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Mad Love

Batman Mad Love[Histoire]
Après un énième échec visant la capture (ou la mort) de Gordon (sauvé par Batman), le Joker rumine en cherchant dans ses plans la façon la plus magistrale de se débarrasser de son éternel rival. Fou de rage contre son acolyte féminin, Harley Quinn, le Clown du Crime la jette dehors, la jugeant responsable de ses déboires. La jeune femme se remémore alors sa rencontre et le début de son idylle avec monsieur J, à l’époque où elle n’était qu’une simple psychiatre fraîchement débarquée à l’Asile d’Arkham.

Mad Love

[Critique]
Les fans de Batman savent généralement que Harley Quinn a été créée dans la superbe série d’animation Batman de 1992 (également connue sous le nom de Batman : La Série Animée en France, ou encore Batman : The Animated Serie en anglais) par Paul Dini et Bruce Timm (les auteurs de ce comic justement). En revanche, les origines de la célèbre psychiatre ont d’abord été narrés dans ce Mad Love avant qu’il ne soit adapté dans un épisode très fidèle éponyme (simplement traduit par Amour Fou chez nous). Pour mieux comprendre ces différentes notions d’appellations du dessin animé, n’hésitez pas à vous référer à la note en bas de cet article.

Mad Love se focalise donc sur l’éternelle muse du Joker. À travers des flash-backs de pensées nostalgiques, Harleen Quinzel se rappelle son arrivée à l’asile d’Arkham, après avoir usé de ses charmes pour que sa note d’examen soit plus élevée (ce qui souligne que, dès le début, elle n’était pas forcément une psychiatre compétente — l’un des rares éléments qui a disparu dans la version animée) puis évidemment son coup de foudre pour le célèbre Clown du Crime. Cette étape peut paraître un peu trop rapide mais les textes sonnent justes et l’ensemble reste plausible. Très vite, la jeune et jolie femme devient l’assistante officielle de son Joker et c’est cette relation d’amour à sens unique (ou plutôt de Je t’aime moi non plus) qui est ici mise en avant (aussi bien en flash-backs que dans l’histoire se déroulant dans le « présent »). L’on ne découvre pas un Monsieur J particulièrement démonstratif en amour, au contraire, c’est quand il brille par son absence qu’il envoie discrètement des mots à sa douce, mais dans quel but ? La manipuler ou lui prouver son attachement ? On ne sait jamais vraiment ; si ce n’est que Poussin n’a pas l’air très sensible aux charmes corporelles d’Harley, qu’il n’hésite pas à la violenter, l’insulter, l’humilier et à s’énerver contre elle pour pas grand chose, surtout si elle prend des initiatives et/ou s’avère plus « compétente » que lui dans la capture de Batman. Impossible, là aussi, de saisir si le Joker est vraiment « fou » ou simplement « malin » et qu’il a conscience de ses actes.

Mad Love Batman Joker HarleyLe talent de Paul Dini (au scénario) et Bruce Timm (aux dessins) confère à Mad Love une forte empathie pour Harleen, qui est simplement victime « d’Amour Fou ». Grâce aux dessins très simplistes (qui reprennent ceux de la série animée, puisque c’est Bruce Timm qui en est également aux commandes) et à quelques dialogues ou pensées subjectives de la psychiatre, on ne peut qu’avoir de la pitié pour elle. Les traits et le style unique de Bruce Timm sont peut-être ce qui va décontenancer les lecteurs pas forcément habitués au dessin animé, qui les jugera très « enfantins », à juste titre. Mais c’est aussi la double force de Mad Love qui permet de replonger avec une délicieuse nostalgie dans l’enfance, ou l’adolescence, du lecteur qui, lui, aura grandi avec le dessin animé et qui va retrouver cet univers ; et qui offre désormais à un « adulte » un récit au double sens de lecture. On pense ici à certains jeux de mots (« faire un tour en Harley ») ou scènes sexuellement suggestives, qui sautent aux yeux désormais alors qu’enfant ce n’était pas le cas, évidemment — et heureusement ! De même, malgré tout ce côté « lisse » et « simpliste », Mad Love est relativement violent (surtout le Joker) et terriblement triste.

