Archives par mot-clé : Gordon Purcell

No Man’s Land – Tome 05

No Man’s Land est une longue saga constituée de plusieurs tomes : le volume unique Cataclysme, qui en était l’introduction, puis le récit « principal » de No Man’s Land en six tomes et, enfin, New Gotham en trois volumes. Voir la page récapitulative si besoin.
Afin d’établir des résumés et critiques plus visibles qu’un gros bloc reprenant l’ensemble de l’ouvrage, celles-ci sont divisées par les différentes (petites) histoires qui composent le tome. Le résumé est en italique sous le titre et la critique est précédée d’une petite flèche.

batman-no-mans-land-tome-5

Chemin de fer souterrain
scénario : Steven Barnes | dessin : Paul Ryan
Batman : Legends of the Dark Knight #123 | Batman : Shadow of the Bat #91

Un certain « pavé » tente de consolider une zone en assurant protection et sécurité à ses habitants. Affublé d’un brassard du logo du Chevalier Noir, cet ancien agent de police (Bock) agit en effet avec l’aval de Batman ; ce dernier lui donne un coup de main de temps en temps. Bock s’engage dans un combat dans l’arène du Pingouin pour marchander avec lui…

no mans land pavé

► Deux chapitres composent cette histoire qu’on peut qualifier « d’introductive » à ce cinquième volume. Comme beaucoup de ses prédécesseurs, la situation à Gotham reste « la même » (comprendre : « stagne ») et on continue de suivre les (petites) évolutions de différents protagonistes. Ici, c’est donc un ancien policier, rapidement attachant, et le Pingouin qui sont mis en avant. Les apparitions de Batman, le Joker et Robin sont les bienvenues et permettent de resituer leur état des lieux à chacun (pas « en quête » particulière, etc.). Après un premier chapitre d’exposition, le second est résolument tourné vers l’action et fonctionne bien, avec une certaine touche d’humanité (y compris chez Copplebot !) et de noirceur. Une scène finale s’attarde sur des soldats étant à l’extérieur de Gotham (ils gardent les entrées/sorties possibles) et reconnaissent l’injustice que subissent les citoyens. Un point de vue qui manquait clairement jusqu’ici et qui mériterait d’être exploré par la suite, ne serait-ce que pour montrer une multitude de réflexions bien loin d’un manichéisme primaire. En somme, ce « chemin de fer souterrain » est une bonne entrée en matière.

« Il m’a appris qu’on n’attaque pas le corps de son adversaire, mais son cœur et son âme. On frappe pour ternir sa lumière, afin que son ombre intérieure enfle et vienne le consumer. »

Soirée en ville
scénario : Chuck Dixon | dessin : Mat Broome
Batman #571 | Detective Comics #738

Dans les souterrains de Gotham, Bane contraint une jeune femme à s’allier à lui. Il lui confie qu’il a préparé un plan en secret car il travaille pour quelqu’un, dont il ignore le nom, et qui a des ambitions pour les lendemains de Gotham. De leur côté Batman et Robin ont aussi le sentiment qu’une personne venue de l’extérieur manipule les évènements de la ville.

Bane répand la terreur en ville et signe ses assassinats par des cartes de deux de pique, pour « faire croire » que Double-Face sont derrière tout cela. Un jeu qui ne dupe pas Le Pingouin qui convie carrément le Chevalier Noir et son acolyte pour aider Harvey Dent…

Bane No Mans Land

► Le Caveau et Le Vandale sont les noms des deux chapitres de ce qui est peut-être le premier réel gros tournant dans la saga depuis des lustres. On insiste, un peu trop souvent, sur l’idée d’un homme de l’ombre (qu’on peut déjà imaginer si l’on connaît modestement la mythologie de Batman ou de DC Comics). Même si c’est assez soudain, c’est clairement une étape bienvenue pour No Man’s Land (dont le côté stagnant n’est plus à prouver). Cette transition est tout de même écrite avec une certaine habilité. Employer Bane est une bonne chose, c’est un ennemi intelligent, il le prouve en expliquant qu’il conserve l’illusion que la personne pour qui il travaille est son patron mais in fine ce sont ses intérêts qu’il sert. De la même manière, en refusant d’agir sur certains points, Batman prouve, lui aussi, son intelligence, pour recueillir certains indices importants. Globalement, l’histoire se tient (malgré le personnage féminin débarquée de nulle part) mais aurait dû être avancée plus tôt pour gagner en fluidité sur l’ensemble des tomes (même si cette piste d’une personne de l’ombre avait déjà été évoquée discrètement par le passé). On retrouve Chuck Dixon derrière le scénario, c’est un habitué de Bane puisqu’il a créé le personnage et l’a émancipé lors de la saga Knightfall (des allusions y sont faites). Aux pinceaux, Mat Broome se démarque en proposant un découpage très rythmé, des traits modernes et un ensemble plutôt élégant et agréable. Du tout bon donc.

