox, sous l’identité de Bruce et d’une masseuse. Graphiquement réussi (traits précis, cadrage hors-norme, découpage rythmé…) on apprécie aussi les séquences avec le Joker et le Pingouin, même si les « conclusions » avec ces deux derniers sont un peu expéditives.

On retrouve aussi un problème de cohérence puisque Robin (Timothy Drake) est présent ici alors qu’il a été évacué hors de la ville deux chapitres plus tôt (il s’agit en fait d’une curiosité éditoriale puisqu’il aurait sans doute fallu placer le chapitre sur Robin plus tard mais cela gâcher certainement la lecture de l’ensemble — le dernier chapitre du livre confirme que Tim fait des allers-retours dans la ville, ce qui n’était pas réellement explicite ici ; pourquoi pas). De la même manière, en étant pointilleux, on a du mal à comprendre pourquoi Luthor continue de s’adjoindre des services de Mercy plus qu’elle enchaîne défaite sur défaite sans que cela énerve son patron. Cette dernière a d’ailleurs l’occasion de tuer le Joker mais ne le fait pas préférant le laisser fuir car il a sans doute « compris le message » (sic) !

Fin de partie
scénario : Greg Rucka / Devin Grayson | dessin : Damion Scott / Dale Eaglesham
Batman : Legends of the Dark Knight #126 | Batman #574 | Detective Comics #741

Un mois. C’est le délai qu’il reste aux (derniers) habitants de Gotham pour rebâtir la ville pour que le décret no man’s land soit levé. Avec approbation du président des États-Unis, Lex Luthor s’occupe en grande partie de cette reconstruction. Les médias sont braqués sur lui, son image est extrêmement positive. En plus de LexCorp, Bruce Wayne Enterprises met évidemment aussi du sien, ainsi que les labos S.T.A.R., le Corps des Ingénieurs de l’Armée (et les citoyens de la ville). L’espoir renaît. Dans l’ombre, le Joker est irrité que ça évolue en ce sens : fini l’anarchie et les territoires contrôlés par des fous furieux. Dans Gotham, Noël se prépare…

Huntress no mans land

Douce nuit, sainte nuit… Tendre et à point puis Cet enfant sur la paille endormi sont les titres de ces trois chapitres qui se lisent d’une traite et se suivent directement. Huntress (en pleine rédemption) surveille Billy Petit, sombré dans la folie et paranoïa – en découlera le second chapitre, particulièrement réussi et haletant (un plan habile du Joker, un peu invraisemblable mais ça passe, un Petit dépassé et effrayant et une Huntress extrêmement touchante) -, la plupart des ennemis sont en prison ou peu dangereux (la chute du Pingouin, bien que soudaine, en est un bon exemple), seul le Joker reste donc LE fou furieux à arrêter en dernier parmi la galerie de vilains. Sur ce point, les dernières planches sont glaçantes. Toute la folie du Clown du Crime est montrée « à nouveau ». Bien sûr, l’ennemi revient souvent, mais il « marque » rarement la mythologie du Chevalier Noir dans des histoires qui laissent trace, à l’exception de la mort de Robin. Et bien, là aussi il tue un personnage (secondaire certes, mais important). Le Joker retrouve donc de « sa superbe » tout en étant détestable au plus haut point. Si No Man’s Land était déjà assuré de laisser une trace marquante dans la chronologie (et l’histoire) de Batman, cet ultime meurtre et méfait du Joker définit comme « culte » cette saga, ou tout du moins sa conclusion. Difficile de ne pas être touché, ému ou choqué en voyant certaines cases et les scènes qui suivent le crime. Le plaisir sadique du lecteur est aussi « récompensé », car il apparaissait surréaliste, dans le contexte extrêmement violent, perdu et sauvage de la ville, qu’il n’y ait pas plus de victimes (parmi les protagonistes connus) que cela (pas mal de figurants le sont tout de même). Seul reproche de cette fin de partie : la non-homogénéité des dessins. Il est normal d’avoir plusieurs dessinateurs différents (ici deux) dans ce genre de cas (3 chapitres de 3 séries différentes) mais les deux ont un style tellement différents que ça casse un peu l’immersion. Eaglesham va dans le réalisme pur et sale, là où Scott a un trait plus « cartoony », un chouilla dommageable mais ça passe quand même vu que le scénario prend le dessus aisément.

Dons de l’esprit
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael : Agent of the Bat #61

Prolongement de Fin de partie en adoptant cette fois le point de vue d’Azrael et Batgirl, missionné par Batman pour retrouver les bébés kidnappés par le Joker. Le nouveau duo de justiciers en profite pour découvrir les traditions de Noël.

Batgirl Azrael

► Si les errances de Jean-Paul Valley ont toujours été un peu redondantes voire ennuyeuses, celles-ci, proposées comme les dernières (pour cette saga) sont plutôt plaisantes. On a clairement envie de savoir ce que va donner la relation Cassandra Cain/Jean-Paul Valley. Ce dernier contraste toujours autant avec l’univers « classique » de Batman mais c’est suffisamment bien écrit (dans ce chapitre) pour qu’on soit pris d’empathie pour le presque schizophrénique justicier. Placer cette histoire après les trois chapitres précédents est un peu dommage (elle « dévoile » le plan du Joker mais aurait pu s’insérer avant, quitte à casser la dynamique de Fin de partie au moment où celle-ci se déroule, pour mieux clore l’ensemble avec la conclusion épique et tragique qu’on vient juste de lire avant).

