Archives de catégorie : Justice League

Justice League – Knight Terrors

L’évènement Knight Terrors a touché différentes séries DC Comics. La principale éponyme est dans le récit primordial (Knight Terrors #1-4), agrémenté de trois segments qui s’y greffaient et rendent l’ensemble complet et terminé (Knight Terrors FCBD Edition #1, Knight Terrors: First Blood #1 et Knight Terrors: Night’s End #1). Pour découvrir les différents épisodes impactant les super-héros, antagonistes et vilains de DC, se référer à cette autre critique regroupant tous ces tie-ins (sur Batman, Superman, Green Lantern, etc.), nommés les terreurs nocturnes chez nous.

[Résumé de l’éditeur]
Lorsque Batman, Superman et Wonder Woman découvrent le corps de l’un de leurs plus anciens ennemis dans le Hall de Justice, leur enquête les mène au-delà de la réalité vers un nouveau méchant appelé Insomnia… qui utilise ses pouvoirs pour engloutir chaque héros et méchant dans leurs propres cauchemars sombres et tordus. Le seul moyen de sauver le monde du sommeil éternel est d’appeler à l’aide un héros improbable : Deadman !

Inutile de détailler le début de l’histoire, le résumé officiel de l’éditeur suffit.

[Critique]
Les connaisseurs de la VO le savent bien : le terme Justice League accolé au titre ne reflète pas le comic book, il s’agit d’une spécificité propre à l’édition française afin de mettre en avant le récit (et c’est tout à fait cohérent dans une logique éditoriale, impossible de vendre Knight Terrors sur base de ces deux simples mots). Il ne faut donc pas s’attendre à voir la ligue de justice habituelle affronter un ou plusieurs ennemis. Par opposition à Alice au pays des merveilles, on serait tenter de renommer l’ensemble à Deadman au pays des cauchemars.

En effet, Deadman est le véritable personnage principal de toute l’histoire (pas forcément très connu en France mais habilement ré-introduit dans la fiction pour se familiariser avec), il prend possession du corps de Batman pour évoluer dans le monde et il échange beaucoup avec Robin/Damian Wayne. En cela, le titre est plutôt orienté « Batman » et pourrait plaire à ses fans. C’est d’ailleurs probablement pour ça que c’est une couverture alternative sur le Chevalier Noir qui a été choisie pour illustrer Knight Terrors en France (les deux autres de la même série, centrées sur Superman et Wonder Woman, sont curieusement absents de la galerie de bonus à la fin du livre, mais à découvrir en introduction des Terreurs nocturnes sur ce site).

Alors, qu’est-ce que ça vaut tout ça ? Franchement, c’est très moyen… Le récit part un peu dans tous les sens, la menace peu tangible, paradoxalement simpliste et confuse. D’un côté, tout se résume à un démon (Insomnia donc) et d’une mystérieuse pierre magique, qui infiltre les cauchemars des personnes (citoyens et super-héros compris), d’un autre tout se complexifie inutilement en tentant d’ajouter ce MacGuffin, en navigant entre réalité, rêves et cauchemars, le tout peu aidé par une myriades de dessinateurs différents (on y reviendra). L’auteur Joshua Williamson poursuit un cycle initié avec Dark Crisis on Infinite Earths (qu’il avait aussi écrit – pas encore chroniqué sur ce site) et Planète Lazarus (de Mark Waid – idem). Nul besoin de les connaître pour comprendre (et potentiellement apprécier) Knight Terrors. L’éditeur résume l’essentiel en avant-propos;

Dans ses meilleurs moments, Knight Terrors se relève étonnamment intimiste voire touchant, avec Deadman en maître de cérémonie (qui s’adresse directement au lecteur) et la révélation de la bascule de l’ennemi vers le côté obscur  (une justification classique mais peu traitée – de façon pertinente et aboutie – sur les fameux dégâts collatéraux causées par des super-héros). Du reste, Knight Terrors convoque un autre personnage secondaire, Sandman, pas celui de Neil Gaiman mais Wesley Dodds, un héros de l’âge d’or ressuscité (littéralement) qui arbore un masque à gaz notamment. Impossible de ne pas penser au célèbre Rorschach de Watchmen et on se plaît à suivre la petite équipe hétéroclite composée de Deadman/Batman, Sandman et Robin/Damian !