Capitaine d’Industrie
scénario : Chuck Dixon | dessin : Rafael Kayanan
Batman : Legends of the Dark Knight #124

Le criminel Shanks promet à chaque citoyen qui le rémunère en argent ou bijoux un passage secret permettant de quitter Gotham. Batman recherche Danny Flowers, qui a justement emprunté cette soi-disant voie de sortie. Pour enquêter, le Chevalier Noir utilise son alias de Malone l’allumette.

Batman Malone l'allumette

► L’intérêt de ce chapitre est « double ». La première est l’incursion d’un côté über « primaire » de citoyens piégés dans un tunnel qui deviennent limite des zombies. Si l’on ne flirte pas vraiment avec le registre fantastique (et tant mieux), cette petite originalité fait plaisir à voir. L’autre intérêt est de constater « enfin » une réflexion qu’on peut légitimement se faire : si l’argent (et les bijoux) n’a pas de valeur durant le No Man’s Land, on peut imaginer qu’une fois la situation débloquée, la monnaie redeviendra synonyme de fortune. Si quelques personnes souhaitent en conserver pour « plus tard », cela semble logique. C’est donc un aspect que l’on découvre ici, brièvement certes, mais cela valait le détour. Et permet d’aboutir sur une case finale assez glaçante. L’idée effleurée d’un potage privé pour marchander est également intéressante. Du reste, on retient des dessins corrects mais sans plus et un Batman utilisant son identité de Malone l’allumette, un alias qu’on retrouve dans d’autres aventures du Dark Knight — dont des plus récentes comme Batman Eternal.

Avis de Tempête
scénario : Devin K. Grayson | dessin : Dale Eaglesham
Batman : Shadow of the Bat #92

Superman revient à Gotham City mais en tant que civil. Il veut aider quelques citoyens mais aussi vérifier qu’un attentat terroriste par drone ne va pas se produire. Son chemin croise celui de Batman.

Batman Superman No Mans Land

► Le retour de l’Homme d’Acier apporte une certaine « pause » légèrement rafraichissante et avec un peu d’humour. Concrètement, elle n’apporte pas grand chose mais permet de réexpliquer les raisons de l’absence de Superman dans Gotham. Ce dernier était déjà intervenu par le passé (voir les volumes précédents) mais ses actions se soldaient par un échec. Batman avait déjà averti son collègue de la Justice League que seul lui pouvait aider SA ville et comprendre les façons d’être des humains (comprendre « néfastes »). Graphiquement on oscille entre l’excellent (des cases fourmillent de détails, des visages sont parfois d’une grande complexité) et le mauvais (têtes pas crédibles, contours brouillons…). Pénible du coup, et assez paradoxal mais tant pis.

On retient toutefois une tirade de Batman relativement puissante et efficace, à découvrir ci-dessous.

Batman Superman No Man s Land

Jurisprudence
scénario : Greg Rucka | dessin : Damion Scott
Batman #572 | Detective Comics #739

L’Encaisseur est un sbire de Double-Face, il apporte à son boss la prisonnière Renée Montoya, enfermée avec son frère. Harvey Dent, visiblement sous le charme de Renée, va aussi kidnapper Gordon pour… lui faire son procès !