Ce n’est qu’un au revoir
scénario : Greg Rucka | dessin : Pablo Raimondi
Batman : Shadow of the Bat #94

31 décembre, dernier jour de l’année, dernier jour du no man’s land, un enterrement se déroule à Gotham City… Puis Batman et Oracle reprennent le travail, il apparaît que Luthor a mené habilement son jeu puisqu’il a racheté des propriétés de la ville pour 0,4% du prix du marché en trafiquant des documents. Mais Bruce Wayne était sur le coup grâce à Lucius Fox.

Batman VS Lex Luthor

► Conclusion douce-amère de toute la grande saga No Man’s Land. Touchante mais avec quelques éléments pas forcément tout à fait résolus (on ignore si Luthor est réellement à l’origine du cataclysme, ce qui était sous-entendu à une époque). Le reste semble assez « classique » pour une fin et un renouveau mais efficace pour conclure ce dernier tome : on y retrouve chaque héros, quelques choix finaux (Dick se dirigeant vers Helena plutôt que Barbara), des cases sans texte, etc. Et ça fonctionne suffisamment pour avoir eu le sentiment de lire un grand arc maîtrisé.

Conclusion : C’est un peu de cliché de dire que cette fin est avant tout un nouveau départ mais c’est assez vrai (la « suite » se nomme New Gotham et est à découvrir en trois tomes). Nettement plus passionnante que Knightfall, à qui elle est souvent comparée, cette très longue histoire aura eu le mérite d’apporter un statu quo extrêmement original et une plongée dans la survie et l’anarchie pour bon nombre de protagonistes. Un quasi retour à l’ère « primitif » avec une qualité d’écriture plutôt élevée malgré un côté « stagnant » régulier. Certains épisodes se révélant (forcément) moins passionnants que d’autres (Azrael, une partie de ceux de Catwoman et Robin sont parfois de moindre intérêt) mais la majorité se lit avec plaisir. On pense notamment aux évolutions des héros (Huntress et Batgirl), aux doutes des autres (Batman en premier) et aux folies des ennemis plus ou moins connus, avec le point d’orgue de ce volet grâce au Joker. Ce qui est à déplorer relève des dessins : une armée d’artistes différents livrent (forcément bis) un ensemble hétérogène. Si on se prête à nouveau au jeu de la comparaison, on observe que les planches de No Man’s Land vieillissent bien mieux que celles de Knightfall, elles sont plus modernes et même si parfois les styles sont radicalement différents, l’ensemble reste cohérent.

Difficile donc de trouver les « bons mots » pour évoquer six tomes (sept en vrai), même s’ils ont été lus « à la suite » (vivement recommandé), il y a sans doute quelques éléments qui peuvent échapper au lecteur (et au critique) mais le ressenti général est vraiment possible. Bien sûr, comme souvent, tout n’est pas parfait. C’était évoqué plus haut : peu de morts « réelles » parmi les emblématiques personnages de la mythologie de Batman, une année complète en no man’s land qui paraît surréaliste mais paradoxalement fascinante. Il y a un avant et un après cette saga qui est considérée comme culte à juste titre. C’est donc un gros coup de cœur et un conseil de lecture indispensable. Les deux derniers tomes sont sans doute les plus réussis !

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batman conclusion no mans land

No Man’s Land – Tome 05

No Man’s Land est une longue saga constituée de plusieurs tomes : le volume unique Cataclysme, qui en était l’introduction, puis le récit « principal » de No Man’s Land en six tomes et, enfin, New Gotham en trois volumes. Voir la page récapitulative si besoin.
Afin d’établir des résumés et critiques plus visibles qu’un gros bloc reprenant l’ensemble de l’ouvrage, celles-ci sont divisées par les différentes (petites) histoires qui composent le tome. Le résumé est en italique sous le titre et la critique est précédée d’une petite flèche.

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Chemin de fer souterrain
scénario : Steven Barnes | dessin : Paul Ryan
Batman : Legends of the Dark Knight #123 | Batman : Shadow of the Bat #91

Un certain « pavé » tente de consolider une zone en assurant protection et sécurité à ses habitants. Affublé d’un brassard du logo du Chevalier Noir, cet ancien agent de police (Bock) agit en effet avec l’aval de Batman ; ce dernier lui donne un coup de main de temps en temps. Bock s’engage dans un combat dans l’arène du Pingouin pour marchander avec lui…

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► Deux chapitres composent cette histoire qu’on peut qualifier « d’introductive » à ce cinquième volume. Comme beaucoup de ses prédécesseurs, la situation à Gotham reste « la même » (comprendre : « stagne ») et on continue de suivre les (petites) évolutions de différents protagonistes. Ici, c’est donc un ancien policier, rapidement attachant, et le Pingouin qui sont mis en avant. Les apparitions de Batman, le Joker et Robin sont les bienvenues et permettent de resituer leur état des lieux à chacun (pas « en quête » particulière, etc.). Après un premier chapitre d’exposition, le second est résolument tourné vers l’action et fonctionne bien, avec une certaine touche d’humanité (y compris chez Copplebot !) et de noirceur. Une scène finale s’attarde sur des soldats étant à l’extérieur de Gotham (ils gardent les entrées/sorties possibles) et reconnaissent l’injustice que subissent les citoyens. Un point de vue qui manquait clairement jusqu’ici et qui mériterait d’être exploré par la suite, ne serait-ce que pour montrer une multitude de réflexions bien loin d’un manichéisme primaire. En somme, ce « chemin de fer souterrain » est une bonne entrée en matière.

