Lex Tutor – Le droit d’être Batman

J’ai été contacté par le YouTubeur Lex Tutor (alias Nunya) en juillet 2015 dans le cadre de sa troisième vidéo de vulgarisation sur le Droit. En effet, le jeune homme (avec qui j’étais intervenu, par le plus grand des hasards, sur un plateau télé en mai 2008 !) avait besoin de conseils pour évoquer la possibilité d’être un vigilent « dans la vraie vie », ainsi que des exemples précis de situations sur Batman. Je lui ai donc apporté mon aide à travers des conseils de lecture et des suggestions diverses concernant des comics sur Batman ou des adaptations de son univers

Après plusieurs échanges, je lui ai conseillé la très bonne histoire L’Avocat du Diable, dans laquelle Batman défend le Joker au tribunal car son pire ennemi n’est pas le responsable du crime duquel il est accusé (critique prochainement en ligne) ! Également au programme : Année Un, The Dark Knight Returns, Batman Eternal (l’homme chauve-souris enferme un de ses ennemis dans sa Bat-Cave), etc. J’ai également parlé du jeu Arkham Knight, dans lequel Batman ne tue pas les passants en roulant avec sa Batmobile, celle-ci envoie des petites décharges électriques pour les assommer (toujours dans le cadre de la fameuse morale « ne pas tuer »). Enfin, j’ai suggéré une vidéo qui montre les différents « morts » imputables au Dark Knight dans les adaptations cinématographiques.

« Batman incarne aujourd’hui le phénomène d’autojustice dans toute sa complexité. Mais en dehors des villes du hard boiled dont il est à la fois acteur et spectateur, un tel individu peut-il exister ? Peut-on faire justice soi-même ? Peut-on devenir… Batman ? »

Justice privée, religieuse, d’état, Loi du Talion, évolution de la justice, auto-justice… découvrez tout cela dans sa passionnante vidéo (regardez ses anciennes aussi) qu’il a mis en ligne en septembre 2015.

Pour finir, outre les remerciements de la vidéo et dans la description de celle-ci qui me touchent beaucoup, j’ajoute le même dialogue issu d’Under the Red Hood que Nicolas a publié :

Jason Todd n’en veut pas à Batman de ne pas l’avoir sauvé mais ne lui pardonne pas que le Chevalier Noir n’ait pas tenté de le venger et de tuer le Joker.
Si c’était toi qu’il avait réduit en bouillie… Si c’était toi qu’il avait torturé… Si c’était toi qu’il avait tué… J’aurais remué ciel et terre pour retrouver cet immonde tas de merde et je l’aurais expédié en enfer.
Tu ne comprends pas. Tu n’as jamais compris.
Quoi ? Ta fameuse morale ne t’y autorise pas ? C’est trop dur de « franchir la ligne » ?
Oh, mon Dieu, non… Ce serait tellement facile. J’ai toujours rêvé de le tuer. Il ne se passe pas un jour sans que j’aie envie de le capturer et ensuite de passer un mois entier à lui faire subir les pires tortures qu’on puisse imaginer. Je voudrais le voir en sang, brisé… me supplier… hurler sa souffrance alors qu’il est en train de mourir d’une mort atroce.
Le Joker intervient : Les grands esprits se rencontrent…
Batman poursuit :
Je voudrais le voir mort… Je le veux de toutes mes forces. Mais si je fais ça… Si je descends dans cet enfer… Jamais je n’en reviendrai.

Un grand bravo lui et merci pour sa confiance 🙂

Année Un : Batman / Ra’s al Ghul

En juin 2006, Panini Comics publie le cinquième hors-série de son magazine Batman consacré à l’emblématique Ra’s al Ghul. Cette mini-série se déroule peu après Les jeunes filles et la mort.

Batman Ras al Ghul Année Un[Histoire]
Dans Gotham, les personnes qui sont censées mourir (suites à des maladies, des impacts de balle, des accidents, etc.) semblent étrangement ne pas succomber définitivement à leurs blessures. Elles restent plus ou moins en vie dans un état végétatif. Batman enquête pour comprendre comment cela est possible.

Parallèlement il reçoit une lettre posthume de Ra’s al Ghul son ancien ennemi immortel (censé être mort à la fin de Les jeunes filles et la mort). Celui-ci scande par écrit son éternel envie de désigner le Détective son digne héritier ; il raconte aussi ses souvenirs des anciens siècles, sa découverte des premiers fruits conférant le pouvoir d’immortalité, sa crainte de sombrer (un peu) dans la folie après chaque plongeon dans un puits de Lazare, son amour pour la nature et son désir d’anéantir une bonne partie des humains qu’il juge responsable de la pollution et de la destruction de la Terre. L’éco-terroriste justifie ses actes et emmène Batman dans un jeu de piste mystérieux par la même occasion.

Batman Ras al Ghul Annee Un[Critique]
Découpée en deux chapitres, cette curieuse Année Un de Ra’s Al Ghul excelle dans le premier mais, hélas, perd en qualité, voire en intérêt dans la seconde. Le début annonce en effet une mystérieuse épidémie qui empêche les gens de mourir (qui sera poussé à l’excès avec la résurrection des morts par la suite, ce qui est dommage) et surtout montre le passé de l’emblématique « Tête de Démon ».

Un style visuel typiquement inspiré des estampes japonaises est dès lors utilisé pour les (nombreux) flash-backs. Le résultat, aux tons pastels colorés, est remarquable (pas toujours) mais dénote avec les scènes se déroulant dans le présent et leur côté sombre. Graphiquement il n’y a donc rien à redire.