Double Face Montoya

► Cette histoire apporte enfin une résolution d’intrigue entamée plus tôt (voir volumes précédents) notamment entre les agissements de Gordon envers Double-Face. On comprend que le commissaire a tenté de faire affaire (un pacte de défense mutuelle) avec l’ancien procureur, par l’intermédiaire de Renée Montoya (qui a donc été capturée à ce moment-là et gardé captive durant cinq mois). La première partie est un peu confuse de prime abord avec des éléments peu contextualisés, le personnage de l’Encaisseur (aperçu durant Knightfall et Le Fils Prodigue) qui revêt une certaine importance avant de disparaître, etc.

L'Encaisseur Double Face

La seconde, le procès de Gordon, est nettement plus intéressante, aussi bien par son découpage original durant les témoignage que par une habile écriture sur la culpabilité de Gordon puis sa défense. Rarement la schizophrénie de Dent n’aura été si bien dépeinte — à travers lui ou bien via un dialogue des parents de Montoya. En somme c’est une véritable incursion méta (le faux procès à l’intérieur du no man’s land à l’intérieur de Gotham) qui est proposée avec brio ! Original et d’une parfaite continuité avec l’ensemble de la saga, tout en amorçant un certain virage pour montrer qu’on ne va plus trop « stagner ». Deux critiques négatives cependant : Jurisprudence arrive un peu tardivement pour saisir les anciennes connexions des récits passés (ce n’est pas très grave lorsqu’on lit l’intégralité de la saga à la suite) et les dessins ont un côté cartoony par forcément idéal pour « prendre au sérieux » ces deux chapitres. Malgré cela, à mi-chemin de ce cinquième tome c’est clairement une réussite.

Le Roi Lézard
scénario : Chuck Dixon | dessin : Staz Johnson / Gordon Purcell
Robin #71-72

Killer Croc va prendre sa revanche après sa défaite face à Black Mask et aux policiers. L’homme-lézard, ou plutôt le Roi Lézard, reprend petit à petit des quartiers de la ville. De son côté, Robin (Timothy Drake) se reposer à la Batcave avec Alfred. Le jeune prodige ignore comment il expliquera à son père son absence soudaine. Dick panse aussi ses plaies mais avec Barbara, et Stéphanie Brown, dont la mère avait découvert son costume d’Oracle, est consignée à domicile. Mais toute la Bat-Family communique entre elle et se soutient.

Robin No Mans Land Killer Croc

► Une coopération inédite entre le Pingouin et le GCPD, le « retour » des justiciers — Robin est au centre du récit mais revoir brièvement Alfred, Dick, Stéphanie et Barbara fait plaisir — et Killer Croc plus puissant que jamais (il pend ses victimes). Une petite histoire qui se lit très bien et qui continue cette mouvance auquel nous habitue le volume depuis le début. Seul regret côté dessin où l’ensemble pêche un peu et retrouve ce côté très années 80/90 à l’inverse des chapitres précédents. On notera également la fin, très intéressante (qui se terminera dans le tome 6) avec un bel accent mis sur la relation père-fils entre Tim et son paternel.

Retrouvailles
scénario : Greg Rucka | dessin : Rick Burchett
Batman : Legends of the Dark Knight #125

Gordon et Batman se revoient enfin en privé et règlent leur compte. Gordon ne digère toujours pas l’absence notoire du Chevalier Noir au début du no man’s land et le Dark Knight est prêt à lui révéler son identité secrète pour rétablir la confiance brisée.

Gordon VS Batman

► Il est utile de se remémorer pourquoi il y a cette tension entre les deux mythiques partenaires. C’est ce que fait subtilement Rucka en rappelant un contexte temporel mais le lecteur doit surtout se souvenir que cette fameuse absence a eu lieu « avant » le premier tome de la saga, quand Bruce Wayne tentait alors d’agir à l’extérieur en jouant de ses influences. Une disparition de Batman qui a engendré également une perte de repères et d’espoir. Clairement, le texte aurait dû aller davantage en ce sens au lieu de passer par de nombreuses cases muettes — qui fonctionnent quand même très très bien. De plus, les traits de Burchette rappellent ceux de Darwyn Cooke, combiné avec un texte « adulte », ça fait toujours mouche. Même si certains visages sont clairement ratés. Un chapitre de transition important.