« Il m’a appris qu’on n’attaque pas le corps de son adversaire, mais son cœur et son âme. On frappe pour ternir sa lumière, afin que son ombre intérieure enfle et vienne le consumer. »

Soirée en ville
scénario : Chuck Dixon | dessin : Mat Broome
Batman #571 | Detective Comics #738

Dans les souterrains de Gotham, Bane contraint une jeune femme à s’allier à lui. Il lui confie qu’il a préparé un plan en secret car il travaille pour quelqu’un, dont il ignore le nom, et qui a des ambitions pour les lendemains de Gotham. De leur côté Batman et Robin ont aussi le sentiment qu’une personne venue de l’extérieur manipule les évènements de la ville.

Bane répand la terreur en ville et signe ses assassinats par des cartes de deux de pique, pour « faire croire » que Double-Face sont derrière tout cela. Un jeu qui ne dupe pas Le Pingouin qui convie carrément le Chevalier Noir et son acolyte pour aider Harvey Dent…

Bane No Mans Land

► Le Caveau et Le Vandale sont les noms des deux chapitres de ce qui est peut-être le premier réel gros tournant dans la saga depuis des lustres. On insiste, un peu trop souvent, sur l’idée d’un homme de l’ombre (qu’on peut déjà imaginer si l’on connaît modestement la mythologie de Batman ou de DC Comics). Même si c’est assez soudain, c’est clairement une étape bienvenue pour No Man’s Land (dont le côté stagnant n’est plus à prouver). Cette transition est tout de même écrite avec une certaine habilité. Employer Bane est une bonne chose, c’est un ennemi intelligent, il le prouve en expliquant qu’il conserve l’illusion que la personne pour qui il travaille est son patron mais in fine ce sont ses intérêts qu’il sert. De la même manière, en refusant d’agir sur certains points, Batman prouve, lui aussi, son intelligence, pour recueillir certains indices importants. Globalement, l’histoire se tient (malgré le personnage féminin débarquée de nulle part) mais aurait dû être avancée plus tôt pour gagner en fluidité sur l’ensemble des tomes (même si cette piste d’une personne de l’ombre avait déjà été évoquée discrètement par le passé). On retrouve Chuck Dixon derrière le scénario, c’est un habitué de Bane puisqu’il a créé le personnage et l’a émancipé lors de la saga Knightfall (des allusions y sont faites). Aux pinceaux, Mat Broome se démarque en proposant un découpage très rythmé, des traits modernes et un ensemble plutôt élégant et agréable. Du tout bon donc.

Capitaine d’Industrie
scénario : Chuck Dixon | dessin : Rafael Kayanan
Batman : Legends of the Dark Knight #124

Le criminel Shanks promet à chaque citoyen qui le rémunère en argent ou bijoux un passage secret permettant de quitter Gotham. Batman recherche Danny Flowers, qui a justement emprunté cette soi-disant voie de sortie. Pour enquêter, le Chevalier Noir utilise son alias de Malone l’allumette.

Batman Malone l'allumette

► L’intérêt de ce chapitre est « double ». La première est l’incursion d’un côté über « primaire » de citoyens piégés dans un tunnel qui deviennent limite des zombies. Si l’on ne flirte pas vraiment avec le registre fantastique (et tant mieux), cette petite originalité fait plaisir à voir. L’autre intérêt est de constater « enfin » une réflexion qu’on peut légitimement se faire : si l’argent (et les bijoux) n’a pas de valeur durant le No Man’s Land, on peut imaginer qu’une fois la situation débloquée, la monnaie redeviendra synonyme de fortune. Si quelques personnes souhaitent en conserver pour « plus tard », cela semble logique. C’est donc un aspect que l’on découvre ici, brièvement certes, mais cela valait le détour. Et permet d’aboutir sur une case finale assez glaçante. L’idée effleurée d’un potage privé pour marchander est également intéressante. Du reste, on retient des dessins corrects mais sans plus et un Batman utilisant son identité de Malone l’allumette, un alias qu’on retrouve dans d’autres aventures du Dark Knight — dont des plus récentes comme Batman Eternal.

Avis de Tempête
scénario : Devin K. Grayson | dessin : Dale Eaglesham
Batman : Shadow of the Bat #92

Superman revient à Gotham City mais en tant que civil. Il veut aider quelques citoyens mais aussi vérifier qu’un attentat terroriste par drone ne va pas se produire. Son chemin croise celui de Batman.

Batman Superman No Mans Land

► Le retour de l’Homme d’Acier apporte une certaine « pause » légèrement rafraichissante et avec un peu d’humour. Concrètement, elle n’apporte pas grand chose mais permet de réexpliquer les raisons de l’absence de Superman dans Gotham. Ce dernier était déjà intervenu par le passé (voir les volumes précédents) mais ses actions se soldaient par un échec. Batman avait déjà averti son collègue de la Justice League que seul lui pouvait aider SA ville et comprendre les façons d’être des humains (comprendre « néfastes »). Graphiquement on oscille entre l’excellent (des cases fourmillent de détails, des visages sont parfois d’une grande complexité) et le mauvais (têtes pas crédibles, contours brouillons…). Pénible du coup, et assez paradoxal mais tant pis.

On retient toutefois une tirade de Batman relativement puissante et efficace, à découvrir ci-dessous.

Batman Superman No Man s Land

Jurisprudence
scénario : Greg Rucka | dessin : Damion Scott
Batman #572 | Detective Comics #739

L’Encaisseur est un sbire de Double-Face, il apporte à son boss la prisonnière Renée Montoya, enfermée avec son frère. Harvey Dent, visiblement sous le charme de Renée, va aussi kidnapper Gordon pour… lui faire son procès !

