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Batman – Silence 2

Annonce surprise de 2024, la suite inattendue du célèbre et incontournable récit Batman Silence (Hush en VO) est prévue en six chapitres (ceux de la série Batman, #158-163). Ces derniers sont publiés en France avec une date rapprochée des États-Unis. En effet, Urban Comics propose chaque épisode en format souple et en noir et blanc. Ainsi, le premier chapitre de Silence 2 est sorti fin mars 2025 outre-Atlantique et début juillet chez nous, soit presque trois mois après.

Silence 2 devait initialement s’étaler en France sous cette forme jusqu’en décembre 2025 (mais un retard aux US décale tout ça – on en parle plus loin) mais ce sera pour février 2026. L’éditeur publiera ensuite l’intégralité du titre en couleur le 30 avril 2026. Pour l’occasion, Urban Comics a aussi mis en vente la version 20ème anniversaire du premier Silence (le 4 juillet 2025), contenant un épilogue inédit (Prologue : The Aftermath en VO). Pour éviter de repasser à la caisse, on espère qu’il sera dans la version intégrale de Silence 2.

Sur ce site, la critique se fera également en deux temps, uniquement sur cette page. Une première, mensuelle, revenant sur chaque épisode disponible. Une seconde, plus générale, quand l’intégralité sera disponible et lisible « à la suite » et en couleur. Début juillet 2025, lors de la sortie du coffret très soigné de la version noir et blanc (voir photo plus bas), on apprenait que la publication de la série prenait un certain retard aux États-Unis (trois chapitres disponibles au lieu de quatre – les suivants déjà annoncés comme reportés).

Mi-septembre 2025, le sixième et dernier chapitre est annoncé pour janvier 2026 (au lieu d’août 2025). L’éditeur français met à jour son site : le cinquième épisode sortira fin janvier 2026 et le sixième un mois plus tard. Sauf que… l’on apprend aussi (toujours sur Bleeding Cool) que Silence 2, titré H2SH aux US, serait en deux parties ! La seconde contiendrait six autres chapitres (donc équivalent de #07-12), soit les chapitres Batman #164-169 – ce qui n’a aucun impact sur la numérotation du renouveau de la série Batman (par Matt Fraction et Jorge Jimenez – pas encore disponible en France) car celle-ci a été recommencée à un numéro #01 et peut donc se lire en parallèle (tout le monde suit ?). L’article va même plus loin est évoque en plus de ce H2SH – Part Two un H3SH ! Donc, un troisième segment sur Hush ? Il faut croire… sauf si celui-ci correspond à la seconde partie de Hush 2, c’est un peu nébuleux. Néanmoins, vu le retard aux dessins de Jim Lee, il est difficile d’envisager tous ces futurs épisodes croqués par le big boss de DC.

01. Le Pion
Sortie le 4 juillet 2025 (uniquement dans un coffret spécifique)11,90 €
Batman #158

[Résumé de l’éditeur]
Il y a des années, Batman et ses alliés ont soudainement été assaillis par tous leurs ennemis, jusque dans leur vie civile. Derrière cette attaque se cache un mystérieux adversaire masqué se faisant appeler Silence, directement lié à l’enfance de Bruce Wayne et connaissant tous les secrets de la Chauve-Souris. Alors que la menace semblait enterrée, Silence semble pourtant de retour, plus dangereux que jamais et décidé à mener sa guerre contre la bat-famille jusqu’au bout…

[Résumé du chapitre]
En affrontant le Joker, Batman échappe à la mort de peu, sauvée par Talia al Ghul. En enquêtant sur cet affrontement, le Chevalier Noir comprend que son ancien ennemi Silence est de retour.

