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Batgirl – Tome 01 : Bienvenue à Burnside

Après les critiques des chapitres #01 à #34 (et quelques compléments) de la série Batgirl sous l’ère New 52 — qui ont tous été publiés dans le magazine Batman Saga en France (mais pas en recueil en librairie) — place à la « suite » (qui est surtout un nouveau départ) avec les chapitres #35 à #40 (et Secret Origins #10) qui composent ce premier tome (sur trois) de la série sobrement intitulée en France chez Urban Comics Batgirl, point d’entrée idéal avec Batgirl – Année Un pour découvrir un récit entièrement centrée sur l’héroïne. Mais attention, le personnage et son univers changent radicalement dans cette aventure… Explications.

[Résumé de l’éditeur]
Lorsque les ennuis pointent le bout de leur nez, Barbara Gordon n’est pas du genre à abandonner ses vieilles habitudes. Alors, quand un terrible incendie la prive de tout ce qu’elle possédait, la jeune femme saisie l’opportunité de repartir à zéro. Tout comme le reste de la jeunesse branchée de Gotham, elle s’installe dans le quartier chic de Burnside et profite de ce renouveau pour redéfinir le style et les méthodes utilisées par son alter ego Batgirl. Mais changer d’environnement ne réduit pas pour autant les menaces et dangers quotidiens de l’héroïne.

[Histoire]
Le lendemain du déménagement de Barbara à Burnside (quartier branché de Gotham), la jeune femme se réveille avec une sacrée gueule de bois. Sa nouvelle colocataire Frankie lui rappelle qu’elle a flirté avec un homme qui a passé la nuit chez elles (mais qui a dormi sur le canapé !). Après avoir été cherchée des cafés et arrêtée un voleur au passage, Barbara Gordon croise Dinah Lance (Black Canary), dont l’appartement a été brûlé (ainsi que tout le quartier où elle résidait). Double problème : Barbara avait stocké des affaires et son équipement chez Dinah et en plus son propre ordinateur personnel a été volé durant la crémaillère. Le précieux travail de sa thèse, un algorithme pouvant anticiper certains crimes avant d’avoir lieu, se trouvait dans son disque dur.

La justicière doit faire appel à sa mémoire photographique pour se rappeler ce qu’il s’est passé. Un certain Black Riot récupère justement les données virtuelles de personnes pour détruire leur vie en les dévoilant ensuite…

Dans Burnside, il semblerait qu’une personne se fasse pour Batgirl ! Elle aurait même démasqué Barbara.

[Critique]
Après un run plus ou moins dispensable (cf. cet article), que vaut ce nouveau départ de Barbara sous l’égide des scénaristes Cameron Stewart et Brenden Fletcher (Gotham Academy) ? Et bien… c’est plutôt sympathique, à défaut d’être épique, révolutionnaire ou mémorable. Le ton est relativement « léger », l’ensemble frais et coloré, parfois improbable (on y reviendra) mais l’héroïne est particulièrement attachante, comme son entourage. Attention : ce renouveau de Batgirl risque d’être clivant, tant on s’éloigne (un peu) d’une personnalité et (beaucoup) d’un univers normalement plus « sombre et sérieux » !

Problèmes d’argent, travail scolaire, thèse, soirées alcoolisées, relations amicales et amoureuses compliquées, ordinateurs, smartphones, image virtuelle, réseaux sociaux et sites de rencontres, pas de doute, nous écumons les thématiques de la « jeunesse » post-adolescence/pré-adulte ! Si certaines véhiculent quelques clichés (ou sonnent trop « girly » selon son degré d’acceptation), l’ensemble n’a pas à rougir tant il propose une approche singulière dans l’univers habituellement sombre de Batman. L’homme chauve-souris est d’ailleurs absent ici, de même que James Gordon (à quelques rares cases près mais sans intérêt). A l’exception de Dinah Lance, il n’y a d’ailleurs aucune connexion à la mythologie connue du Chevalier Noir. Les ennemis sont nouveaux et on a presque l’impression de suivre une justicière qui pourrait être « n’importe qui » tant l’accent du tome est mis sur le quotidien de la jeune femme. C’est clairement la partie la plus réussie de l’ouvrage, impossible de ne pas apprécier cette Barbara et ses soucis journaliers très communs !