Double Face Montoya

► Cette histoire apporte enfin une résolution d’intrigue entamée plus tôt (voir volumes précédents) notamment entre les agissements de Gordon envers Double-Face. On comprend que le commissaire a tenté de faire affaire (un pacte de défense mutuelle) avec l’ancien procureur, par l’intermédiaire de Renée Montoya (qui a donc été capturée à ce moment-là et gardé captive durant cinq mois). La première partie est un peu confuse de prime abord avec des éléments peu contextualisés, le personnage de l’Encaisseur (aperçu durant Knightfall et Le Fils Prodigue) qui revêt une certaine importance avant de disparaître, etc.

L'Encaisseur Double Face

La seconde, le procès de Gordon, est nettement plus intéressante, aussi bien par son découpage original durant les témoignage que par une habile écriture sur la culpabilité de Gordon puis sa défense. Rarement la schizophrénie de Dent n’aura été si bien dépeinte — à travers lui ou bien via un dialogue des parents de Montoya. En somme c’est une véritable incursion méta (le faux procès à l’intérieur du no man’s land à l’intérieur de Gotham) qui est proposée avec brio ! Original et d’une parfaite continuité avec l’ensemble de la saga, tout en amorçant un certain virage pour montrer qu’on ne va plus trop « stagner ». Deux critiques négatives cependant : Jurisprudence arrive un peu tardivement pour saisir les anciennes connexions des récits passés (ce n’est pas très grave lorsqu’on lit l’intégralité de la saga à la suite) et les dessins ont un côté cartoony par forcément idéal pour « prendre au sérieux » ces deux chapitres. Malgré cela, à mi-chemin de ce cinquième tome c’est clairement une réussite.

Le Roi Lézard
scénario : Chuck Dixon | dessin : Staz Johnson / Gordon Purcell
Robin #71-72

Killer Croc va prendre sa revanche après sa défaite face à Black Mask et aux policiers. L’homme-lézard, ou plutôt le Roi Lézard, reprend petit à petit des quartiers de la ville. De son côté, Robin (Timothy Drake) se reposer à la Batcave avec Alfred. Le jeune prodige ignore comment il expliquera à son père son absence soudaine. Dick panse aussi ses plaies mais avec Barbara, et Stéphanie Brown, dont la mère avait découvert son costume d’Oracle, est consignée à domicile. Mais toute la Bat-Family communique entre elle et se soutient.

Robin No Mans Land Killer Croc

► Une coopération inédite entre le Pingouin et le GCPD, le « retour » des justiciers — Robin est au centre du récit mais revoir brièvement Alfred, Dick, Stéphanie et Barbara fait plaisir — et Killer Croc plus puissant que jamais (il pend ses victimes). Une petite histoire qui se lit très bien et qui continue cette mouvance auquel nous habitue le volume depuis le début. Seul regret côté dessin où l’ensemble pêche un peu et retrouve ce côté très années 80/90 à l’inverse des chapitres précédents. On notera également la fin, très intéressante (qui se terminera dans le tome 6) avec un bel accent mis sur la relation père-fils entre Tim et son paternel.

Retrouvailles
scénario : Greg Rucka | dessin : Rick Burchett
Batman : Legends of the Dark Knight #125

Gordon et Batman se revoient enfin en privé et règlent leur compte. Gordon ne digère toujours pas l’absence notoire du Chevalier Noir au début du no man’s land et le Dark Knight est prêt à lui révéler son identité secrète pour rétablir la confiance brisée.

Gordon VS Batman

► Il est utile de se remémorer pourquoi il y a cette tension entre les deux mythiques partenaires. C’est ce que fait subtilement Rucka en rappelant un contexte temporel mais le lecteur doit surtout se souvenir que cette fameuse absence a eu lieu « avant » le premier tome de la saga, quand Bruce Wayne tentait alors d’agir à l’extérieur en jouant de ses influences. Une disparition de Batman qui a engendré également une perte de repères et d’espoir. Clairement, le texte aurait dû aller davantage en ce sens au lieu de passer par de nombreuses cases muettes — qui fonctionnent quand même très très bien. De plus, les traits de Burchette rappellent ceux de Darwyn Cooke, combiné avec un texte « adulte », ça fait toujours mouche. Même si certains visages sont clairement ratés. Un chapitre de transition important.

Monnaie d’échange spirituelle
scénario : Devin K. Grayson | dessin : Dale Eaglesham
Batman Chronicles #38

Le docteur Leslie Thompkins, aidée de Mikey — ancien sbire de Black Mask —, récupère le criminel Zsasz. Dans sa zone « neutre » d’aide aux blessés, Thompkins voit défiler aussi bien de terribles criminels, comme Killer Croc, que des alliés du Chevalier Noir, dont Huntress, Batgirl et lui-même. Un véritable défi moral est en jeu : pour sauver Zsasz, il faut une transfusion sanguine. Batman refuse.

batman thompkins no mans land

► Cet excellent très long chapitre permet de retrouver Mikey — introduit dans le premier tome de la saga avec brio — et évidemment Thompkins, qui était présente surtout dans les histoires précédentes liées à Azraël. C’est à la fois la force et « faiblesse » de l’histoire : se remémorer d’anciens morceaux de récits, parfois publiés très longtemps en amont. Revoir Batman au « centre » du scénario est réjouissant, d’autant plus que le détective est en déroute morale total, à nouveau à cause du contexte du no man’s land (en résulte une belle tirade ci-après de Thompkins). L’amour quasi maternel du docteur sur le Chevalier Noir est extrêmement touchant, au même titre que sa volonté de sauver des vies sans juger ses patients. Thompkins est aussi le personnage principal et cela permet de proposer un chapitre intense et quelque peu dramatique. Unité de temps (quelques minutes/heure), unité de lieu (la zone dite « neutre » de Thompkins) mais multiples unités d’action dans ce petit théâtre gothamien où se croisent autant d’ennemis que d’alliés que d’antagonistes. Où le manichéisme primaire ne peut pas avoir lieu, c’est clairement sur ce terrain qu’il faut jouer. Malheureusement, pas d’issue tragique (dans le sens où cela aurait été une vraie surprise et un culot monstre) mais cela n’empêche pas de prendre plaisir à lire ces planches aux dessins convenus mais efficaces.

