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Batman – One Bad Day : Gueule d’argile

Basil Karlo, alias Gueule d’argile est au cœur du dernier tome de la collection One Bad Day et c’est (enfin) une réussite qu’on recommande ! Explications et critique.

[Résumé de l’éditeur]
Basil Karlo a toujours rêvé d’être acteur… ou plutôt d’être le plus grand acteur de tous les temps. Mais lorsqu’il est devenu Gueule d’Argile, sa vie a pris un tournant inattendu. Aujourd’hui, après bien des années de lutte face à Batman, il a décidé de changer d’air. Arrivé dans la capitale mondiale du cinéma, loin de l’atmosphère viciée de Gotham, il s’y forge une nouvelle identité et reprend son rêve où il l’avait laissé. Mais pour arriver à être la star qu’il souhaite devenir, il va devoir façonner Los Angeles à son image…

Inutile de détailler le début de l’histoire, le résumé officiel de l’éditeur suffit.

[Critique]
On le martèle depuis le début de la collection, le concept d’une mauvaise journée qui ferait basculer une personne « lambda » dans la criminalité n’a jamais vraiment été respecté dans les opus consacrés aux antagonistes de Batman. Ce n’est pas ici pour Gueule d’argile que ça change mais, néanmoins, il s’agit tout de même d’une « mauvaise journée » que passe Basil Karlo. Le célèbre comédien impulsif (déjà connu en tant que Gueule d’argile) enchaîne les auditions sous le nom de Clay (en VO, son surnom est Clayface) loin de Gotham. Quand un de ses amis est pris suite à un casting que Clay/Basil désirait ardemment, Gueule d’argile le tue et revêt ses traits. Ensuite, il n’hésite pas à dire ce qu’il pense au metteur en scène, donner ses leçons de cinéma et imposer sa vision…

De quoi basculer dans une journée où Basil d’argile (non il n’est jamais appelé comme ça, c’est uniquement dans l’objet de cette critique) enchaîne les méfaits et le contrôle de ses manipulations et créations lui échappe petit à petit, au détour d’une amitié brisée, comme sa carrière. L’œuvre est finement écrite à quatre main par Collin Kelly et Jackson Lanzing (on leur doit plusieurs segments, déjà co-scénarisés ensemble des deux volumes de Batman & Robin Eternal et du dernier opus de Grayson). Un peu déroutant au début (beaucoup de figurants parlent à tout va de plusieurs sujets sans corrélation), le titre happe assez rapidement pour ne plus quitter son lecteur.

Il faut dire qu’il y a peu de comics pleinement consacrés à Gueule d’argile (on se rappelle de son rôle secondaire plutôt chouette dans la série Batman Detective Comics). Sans tomber dans trop de sympathie pour le criminel, les auteurs parviennent à susciter une empathie et une forme de « justesse » (surtout quand il est en monstre de boue) assez touchante. Le One Bad Day s’inscrit d’ailleurs comme un récit complet amusement méta, rendant hommage au Fantôme Gris (de la célèbre série d’animation Batman, déjà évoqué dans l’univers White Knight de Sean Murphy, plus particulièrement dans le tome consacré à Harley Quinn) et… à Killing Joke.

En effet, si initialement la gamme One Bad Day devait singer le récit culte d’Alan Moore et Brian Bolland, on a vu plusieurs fois qu’il n’en fut rien (exception pour Le Sphinx – contenant lui aussi une conclusion ouverte quant au sort des protagonistes). Dans ce livre sur Gueule d’argile, l’acteur joue le rôle du… comédien raté qu’était le Joker, allant jusqu’à reprendre son heaume rouge et son look ! Une approche assez osée et qui fonctionne étonnamment bien, probablement car elle occupe peu de places (cf. images ci-dessous qui ne se suivent pas normalement et sont séparées de quelques planches et rassemblées l’une en dessous de l’autre uniquement dans le cadre de cette critique). Le duo d’auteur se permet aussi une petite pique (facile) envers l’industrie cinématographique.

Côté dessins, Xermanico (Flashpoint Beyond notamment) est en pleine forme. Il croque avec élégance dans un style aéré et fluide, presque européen (l’artiste est espagnol et parle un peu français d’ailleurs), la mésaventure quotidienne de Basil, bien aidé par une exposition lumineuse assez prononcée, changeant un peu de la noirceur habituelle de Gotham (à laquelle on n’échappe pas en fin du livre). L’encrage (de Xermanico également) et la colorisation (signée Romulo Fajardo Jr.) ajoutent ce qu’il faut pour conférer au titre une ambiance et une unité graphique singulière. Son découpage équilibré, ses morceaux de scénario incrustés dans les planches et son approche parfois franco-européenne ajoutent une dimension sincèrement atypique et plaisante.