Mad Love Harleen Quinzel

Relativement courte (64 pages), la bande dessinée se suffit à elle-même, bien qu’on en redemande fortement, forcément ! L’ouvrage est donc agrémenté d’une tonne de bonus non négligeable (d’une bonne centaine de pages supplémentaires) qui permet d’atteindre le prix de 15€ ; un poil cher tout de même (même effet que sur Killing Joke, qui coûte 13€ pour une histoire de 46 pages seulement). Les suppléments se composent d’une préface de Paul Dini (à lire sur le site d’Urban Comics) et une postface de Bruce Timm, du storyboard complet en noir et blanc (permettant de constater quelques rares changements de dessins réclamés par l’éditeur à l’époque), de la mise en couleur originale (à nouveau sur l’ensemble du récit, avec les annotations de Bruce Timm au coloriste Rick Taylor), une galerie de couvertures et deux petites histoires, toujours signés par Dini et Timm : Petit Papa Noël (dix pages) et La Croisière s’embrase (six pages), respectivement sur Batgirl et Poison Ivy, mais qui sont clairement anecdotiques.

On ne peut donc que conseiller ce Mad Love, indispensable pour connaître les origines d’un personnage devenu rapidement culte et qui a intégré officiellement la mythologie du Dark Knight. Récompensée par un Eisner Awards (meilleure bande dessinée one-shot), l’œuvre commune de Paul Dini et Bruce Timm n’a absolument pas vieilli depuis sa première publication, en 1994 tout de même ! Une histoire à lire au moins une fois, qui ne demandera peut-être pas —et c’est la son seul défaut— une relecture multiple. À noter également la sublime couverture du tome qui ferait une très jolie affiche murale.

Mad Love Harley Quinn[À propos]
Publiée en France chez Urban Comics le 11 décembre 2015.
Titre original : Mad Love
Scénario : Paul Dini et Bruce W. Timm
Dessin et encrage : Bruce W. Timm
Encrage additionnel : Glen Murakami
Couleurs : Bruce W. Timm, Rick Taylor, Mark Chiarello
Lettrage : Christophe Semal et Laurence Hingray
Traduction : Ayn Rang

Première publication originale en février 1994.

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Mad Love Joker Harley

  À propos du dessin animé Batman

• Tout d’abord, il est important de préciser que la série d’animation est composée en France de quatre saisons comportant respectivement 28, 28, 29 et 24 épisodes. Pour rappel, Mad Love est le tout dernier épisode, celui qui clôt donc la série.
En version originale, c’est un peu plus compliqué : les trois premières saisons constituent en fait la première série de Batman (1992-1995) et comportent donc 85 épisodes (28+28+29). Ces épisodes sont scindés en deux saisons, la première de 65 épisodes (qui est donc la série Batman) et la seconde n’en comportant que 20 (et renommée The Adventures of Batman and Robin). La suite et fin de la série, c’est à dire l’équivalent de la troisième et dernière saison aux États-Unis (la quatrième en France) est appelée The New Batman Aventures (Les Nouvelles Aventures de Batman chez nous). Celle-ci ne comporte donc que 24 épisodes (1997-1999) qui ont quelques différences graphiques notoires (suite à un changement de chaîne de diffusion, sans doute pour se « démarquer » gentiment de la précédente), mais font toujours partie de l’univers de la série commencée en 1992, aussi bien en terme d’ambiance que d’histoire. Moins de complexité pour l’exportation hexagonale puisque désormais tous les épisodes (109 de vingt minutes) sont regroupés dans un très beau coffret DVD (voir ci-dessous).

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Coffret intégrale 4 saisons

• Pour les amoureux de la série d’animation, Urban Comics publie également, dans sa collection pour enfants, des histoires inspirées du dessin animé. Deux tomes sont disponibles. On y retrouvera donc le style graphique de Mad Love mais sans la légère noirceur de l’histoire qui parcourt le comic. À réserver aux plus jeunes, aux collectionneurs exigeants ou aux simples nostalgiques de la série.

Batman - Les Nouvelles AventuresBatman : Les Nouvelles Aventures
Tome 1 | Tome 2

• Enfin, Urban Comics prévoit un ouvrage sur Bruce Timm dans sa collection Les Grands Entretiens de la Bande Dessinée. 128 pages qui retraceront l’histoire du dessinateur mythique à travers des interviews et des illustrations. Sortie prévue le 11 mars 2016 !

Bruce Timm

Under the Red Hood

Article récapitulatif de cette saga (sans spoilers)
/!\ Il est fortement conseillé de connaître le début
de cette histoire
avant de lire cette suite /!\

Under the Red Hood est le nom du tome américain recueillant les chapitres Batman #635 à #641 (à découvrir dans cet article), mais également les Batman #645 à #650 ainsi que le Batman Annual #25. En France, ce volume n’existe pas mais son contenu a été publié dans les magazines Batman #11 à #23 par Panini Comics fin 2006/début 2007.