Quand elle enfile son costume, c’est pour se battre contre des personnages un peu ridicules et vite oubliés. Mais — heureusement — l’œuvre va plus loin, cherchant à conjuguer la vie numérique moderne et les conséquences des images et vidéos sur les réseaux sociaux (le fameux Hooq, mélange de Facebook et Tinder, très présent tout au long de la bande dessinée). Que va-t-on dire sur le hashtag #Batgirl après ses derniers exploits ? C’est une approche assez minimaliste mais tout de même plaisante. On peut pousser la réflexion plus loin et y voir une critique acerbe non seulement de la vie ultra-connectée de certains jeunes, mais aussi de l’art contemporain dans son arnaque la plus pure, la télé-réalité, les applications de rencontre et ainsi de suite. Est-ce vraiment la volonté des auteurs ? Difficile de le savoir mais dans les deux cas ça passe.

Autour de Barbara gravitent plusieurs hommes et femmes, certaines homosexuelles ou musulmanes, sans que cette orientation sexuelles ou religion soit mise en avant ou devienne une caractéristique primaire de leur personnalité. Une écriture accessible, presque évidente et une forme de progressisme quelque part. Appréciable. Les traits simplistes et la mise en couleur, très variée et riche, avec un côté « pop-art » assumé (parfois presque cartoony), contribuent à cette impression de « légèreté » évoquée plus haut, de bonne humeur même ! Babs Tarr (dessin et encrage) et Maris Wicks (couleur) proposent leur style atypique pour servir la fiction et, une fois de plus, sans révolutionner le genre, ça fonctionne plutôt bien. Les tons pourpres (rappelant le costume) et orangées (la chevelure rousse) agrémentent les cases. La fameuse « mémoire photographique » de Barbara est particulièrement bien illustrée dans le premier chapitre, dommage qu’on ne retrouve pas le procédé (sorte d’arrêt sur image bleuté avec indices en surbrillance) plus tard ou qu’on n’emmène pas le lecteur dans des énigmes possibles si on est attentif. On note un épisode particulier (Secret Origins #10) où Irene Koh officie aux dessins et à l’encrage, accompagné de Hi-Fi pour la colorisation : les planches sont un brin plus élégantes tout en restant proche du travail du binôme créatif graphique de la série principale.

Tout n’est pas pour autant acceptable dans Bienvenue à Burnside. On flirte avec la science-fiction un peu trop improbable pour être réaliste (que ce soit dans une technologie évoquée dans les premiers chapitres ou de l’identité d’une intelligence artificielle dans les derniers). Pas très grave en soi mais ça gâche une certaine immersion… De même, on se demande comment certains protagonistes n’arrivent pas à devenir l’identité de Batgirl quand ils la côtoient sous son costume mais aussi sous son alias civil. Là aussi on peut fermer les yeux dessus aisément.

Ce premier tome de Batgirl ne propose pas une longue aventure épique et palpitante (et manque cruellement d’action) mais permet d’ouvrir une parenthèse sympathique se concentrant sur une « nouvelle » Barbara Gordon, accroc aux réseaux sociaux et dans un univers bien trop acidulé. En se concentrant sur des tranches de quotidiens mêlées à quelques affrontements peu palpitants, le comic séduit un lectorat bien particulier tout en repoussant légitimement un autre, attendant probablement quelque chose de foncièrement différent dans le traitement d’une justicière emblématique. A ceux-là, on les dirigera plutôt vers d’autres sagas où Barbara est en retrait, reflétant peut-être une autre image, plus guerrière et davantage ancrée dans l’univers de Batman.

[À propos]
Publié en France chez Urban Comics le 11 septembre 2015
Précédemment publié dans Batman Saga #37 à #43

Scénario : Cameron Stewart & Brenden Fletcher
Storyboard : Cameron Stewart
Dessin : Babs Tarr
Encrage : Babs Tarr
Couleur : Maris Wicks

Traduction : Mathieu Auverdin
Lettrage : Stephan Boschat

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Ci-dessous, la superbe couverture du chapitre #40 sans les textes et titres.