Ce dernier volume « boucle la boucle » efficacement (même s’il n’était pas sorti dans cet ordre aux États-Unis) et se hisse dans les meilleurs One Bad Day de la série ! Si Le Sphinx reste indétrônable, se suivent de près Mr. Freeze, Bane et ce Gueule d’Argile, tous trois de même qualité et appréciable à différents niveaux (cf. le classement de la page récapitulative). Les quatre autres comics restent déconseillés (Le Pingouin et Double-Face en tête, Catwoman et Ra’s al Ghul possèdent des qualités davantage visuelles que scénaristiques mais ne justifient pas de débourser une quinzaine d’euros pour ça) mais ils ressortiront peut-être pour un prix plus abordable en intégralité dans les prochaines années… (Rappel « d’actualité » : mon tour d’horizon de l’entièreté des One Bad Day est en ligne sur le site de Bruce Lit.)

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 6 octobre 2023.
Contient : Batman – One Bad Day : Clayface #1
Nombre de pages : 72

Scénario : Collin Kelly, Jackson Lanzing
Dessin & encrage : Xermanico
Couleur : Romulo Fajardo Jr.

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Studio Myrtille (Christophe Semal)

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Batman – One Bad Day : Ra’s al Ghul

Avant-dernier volume de la collection One Bad Day, ce septième opus est consacré au célèbre immortel.

[Résumé de l’éditeur]
Depuis des siècles, Ra’s al Ghul a tenté de sauver la Terre de son pire ennemi : la corruption humaine. Sans jamais y parvenir. De nombreux obstacles se sont dressés sur sa route, parmi lesquels le Chevalier Noir. Ra’s a pourtant offert à Batman de se rallier à sa cause, mais en vain. Aussi n’a-t-il d’autre choix que d’éliminer le détective de Gotham de l’équation. S’il faut en passer par là pour remodeler le monde à son image et apporter paix et prospérité à cette Terre en perdition, alors il n’hésitera pas…

Inutile de détailler le début de l’histoire, le résumé officiel de l’éditeur suffit.

[Critique]
C’est probablement l’un des plus beaux One Bad Day ! Graphiquement, cet opus sur Ra’s al Ghul a beau avoir un côté mainstream (s’éloignant des styles plus singuliers et élégants des titres sur Le Sphinx et Mr. Freeze), il demeure une pépite visuelle. Pas étonnant, le dessinateur Ivan Reis est particulièrement inspiré (on lui doit la série Aquaman période Renaissance, plusieurs tomes de Justice League de la même ère et diverses apparitions un peu partout (Geoff Johns présente Green Lantern, Infinite Crisis…) ou chez Batman (Batman Detective Infinite par exemple, Batman/Superman…) – cf. son nom dans la recherche de ce site).

Ivan Reis est bien aidé par deux artistes prolifiques chez DC Comics : l’encreur Danny Miki et le coloriste Brad Anderson. Si vous êtes un connaisseur, il n’y a plus vraiment à les présenter et vous savez probablement ce qu’ils ont signé accompagnés parfois d’autres personnes. L’alliance des trois est donc une valeur sûre ! Il suffit de regarder les différentes illustrations de cette critique pour s’en satisfaire – de sublimes compositions, parfois éclatées sur deux pages restent à découvrir dans la bande dessinée bien sûr.

Alors oui, c’est plutôt agréable à voir, mais est-ce que ça l’est à lire ? C’est une lecture intéressante pour les passionnés de Ra’s al Ghul mais malheureusement, et encore une fois, il s’agit davantage d’un chapitre annual luxueux ou un récit complet « classique » plutôt qu’un titre se référant à ce qu’est censé être cette collection et annoncé comme tel par l’éditeur : la bascule vers le Mal à l ‘état pur lors d’une mauvaise journée. On a donc une narration somme toute stimulante mais en aucun cas réellement originale.

Suivre un énième plan du célèbre immortel assez classique (tuer une trentaine de personnes riches et/ou influentes qui causent le plus de dégâts à la Terre pour les remplacer par de meilleures personnes) avec Batman et Robin (Damian – forcément) en travers son chemin, reste sympathique, notamment pour le travail d’écriture sur le personnage de Ra’s, mais insuffisant pour justifier l’achat éventuel.

Tom Taylor (auteur habitué de l’éditeur, on lui doit les sagas Injustice, DCEASED et quelques opus sur Batman (La dernière sentinelle…), Suicide Squad (Renégats – pas encore chroniqués), etc.) insuffle suffisamment d’empathie envers la Tête de Démon grâce à ses nombreuses pensées subjectives tout en proposant une légère « suite » au tandem Bruce/Damian, qui devrait donc ravir aussi les fans de ce Robin. On pourrait même voir cet opus comme une sorte de léger prolongement du célèbre run de Morrison.

Comme évoqué en début de critique, ce sont davantage les aspects graphiques qui sont la force de l’œuvre, le reste est une aventure disons « habituelle » pour un affrontement entre Batman et Ra’s (Talia est un peu trop en retrait d’ailleurs). C’est d’autant plus dommage pour un One Bad Day de ne pas s’être concentré sur la promesse éditoriale initiale car il y avait beaucoup de choses à explorer pour montrer le basculement dans la folie ou le radicalisme de Ghul ! Décevant aussi de la part de Taylor, souvent plus inspiré et atypique dans ses traitements. La réflexion sur l’évolution « écologique et humaine » est assez simpliste également.