[Critique]
Voilà une entrée en matière rythmée et efficace – mais un poil décevante. Au scénario, Jeph Loeb déploie rapidement et brillamment plusieurs éléments. On sait d’entrée de jeu que nous sommes dans la continuité classique (Damian est évoqué et les trois victimes du Joker des habituels morceaux de la chronologie du Chevalier Noir sont remémorés : James Gordon et sa fille Barbara via Killing Joke et Jason Todd/Robin via Un deuil dans la Famille), on y croise déjà des alliés (Nightwing et Batgirl), des ennemis (le Joker et Silence), une antagoniste (Talia) et un nouvel adversaire, complice de Tommy Elliot visiblement : Soupir. En somme, en une petite trentaine de pages, le ton est posé (sérieux, divertissant, vaguement original) et de nombreux protagonistes se côtoient directement ou indirectement.

Le « problème » est davantage une appréhension qu’un souci factuel sur ce premier épisode. On sait qu’il n’y aura que six chapitres au total pour cette histoire et ce premier semble presque « anecdotique » pour évoquer ces retrouvailles mythiques. Il ne faut donc pas être trop sévère et garder espoir sur le long terme, même si on aurait pu espérer quelque chose de plus novateur voire épique. Mais attendons la suite avant de se montrer trop pessimiste. Pour information, Urban Comics a inclut le prélude La Promesse (quatre pages) qui servait de bonus au premier chapitre de Justice League Unlimited en VO (sans rapport entre les deux séries) pour introduire le récit.

En revanche, on adore les planches en noir et blanc de Jim Lee couplées au fabuleux encrage de Scott Williams – même équipe artistique qu’à l’époque du premier opus. Un régal pour les yeux, des traits toujours aussi fins, des cases détaillées, des personnages reconnaissables et aux expressions faciales lisibles, tous charismatiques et appréciables. Toutefois, la vision de l’ensemble s’avère parfois frustrante – on aurait aimé découvrir la version colorisée (par Alex Sinclair) en même temps, aussi bien pour la comparer que l’admirer. On se perd aussi un peu de temps à autre à savoir si l’action se déroule en journée ou de nuit et des détails sanglants semblent « adoucis » par l’absence de couleur mais, une fois de plus, ne boudons pas notre plaisir tant le duo Lee/Williams fait des merveilles ! Le Pion se lit rapidement et, même s’il ne propose pas forcément de grosse promesses narratives ou quelque chose d’ambitieux, il reste modestement efficace. À suivre !

02. La Tour
Sortie prévue le 29 août 20255,90 €
Batman #159

[Résumé / Début de l’histoire]
Le Joker
est quasiment laissé pour mort par Silence. Batman se voit dans l’obligation de l’aider pour ne pas qu’il décède et le transporte chez Leslie Thompkins. Red Hood ne semble pas l’entendre de la même oreille…

[Critique]
Jeph Loeb
semble savoir (sans surprise) où il va ! On s’interroge déjà sur qui manipule qui ? Jason Todd/Red Hood travaille-t-il avec Silence ou bien l’ancien Robin agit comme l’avait prévu Tommy ? En sauvant la vie du Joker, Batman a-t-il fait exactement ce qu’avait prévu Silence ? Difficile d’en dire davantage sans dévoiler certains éléments – dont l’arrivée d’un allié inattendu en toute fin (et avec un look improbable de prime abord) mais qui demeure très cohérente avec le premier tome Silence de l’époque (on aura sans doute l’occasion d’en reparler dans le chapitre suivant). L’ensemble commence tout doucement à être étrange par rapport à la continuité « classique », attention à ne pas trop dévier… Du reste, on poursuit un rythme efficace et une narration solide même s’il y a toujours cette crainte d’un récit complet moins marquant que l’œuvre mère, puisqu’on est déjà à un tiers de sa fin.