 

Batman Saga #44 – 4 récits complets autour de « End Game » (Mascarade / Joker Renaissance)

Retour sur l’avant-dernier numéro de Batman Saga (le #44, publié en janvier 2016) qui propose une brève extension de Mascarade (ainsi qu’un récit à part de la série Batman & Robin). Malheureusement l’ensemble est sans grand intérêt… Explications.

[Rappel du contexte]
Dans Mascarade (alias Endgame en VO, soit Fini de jouer), le Joker est de retour à Gotham après ses actions dans Le Deuil de la Famille, soit les tomes 3 et 7 de la série Batman scénarisées par Scott Snyder, c’est-à-dire les deux tomes compilés dans Joker Renaissance.

Le Deuil de la Famille et Mascarade sont particuliers, tous deux globalement « déconseillés ». Les guillemets sont de mise car tout n’est pas à jeter dedans bien sûr, à commencer par l’aspect graphique de l’ensemble. Quant à l’histoire en elle-même, la première raconte la fracture de la confiance au sein de la Bat-Family… Une idée séduisante mais maladroitement développée car n’apparaissant qu’à la fin du récit et donc n’ayant aucune conséquence dans la série en elle-même (à peine dans sa « suite » Mascarade). Il fallait se tourner vers les séries annexes au même moment pour trouver un intérêt plus prononcé à l’ensemble du Deuil de la Famille. On apprécie tout de même l’affrontement plutôt « psychologique » entre l’homme chauve-souris et sa Némesis. Quant à Mascarade, si on accroche à son début et sa fin, l’histoire en elle-même reste paradoxalement confuse et convenue. Confuse car il y est question de biologie surréaliste et tirée par les cheveux, convenue car le déroulé de la la narration reste assez basique, in fine. Néanmoins il y a quelques chouettes propositions dedans : Batman contre la Justice League, le rôle de la Cour des Hiboux (encore une fois trop en retrait), l’évolution d’Alfred et sa fille, la conclusion de l’ensemble…

Les quatre chapitres de ce Batman Saga enrichissent à peine Mascarade et sont complètement dispensables.

Batgirl : Endgame #1 : La bataille du Burnside Bridge montre, entre autres, le sauvetage d’une citoyenne de Gotham en pleine pandémie. Rien d’exceptionnel si ce n’est que l’entièreté du chapitre est muet, dessiné par Bengal, un artiste français ! Malheureusement, on apprend pas grand chose, on suit banalement une (très) courte action de Batgirl…

Arkham Manor : Endgame #1 – Le Manoir Arkham : Fin de partie est probablement le récit le plus intéressant. Bullock interroge un garde du Manoir Arkham pour savoir s’il est complice de l’évasion du Pingouin notamment. Il faut rappeler que la courte série Arkham Manor est inédite en France et met en avant la vie de l’Asile d’Arkham qui avait été transféré… au manoir Wayne ! Situation singulière, causée par la destruction du célèbre hôpital psychiatrique et la non habitation (à ce moment précis) du manoir du milliardaire, réquisitionné par la mairie pour accueillir les criminels de Gotham. Cette courte série (six chapitres) était liée à la grande saga Batman Eternal.

Gotham Academy : Endgame #1 – Histoires de Joker s’attarde sur trois jeunes étudiantes de la Gotham Academy (série non chroniquée sur le site mais terminée en trois volumes). Les amies se racontent mutuellement trois contes/légendes urbaines autour du Joker. Chaque histoire est dessinée par une personne différente, apportant une certaine identité visuelle sympathique à cet épisode mais qui reste, in fine, assez vain aussi…

Detective Comics : Endgame #1 – Fin de partie revient sur Lonnie Machin, alias Araignée du soir, allié impromptu apparu dans Anarky. Il se fait aider, toujours dans un Gotham en proie aux toxines du Joker, par plusieurs jeunes de la ville (qui s’avèreront être les futurs adeptes du mouvement Nous sommes Robin). Une fois de plus, on reste sur une aventure hyper banale, où apparaissent brièvement à la fin Spoiler et Batwoman entre autres.

Le numéro se referme sur le troisième annual de la série Batman & Robin (Vielles Lunes), qui fut publié dans le septième et dernier tome de la série. Une histoire qui montre le père et son fils sur… la lune. Vite oubliable malgré les jolis dessins de Juan José Ryp.