Monnaie d’échange spirituelle
scénario : Devin K. Grayson | dessin : Dale Eaglesham
Batman Chronicles #38

Le docteur Leslie Thompkins, aidée de Mikey — ancien sbire de Black Mask —, récupère le criminel Zsasz. Dans sa zone « neutre » d’aide aux blessés, Thompkins voit défiler aussi bien de terribles criminels, comme Killer Croc, que des alliés du Chevalier Noir, dont Huntress, Batgirl et lui-même. Un véritable défi moral est en jeu : pour sauver Zsasz, il faut une transfusion sanguine. Batman refuse.

batman thompkins no mans land

► Cet excellent très long chapitre permet de retrouver Mikey — introduit dans le premier tome de la saga avec brio — et évidemment Thompkins, qui était présente surtout dans les histoires précédentes liées à Azraël. C’est à la fois la force et « faiblesse » de l’histoire : se remémorer d’anciens morceaux de récits, parfois publiés très longtemps en amont. Revoir Batman au « centre » du scénario est réjouissant, d’autant plus que le détective est en déroute morale total, à nouveau à cause du contexte du no man’s land (en résulte une belle tirade ci-après de Thompkins). L’amour quasi maternel du docteur sur le Chevalier Noir est extrêmement touchant, au même titre que sa volonté de sauver des vies sans juger ses patients. Thompkins est aussi le personnage principal et cela permet de proposer un chapitre intense et quelque peu dramatique. Unité de temps (quelques minutes/heure), unité de lieu (la zone dite « neutre » de Thompkins) mais multiples unités d’action dans ce petit théâtre gothamien où se croisent autant d’ennemis que d’alliés que d’antagonistes. Où le manichéisme primaire ne peut pas avoir lieu, c’est clairement sur ce terrain qu’il faut jouer. Malheureusement, pas d’issue tragique (dans le sens où cela aurait été une vraie surprise et un culot monstre) mais cela n’empêche pas de prendre plaisir à lire ces planches aux dessins convenus mais efficaces.

« Essaie de voir par mes yeux le monde dans lequel nous vivons et le rôle qu’on y joue. Tu n’es pas le seul à défendre un système de croyances, tu sais. Je te suis reconnaissante de tout ce que tu fais pour cette ville. Mais je n’approuve pas la façon dont tu t’y prends. Tu es infantile et entêté dans ta colère. Et plus que jamais, j’ai peur de n’avoir rien réussi à t’apprendre. Et surtout, j’ai peur… de descendre à ton niveau plutôt que de t’élever au mien. »
[Leslie Thompkins à Batman/Bruce Wayne]

Les Règles du Jeu / Le retour du pèlerin
scénario : John Ostrander / Dennis O’Neil | dessin : Jim Balent / Roger Robinson
Catwoman #75 | Azrael : Agent of the Bat #59

Catwoman est sévèrement blessée après sa mission confiée par Batman (voir fin du tome 3). Elle se rappelle alors de son enfance dans un cirque où elle a appris à devenir acrobate et voleuse de talent. Après une reprise en main, elle se met en route pour retourner à Gotham. Là-bas, le Chevalier Noir a chargé Azraël de venir en aide à la femme féline si besoin.

Catwoman no mans land

► Une fois de plus il faut se souvenir de l’ancienne histoire centrée sur Catwoman qui remonte à deux volumes plus tôt. Ces deux chapitres signent aussi le retour d’Azrael sans ses errances psychologiques internes parfois pénibles. Au contraire le second chapitre est la même histoire de son point de vue et de celui d’un antagoniste. Passé deux ou trois planches trop identiques, l’intérêt s’accroît puisque Batman récupère des données informatiques confidentielles (on ignore de quoi il s’agit) et ses deux alliées (Catwoman et Azraël) semblent appeler à de nouvelles « quêtes » chacun. De quoi rester sur sa fin mais avec la certitude que la « suite » sera dans le tome suivant, qui est le dernier. Globalement bon avec des dessins très corrects, particulièrement sur les plans larges de la ville dévastée.