Les chapitres #635 à #641 sont devenus les deux histoires Sous le masque et Réunion de famille (dans cet article donc) et les chapitres suivants sont encore plus « divisés ». Il y a en effet #645 : Pour affronter le présent, il faut comprendre le passé, #646-647 : Jeux de vilains, #648-650 : Course contre la mort et enfin Batman Annual #25 : Le retour de Jason Todd. C’est pourquoi tous ces chapitres sont rassemblés dans ce même article, sous l’appelation Under the Red Hood. De plus, le chapitre #642 : Percer la carapace (se déroulant donc en premier mais pas intégré -à juste titre- à la version américaine) est également inclus.

Batman Red Hood

[Histoire — Percer la carapace]
Black Mask s’associe au Chapelier Fou et les deux tentent de contrôler Killer Croc. Mais Batman veille…

Batman Percer la carapace[Histoire — Pour affronter le présent, il faut connaître le passé]
Alfred fait sortir le cercueil de la tombe de Jason Todd et Bruce passe ses journées à l’examiner pour comprendre comment son ancien équipier a pu s’en extraire. Il se remémore également sa première rencontre avec Todd et leur duo quand il est devenu Robin.

Batman Cercueil Jason Todd[Histoire — Jeux de vilains]
Batman trouve une bombe dans un entrepôt destiné au trafic de drogue de Black Mask. Red Hood l’avait posé et n’hésite pas à la faire exploser, dans la foulée il tue la plupart des hommes de Black Mask, avant d’attaquer son bureau directement au bazooka ! Le caïd de Gotham est fou de rage mais se voit offrir une invitation de la part de Deathstroke au sein d’une mystérieuse Société.

Red Hood Moto[Histoire — Course contre la mort]
Black Mask tue ses derniers lieutenants pour s’associer à Red Hood, à la demande de ce dernier. Mais il s’agissait d’un piège et les deux s’entretuent. En même temps, Alfred reçoit un paquet contenant une mèche de cheveux verts ; appartenant au Joker bien sûr. Lui et Batman comprennent que Todd a kidnappé le Clown du Crime et le retient quelque-part…

Batman Red Hood VS Black Mask[Histoire — Le retour de Jason Todd]
Comment Jason Todd est sorti de son cercueil dans un état végétatif avant d’être recueilli par Talia As Ghul, de recouvrer sa mémoire et enfin de devenir Red Hood.

Le Retour de Jason Todd[Critique de l’ensemble]
Excepté le premier chapitre plutôt anecdotique et passable (publié en France dans les magazines mais pas dans le tome américain, qui en plus appelle à une suite), l’ensemble se lit très bien et comporte les mêmes qualités (et défauts mineurs) que Réunion de famille et Sous le masque : de l’humour (toujours avec Black Mask et Red Hood principalement), de jolies planches assez « colorées » (contrastant avec le côté noir de l’histoire) qui n’ont parfois pas de réel second plan (des fonds unis peu esthétiques) et un scénario prenant avec une bonne conclusion.

Là aussi, les chapitres ne se cantonnent pas uniquement à l’univers de Batman mais vont explorer un petit côté plus méconnu pour les néophytes, avec Deathstroke et la Société. Une idée qui tombera un peu à plat puisque les autres personnages qui interviendront dans Jeux de Vilains sont un nazi aveugle et une hyène (!), puis le Comte Vertigo (issu de la série Flash) qui est déjà plus prometteur. Malgré cet écart, qui apporte un peu d’humour en échange d’une véritable menace, la suite devient plus violente, avec un Red Hood impitoyable qui n’hésite pas à massacrer bon nombre de malfrats. C’est ainsi que le classique débat sur la nécessité de tuer ou non un ennemi, et la moralité qui en découle, est plutôt bien amené et ne tombe pas dans les clichés éculés ; notamment lors des « retrouvailles » entre Batman, le Joker et Jason Todd, point d’orgue de la conclusion du récit (juste avant les explications sur la résurrection de l’ancien Robin, qui auraient méritées d’être publiées avant pour que la tension entre le trio soit vraiment la fin de cet arc).