[Conclusion]
Pas grand chose à sauver de ces épisodes, les connexions avec Mascarade s’avèrent sans grand intérêt (à l’exception d’Arkham Manor à la rigueur) et ne permettent ni d’enrichir le mythe ni d’apporter des compléments pertinents ou l’envie de suivre ces autres séries annexes (qui, de toute façon, n’ont pas bénéficié de suite poussée). Il aurait fallu raconter sur trois à six chapitres les « vraies » conséquences de l’évènement — ou un point de vue différent durant ce dernier (un peu comme ce qui avait été effectué pour Le Deuil de la Famille, l’enrichissant un peu plus (sans que ce soit non plus révolutionnaire bien sûr).

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« La Guerre des Robin » (Batman Univers #7-#9) + « We are Robin » (Batman Univers HS #3-4)

Double critique aux publications particulières. La Guerre des Robin est le nom d’un crossover publié fin 2016 dans les magazines Batman Univers #7 à #9. Cet évènement s’étale sur six chapitres : Robin War #1-2, Grayson #15, Detective Comics #47, We are Robin #7 et Robin, Son of Batman #7 (à ne pas confondre avec le titre français éponyme du deuxième tome de la série Batman & Robin).

We are Robin est le titre en VO d’une série centrée sur des jeunes de Gotham, membres du mouvement « Nous sommes Robin » (se réclamant justiciers de la ville en arborant des logos et couleurs de Robin), où l’on retrouve Duke Thomas. Constituée de 12 épisodes (ainsi qu’un prologue DC Sneak Peek), la série a été publiée dans les hors-séries #3 et #4 de Batman Univers. Le HS#3 contenait les six premiers chapitres constituant l’histoire Nous sommes Robin, le HS#4 les cinq derniers, proposant le récit Nous sommes Joker (puis Héros à temps plein). L’épisode manquant (le chapitre #7) n’était pas inclut car il faisait partie de La Guerre des Robin.

On peut d’abord lire Nous sommes Robin puis La Guerre des Robin, histoire d’être familiarisé un peu plus avec les adeptes du mouvement. Ou bien on peut lire dans l’ordre proposé dans cette critique, correspondant aussi à la publication en France ; dans les deux cas ça ne change pas grand chose. Au global, on conseille La Guerre des Robin mais pas trop la série qui tourne autour… Explications.

Couverture promotionnelle du crossover La Guerre des Robin (Robin War) (g.)
et couvertures des deux tomes (VO) de l’intégralité de la série We are Robin (dr.),
toutes trois dessinées par Khary Randolph.

Couvertures des deux numéros de Batman Univers Hors-Séries (automne 2016 et hiver 2017)
qui ont publié l’intégralité de la série We are Robin, toutes deux dessinées par Lee Bermejo (scénariste de l’entièreté de la série).

Partie 1 – L’évènement La Guerre des Robin (Robin War)

Dessin promotionnel de Lee Bermejo, un des scénaristes de l’évènement.

[Histoire]
Plusieurs enfants et adolescents s’inspirent de Robin pour s’auto-proclamer justicier dans Gotham. Après un accident qui coûte la vie à un policier, les « lois Robin » sont créées et durcissent considérablement les libertés des jeunes citoyens de la ville. Un emblème, une couleur ou une allusion à Robin peut suffire à faire arrêter quelqu’un. Tous les adeptes du mouvement « Nous sommes Robin » sont recherchés.

Duke Thomas et ses camarades issus de ce collectif refusent de se laisser faire. Il en est de même pour Damian Wayne, « le vrai Robin », bien décidé à affronter ceux qu’il juge comme des imposteurs et qui ne rendent pas honneur au co-équipier de Batman ni au Chevalier Noir lui-même.

Les anciens Robin ne seront pas de trop pour aider tout ce beau monde : Dick Grayson (devenu Nightwing puis l’Agent 37 de l’organisation Spyral — son état actuel au moment où se déroule le récit), Jason Todd (Red Hood) et Timothy Drake (Red Robin). Bientôt, chacun sympathise avec un de leur « élève » : Nightwing et Duke, Red Robin et Dre, Red Hood et Dax puis Robin et Isabella.