En synthèse, ce One Bad Day est un peu comme celui de Catwoman : visuellement très réussi mais scénaristiquement assez moyen. Il n’est pas forcément conseillé vu le prix (15 € tout de même, pour une soixantaine de pages – éternel débat du rapport entre le prix et les pages) mais s’en tire avec les honneurs par rapport à d’autres (Le Pingouin et Double Face notamment, cf. le classement de la page récapitulative). C’est toujours aussi banal de dire cela mais si vous êtes évidemment fan de Ra’s al Ghul, il ne faut pas faire l’impasse dessus…

Quelques autres livres pour explorer la célèbre Tête de Démon si jamais (pas encore critiqués sur ce site à part les deux derniers) : La saga de Ra’s al Ghul – avec un segment complémentaire dans DC Anthologie –, Tales of the Demon, La résurrection de Ra’s al Ghul, Justice League – La Tour de Babel et Injustice 2 où il occupe un rôle important et déjà signé Tom Taylor, visiblement appréciant ce célèbre antagoniste. (Rappel « d’actualité » : mon tour d’horizon de l’entièreté des One Bad Day est en ligne sur le site de Bruce Lit.)

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 22 septembre 2023.
Contient : Batman – One Bad Day : Ra’s al Ghul
Nombre de pages : 72 pages

Scénario : Tom Taylor
Dessin : Ivan Reis
Encrage : Danny Miki
Couleur : Brad Anderson

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Studio Myrtille (Christophe Semal)

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Batman – One Bad Day : Catwoman

La collection One Bad Day se poursuit avec cette fois Catwoman au premier plan !

[Résumé de l’éditeur]
Alors que Selina Kyle n’était qu’une adolescente, sa mère a dû se résoudre à vendre une broche dont elle avait héritée à un prêteur sur gages peu scrupuleux. Quelques années plus tard, lorsque Catwoman apprend que ce bijou est en réalité d’une valeur inestimable, elle n’a plus qu’une idée en tête : reprendre ce trésor familial à tout prix ! Mais cette course effrénée ne risque-t-elle pas de déterminer le reste de son existence ?

Inutile de détailler le début de l’histoire, le résumé officiel de l’éditeur suffit.

[Critique]
Cet opus est davantage un récit complet sur Catwoman (de bonne facture au demeurant – on y reviendra) qu’un One Bad Day à proprement parler, c’est-à-dire un titre qui fouillerait le passé de Selina Kyle pour montrer son « jour de bascule » pour devenir voleuse (bien qu’un flash-back soit présent). L’histoire tourne autour d’une broche familiale qu’avait dû vendre pour une bouchée de pain la mère des jeunes sœurs (Maggie et Selina) pour subvenir à leur besoin. Quelques années plus tard, la célèbre Catwoman compte bien la reprendre.

Le titre se déroule majoritairement « dans le présent », à priori dans la continuité officielle (un peu comme l’opus sur Double-Face), les quelques échanges avec Bruce/Batman laissent entendre cela. Toutefois, cet One Bad Day peut aussi rester indépendant ou en marge de tout ça, ce n’est pas très important. On a l’impression de lire un annual luxueux (comme ceux du Pingouin et Harvey Dent) mais, cette fois, en plus qualitatif, grâce aux dessins emmenés par Jamie McKelvie, signant une singularité visuelle sans faille (comme toujours, si les quelques illustrations de cette critique vous séduisent, le reste devrait aller). Il dessine, encre et colorie entièrement ses planches ! Si l’on peut déplorer de nombreux fonds de cases vides, le style épuré et léché de l’artiste ne laisse pas indifférent.

Côté histoire, le schéma narratif de G. Willow Wilson (Gwendoline de son prénom) est malheureusement un poil convenu avec un ou deux rebondissements peu surprenants. La plus grosse faille est sans aucun doute la conclusion abrupte qui laisse une sorte de « suspens » au lecteur (quid de… ? pas mal de choses en fait – qu’on ne révèlera pas ici). C’est dommage de rester sur ce sentiment d’inachevé. La figure habituelle de Selina est respectée, oscillant entre « le bien et le mal », ou plutôt le profil personnel, l’individualisme et la criminalité, sans en effleurer une réflexion très poussée – on parle banalement d’un vol d’un objet lui ayant appartenu.

En somme, heureusement que la partie graphique et le début de ce One Bad Day fonctionnent, à défaut d’être marquant ou incontournable. Comme d’habitude, il y avait plein de choses à explorer en prenant en compte un passif d’enfance malheureuse (peut-être) ou une vie de jeune adulte dans la prostitution (comme dans Année Un). L’ensemble reste trop « sage », un brin décevant mais sympathique visuellement. Pour le prix on aurait tendance à la déconseiller sauf aux aficionados de Catwoman, évidemment. Pas le meilleur des One Bad Day (Le Sphinx, Mr. Freeze, Bane), pas le pire (Double-Face, Le Pingouin), juste entre les deux !

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 18 août 2023.
Contient : Batman – One Bad Day : Catwoman 
Nombre de pages : 72

Scénario : G. Willow Wilson
Dessin, encrage et couleur : Jamie McKelvie

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Studio Myrtille (Christophe Semal)

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