Batman Joker Red HoodJason n’en veut pas à Batman de ne pas l’avoir sauvé mais il ne lui pardonne pas que le Chevalier Noir n’ait pas tenté de le venger et de tuer le Joker.
Si c’était toi qu’il avait réduit en bouillie… Si c’était toi qu’il avait torturé… Si c’était toi qu’il avait tué… J’aurais remué ciel et terre pour retrouver cet immonde tas de merde et je l’aurais expédié en enfer.
Tu ne comprends pas. Tu n’as jamais compris.
Quoi ? Ta fameuse morale ne t’y autorise pas ? C’est trop dur de « franchir la ligne » ?
Oh, mon Dieu, non… Ce serait tellement facile. J’ai toujours rêvé de le tuer. Il ne se passe pas un jour sans que j’aie envie de le capturer et ensuite de passer un mois entier à lui faire subir les pires tortures qu’on puisse imaginer. Je voudrais le voir en sang, brisé… me supplier… hurler sa souffrance alors qu’il est en train de mourir d’une mort atroce.
Le Joker intervient : Les grands esprits se rencontrent… Batman poursuit :
Je voudrais le voir mort… Je le veux de toutes mes forces. Mais si je fais ça… Si je descends dans cet enfer… Jamais je n’en reviendrai.

La renaissance de Jason Todd trouve donc une double explication, premièrement il est ressuscité suite à une altération du continuum temporel par Superboy-Prime (difficilement compréhensible dans la bande dessinée, surtout quand on connaît peu l’univers de Superman, on se contentera donc de ça, en lien avec Infinite Crisis selon l’article récapitulatif d’Urban), c’est un peu maigre comme justification. Le jeune homme s’est donc réveillé de son cercueil, s’en est extirpé et est sorti sous terre. On apprendra plus tard qu’il a fait concevoir le même cercueil pour remplacer le sien et ainsi en laisser un « propre » pour brouiller les pistes. Deuxièmement, Jason Todd, alors dans un état végétatif, est recueilli par Talia As Ghul. L’ancien Robin est amnésique, bien qu’il ait conservé tous ses réflexes de combat, il reste « perdu ». C’est en le jetant dans un puits de Lazare que Todd recouvrera la mémoire et fomentera son retour à Gotham City sous l’alias Red Hood.

Toutes ces étapes durent plusieurs années et sont à la fois décevantes et satisfaisantes. Décevantes car l’éternel « altération du continuum temporel » est la solution de facilité dans tous les comics (il s’est produit à peu près la même chose par Flash pour la création des New 52) pour faire renaître des personnages. Par ailleurs, ce sont toujours des héros externes à Gotham et à l’univers de Batman qui en sont les causes (forcément, car il s’agit souvent de pouvoirs « fantastiques » ou de méta-humains, donc moins plausibles/rationnels chez le Dark Knight). Mais il était difficile de concevoir autrement une résurrection tout en voulant rester crédible. La suite est par contre satisfaisante, le coma d’un an, les Ghul qui prennent soin de Jason, etc. Todd lui-même confirme qu’il a combattu Batman (durant Silence) avant d’être remplacé par Gueule d’Argile. C’est en constatant, durant cet échange, que Batman ne l’avait pas vengé que Todd choisira d’adopter les traits de Red Hood. Cela était-il prévu dès l’élaboration de l’œuvre culte de Jeph Loeb ? Aucune idée, mais sur le principe ça « fonctionne » et ne fausse pas les deux histoires, au contraire, elles se complètent parfaitement.

Red Hood MasqueAu-delà de cet ultime chapitre, apportant donc des explications attendues depuis plusieurs mois, l’ensemble est tout de même de très bonne facture. C’est un chouilla en dessous que la première partie, pour les diverses raisons évoquées plus haut, mais reste extrêmement satisfaisant pour une courte saga très importante pour la mythologie de Batman. L’hétérogénéité du côté des dessins n’est pas gênante car l’ensemble reste visuellement très cohérent.

[À propos]
Publiée en France dans le magazine Batman #18 en novembre 2006 chez Panini Comics, jusqu’au Batman #23 en avril 2007. Premières publications originales dans Batman #642, #645 à #650, de septembre 2005 à avril 2006.

Percer la carapace
Titre original : Breaking the Skin
Scénario : Andersen Gabrych
Dessin : Chris Marrinan
Encrage : Andrew Pepoy
Couleurs : Alex Sinclair
Traduction : Sophie Viévard

Pour affronter le présent, il faut connaître le passé
Titre original : Show me Yesterday, for I can find Today
Scénario : Judd Winick
Dessin : Doug Mahnke
Encrage : Tom Nguyen
Couleurs : Jason Wright
Traduction : Sophie Viévard

Jeux de vilains
Titre original : Franchise
Scénario : Judd Winick
Dessin : Shane Davis
Encrage : Collectif
Couleurs : Alex Sinclair
Traduction : Sophie Viévard

Course contre la mort
Titre original : All They Do is Watch Us Kill
Scénario : Judd Winick
Dessin : Doug Mahnke
Encrage : Tom Nguyen
Couleurs : Alex Sinclair
Traduction : Sophie Viévard

Le retour de Jason Todd
Titre original : Under the Hood
Scénario : Judd Winick
Dessin : Shane Davis
Encrage : Mark Morales
Couleurs : Alex Sinclair
Traduction : Sophie Viévard

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Crimes de Guerre

Il est nécessaire d’avoir lu Jeux de Guerre avant d’entamer cette histoire (et par conséquent cette critique).