Le GCPD et le « nouveau » Batman (en réalité James Gordon dans une armure high-tech, cf. explications dans la critique) s’appliquent à faire respecter les « lois Robin », quitte à se battre voire emprisonner les alliés de la croisade de Batman.

Dans l’ombre, la Cour des Hiboux semble manipuler les bonnes personnes afin de concevoir des traités légaux qui les arrange et… faire revenir Nightwing !

[Critique]
Voilà un récit qui mériterait une publication en librairie ! L’histoire est assez originale et met au premier plan une foule de protagonistes. Il est rare de voir les quatre Robin ensemble, c’est très plaisant de les retrouver ici. Si La Guerre des Robin est plutôt accessible, elle est plus appréciable quand on a en tête les connexions aux différentes séries auxquelles elle fait référence. Tout d’abord Batman et plus particulièrement ses deux premiers tomes (La Cour des Hiboux et La Nuit des Hiboux) et ses deux derniers tomes (La Relève, partie 1 et partie 2). En effet, le récit se déroule en parallèle de cette conclusion, lorsque Bruce Wayne est amnésique et que Batman est désormais incarné par James Gordon lui-même, fortement aidé par une armure géante high-tech. De même, la traditionnelle Cour des Hiboux trouve ici légitimement une place de choix et permet même d’être une « suite » à leur arc narratif. Créée par Scott Snyder dans les deux titres pré-mentionnés, on l’a revue de façon éparse sans réellement constituer de « menace sérieuse ». Ensuite, l’on fait écho au fameux ergot et à l’héritage de Dick Grayson sous cet alias (cf. deuxième tome de sa série Nightwing). Enfin, d’autres allusions diverses parsèment l’ouvrage (à la série Gotham Academy entre autres, le reste étant moins prononcé). Idéalement il faudrait donc connaître à minima La Cour puis la Nuit des Hiboux pour mieux apprécier La Guerre des Robin. Duke Thomas étant aussi au premier plan, la lecture est plus aisée si on est familier du personnage qui est apparu, lui aussi, dans la série Batman de Scott Snyder (dans L’An Zéro).

Définitivement « urbaine », cette guerre multiplie les points de vue et se permet de belles surprises, pas forcément décelables. On apprécie aussi, toutes proportions gardées bien sûr, la dimension politique présente : bavure policière, jeunesse révoltée, lois restrictives, etc. Le tout en jonglant habilement entre les side-kicks de Batman avec des dialogues percutants, chacun mettant en avant sa forte personnalité. En un mot : les amoureux de tous les Robin ou même d’un en particulier devraient y trouver leur compte. L’ensemble est très bien rythmé, se lit rapidement et les six épisodes forment une histoire à peu près complète.

« A peu près » car… la conclusion invite à se tourner vers la série Grayson (très chouette au demeurant) pour avoir la « suite » (centrée sur Dick/Nightwing/Agent 37 donc) mais ce n’est pas vraiment le cas… En effet, au moment où s’achève La Guerre des Robin, Grayson entame sa dernière ligne droite dans les chapitres #16 à #20 (le #15 faisait partie justement de La Guerre des Robin). Dans ces cinq épisodes, compilés dans le troisième et dernier tome de la série, il n’est pas fait mention du statu quo ou du rôle de Dick au sein des Hiboux… Très étrange donc, peut-être un plan prévu pour plus tard qui ne s’est jamais réalisé ?

Comme souvent dans ce genre de crossover, une armée de dessinateurs différents opère, carrément une petite quinzaine ici ! Khary Randolph, Alain Mauricet, Jorge Corona, Andres Guinadlo, Walden Wong, Mikel Janin, Steve Pugh, Carmine Di Gianomenico, Patrick Gleason, Alvaro Martinez, Raul Fernandez, Scott McDaniel et Andy Owens enchaînent donc les planches tour à tour, chacun avec un style différent mais grâce aux nombreux héros costumés, on n’a pas trop de mal à s’y repérer. Il faudra en revanche fermer les yeux pour espérer une homogénéité graphique (forcément) mais… ce n’est étonnamment pas trop dérangeant ici. Peut-être à cause du trop grand nombre d’artiste, on se plonge rapidement dans l’histoire sans faire trop attention à ce côté visuel puisqu’on est vite habitué à la différence des genre (cinq dessinateurs officient pour le premier chapitre uniquement !). Le tout sous la houlette de plusieurs scénaristes qui travaillaient sur leurs séries respectives à l’époque : Tom King pour les épisodes Robin War et Grayson, Ray Fawkes pour Detective Comics et Robin, son of Batman et enfin Lee Bermejo pour We are Robin (voir ci-après). Nul doute qu’il y a eu concertation entre les trois auteurs pour garder une cohérence entre les évènements, à priori initié et chapeauté par Tom King.