Rassemblement
scénario : Greg Rucka / Paul Ryan | dessin : Bill Sienkiewicz
Batman : Shadow of the Bat #93

Tel un jeu, toutes les pièces de l’échiquier de Gotham se rassemblent ou se croisent. Les alliés d’un côté, les antagonistes de l’autre, les ennemis autour… Chacun prêt à un plan particulier : une mystérieuse femme protégée par Bane, elle-même en lien avec Le Pingouin, attendant un individu, tous épiés par Robin qui communique avec Oracle tandis que Batman conjoint Gordon, Batgirl et Azraël à une mission, Huntress s’éloigne de la Bat-Family et le Joker et sa muse Harley Quinn attendent le Chevalier Noir…

joker harley quinn no mans land

► Sans révéler le fameux élément attendu depuis un bon moment, cet ultime chapitre est carrément jouissif. On a « enfin » le sentiment que tout est en place pour la dernière ligne droite. Suivre tour à tour quasiment tous les personnages principaux est salutaire, cela ne livre pas forcément une conclusion « épique » du tome (dans les faits il ne se passe pas grand chose) MAIS on a hâte de lire la suite et fin. Tout est bien dessiné en plus, c’est une histoire idéale pour achever la lecture d’un tome très réussi !

Conclusion : avant-dernier volume de la saga, ce cinquième tome de No Man’s Land est sans aucun doute le plus abouti et le meilleur jusqu’ici. Pas un chapitre est inintéressant ou comporte d’éléments ratés ou dispensables, bien au contraire. Sa fin motive à se procurer l’ultime dernier tome. L’ensemble est fluide et frôle le sans faute, on peut déplorer quelques notes éditoriales qui auraient resituer le contexte de certains chapitres (Mikey qui était dans le tome 1, l’histoire de Catwoman du tome 3, etc.) mais si on lit toute la saga à la suite ça ne pose pas vraiment de problèmes. Quoiqu’il en soit, les auteurs, Greg Rucka en premier, ont mis la barre très haute en dévoilant une galerie de vilains iconoclastes et richement illustrée et mise en avant (plus que Batman). Quasiment un must-have donc !

Acheter sur amazon.fr

 

No Man’s Land – Tome 04

No Man’s Land est une longue saga constituée de plusieurs tomes : le volume unique Cataclysme, qui en était l’introduction, puis le récit « principal » de No Man’s Land en six tomes et, enfin, New Gotham en trois volumes. Voir la page récapitulative si besoin.
Afin d’établir des résumés et critiques plus visibles qu’un gros bloc reprenant l’ensemble de l’ouvrage, celles-ci sont divisées par les différentes (petites) histoires qui composent le tome. Le résumé est en italique sous le titre et la critique est précédée d’une petite flèche.

batman-no-mans-land-tome-4

Le Message
scénario : Alisa Kwitney | dessin : Michael Zulli
Batman : No Man’s Land Secret Files #1

Peu avant l’évacuation des citoyens de Gotham, l’un d’eux, Jason Braun, entend une voix lui demandant de délivrer un message à Oracle. Suit une dérive nocturne où l’homme va croiser Le Pingouin, Poison Ivy… et quelques autres têtes connues de la ville.

Harley Quinn Penguin Pingouin

► Voici une étrange introduction, présentant un nouveau personnage, qui n’aura d’intérêt que s’il revient ultérieurement. D’un point de vue purement rationnel, il s’agit « juste » d’un homme sombrant dans la folie de la ville, la dernière nuit où il était possible de la quitter. Avare en métaphore et proche du mysticisme, le style graphique aide à apprécier cette petite histoire qui replonge dans le passé (les débuts du no man’s land) mais s’attarde sur une personne lambda sans développement narratif réellement intéressant.

Harley Quinn
scénario : Paul Dini | dessin : Yvel Guichet
Batman : Harley Quinn #1

Poison Ivy, chargée de la récolte de fruits par Batman, découvre une étrange figure familière en costume d’Arlequin dans des décombres à Gotham. Elle décide de la soigner et écoute son histoire d’ancienne psychiatre à l’Asile d’Arkham (là où Ivy l’a connu) et son idylle avec le Joker.