Comme pour l’épisode précédent, on se régale au niveau des planches de Jim Lee et du saisissant contraste bichrome plus prononcé ici grâce à trois lieux en huis clos distincts (la clinique de Thompkins, le Batcave et l’Horloge/repaire de Batgirl). Des pleines pages (parfois doubles) font clairement décoller les rétines. Il ne s’est déroulé qu’une poignée d’heure depuis le début de Silence 2 et on espère qu’en quatre chapitres restants, on pourra explorer la partie civile du héros avec Bruce Wayne et, à minima, son idylle avec Selina/Catwoman, qui occupait une place importante dans l’opus précédent. Pour l’instant, l’auteur semble se concentrer sur l’action et une poignée de protagonistes seulement. Pour le meilleur ou pour le pire ?

03. Le Cavalier
Sortie prévue le 26 septembre 20255,90 €
Batman #160

[Résumé / Début de l’histoire]
Red Hood 
veut tuer le Joker, ligoté et endormi dans une planque de Silence mais ce dernier l’en empêche, arguant que le célèbre Clown doit vivre pour la suite de son plan – qui consiste(ra) à montrer que Batman préfère sauver le Joker que son entourage. Le Sphynx/Riddler devient un allié inattendu auprès de Batgirl (qui va tâcher de retrouver son père rapidement) et Nightwing (qui se dirige vers Jason Todd). Au milieu de tout ça, Batman enquête sur l’origine des scalpels utilisés par Tommy et se retrouve dans un chaos d’affrontements…

[Critique]
Encore un chapitre explosif, riche en action et en parcours (géographiques) de différents protagonistes ! C’est presque épuisant d’essayer de tout suivre (faute à nouveau au noir et blanc qui empêche la lisibilité d’intrigue diurne/nocturne – mais c’est du détail). Après une courte première phase de « repos » (on insiste sur les guillemets), tout s’enchaîne à degrés divers. Nygma parle par énigme alors qu’il n’a pas besoin (fait-il partie du plan d’Elliot lui aussi ?), la présence de Damian Wayne confirme la continuité chronologique – et la surprise de le voir avec Bane (tueur d’Alfref) ainsi que la réaction de Batman viennent confortent aussi en ce sens. Néanmoins, il n’est pas exclu qu’a posteriori, Jeph Loeb (ou DC Comics d’une manière générale, par la voix de leur représentant donc… Jim Lee, le dessinateur de ce comic), ce Silence 2 soit proposé comme Trois Jokers, c’est-à-dire faisant partie de la continuité ou en marge de celle-ci en fonction du bon vouloir du lecteur. Curieux de voir, une fois de plus, si cela sera évoqué dans l’épisode suivant. Du reste, arrivé à la moitié de l’arc, on apprécie globalement sans pour autant être totalement conquis. Mitigé mais paradoxalement confiant ET inquiet quant à la suite…

04. La Reine
Sortie prévue le 31 octobre 20255,90 €
Batman #161

[Résumé / Début de l’histoire]
Batman
trouve le repaire de Silence et constate que Jim Gordon a été blessée. Sa fille Barbara, alias Batgirl, s’en prend au Chevalier Noir.

[Critique]
Probablement le moins bon chapitre depuis le début. Le sujet Bane/Damian(/Alfred) est vite balayé, Barbara/Batgirl s’éloigne de l’ADN de son personnage (combattre son mentor ne lui ressemble pas), l’intrigue générale n’avance toujours pas (Silence est quasiment absent de l’épisode même si c’est visiblement fait exprès pour la poursuite de son plan), deux Robin ont du mal à en découvre face à un Joker armé et doivent s’enfuir, etc. Bref ! Pas mal de courtes situations improbables ou anecdotiques qui laissent un peu de marbre. C’est d’autant plus délicat qu’il ne reste que deux chapitres avant la fin…