Tout va bien sûr trop vite et peu après la moitié du titre, l’on apprend qu’Insomnia a impacté tous les cauchemars des super-héros, antagonistes et vilains, précisément ceux à découvrir en parallèle du récit complet, dans différents ouvrages dont les premiers Dawn of (nom d’un semi-relaunch de DC) et les habituels de Batman (on conseille d’ailleurs celui dans le troisième volet de Dark City). Tout est récapitulé et chroniqué sur cet article. Se pose la question de la pertinence d’avoir séparé tous ces chapitres (pas obligatoire et à la qualité variable) plutôt que les compiler dans un second voire troisième volume de Knight Terrors, probablement une stratégie commerciale vu la faible pertinence de l’ensemble.

Pour les complétistes, Knight Terrors se décompose en sept chapitres : la courte introduction Longue nuit à Gotham (Knight Terrors FCBD Edition #1), Premier Sang (Knight Terrors: First Blood #1) puis Mort à l’arrivée, Résurrection, La valse d’un mort, Matière à cauchemars (Knight Terrors #1-4) et enfin la conclusion Retour à la réalité (Knight Terrors: Night’s End #1) sur 190 pages au total (hors galerie de couvertures en bonus). Malheureusement, ces épisodes cumulent une armée de dessinateurs : Howard Porter, Giuseppe Camuncoli, Stefano Nesi, Caspar Wijngaard, Chris Bachalo et Trevor Hairsine.

On retient le style de Porter (DC Univers Rebirth – Le Badge) et ses esquisses volontairement maladroites, parfois grossières, désincarnées, se mêlant gracieusement aux mondes oniriques pour aboutir sur quelques illustrations sympathiques et richement colorisées. Des planches fonctionnent quand elles tendent vers le registre purement horrifique, trop rares pour s’en délecter. L’ambiance cauchemardesque et sinistre est néanmoins respectée, parfois surprenante, souvent frustrante (on aimerait en voir davantage et aller dans des directions plus osées voire radicales et gores), malgré des pattes artistiques décousues (Porter et Camuncoli restent les deux plus prolifiques sur l’œuvre).

En somme, Knight Terrors et un évènement « inoffensif », pas très intéressant ni révolutionnaire, agréable à lire et regarder, gentiment « divertissant » pour les moins exigeants mais complètement dispensable. Les amoureux de Deadman ne doivent, en revanche, pas faire l’impasse dessus tant ce personnage emblématique de DC est peu exploité (surtout en France). On pouvait d’ailleurs envisager une équipe façon Justice League Dark mais il n’en est rien (malgré quelques apparitions en guest). Cet event devrait avoir quelques conséquences dans Dawn of Titans et, peut-être, dans les futures productions de Williamson, on verra…

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 12 janvier 2024
Contient : Knight Terrors FCBD Edition #1 + Knight Terrors: First Blood #1 + Knight Terrors #1-4 + Knight Terrors: Night’s End #1
Nombre de pages : 208

Scénario : Joshua Williamson
Dessin & encrage : Howard Porter, Giuseppe Camuncoli, Stefano Nesi, Caspar Wijngaard, Chris Bachalo, Trevor Hairsine
Encrage additionnel : Jaime Mendoza, Danny Miki
Couleur : Brad Anderson, Frank Martin, Caspar Wijngaard, Chris Bachalo, Rain Beredo

Traduction : Benjamin Viette
Lettrage : Scribgit

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Dark Knights of Steel – Tome 01 : Au loin l’orage

(À gauche, couverture de la version normale,
à droite, couverture de la version limitée)

[Résumé de l’éditeur]
Un monde médiéval se voit bouleverser à jamais lorsqu’un vaisseau spatial s’écrase sur une planète condamnée. Des années plus tard, le Royaume des Tempêtes confronte le tout-puissant Royaume des El et rassemble des alliés pour le défier. Mais les El peuvent compter sur un allié de poids en la personne de Bruce Wayne, l’impitoyable et dévoué chef de la garde, bien décidé à éradiquer la magie de ses terres… Les alliances se noueront et se briseront, les monarques tomberont, les royaumes s’élèveront, et ce qui semblait être la fin du monde pour beaucoup… n’était que le début d’une nouvelle ère.

[Début de l’histoire]
Les El s’écrasent avec leur bébé sur une autre planète. Au même moment, au Royaume des orages, Constantine a une vision. Il confie à son souverain Jefferson qu’il a vu leur mort prochaine…

Dix-neuf ans plus tard, au château des El, le jeune Kal-El désire accompagner Bruce à l’extérieur. Adopté par les El, Bruce est comme un frère pour Kal malgré son statut de bâtard. Bruce va affronter la magie Banshee (de Black Canary) et refuse de mettre en danger Kal, malgré les pouvoirs divins que ce dernier a.