Harley Quinn No Mans Land

► Cette longue histoire (48 pages) est presque la première véritable apparition de Harley Quinn dans un comic-book. Nous sommes en octobre 1999, sept ans après sa création par Paul Dini pour la série d’animation Batman, la muse du Joker a droit à sa transition vers le papier en intégrant officiellement l’arc narratif en cours de Batman, en passant par ses origines (contées ici). C’est « presque » sa première apparition puisqu’elle était déjà dans le chapitre The Batman Adventures #12 en septembre 1993 (soit pile un an après sa découverte dans le dessin animé). Mais ce chapitre est un mélange d’adaptation et de prolongement de la série de Paul Dini (et Bruce Timm), plutôt anecdotique et enfantin (disponible en français dans Batman – Les Nouvelles Aventures – Tome 2). Et puis sûr, en février 1994 est sorti l’excellent Mad Love, à la fois adaptation de l’épisode éponyme qui refermait la série, et transposition papier officielle dans un one-shot dans un récit à la double lecture. C’est donc plutôt la troisième fois que Quinn apparaît dans une bande dessinée mais véritablement la première fois qu’elle intègre le Bat-Universe des comics, sa mythologie et ses connexions avec les autres protagonistes, prenant ainsi part à la complexe mythologie du Chevalier Noir. On notera aussi au passage la couverture alternative de ce chapitre par Alex Ross, livrant toujours de sublimes compositions (cf. Kingdome Come), qui a été choisi pour illustrer ce quatrième tome de No Man’s Land.

Modifiant très légèrement des petits passages d’origin-story de Mad Love (la rencontre entre Harley et le Joker), cette histoire développe efficacement le personnage d’Harleen Quinzel. Le récit navigue d’ailleurs en perpétuelle confusion sur l’état mentale de la dulcinée du Joker et de ce dernier. Jonglant entre la folie pure et le rationalisme à propos de leur idylle, bien difficile de juger si l’un ou l’autre est réellement fou et pas conscient de ses actes. Ces éléments sont clairement les points forts de ce chapitre, s’intercalant peu après Les Fruits de la Terre (fin du volume précédent) et dans l’immense échiquier qu’est la saga No Man’s Land. On retrouve évidemment le Joker et on en sait davantage sur ce qu’il faisait récemment.

Hélas, la pauvreté graphique, oscillant étrangement entre le très cartoony (pour se rapprocher de la série d’animation ?) et un style plus classique mais mal encré et colorisé, n’aident pas à faire de ce Harley Quinn, un « must-have » et un objet culte (l’exploit de Mad Love n’est donc pas réitéré). Dommage mais pas complètement gâché pour autant car le scénariste Paul Dini, créateur du personnage, livre tout de même une histoire solide et passionnante.

*À titre anecdotique, on peut lire Nom de Zeus…

Le Roi
scénario : Ian Edginton | dessin : Jason Minor
Batman : Shadow of the Bat #89

Batman cherche  » Le Roi « , un mystérieux bienfaiteur qui a aidé les plus démunis et abandonnés. Killer Croc semble être en lien avec cette disparition.

Batman Killer Croc

► Si, une fois de plus, on s’attarde sur un personnage anecdotique, il est intéressant de constater le « bien » qui est fait dans Gotham City et, surtout, c’est la première fois depuis longtemps que Batman est au centre d’un récit. Ce qui fait… du bien aussi ! Toutefois les graphismes hideux n’aident pas à rendre cette histoire mémorable, loin de là…

Sur les quais
scénario : Janet Harvey | dessin : Sergio Cariello
Batman #569

Batman confie une mission à la nouvelle Batgirl, ravie de pouvoir montrer ses talents à celui qu’elle admire.

Batgirl No Mans Land

► Le développement du personnage de la fille de Caïn — toujours sans prénom durant cette histoire — se poursuit « lentement mais sûrement ». Apparue à la fin du deuxième tome, elle a pris la relève de l’ancienne Batgirl (Huntress qui avait revêtu la cape sans le réel aval de Batman), et permet d’obtenir une certaine dynamique intéressante. Notamment dans la relation maître-élève qui avait disparu depuis un bon moment dans les aventures du Chevalier Noir. Du reste, on poursuit, ou plutôt on stagne (mais ce n’est pas bien grave), l’évolution du no man’s land de Gotham avec toujours ses différents gangs et lieux stratégiques.