Toutefois, l’on apprenait quelques semaines plus tôt (début septembre 2026) qu’il pourrait y avoir une seconde partie à ce Silence 2 et carrément un Silence 3 (voir haut de cette critique) ! À la fois rassurant car on a du mal à voir comment en six volumes aussi courts on pourrait atteindre une maestria importante et en même temps frustrant vu le temps nécessaire de production… En attendant, on a plutôt l’impression de lire/voir une aventure « lambda » de Silence, qui ne mériterait pas d’être une « suite officielle », comme il y a pu en avoir par le passé (cf. index dédié). Heureusement, les dessins de Jim Lee et l’encrage de Scott Williams continuent de faire des merveilles (cette double planche ci-dessus), dynamiques et aérés, lisibles et élégants ; c’est toujours ça de gagné dans une lecture mi-figue mi-raisin…_

05. Le Roi
Sortie prévue le 30 janvier 20265,90 €
Batman #162 (sortie le 12 novembre aux US)

[Résumé / Début de l’histoire]

[Critique]

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06. Aucun titre annoncé (probablement Le Fou )
Sortie prévue le 27 février 2026 – 5,90 €
Batman #163 (sortie le 28 janvier 2026 aux US)

[Résumé / Début de l’histoire]

[Critique]

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Batman Dark Patterns – Affaire #1 : L’Homme Blessé

Série prévue en quatre volumes, Batman Dark Patterns annonce renouer avec l’approche détective du célèbre justicier. Alléchant sur le papier mais avec un premier hic avant d’entamer sa lecture : le prix. En effet, le comic book coûte 16 € pour seulement 80 pages (dont 72 € seulement de BD pour trois chapitres !) mais on en reparlera plus loin. Alors, que vaut cette première affaire : L’Homme Blessé ? Critique.

[Résumé de l’éditeur]
Affaire #1 : Une série de meurtres effroyables a provoqué une onde de choc à Gotham. La piste mène tout droit vers un sinistre tueur en série, au corps percé d’innombrables clous et baptisé l’écorché. Mais s’agit-il des agissements d’un seul désaxé, ou y a-t-il quelque chose d’encore plus sinistre en jeu ?

Pas besoin de détailler davantage le début de l’histoire, le résumé de l’éditeur suffit amplement.

[Critique]
Qu’il est plaisant de retrouver un Chevalier Noir détective au sens littéral, sans artillerie lourde ou gadgets surpuissants. Un justicier qui a démarré sa croisade depuis trois ans, dont les ennemis emblématiques ne sont pas encore présents. Complice avec Gordon (et Alfred), Batman avance méthodiquement, un peu rapidement aussi (pas de place pour Bruce Wayne dans la fiction). Quelques nouveaux personnages secondaires sont posés (un médecin légiste un peu creepy, un journaliste indépendant solitaire prompt à avoir des ragots) pour – sans doute – être réutilisés plus tard. En effet, Dark Patterns est (en VO) « banalement » une série en douze chapitres qui se suivent, avec une enquête différente tous les trois épisodes.

En France, Urban Comics a donc choisi de les segmenter en quatre opus dédié chacun à une enquête. Ce qui relance toujours le même débat légitime sur le prix de vente par rapport au nombre de pages d’une part, mais aussi par rapport à un horizon éditorial « inconnu » d’autre part. Comprendre qu’à terme, il est possible qu’Urban réédite Dark Patterns en intégrale (320 pages) au même format ou en Nomad… Impossible de le savoir pour l’instant, il faudra donc débourser 64 € pour l’entièreté de la saga (16 € par tome) ! Pour information/rappel, un titre équivalent (Absolute Power et ses 320 pages également) est vendu… 31 € ! De même, certaines rééditions de plus de 500 pages (Justice League Intégrale) coûtent elles aussi 31 € (et même 30 € avant juillet 2024 – code UB30 chez les commerçants). Au lecteur de trancher : 16 € une fois de temps en temps (tous les quatre mois) passeront mieux qu’un achat complet d’un coup ?