« Essaie de voir par mes yeux le monde dans lequel nous vivons et le rôle qu’on y joue. Tu n’es pas le seul à défendre un système de croyances, tu sais. Je te suis reconnaissante de tout ce que tu fais pour cette ville. Mais je n’approuve pas la façon dont tu t’y prends. Tu es infantile et entêté dans ta colère. Et plus que jamais, j’ai peur de n’avoir rien réussi à t’apprendre. Et surtout, j’ai peur… de descendre à ton niveau plutôt que de t’élever au mien. »
[Leslie Thompkins à Batman/Bruce Wayne]

Les Règles du Jeu / Le retour du pèlerin
scénario : John Ostrander / Dennis O’Neil | dessin : Jim Balent / Roger Robinson
Catwoman #75 | Azrael : Agent of the Bat #59

Catwoman est sévèrement blessée après sa mission confiée par Batman (voir fin du tome 3). Elle se rappelle alors de son enfance dans un cirque où elle a appris à devenir acrobate et voleuse de talent. Après une reprise en main, elle se met en route pour retourner à Gotham. Là-bas, le Chevalier Noir a chargé Azraël de venir en aide à la femme féline si besoin.

Catwoman no mans land

► Une fois de plus il faut se souvenir de l’ancienne histoire centrée sur Catwoman qui remonte à deux volumes plus tôt. Ces deux chapitres signent aussi le retour d’Azrael sans ses errances psychologiques internes parfois pénibles. Au contraire le second chapitre est la même histoire de son point de vue et de celui d’un antagoniste. Passé deux ou trois planches trop identiques, l’intérêt s’accroît puisque Batman récupère des données informatiques confidentielles (on ignore de quoi il s’agit) et ses deux alliées (Catwoman et Azraël) semblent appeler à de nouvelles « quêtes » chacun. De quoi rester sur sa fin mais avec la certitude que la « suite » sera dans le tome suivant, qui est le dernier. Globalement bon avec des dessins très corrects, particulièrement sur les plans larges de la ville dévastée.

Rassemblement
scénario : Greg Rucka / Paul Ryan | dessin : Bill Sienkiewicz
Batman : Shadow of the Bat #93

Tel un jeu, toutes les pièces de l’échiquier de Gotham se rassemblent ou se croisent. Les alliés d’un côté, les antagonistes de l’autre, les ennemis autour… Chacun prêt à un plan particulier : une mystérieuse femme protégée par Bane, elle-même en lien avec Le Pingouin, attendant un individu, tous épiés par Robin qui communique avec Oracle tandis que Batman conjoint Gordon, Batgirl et Azraël à une mission, Huntress s’éloigne de la Bat-Family et le Joker et sa muse Harley Quinn attendent le Chevalier Noir…

joker harley quinn no mans land

► Sans révéler le fameux élément attendu depuis un bon moment, cet ultime chapitre est carrément jouissif. On a « enfin » le sentiment que tout est en place pour la dernière ligne droite. Suivre tour à tour quasiment tous les personnages principaux est salutaire, cela ne livre pas forcément une conclusion « épique » du tome (dans les faits il ne se passe pas grand chose) MAIS on a hâte de lire la suite et fin. Tout est bien dessiné en plus, c’est une histoire idéale pour achever la lecture d’un tome très réussi !

Conclusion : avant-dernier volume de la saga, ce cinquième tome de No Man’s Land est sans aucun doute le plus abouti et le meilleur jusqu’ici. Pas un chapitre est inintéressant ou comporte d’éléments ratés ou dispensables, bien au contraire. Sa fin motive à se procurer l’ultime dernier tome. L’ensemble est fluide et frôle le sans faute, on peut déplorer quelques notes éditoriales qui auraient resituer le contexte de certains chapitres (Mikey qui était dans le tome 1, l’histoire de Catwoman du tome 3, etc.) mais si on lit toute la saga à la suite ça ne pose pas vraiment de problèmes. Quoiqu’il en soit, les auteurs, Greg Rucka en premier, ont mis la barre très haute en dévoilant une galerie de vilains iconoclastes et richement illustrée et mise en avant (plus que Batman). Quasiment un must-have donc !

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No Man’s Land – Tome 02

No Man’s Land est une longue saga constituée de plusieurs tomes : le volume unique Cataclysme, qui en était l’introduction, puis le récit « principal » de No Man’s Land en six tomes et, enfin, New Gotham en trois volumes. Voir la page récapitulative si besoin.
Afin d’établir des résumés et critiques plus visibles qu’un gros bloc reprenant l’ensemble de l’ouvrage, celles-ci sont divisées par les différentes (petites) histoires qui composent le tome. Le résumé est en italique sous le titre et la critique est précédée d’une petite flèche.

Rappel : après un énorme cataclysme, Gotham City est déclaré no man’s land : personne n’y entre et personne n’en sort. Les rues sont aux mains des criminels, divisés par zones spécifiques. La police et quelques justiciers tentent d’en reprendre le contrôle et de sauver les plus démunis qui n’ont pas pu partir.