Ras al Ghul Année UnCôté scénario, arrivé à la fin du récit, l’ensemble est confus : Ra’s Al Ghul n’est donc pas vivant mais il avait réussi à faire des morts de Gotham des zombies qui en avaient après Batman (sic)… Du propre aveu d’Alfred, qui s’adresse plus au lecteur qu’à son maître, dans les dernières cases : « Vous avez fait courir Ubu [un homme de main de Ghul] pour rien, cela je l’ai compris… la suite est moins claire. » La suite est donc une réponse de Bruce expliquant qu’une formule chimique permet de recréer un puits de Lazare, ce qu’il fait dans sa Bat-cave ; il assène que si Ra’s souhaite revenir, il l’attend de pied ferme.

Ra’s al Ghul : Année Un est donc inégal : de jolies planches, alternant deux styles très différents, servent une double histoire. L’une, très réussie, retraçant certains moments de la vie de l’éco-terroriste, l’autre, moins prenant, portant une intrigue sur des zombies et des explications assez floues et peu plausibles, dommage.

Batman Ras al Ghul Annee Un Zombies[À propos]
Publiée en France dans le magazines Batman Hors-Série #5 en juin 2006 par Panini Comics.

Titre original : Year One : Batman/Ra’s al Ghul
Scénario : Devin Grayson
Dessin : Paul Gulacy
Encrage : Jimmy Palmiotti
Couleur : Laurie Kronenberg

Première publication originale en juin et juillet 2005.

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Year One : Batman/Ra’s al Ghul [en anglais]

Ras al Ghul Year One

Les jeunes filles et la mort

Neuf chapitres (et un court prologue) composent cette histoire publiée dans les magazines Batman Hors-Série #1 et #2 en septembre et décembre 2005 par Panini Comics.

Batman Les Jeunes Filles et la Mort[Histoire]
Ra’s Al Ghul, 600 ans, se meurt. Il sollicite Bruce Wayne/Batman (il connaît son identité) de lui laisser un puits de Lazare pour se ressourcer et continuer d’être immortel mais le Chevalier Noir estime qu’il ne lui doit rien et préfère les détruire. Le terroriste international propose alors un échange au milliardaire : un puits contre une potion chimique qui lui permettrait de dialoguer avec ses parents morts. La tentation est grande…

Parallèlement, une mystérieuse femme, Nyssa, souhaite la mort de Ra’s Al Ghul et veut s’allier avec Batman dans cette tâche. Elle ira même jusqu’à tuer et ressusciter Talia Al Ghul, afin que celle-ci nourrisse également une haine farouche envers son père.

Batman Nyssa Al Ghul[Critique]
Mini-série écrite par le talentueux Greg Rucka (Gotham Central) et dessinée par Klaus Johnson (encreur de Frank Miller sur The Dark Knight Returns et dessinateur de Grant Morrison présente Batman – Tome 0 : Gothique), Les jeunes filles et la mort met du temps à démarrer. Faute à d’incessants flash-backs entre Nyssa et Ra’s Al Ghul. Si l’ennemi immortel brille par son charisme et son « élégance », Nyssa (on comprend vite qu’il s’agit de sa fille) ne génère guère d’empathie. C’est le principal problème de cette histoire. Ce nouvel antagoniste féminin a été créé spécialement pour cette mini-série mais il est difficile de s’y attacher. On comprend ses motivations et son parcours, la séquence dans un camp de concentration est particulièrement touchante et éprouvante — mais ça ne suffira pas à réellement s’attacher au personnage — et par conséquent sa haine viscérale, et justifiée, envers Ra’s Al Ghul. L’évolution de Nyssa est à ce sujet relativement cohérente, et plaisante.

Celle de Bruce Wayne (ici moins présent en tant que Batman, avec moins de scènes d’action, ce qui n’est pas plus mal) est passionnante car inattendue et originale. Le Chevalier Noir rencontre en effet ses parents, qui lui font la morale. Cette séquence apporte une touche atypique au récit et justifierait presque à elle seule sa lecture.

Ra's Al Ghul NaziLes dessins de Klaus Johnson portent la patte indéniable de l’artiste, avec leur côté un peu « carré » (rappelant parfois brièvement Miller qu’il a encré des années avant) et donnent un côté visuel original. Malheureusement, ses planches sont inégales, certains visages sont parfois dignes de simples brouillons et les mensurations corporelles apparaissent de temps à autre faussées. Les fonds vides, juste colorés, et les traits parfois très gras, n’aident pas non plus rendre le tout plus joli.

Les jeunes filles et la mort est donc une histoire bancale, suffisamment intrigante pour être lue, plus ou moins bien dessinée, proposant de bonnes choses : des flash-backs osés dans des contextes historiques douloureux (Ra’s Al Ghul en officier nazi, les déportés, etc.), la balade de Batman dans Gotham avec ses défunts parents, la relation entre Nyssa et Talia, la fin surprenante, etc. Malheureusement, le personnage principal, Nyssa, n’est pas forcément des plus attachants et sa trop mise en avant déséquilibre un récit qui s’annonçait prometteur. Légère déception mais à découvrir tout de même pour les raisons évoquées ci-dessus.

Une suite indirecte a été publiée quelques mois après, sous le titre Ra’s al Ghul : Année Un, à découvrir sur cet article.

Martha Wayne[À propos]
Publiée en France dans les magazines Batman Hors-Série #1 et #2 en septembre et décembre 2005 par Panini Comics.

Titre original : Death & The Maidens
Scénario : Greg Rucka
Dessin et encrage : Klaus Johnson
Couleur : Steve Buccellato

Première publication originale du prologue dans Detective Comics 783 en août 2003 puis dans Death & The Maidens d’octobre 2003 à août 2004.

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Nyssa et Talia Al Ghul