Le Retour
scénario : Larry Hama | dessin : Mike Deodato Jr.
Detective Comics #736

Bane est de retour à Gotham. Par un ingénieux système, la brute intelligente réussit à passer les ponts pourtant détruits et gardés. Bane considère que c’est SA ville et qu’il est temps de revenir y mettre de l’ordre et évidemment d’affronter Batman.

Bane No Mans Land

►Avec un excellent rythme (aucun temps mort, beaucoup d’action bien croquée), ce retour fracassant de Bane (apparu dans Knightfall, la précédente saga qui se déroulait peu avant celle-ci) est réjouissant même s’il fait surtout office d’introduction. On a hâte de voir cet antagoniste puissant œuvrer dans la ville car, s’il y a bien un ennemi du Chevalier Noir qui n’est pas dans le manichéisme primaire, c’est bien Bane.

Sous les pavés, la guerre !
scénario : Chuck Dixon / Staz Johnson | dessin : Gordon Purcell
Robin #68 à 70

Batman confie la lourde tâche à Robin (Timothy Drake) de trouver une cache dans les égouts qui contient nourritures et médicaments. Le jeune apprenti ne veut décevoir son mentor et se risque dans le dédale poisseux où plusieurs figures ennemies se côtoient… À commencer par Mangles et Mégaborg, qui manquent de peu de se noyer. De l’autre côté de Gotham, en rentrant chez elle après un footing, Stéphanie Brown est confrontée à sa mère, qui vient de découvrir le costume de Spoiler en rangeant les affaires de sa fille.

Robin No Mans Land

► Comme dans la seconde partie du tome précédent, trois chapitres constituent cette mini-histoire : les Rats, les Louveteaux, les Survivants. On y retrouve justement des têtes connues et aperçues en début du troisième volume : le duo Tommy Mangles et Mégaborg (ils sont un peu ridicules et deviennent rapidement des figurants), Otis Flannegan, le « chasseur de rats » (sauf qu’il ne les chasse pas, il les dompte), lui aussi brièvement croisé dans le tome précédent et enfin (surtout), Mister Freeze qui signe là son grand retour. Malheureusement l’ensemble ne sera pas spécialement épique mais fonctionne rudement bien grâce au travail d’écriture sur Robin, obstiné à ne pas décevoir Batman.

Une autre partie intéressante du récit se situe du point de vue Stéphanie Brown. Selon une conversation, on comprend que la jeune fille était enceinte et a avorté. En couple avec Robin (même si ce n’est pas explicitement indiqué), on prend plaisir à suivre l’avancement de cette autre justicière, même sans son costume. Un aparté plus poussé aurait été le bienvenu, de peur qu’elle soit délaissé et revienne plus tard sans forcément avoir eu un traitement aussi soigné (ou plutôt publié) que ses alliés.

Fantômes
scénario : Dennis O’Neil | dessin : Roger Robinson
Azrael #58

Azrael continue d’aider les plus démunis et les ramène au Docteur Thompkins. Mais le justicier ne cesse d’être hanté et poursuivi par ses démons intérieurs : son père, l’Ordre de St. Dumas…

Azrael no mans land

► Il est toujours difficile de lire les aventures de Jean-Paul Valley. Si le jeune homme est charismatique et que son cheminement interne est toujours plutôt bien développé (il est à la limite de la schizophrénie), la dériver avec les chevaliers mystiques, le côté sectaire et d’autres éléments ont toujours du mal à passer dans l’univers de Batman. Il aurait sans doute fallu lire tout l’arc consacré à Azrael pour pleinement être

Le Code
scénario : Bronwyn Carlton | dessin : Mike Deodato Jr. / Tom Morgan
Batman #570 | Detective Comics #737

Le Joker et Harley Quinn prennent possession d’un immeuble. Harley s’installe dans un appartement où elle découvre un code de séduction qu’elle décide de suivre à la lettre pour que son poussin montre son amour pour elle. De son côté, le Clown du Crime décide d’organiser une élection dans son territoire pour permettre « démocratiquement » de savoir qui va le diriger entre lui et Petit, un policier qui a préféré s’exiler de Gordon, préférant des méthodes plus brutales. L’objectif du Joker est multiple : retrouver sa dulcinée, montrer que Batman impose sa façon de faire alors que lui propose d’être élu, etc.