La Guerre des Robin s’encre à un instant précis de la mythologie de Batman (rendant peut-être délicate sa lecture en postérité), ce dernier y est d’ailleurs totalement absent, mais permet d’offrir un segment singulier, plaisant et, d’une certaine façon, innovant. On le conseille donc pour cette approche plus ou moins inédite, qu’on aurait aimé être étalée sur une dizaine de chapitres au total et, bien sûr, pour les fans des Robin.

Partie 2 – La série We are Robin
Nous sommes Robin (6 chapitres) + Nous sommes Joker (4 chapitres) + Héros à temps plein (1 chapitre)

[Histoire — Nous sommes Robinpublié intégralement dans Batman Univers HS#3]

Duke Thomas
recherche désespérément ses parents, disparus suite à l’attaque du Joker (dans Mascarade). Le jeune homme est placé par Leslie Thompkins dans une famille d’accueil dont il s’échappe rapidement.

Dans Gotham, le mouvement « Nous sommes Robin » fait des adeptes : des jeunes issus du collectif entendent bien  protéger les citoyens. Mais entre la police, une organisation de SDF obéissant à une étrange personne, la fameuse Cour des Hiboux et le mystérieux homme se cachant derrière le terme « Le Nid », les adeptes singeant Robin ont du travail.

Duke se joint à eux et combat aux côtés de Riko Sheridan, Daxton ‘Dax Chill, Isabella Ortiz, Troy Walker et Anre ‘Dre’ Cipriani.

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[Critique]
En six épisodes, le scénariste Lee Bermejo propose une incursion plutôt réussie avec un côté « street culture » et de nouveaux protagonistes sympathiques mais qui n’ont malheureusement pas droit à un portrait plus fouillé… à l’exception de Duke Thomas bien sûr et Riko Sheridan, fan de Batgirl (la super-héroïne intervient même le temps du chapitre dédié à Riko — le quatrième et le plus intéressant graphiquement, on y reviendra). On pourrait bien sûr lire ce récit avant La Guerre des Robin mais, in fine, ça ne change pas grand chose (il se déroule juste avant et a été publié à peu près en même temps en France), sauf pour être un peu plus familier avec ces nouveaux Robin.

Le problème majeur de l’œuvre est son manque de contextualisation et de « présentation générale » : qui sont ces jeunes ? d’où sortent-ils ? pourquoi décident-ils de devenir des justiciers ? quel est leur passé ? Comme dit, seul Duke Thomas bénéficie d’un traitement de faveur car il est l’un des fils rouges narratifs de l’histoire et, surtout, les lecteurs de longue date le connaisse bien puisqu’il est apparu durant L’An Zéro (de la série Batman). Ses partenaires, d’illustres inconnus dès le début, sont attachants pour la plupart mais on aurait aimé un chapitre centré sur chacun d’entre eux (il n’y a que Riko qui y a droit). On lit toutefois sans déplaisir Nous sommes Robin, changeant assez le ton et le côté héroïque des comics de la même mouvance (pas de super-héros « grandiloquents » ici, une tragédie au milieu du parcours, un côté urbain plus prononcé, un énigmatique personnage — que les fans vont aisément deviner, etc.).

Jorge Corona dessine cinq épisodes (aidé de Patricia Mulvihill à la colorisation). Son style est dynamique et un peu anguleux est tout à fait correct pour une bande dessinée du genre (même s’il ne se démarque pas tant que ça que bon nombre de productions similaires). En revanche, la patte de James Harvey qui officie durant le quatrième chapitre (celui sur Riko et Batgirl) est d’une folle originalité et dénote brillamment avec le reste ! L’artiste s’occupe également de son encrage (avec Diana Egea) et de ses couleurs (avec aussi Alex Jaffe). Place à un découpage singulier, bourré de couleur, à l’esprit « pop-art ». Sublime ! Lee Bermejo signe quant à lui les dessins de couverture.