Plus tard, Bruce et Kal se disputent, le premier tient en haute importance de servir le royaume et respecter les traditions là où le second, venu de l’espace, les juge archaïques.

Dans la forêt de Hobb, un archer vert à capuche sous mauvaise influence tire une flèche et abat le roi Jor-El. C’est le début d’un conflit épique…

[Critique]
Le scénariste Tom Taylor revisite une fois de plus l’univers DC à sa sauce ! Après un Superman dictatorial dans la saga Injustice puis le monde zombifié dans l’univers DCEASED (et une incursion futuriste de Batman dans La dernière Sentinelle – ainsi que quelques autres œuvres éparses et plus convenues : One Bad Day – Ra’s al Ghul, Suicide Squad Renégats, Nightwing Infinite…), le prolifique auteur se tourne vers le registre fantasy-médiéval. Il transpose donc les figures iconiques de DC Comics dans un monde revêtant autant du Moyen-Âge que de la magie.

C’est évidemment très plaisant de lire le parcours croisé d’un Bruce Wayne revisité (et ses « merles » : ces adolescents qui lui rendent service, les différents Robin donc), d’une dynastie El (lire « elle », du nom de famille kryptonien et non « e – i », comme pourrait l’être l’État Islamique – oui ça paraît tiré par les cheveux mais c’est assez étrange en lecture continue de voir El assez souvent !), de guerrière amazones alliées à Supergirl, d’un empire Jefferson (Black Lightning) servi par Constantine, et ainsi de suite. On pourrait tous les révéler mais mieux vaut garder le plaisir de la découverte en lecture !

Dark Knights of Steel est fièrement comparé à Game of Thrones voire Le Seigneur des Anneaux. Il faut évidemment nuancer cela mais ce n’est pas incorrect d’en établir un rapprochement. Concernant Game of Thrones (que ce soit les livres ou la série), il est vrai que Dark Knights of Steel s’y rapproche dans ses thématiques de complots et d’état des lieux (un enfant bâtard, un roi tué, un garçon jeté du haut d’une tour, diverses trahisons, des infiltrés, etc.). Pour Le Seigneur des Anneaux, c’est uniquement la puissance dudit anneau (et d’une transformation qui va avec) qui rappelle un tout petit peu la saga (littéraire et cinématographique) culte. En somme, on est plus proche d’une version édulcorée et comic book mainstream des titres de G. R. R. Martin que J. R. R. Tolkien.

L’ouvrage contient six chapitres sur les douze que comporteront l’intégralité de la fiction. En effet, aux États-Unis, Dark Knights of Steel avait directement été annoncé comme série limitée en douze épisodes, accompagné de quelques bonus, comme les Contes des trois royaumes, trois courts récits situés dans le même univers et principalement liés aux éléments de Batman modelés à ce style fantasy-médiéval (disponible dans ce présent opus). Étrangement, la quatrième de couverture du livre annonce une « série à suivre » ainsi que la couverture du second tome. Il faut donc envisager un troisième volet à minima, ce qui ne serait guère étonnant tant les sagas elseworlds de Taylor s’enrichissent systématiquement en sériés dérivées ou bien préquel ou suite.

Difficile de s’attarder sur l’intrigue globale sans la gâcher, si ce n’est que l’auteur manie avec son habituel brio sa narration : le rythme est haletant, l’ensemble plutôt original, les personnages attachants (une fois de plus Harley Quinn est soignée – revêtant son célèbre costume d’arlequin, c’est approprié !), l’humour est parsemé ici et là, etc. On regrette une absence d’émotion qui faisait le sel d’Injustice (et dans une moindre mesure, de certains segments de DCEASED, notamment dans son troisième et dernier opus, sorti le même jour que Dark Knights of Steel). Enfin, certains protagonistes sont un peu survolés (Green Arrow, Lois Lane…) – c’est mieux que rien car certaines figures emblématiques sont étonnamment absentes (pour l’instant tout du moins). Pas besoin d’avoir des connaissances très poussées dans l’univers DC Comics pour apprécier cette incursion assez singulière et visuellement séduisante.