Joker Harley No Mans Land

► Le retour du duo fou, peu de temps après les premiers pas d’Harley. L’ensemble est clairement bien écrit et réjouissant, on retrouve les caractéristiques propres du couple, empruntant à la fois à la série d’animation et aux codes des comics papier (le Joker est plus violent, Harley semble plus maline). L’élection est clairement un prétexte bidon et une intrigue très secondaire. Elle permet tout de même de retrouver Huntress, qui agit en solo suite à son renvoi par Batman. Graphiquement ça tient la route et continue de montrer par petites touches des histoires différentes qui font avancer lentement mais sûrement l’intrigue, même si la globalité de la saga « stagne » toujours (elle dévoile juste les petites avancées de chaque protagonistes ou antagonistes).

Jeu de Pouvoir
scénario : Larry Hama | dessin : Rick Burchett
Batman : Legends of the Dark Knight #121

Batman enquête dans un quartier où Mister Freeze semble régner…

Batman Torture Tue

► Le style de Rick Burchett rappelle indéniablement celui de Darwyn Cooke. Cela permet d’y voir une histoire aux allures « enfantines » mais aux propos plus « adultes », ce qui détonne toujours et est particulièrement efficace. Mais ici, le côté sombre et mature du récit n’est évoqué que partiellement : la mort de Nora — femme de Victor Fries — et le sauvetage des œuvres d’art par ce dernier afin de les préserver du désastre causé par le no man’s land. L’idée n’est malheureusement qu’effleurer et il faudra absolument la développer. Ne reste qu’un très long affrontement, presque onirique entre l’homme de glace et l’homme chauve-souris. Une petite mention est faite à Robin (voir plus haut) mais on ne sait pas comment Mister Freeze s’est échappé pour redevenir libre. Un court chapitre plutôt réussi mais qui aurait méritait de s’étendre sur un autre.

Le Gouffre aux Chimères
scénario : Larry Hama | dessin : Paul Gulacy
Batman : Legends of the Dark Knight #122 | Batman : Shadow of the Bat #90

Le Chevalier Noir s’allie à Lynx, une antagoniste borgne redoutable. Ensemble ils vont combattre une triade asiatique qui exploite les plus démunis. Ces derniers sont des esclaves chargés de pédaler en continue pour fournir de l’électricité à des chefs mafieux.

Batman Lynx No Mans Land

► Quand baissent les chimères… et un bel exemple pour la jeunesse sont les deux titres de cette histoire un peu anecdotique puisqu’elle fait intervenir un personnage peu connu et pas forcément charismatique. On retient surtout un flash-back en France et la dernière planche annonçant un plan d’action de Bane. L’ensemble est assez moyen d’un point de vue graphique et Batman semble être un roc imbattable. Des échanges avec Lynx sont par contre intéressants, comme celui-ci : « Je combats le crime et je suis un détective. Je ne me considère pas comme un héros. Ce n’est pas un métier… c’est une appellation… que décerne la postérité. »

Conclusion : Si chaque tome de No Man’s Land poursuit un certain schéma pré-établi avec brio (de multiples petites histoires faisant intervenir des héros, des antagonistes, des ennemis, des inconnus… partiellement ou sur deux à trois chapitres), la formule semble s’essouffler un petit peu. En effet, l’ensemble a toujours été hétérogène quant à la qualité graphique (c’est à nouveau le cas ici mais une tendance tout de même en dessous de ce qu’on a connu) mais toujours homogène côté scénario. L’écart se creuse dans ce quatrième tome puisqu’on a du très bon (toutes les histoires avec le Joker, Harley Quinn, Bane et éventuellement Mister Freeze) et du moins bon voire franchement pas mauvais (les errances d’Azrael, Killer Croc et Le Pingouin).

En constat général, les deux tiers de l’œuvre sont quand même excellents (scénaristiquement parlant) mais l’autre tiers se révèle plus que moyen. L’équilibre qualitatif devient un peu plus fragile. Néanmoins, la saga continue de passionner, à défaut de vraiment s’émanciper vers un échappatoire logique et une certaine légèreté faite d’espoir et de clarté. Recommandé tout de même donc.

Acheter sur amazon.fr