En tant qu’histoire « seule », Nous sommes Robin ne mérite pas forcément qu’on s’y attarde. En revanche, couplée à La Guerre des Robin, ça passe nettement !mieux ! Malheureusement sa suite et fin (Nous sommes Joker, voir ci-dessous) n’est pas à la hauteur, cela propose donc trois volumes plutôt originaux et changeant du matériel « classique » autour du mythe de Batman mais clairement dispensables (sauf pour les fans de Duke Thomas).

[Histoire — Nous sommes Joker + Héros à temps plein • publiés intégralement dans Batman Univers HS#4]

Après les évènements survenus durant La Guerre des Robin, Duke Thomas poursuit toujours ses recherches afin de retrouver ses parents victimes d’une toxine du Joker.

Ses camarades de « Nous sommes Robin » continuent leur chemin de leur côté…

Mais quand John Bender Jr., fanatique du Joker tue sort de prison, assassine ses parents et se grime en Clown Prince du Crime sous le nom de Rictus, le mouvement des jeunes Robin doit intervenir !

Dans l’ombre, le mystérieux homme derrière « Le Nid » se dévoile peu à peu et continue d’aider ces jeunes justiciers.

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[Critique]
Les quatre premiers épisodes (en réalité les chapitres #8 à #11 de la série We are Robin) forment la plus importante histoire du numéro. La petite troupe de Robin se retrouve face aux Jokerz (!) mené par un nouvel antagoniste. Hélas, cet affrontement étiré est le moins passionnant et sans réelles surprises. Ce sous Joker sert du réchauffé, on préfère vivement s’intéresser au quotidien des jeunes. Malgré tout, ça manque encore cruellement d’émotions ou d’approfondissement plus soigné chez ces citoyens semi-justiciers. Il y a bien quelques pistes intrigantes (l’un d’eux serait un décédant de Joe Chill, Alfred a été leur complice…) mais ce n’est pas assez creusé. Idem du côté de Duke Thomas, davantage en retrait cette fois et qui a retrouvé ses parents.

En synthèse, on a bien du mal à apprécier l’entièreté de la série malgré quelques bonnes idées, l’atout sympathie de certains personnages et la semi-originalité de l’ensemble (le premier hors-série est meilleur que ce second, moins travaillé). On favorise nettement le cross-over La Guerre des Robin au détriment de cette autre série We are Robin. Côté équipe artistique, on a à peu près la même que pour les précédents chapitres : Lee Bermejo au scénario (et illustrations de couverture), Jorge Corona aux dessins et à l’encrage, Patricia Mulvihill à la couleur (et Rob Haynes au découpage).

Alors, quel bilan tirer de tout cela ? Difficile de conseiller finalement We are Robin/Nous sommes Robin… Le plus simple est peut-être de commencer par La Guerre des Robin (qui dans tous les cas est recommandé) et si on a « aimé » tous les nouveaux personnages (dont on a déjà vite oublié les prénoms…) et l’univers un chouilla « street culture », alors pourquoi pas tenter la série We are Robin (et, donc, les deux hors-séries de Batman Univers — mais n’en lire qu’un seul n’aurait aucun intérêt). Les fans de Duke Thomas devraient aussi se tourner vers ces comics tant il est mis en avant. Pour tous les autres, pas la peine de s’attarder sur tout ça (la mythologie du Chevalier Noir en demeurera d’ailleurs inchangée).

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– Batman Univers #7 | #8 |#9 (La guerre des Robin)
Batman Univers hors-série #3
Batman Univers hors-série #4
Robin War (La guerre des Robin) en anglais (VO)
We are Robin : vol.1 en anglais (VO)
We are Robin : vol.2 en anglais (VO)

Couverture de la version US de Robin War, reprenant les six chapitres principaux de l’évènement et trois autres inédits (tie-ins) issus des séries Gotham Academy, Red Hood/Arsenal et Teen Titans. Probablement la façon la plus simple de lire le cross-over pour les amateurs d’anglais ou de VO.