On retrouve en effet Yasmine Putri au dessin (Bengal pour l’épisode 4 à priori – ce n’est pas spécifié dans la BD, en tout cas pas dans la version limitée – et trois autres artistes pour les trois courts contes de la fin). Plus habituée chez Marvel (Spider-Man) que DC, Putri dépeint ici son monde atypique avec grande justesse, colorisant elle-même ses dessins d’un style relativement aéré, fin et élégant. Les nombreux costumes réajustés pour cet univers fantasy permettent d’identifier immédiatement « qui est qui », bien aidés par les couleurs emblématiques de chaque héros ou anti-héros. On apprécie également les élégantes teintes chromatiques liées aux séquences diurnes ou nocturnes. Dommage que les décors soient souvent assez pauvres ou les paysages un peu vides…

Graphiquement, c’est donc un sans faute pour peu que le style (nous) embarque ! Scénaristiquement, s’il manque un peu d’émotion ou de dramaturgie plus poussée (des morts s’enchaînent sans qu’on les déplore), Dark Knights of Steel tient la route et a de solides fondations. Attention, Tom Taylor en profite pour instaurer un couple lesbien qui devrait faire grincer les dents les puristes (qui crieront au « wokisme » sans réel fondement, ce terme étant devenu galvaudé et mériterait une analyse bien plus nuancée que celle souvent apposée à ce mot).

Amateurs d’elseworlds, de médiéval, de fantasy, de DC Comics, sans chercher une écriture trop subtile ou une intrigue complexe, Dark Knights of Steel devrait (vous) satisfaire ; s’adressant aussi bien aux passionnés de longues date qu’aux néophytes. À voir sur la durée (et donc le second tome, qui arrivera en France probablement début 2024) si l’œuvre mériterait d’être dans les coups de cœur ; il manque encore ce « petit quelque chose » pour la rendre un chouilla plus qualitative mais par son concept elle peut déjà s’inscrire dans un côté intemporel bienvenu. Le livre se ferme sur quelques travaux d’études de personnages et beaucoup de chouettes couvertures alternatives.

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 23 septembre 2023.
Contient : Dark Knight of Steel #1-6 + Dark Knight of Steel : Tales from the Three Kingdoms
Nombre de pages : 208

Scénario : Tom Taylor, Jay Kristoff, C.S. Pacat
Dessin & encrage : Yasmine Putri, Bengal, Caspar Wijngaard, Sean Izaakse, Michele Bandini
Couleur : Yasmine Putri, Arif Prianto, Caspar Wijngaard, Romulo Fajardo Jr., Antonio Fabela

Traduction : Julien Di Giacomo
Lettrage : MAKMA (Gaël Legeard, Sarah Grassart, Lorine Roy et Stephan Boschat)

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Dark Knights of Steel – version normale (21 €)
Dark Knights of Steel – version limitée avec couverture variante (24 €)




Injustice – Année zéro

Que s’est-il passé l’année précédant les évènements d’Injustice (la série de comics, cf. index) ? C’est ce que révèle ce volume Année zéro. Rien d’extraordinaire malheureusement… Explications et critique.

[Résumé de l’éditeur]
« Tout aurait pu être différent s’ils avaient été parmi nous. » Un an avant que Superman ne devienne le dictateur le plus haï de la planète, une Ligue de la Justice encore unie célébrait les héros qui les avaient précédés : la Société de Justice. À leur contact, Batman, Superman et les membres de la Ligue de Justice moderne apprirent comment ces aînés parvinrent secrètement à défaire le tyran nazi durant la seconde guerre mondiale. Mais cette ambiance fraternelle est vite gâchée par les derniers agissements du Joker. Le criminel aurait trouvé le moyen de contrôler mentalement ses adversaires, et s’apprêterait à saboter la Ligue et la Société de Justice de l’intérieur…

Inutile de détailler le début de l’histoire, le résumé officiel de l’éditeur suffit.

[Critique]
Injustice – Année zéro aurait pu être ce prologue palpitant, pièce manquante d’un puzzle narratif et vidéoludique géant mais il n’en est rien, bien au contraire. Des connexions avec la grande saga Injustice, cette Année zéro ne conserve que d’éparses moments, souvent anecdotiques ou prévisibles (Harley Quinn qui réclame un sous-marin, Lois qui apprend qu’elle est enceinte, etc.). L’histoire aurait pu se situer dans un elseworld quelconque ou même dans la chronologie habituelle que cela n’aurait pas changé grand chose.