Revenons à L’Homme Blessé. Le titre fait référence à l’antagoniste de ce premier volet, un « coupable » très rapidement identifié et, chose rare, il s’agit d’un antagoniste (et non un ennemi) qui a une originalité « graphique » qui marque immédiatement les esprits et, chose rare, pourrait peut-être même rejoindre le prestigieux panthéon des figures atypiques de la galerie des vilains de Batman. En effet, cette mystérieuse personne (rapidement dévoilée) a enfoncé dans son corps une multitude de piques, vis et barres de fer transperçant sa peau. De même pour son visage, blindé de clous et punaises en tout genre, brrrh ! Comme dit le Chevalier Noir, « sa chair est une tapisserie d’automutilation quasi fatale. Si je le touche je le tue. ».

Affrontement singulier (impossible de le frapper), origine cohérente (connectée à une tête connue de Gotham), épopée rythmée… Cette première enquête de Dark Patterns fonctionne très bien, même si un peu courte, trop rythmée (certains pans vont trop vite), il faudra voir sur l’entièreté de la série s’il y a un écho à ce nouvel Homme Blessé. Pas grand chose d’autre à critiquer (positivement ou négativement) sur le scénario signé Dan Watters (récemment et principalement sur Nightwing, il a aussi œuvré sur une multitude de titres chez DC à droite à gauche). Côté visuel, Hayden Sherman (Absolute Wonder Woman) offre une vision fidèle aux récits des 1990’s, avec des traits limpides et des cases très détaillées, fournies, corrélés à une dimension presque psychédélique dans sa colorisation (Triona Farrelle). Une patte peut-être clivante pour certains, notamment dans les visages, bouches et expressions faciales. Mais on ferme aisément les yeux sur ça tant l’ensemble ravit. Lecture courte mais intense (et onéreuse) !

[À propos]
Publié chez Urban Comics le2 mai 2025.
Contient : Batman : Dark Patterns #1-3
Nombre de pages : 80

Scénario : Dan Watters
Dessin & encrage : Hayden Sherman
Couleur : Triona Farrelle

Traduction : Basile Béguerie
Lettrage : Cromatik Ltd (Île Maurice)

Acheter sur amazon.frBatman Dark Patterns – Affaire #1 : L’Homme Blessé (16 €)

Batman Nocturne – Tome 5 : Finale

Ça y est ! La série Batman Nocturne arrive enfin à son terme. Les quatre précédents volumes ont mis à l’honneur de somptueuses planches mais un scénario assez médiocre et vite oubliable (cf. chronique du quatrième). Les neufs chapitres de la série Detective Comics (#1081-1089) achèvent ce run de Ram V dans Finale. Critique d’une conclusion attendue avant le renouveau de la série (Ghosts of Gotham, chapeauté par Tom Taylor – disponible le 27 juin).

[Résumé de l’éditeur]
Exilé d’une ville qui le croit mort, Batman a été emmené loin de Gotham jusqu’à un désert de légendes, à la frontière du mythe et du réel. Toujours possédé par un démon Azmer et perdant peu à peu sa propre identité, il erre dans ce paysage hostile, guidé seulement par ses visions. Et sans eau, sans vivres et sans personne pour le sauver, seules deux options se profilent : venir à bout du démon qui le ronge de l’intérieur, ou se résigner à mourir et laisser ses os blanchir à jamais dans le sable. Pendant ce temps, le plan des Orgham est bel et bien lancé : ils utilisent le moteur de réalité pour faire oublier à tout Gotham que Batman a bel et bien existé…

NB : Au-delà de résumé, il est certainement judicieux de reprendre le texte en début de livre proposé par Urban Comics pour bien tout avoir en tête avant la lecture du tome ou de la présente critique. Le voici donc juste ci-après.

[Dans le tome précédent]
Le plan des Orgham a bel et bien fonctionné : ils sont parvenus à prendre le contrôle total de Gotham en s’immisçant dans les hautes sphères du pouvoir gothamien, en transformant ses laissés-pour-compte en une armée de monstres à leur service, et surtout en y excisant celui qu’ils considèrent comme une anomalie dans l’histoire de la cité : Batman. Capturé par Arzen Orgham, le justicier s’est vu emprisonné et inoculé un démon Azmer, dévorant de l’intérieur ses souvenirs comme sa santé mentale et le rendant plus vulnérable que jamais.