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À noter que tous les chapitres commencent par cette introduction : « … Au lendemain du cataclysme qui jeta à terre les fiers buildings de Gotham City, la nation américaine abandonna le peuple de la cité réduite en cendres. Seuls survivront les braves, les calculateurs et les fous dans cet enfer sur Terre appelé NO MAN’S LAND »

Équilibre
scénario : Greg Rucka | dessin : Jason Pearson
Batman : Legends of the Dark Knight #118

Alfred raconte l’histoire d’un chevalier et son écuyer à des enfants dans un endroit sécurisé de Gotham géré par lui-même et Leslie Thompkins. Il y explique la disparition du chevalier (Batman donc) et ce qu’a fait son écuyer (Alfred forcément) en attendant le retour de son maître. Alfred a aidé du mieux qu’il le peut les plus démunis et, surtout, observer les factions en place.

alfred no mans land

► Un point de vue intéressant sur Alfred, qui était absent du tome précédent (sans qu’on s’en rende compte réellement). Cela fait donc « du bien » de découvrir ce qu’il était advenu du célèbre majordome. Peu d’éléments sur le départ de Bruce/Batman (à priori, selon les résumés du volet précédent il essayait de convaincre le gouvernement de sauver Gotham City) mais un beau retour, un peu épique et très « visuel » malgré des dessins globalement ratés sur les visages mais réussis sur le reste (décors, découpage, couleurs)…

Harold / Bien chez soi
scénario : Dennis O’Neil / Scott Beatty | dessin : Chris Renaud / Damion Scott
The Batman Chronicles #16

Harold, bricoleur muet, bossu et chassé de chez lui pour sa laideur, travaillait avec Alfred et Batman dans la Bat-Cave (personnage manipulé par Le Pingouin puis recueilli par le Chevalier Noir). Le génie mécanique est sommé par Alfred de retourner en ville après le cataclysme…

harold batman

Un couple de voleurs se retrouve dans l’appartement… du Joker ! Une ombre en forme de chauve-souris les surveille…

no mans land robin dead

► Deux courts chapitres, surtout celui sur Harold. Ce personnage tertiaire est brièvement au centre du récit pour découvrir, à l’instar d’Alfred juste avant, ce qu’il faisait durant le cataclysme. Anecdotique et pas assez long pour vraiment s’attacher à Harold, on espère le revoir plus tard mais nul doute que ce petit segment est nécessaire pour revenir sur tous les protagonistes, même les moins présents.

L’autre chapitre est nettement plus prenant, glauque et réussi. L’omniprésence du Joker est glaçante alors que le célèbre clown n’apparaît absolument pas durant cette histoire. Les éléments décoratifs et divers (attention aux surprises malsaines) suffisent pour laisser planer l’ombre de l’éternel ennemi du Chevalier Noir.

Home Sweet Home
scénario : Lisa Klink | dessin : Guy Davis
Batman : Shadow of the Bat #86

Le sergent retraité William S. Riley a refusé de quitter Gotham City et continue de défendre sa maison corps et âme. Elle est pourtant située dans un bloc conquis par Killer Croc et que le gang de Zsasz souhaite récupérer. Même Batgirl n’a pas la force de les combattre et se voit contrainte de fuir les lieux…

no mans land tome 2

► Un chapitre qui se focalise sur un parfait inconnu pour mieux faire comprendre au lecteur l’état d’esprit des habitants de Gotham. Ils sont sur le qui-vive puisque les différents criminels s’approprient leur territoire voire leur maison, ils doivent payer un tribut (nourriture…) pour rester en vie, etc. En plus de montrer cet aspect (important et nécessaire), les souvenirs du vieil homme, sa propre vie familiale plutôt triste, la Seconde Guerre Mondiale et l’évolution de jeunes de la ville qu’il a vu grandir font de cette histoire, au style graphique proche d’une BD franco-belge, une curiosité élégante et réussite. Peut-être parce que le point de vue est foncièrement humain sous tous rapports…

Attentat au bonbon piégé
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael : Agent of the Bat #53

Azraël est toujours à la recherche de Calibax (cf. tome précédent) lorsque Batman lui confie la lourde tâche de retrouver le Joker et de le capturer. Tiraillé entre son désir de justice et agacé par l’autorité paternaliste effectuée par le Chevalier Noir, Azraël accepte cette mission. Ça tombe bien, le Clown du Crime est particulièrement impatient et cherche à tout prix à revoir Batman…

joker no mans land

► Si de prime abord le titre et le mot « dragibus » (les fameux bonbons dudit titre) prêtent à sourire, ce chapitre redore clairement le blason de Jean-Paul Valley et de cet arc narratif qui avait mal débuté. Véritable menace, le Joker est typiquement celui du dessin animé de la série de Bruce Timm et Paul Dini (voire même le Nicholson de Burton) : drôle et effrayant. Le dilemme moral entre la justice et la vengeance dans le rôle des quêtes que se sont données Batman et Azraël vient clore efficacement cette petite histoire. L’homme chauve-souris apparaît brièvement mais déterminé comme jamais pour reprendre le contrôle de sa ville, comprenant que sa présence en plein jour est gage de qualité pour effrayer ses ennemis. Seule ombre au tableau : des bulles narratives expliquant l’action en cours (et peut-être une colorisation trop vive pour des dessins des héros moins réussis que ceux du Joker, stylé au possible).