En effet, le cœur du récit nous ramène… à Hitler (oui oui). Un mystérieux artefact (découvert bien plus tôt) par Hawkgirl et Hawkman permet à quiconque le possède d’obtenir un pouvoir de persuasion mental très puissant. Passé de main en main jusqu’aux nazis, on retrouve sa trace « de nos jours » via un prisonnier de Blackgate, André, échangeant les coordonnées du lieu où a été enfoui ledit objet (par la Société de Justice des années auparavant) contre son évasion. C’est bien sûr le Joker qui se charge d’aider le détenu et, forcément, récupérer l’amulette magique peu après.

Un macguffin puis des confrontations plus ou moins épiques rendant grâce à la Société de Justice (en gros, les premiers super-héros de l’ère DC), globalement absents d’Injustice (en comics – et l’on comprend donc pourquoi ici), nourrissent la fiction. C’est plus agréable à lire que Ground Zero mais ce n’est pas non plus très palpitant, faute à ce scénario (pourtant signé Tom Taylor) semi original, semi déceptif. Effectivement, on s’attendait légitimement à une aventure montrant les destins croisés de tous les héros qui interviendront dans Injustice : les prémices d’une Wonder Woman radicale (comme ce fut le cas de l’annual qui lui était consacré, cf. Injustice 2 – Intégrale 2) et bien entendu quelques sauts d’humeur de Superman… Il n’en est rien ; difficile de savoir si c’est « mieux » comme cela (à minima cela reste cohérent).

Si beaucoup de protagonistes de l’écurie DC Comics gravitent dans Année zéro (avec quelques beaux moments pour certains d’entre eux, les plus « âgés » notamment), il manque cette consistance qui faisait le sel d’Injustice : un rythme endiablé, des retournements de situation, de l’émotion, de l’humour utilisé avec parcimonie, une touche d’humanité qui sonnait très « juste », etc. On repart sur quelque chose d’à la fois convenu et à la fois improbable mais aussi « facile » (le Joker équipé d’un pouvoir magique).

C’est tristement efficace (dans sa narration) sans provoquer d’émerveillement ou d’étincelles qualitatives qui tireraient l’œuvre vers le haut. Point fort et point faible, le récit est auto-suffisant, il peut se lire sans connaître le reste d’Injustice (et donc s’en démarque faute de liens pertinents). Comme toujours avec Taylor et dans cette saga, Harley Quinn est plutôt soigné, ses amoureux devraient donc jeter un œil et apprécier.

Graphiquement, Rogê Antônio et Cian Tormey se relayent avec deux styles à peu près homogènes et plutôt agréables, colorisés par Aine Beredo. Cela fait du bien d’avoir peu de dessinateurs, encreurs et coloristes différents dans un segment d’Injustice ! Le travail est tout à fait correct, à l’image du scénario, ce n’est pas forcément exceptionnel mais ce n’est pas désagréable pour autant. Comme les autres séries Injustice, cette dernière a d’abord été publiée numériquement et en moitié de planches.

À l’instar de Ground Zero, Année zéro est complètement dispensable et n’apporte pas grand chose à la chouette saga que constituait Injustice, à défaut d’avoir ses conclusions de jeux vidéo en comics purs et durs, il y a donc ce prologue bancal et inégal qui vient ajouter une petite touche de complémentaire d’utilisation de tout le bestiaire DC. Ne reste que Injustice vs. Les maîtres de l’univers pour avoir LA dernière fiction corrélée à la saga et tout sera bel et bien terminé, sauf si Taylor se plaît à proposer un troisième opus même s’il n’existera(it) pas en jeu vidéo.

Il faut dire qu’Année zéro a été proposer en 2020 soit trois ans après le dernier jeu vidéo, donc pourquoi pas ! Urban annonce d’ailleurs 270.000 exemplaires vendus des comics (en recoupant les chiffres, nous aurions apparemment 200.000 pour la première série Injustice – incluant probablement les nombreuses éditions diverses de la première année – et 500.000 pour le jeu vidéo (en France uniquement)), preuve qu’il existe toujours un engouement pour l’univers. Ce n’est pas pour rien que les intégrales sont sorties également.

[À propos]
Publié chez Urban Comics le 04juin 2021.
Contient : Injustice Year Zero #1-14
Nombre de pages : 176

Scénario : Tom Taylor
Dessin & encrage : Rogê Antônio et Cian Tormey
Couleur : Aine Beredo

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Calix Ltd, Île Maurice

Acheter sur amazon.fr : Injustice – Année zéro (17 €)