Après avoir mis l’homme à genoux, il ne leur restait qu’à détruire le symbole: dans une mise en scène macabre, l’homme Chauve-Souris fût conduit à la potence sous les yeux de la population de Gotham, et pendu haut et court.

Mais c’était sans compter sur une alliance aussi efficace que contre-nature pour organiser son sauvetage, réunissant aussi bien des alliés historiques du Chevalier Noir comme Jim Gordon, Catwoman ou Batgirl, que des ennemis d’hier comme Mister Freeze, Double-Face ou Azrael. Ayant transmis à Bruce, par un baiser, un poison concocté par Ivy permettant aux yeux des Orgham de simuler la mort du héros au moment où la sentence tombe, Catwoman parvient tout d’abord à lui éviter le pire. Par la suite, cet escadron improvisé réussit à récupérer le corps de Bruce et à s’extirper des rues de Gotham avec fracas, avant de le confier à Talia al Ghul pour qu’elle puisse le mettre en sûreté… et le confronter à son destin

Car si l’homme fût sauvé in extremis, il n’en demeure pas moins dans un état catatonique proche de la mort, sa psyché continuant d’être ravagée par le démon Azmer et par Barbatos, personnification monstrueuse de la Chauve-Souris. Pire encore, tout Gotham a vu son protecteur se balancer au bout d’une corde, et le souvenir du mythe s’érode déjà alors que les Orgham utilisent le moteur de réalité pour réécrire une Gotham ou Batman n’aurait jamais existé…

[Critique]
Finale
est scindée en plusieurs parties distinctes et inégales. On y trouve ainsi Une élégie de sable en trois chapitres puis un interlude Son nom était Dr Hurt (composé de trois back-ups). La suite se compose de Crescendo en quatre épisodes, chacun coupé par un interlude (un back-up à chaque fois) : Terrain de chasse, Aud-Daj-Jé, Habeas Corpus et Bonk. Enfin, Finale conclut le tome en deux épisodes, eux aussi entrecoupés un interludes back-up, Enfant chéri. Alors qu’est-ce que ça vaut tout ça ?

Le plus dur est de commencer… Une élégie de sable est le récit le moins intéressant et le plus insupportable à lire, il rappelle les pires moments du run de Grant Morrison, à mi-chemin entre le rêve et la réalité, dans un style décousu, une narration complexe et un propos, in fine, qui n’avait pas besoin d’occuper autant de place (en gros : Batman va « se réveiller / se ressourcer / revenir plus fort »). Cette errance « sépia chromatique » est trop longue et on décroche facilement.

L’omniprésence de Barbatos et Hurt se veut à la fois un hommage à d’anciens moments cultes de Batman (comme Morrison l’avait fait avant lui – avec la même impression désagréable et non limpide) et à la fois une somme soi-disant logique de ce qui a été montré auparavant (on cherche encore le pourquoi du comment). Bref, Une élégie de sable, malgré son joli titre poétique renou malheureusement avec tous les travers désagréables de Batman Nocturne, à peine sauvée par ses quelques planches élégantes (de Riccardo Federici, Stefano Raffaele – qui n’opèreront plus ensuite, laissant place à une myriade d’autres dessinateurs, tous talentueux – cf. rubrique À propos plus bas). C’est un parti pris clivant qui semble plaire à certains et fortement agacer à d’autres (dont l’auteur de ces lignes, vous l’aurez compris depuis le temps). Ce n’est pas l’idéal pour débuter sa lecture, ça ne motive pas à vouloir poursuivre…

Heureusement, le complément Son nom était Dr Hurt est plus intéressant, bien qu’anecdotique eu égard de la grande fresque qu’est la série de Ram V mais sympathique tout de même. Et, heureusement (bis) la suite est d’un meilleur acabit. En effet, Crescendo et Final se lisent avec une excellente fluidité rythmique – peut-être pour la première fois dans toute la série – et rétablit une action efficace avec une double équipe (les alliés de Batman, dont Nightwing, Batgirl, Azrael… ET ses ennemis/antagonistes comme Double-Face, Catwoman, Talia al Ghul, Freeze… face aux ennemis communs – on en parle plus loin).