Le Visiteur
scénario : Kelley Puckett | dessin : Jon Bogdanove
Batman #566

Superman vient (enfin) en aide à Gotham City. Batman y est réticent et lui donne 24 heures pour faire autant « de bien » qu’il le peut. L’Homme d’Acier compte bien en profiter mais les habitants de la ville sont-ils prêt à être solidaire ?

superman no mans land

► L’ouvrage poursuit les points de vue différents (et c’est tant mieux) avec cette fois le surhomme de Metropolis, curieusement absent dans les volumes précédents. Cette entrée en matière ravit mais son côté éphémère et le fatalisme facile imposé (en gros Superman abandonne) gâche un peu l’ensemble — même si le justicier kryptonien n’a pas dit son dernier mot, il revient d’ailleurs dès le chapitre suivant —, servi par des dessins globalement ratés et encrés de façon très grossière et grasse.

Infiltration
scénario : Devin K. Grayson / Mark Waid | dessin : Mark Pajarillo
JLA #32

Huntress communique avec Superman et en veut terriblement à la Ligue de Justice de ne pas être intervenu et de continuer de rester en retrait. De leur côté, les membres affrontent diverses menaces et suivent une piste qui les mène au groupe de scientifiques Locus qui auraient peut-être manipuler le Sénat pour voter le décret no man’s land, interdisant à quiconque d’entrer dans Gotham. C’est l’une des raisons pour laquelle l’Homme d’Acier n’intervient pas, puisque cela est « illégal ».

Huntress No Mans Land

► Ce chapitre arrive pile au bon moment car ça faisait un bout de temps qu’on ne comprenait pas l’absence de la Justice League à Gotham. Si des raisons évoquées ne sont pas forcément les plus pertinentes (cette histoire d’illégalité), l’idée que chaque membre travaille dans l’ombre pour enquêter sur divers groupuscules souhaitant prendre le pouvoir depuis l’extérieur sur la ville est par contre tout à fait « plausible » et intéressante. Du reste, on poursuit le développent de Huntress et l’ensemble est agréable, un peu confus tout de même, avec de jolis dessins qui tranchent avec le chapitre précédent.

Nuances de gris
scénario : Bob Gale | dessin : Phil Winslade
Detective Comics #733

Dans Gotham, Batgirl constate que Gordon ne veut ni d’elle ni de Batman (accusé d’avoir abandonné sa ville). Le Chevalier Noir est lui même pris de doutes sur les bonnes méthodes à adopter pour sécuriser le maximum de personnes. Les choix « justes » sont-ils tous légaux et moraux ? À nouveau le justicier s’interroge et Alfred lui conte un souvenir similaire qui a eu lieu avec Thomas Wayne, à l’époque où Bruce n’était qu’un enfant.

Batman No Mans Land

► Sans nul doute le récit le plus intelligemment écrit jusqu’ici (avec Ni Loi ni Ordre qui ouvrait le tome précédent, déjà scénarisé par le même Bob Gale). La question du dilemme moral est une fois de plus soulevé sans réelle réponse. Tout n’est pas noir ou blanc, il y des nuances de gris, titre du chapitre donc. L’ensemble est passionnant, se recentre (enfin) sur le Chevalier Noir et est d’une rare élégance en terme de dessins particulièrement fins et soignés.

Danse de miséricorde
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael : Agent of the Bat #54-55

Azrael recherche toujours trois personnes : le Joker, Nicholas Scratch et Calibax. Il va voir l’Oracle pour recueillir des informations mais son parcours croise, forcément, celui de quelques démunis, malfrats et d’un mystérieux nouvel ennemi : le danseur de la mort, qui ôte la vie à ceux qui souffrent du no man’s land.

azrael no man land

► On retrouve quelques explications bienvenues, notamment pourquoi des habitants n’ont pas quitté Gotham City : la plupart pensait que le gouvernement ne les abandonnerait pas, ne croyait pas cela possible tellement ça semblait surréaliste. Ça se tient, peut-être pas à si grande échelle mais ça reste plausible (plus que l’inaction de la Justice League). Outre trouvaille, ou plutôt bonne idée, à peine esquissée jusqu’ici : le rechargement par panneau solaire, révolutionnaire pour l’époque (le récit date de l’été 1999). C’est comme cela qu’Oracle utilise des ressources. Une étrange relation entre elle et Azrael , qui se voient pour la première fois après plusieurs journées de conversation téléphonique (dommage qu’on ne les perçoit pas ainsi), se noue.

Le fille de Gordon « flirtait » avec Azrael, Jean Paul Valley de sa véritable identité, qui avait pris tout cela au premier degré (on ne badine pas avec l’amour !). Une certaine complicité nait entre eux deux et c’est clairement… sympathique et original ! En se recentrant sur Azrael durant ces deux chapitres, on s’aperçoit d’ailleurs que ce « justicier » est clairement partagé entre plusieurs éléments : il a pitié des plus pauvres mais une part de lui pense que c’est bien fait pour eux. Il y a toute une ambivalence, cher et coutumière du personnage, qui est ici nettement mieux écrit que d’habitude. Le justicier attire clairement une empathie plus poussée que dans d’autres histoires (plus anciennes comme Knightfall ou plus récentes comme Batman & Robin Eternal).

En bref, ces deux chapitres sont un sans faute si on accepte cette colorisation un peu trop vive qui tranche avec les autres planches de l’ouvrage, plus sombres voire monochromes, ainsi que le costume mi-armure mi-cosplay d’Azrael, un poil too much.

Oracle Azrael No Mans Land

— Tu es avec Batman ?
— Comment avez-vous deviné ? Oh… Le costume bien sûr.
— Non. La violence.

Leslie Thompkins à Azraël.

« Souffrir, c’est le prix que nous payons pour vivre. Et il n’est pas négociable.
Tout ce que nous pouvons faire, c’est l’accepter et aller de l’avant.
La pire chose que nous puissions faire, c’est nous apitoyer sur notre sort. »

Road Trip
scénario : Chuck Dixon / Scott Beatty | dessin : Andy Kuhn
Young Justice : No Man’s Land #1

Batman a viré Robin (Timothy Drake) de Gotham. Le jeune homme a en plus déménagé à Keystone City et ne supporte plus de rester inactif face à la situation actuelle de son ancienne ville. Le fait que son co-équipier ne lui demande pas de l’aide l’enrage et il en discute avec deux membres de la Young Justice : le sexiste (assumé) Superboy et Impulse (Bart Allen). Après un bref débat,  les trois jeunes justiciers partent en croisade à Gotham tandis que Red Tornado reste au QG (ainsi que Wonder Girl et Arrowette). De son côté, un jeune atlante, Lagoon Boy, nage pour la première fois vers Gotham City mais se fait attaquer par Kobra Prime, ennemi de la Young Justice.

Robin No Mans Land

► Petit aparté « fraîcheur et couleur » avec ce chapitre qui montre une jeunesse souriante et dynamique, d’un style graphique très moderne. Robin apparaît enfin, une fois de plus c’est un prisme d’explications qui arrive : le jeune rouge-gorge a été interdit de Gotham par son mentor, d’où son absence, c’est aussi simple que cela. Si le combat final (contre Kobra Prime) est expéditif et très moyen, celui contre la création de Poison Ivy (cette dernière n’apparaît pas mais elle a clairement son territoire et un pacte avec le Chevalier Noir) est très réussi. Il est d’ailleurs étonnant que trois jeunes justiciers n’en arrivent pas à bout, preuve que ce no man’s land n’est pas pour eux. Bon, pourquoi pas… L’ensemble apporte en tout cas ce vent de légèreté qui devient presque nécessaire tant l’ensemble est (un peu) anxiogène (sans que cela soit un défaut, bien entendu).

Titre de propriété
scénario : Greg Rucka | dessin : Mike Deodato Jr.
Batman : Legends of the Dark Knight #119 | Batman : Shadow of the Bat #87

Plus de quatre mois après le début du no man’s land, une carte de territoire montre l’avancée de chaque gangs, certains sont désormais rayés (Black Mask, l’Epouvantail, Scarface…), d’autres sont toujours en place (Double-Face, le Pingouin…) et Batman a presque la moitié de Gotham, une autre partie étant aux mains de la police. Le Pingouin et Double-Face décident de s’associer pour récupérer quelques territoires. Côté GCPD, Gordon prépare un assaut également.

double face no mans land

► Une histoire pleine d’action et particulièrement sombre. Peut-être ce qui « manquait » à l’ouvrage pour nous montrer le « vrai quotidien » du no man’s land en terme d’affrontement et des difficultés rencontrées par Batman pour garantir un semblant de paix. Si graphiquement des passages sont très réussis (notamment Double-Face), d’autres sont clairement ratés (Batman est une montage de muscles bodybuildé). Gordon semble avoir pactisé avec le diable, suffisamment alléchant pour vouloir connaître la suite et Oracle affirme avoir trouvé l’identité secrète de la nouvelle Batgirl. Cette dernière n’est toujours pas acceptée à 100% par Batman qui semble encore sur la réserve pour obtenir une aide plus concrète de sa part. Bref, dans ces deux chapitres, les pièces de l’échiquier avancent lentement mais sûrement, tout le monde a sa propre façon d’agir et trahit ses convictions (alliés comme ennemis). L’image finale est particulièrement réussie.

La marque de Caïn
scénario : Kelley Puckett | dessin : Damion Scott
Batman #567 | Detective Comics #734

Dans un passé proche, une jeune fille ne parlant pas l’anglais s’est liée d’amitié avec Barbara Gordon et a même sauvé la vie de son père. Pour cause, le tueur à gages Caïn est le père de cette jeune fille. Il l’a entraîné pour qu’elle soit une redoutable combattante mais celle-ci ne souhaite pas « tuer des gens ».

Batgirl Batman No Mans Land

Alternant flash-back se situant avant et durant le no man’s land, on ignore un peu les repères chronologiques précis de cette histoire un brin confuse. Son point fort réside dans son mutisme, les trois quarts de l’ensemble n’ont pas de bulle et se « lisent » très bien. On s’attache facilement à la jeune Cain, Cassandra de son prénom (qu’on connaît si on est déjà familier de l’univers Batman), il est difficile de comprendre les tenants et aboutissants de tout le récit tant ces nouveaux personnages ont l’air de sortir de nulle part. Le Chevalier Noir a un look différent de l’histoire précédente mais le début de celle-ci semble se dérouler juste après. Bref c’est un peu le bazar, avec un style cartoonesque étrange et qui ne colle pas à l’ensemble du tome. Sans doute la partie la moins réussie de l’ouvrage mais pas déplaisant totalement non plus grâce à l’introduction « civile » de la jeune fille de Caïn.

Conclusion : La saga poursuit sa très bonne lancée et livre un second tome aussi bon que le(s) précédent(s). Cette fois-ci, l’action est mise sur plusieurs justiciers ou antagonistes bien précis et cette nouvelle salve répond (avec plus ou moins de crédibilité) à bon nombre d’interrogations soulevées légitimement depuis le début de No Man’s Land (inaction de Superman, point de vue de Robin, etc.). Certaines histoires se lisent à travers le prisme d’inconnus ou de personnages très très secondaires, ce qui est une force de ce tome. On peut déplorer des styles graphiques assez différents mais l’ensemble restent très cohérent avec tout de même une qualité plus qu’honorable. Ne pas s’attendre à de gros changements majeurs au sein de l’évènement ni à beaucoup d’actions permettent de mieux savourer ce tome.

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