Le gros problème est la multitude de courtes histoires en back-up qui s’intercalent maladroitement dans les chapitres parentaux. Des courts récits qui ajoutent une certaine importance non négligeable pour « comprendre » ce qu’on va découvrir ensuite, mais il aurait fallu tout proposer en début ou milieu d’ouvrage pour avoir ensuite un enchaînement quasiment sans faute. La dernière ligne droite de Batman Nocturne voit un enchaînement de combats (loup-garou, démon, créature…) mais, surtout, une conclusion plutôt correcte et cohérente avec tout ce qui a été instauré depuis le premier tome. Et en cela, c’est déjà très très bien.

Comprendre : la fin de règne des Orgham et Azmer, se réclamant héritiers de Gotham après avoir montré l’homme chauve-souris déchu et (théoriquement) mort. Mais, on le sa(va)it, rien de tout ça ne fonctionnait jamais vraiment, faute à une écriture confuse, des personnages nouveaux peu empathiques ni charismatiques, des concepts abscons, des moments inintelligibles et peu passionnants… Se targuant de constituer un véritable « opéra » urbain et nocturne (forcément), l’évidence pointe son nez en fin de lecture : et si tout cela n’aurait pas été mieux directement en animation et… en musique ? Dans un médium statique et silencieux, Nocturne passe peut-être plus difficilement avec ce côté figé (si tant est que c’était le souhait de son auteur Ram V).

Au-delà des souvenirs pénibles de l’entièreté de la série, on retient positivement quelques éléments (concentrons nous sur les rares réussites). Principalement la partie graphique (couvertures comprises et la plupart des planches – ce qu’on a mis en avant régulièrement dans les chroniques associées) et quelques parcours singuliers voire intrigants de protagonistes. Renee Montoya muée en (The) Question par exemple (avec de belles promesses pour l’avenir). Bien entendu, Batman reste aussi « palpitant », malmené une énième fois (déconstruit ?) avant de revenir (littéralement) d’entre les morts, plus puissant que jamais (comme dans la série parallèle Dark City). Le tout débouchant sur une énième « remise à zéro » (en vérité : la suite de Detective Comics se poursuit et est chapeauté par Tom Taylor dans Ghosts of Gotham).

Conseille-t-on Batman Nocturne ? Honnêtement non (mais visiblement – et je permets une rare subjectivité – je suis le seul à le penser). Rien de vraiment original : des nouveaux ennemis – oubliables – pour un plan classique puis déjoué… Un bourbier manquant de limpidité et qui peinait cruellement à susciter de l’intérêt. En somme pour les curieux n’osant franchir le pas, espérez une réédition en format Nomad pour découvrir à bas prix.

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 28 mars 2025.
Contient : Detective Comics #1081-1089
Nombre de pages : 312

Scénario : Ram V
Dessin & encrage : Riccardo Federici, Stefano Raffaele, Javier Fernandez, Guillem March, Christian Duce, Hayden Sherman, Christopher Mitten, Jorge Fornés, Robbi Rodriguez, Lisandro Estherren, Francesco Francavilla
Couleur : Lee Loughridge, Dave McCaig, Luis Guerrero, Triona Farrell, Patricio Delpeche, Francesco Francavilla

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : MAKMA (Gaël Legeard, Emmanuel Touset, Morgane Rossi et Bryan Wetstein)

Acheter sur amazon.frBatman Nocturne – Tome 5 : Finale (31 €)