Batman Crimes de Guerre Cover[Histoire]
Pendant la guerre des gangs qui a fait rage à Gotham City, Stephanie Brown, alias Spoiler, a été torturée à mort par Black Mask. Ce dernier dirige désormais une bonne partie de la mafia de la ville.

Batman reçoit anonymement une cassette vidéo présentant une interview d’Aaron Black, un citoyen défiguré qui remet en cause l’efficacité de la police et les services du Dark Knight. Le journaliste qui mène l’entretien est celui qui avait filmé Black Mask pendant ses méfaits lors des Jeux de Guerre. Il lance une vendetta médiatique contre Batman, affirmant que ce dernier est responsable de la mort de Spoiler. Il dévoile même l’identité civile de la jeune fille, ainsi que son association éphémère en tant que Robin avec le Chevalier Noir !

Batman enquête sur la mort de Spoiler et découvre qu’une de ses médecins a été tuée et que le docteur Leslie Thompkins, fidèle alliée depuis l’enfance de Bruce Wayne, est portée disparue. L’homme chauve-souris est bien décidé à interroger le mystérieux Aaron Black mais son éternel rival, Le Joker, s’incruste dans cette complexe affaire.

Batman Crimes de Guerre Bruce[Critique]
Plusieurs mystères parcourent le récit. Ceux-ci sont habilement distillés entre les planches à qualité variable. Effectivement, les dessins ne sont pas terribles ; à l’instar de Jeux de Guerre, la qualité graphique varie et n’est guère mémorable. Côté scénario, le potentiel de départ est très alléchant : Spoiler aurait-elle pu survivre ? Les médias peuvent-ils définitivement ruiner l’image publique de Batman ? Le justicier de la ville est-il si fiable que cela ?

Une bonne partie de l’histoire résout efficacement ses interrogations. Le Joker tient un rôle mineur mais sa justification colle tout à fait au personnage et sa confrontation finale avec Black Mask est plutôt drôle et bien pensée. Romain Sionis est d’ailleurs toujours aussi effrayant. Il revêt la cape du Dark Knight pour se faire passer pour lui, là encore c’est une bonne idée. Mais son arrestation, ainsi que celle du Joker, est plutôt expéditive, surtout pour un criminel de cette envergure, qui a tenu en échec Batman pendant quelques temps.

Batman Crimes de Guerre Black MaskMais outre ce léger défaut, c’est la véritable fin donnée au récit qui peut totalement décontenancer, à savoir l’identité du véritable « meurtrier » de Spoiler. Si ses motivations peuvent « se comprendre », on a du mal à croire que le personnage est capable de cela. Une personne au code moral infaillible laissant mourir une innocente de seize ans, vraiment ? Cette conclusion, très froide et noire, a d’ailleurs suscité beaucoup de réactions outre-Atlantique au moment de la publication. La polémique a même donné naissance à un mouvement féministe au sein des comics, orchestrée par l’auteure Gail Simone (qui travaille sur la série Batgirl depuis 2011).

Comme dans Jeux de Guerre, Crimes de Guerre bénéficie d’un scénario haletant et sans temps mort, une bonne suite qui ne s’éparpille pas. Les échanges sont pertinents et l’ensemble relativement sombre. Le Joker apporte une touche comique mais il est vraiment en retrait. On pourra déplorer la chute un peu trop facile de Black Mask mais les solutions des mystères sont bien trouvées. Excepté donc : le tueur de Spoiler. Qui aura peut-être du mal à convaincre l’ensemble des lecteurs. Le culot de la direction éditoriale de l’époque n’était peut-être pas une bonne idée. Selon la post-face du magazine, les « conséquences » de cette révélation sont à découvrir dans Infinite Crisis.

Batman Crimes de Guerre JokerÀ noter un prologue publié dans le numéro précédent (Batman #18) : Batman Allies Secret Files 2005 – Contact. Cette courte histoire montre Cassandra (Batgirl) et Timothy (Robin) s’entraîner dans la Bat-Cave et se souvenir de la mort de Stephanie Brown, alias Spoiler, survenue dans Jeux de Guerre. Après avoir arrêté des cambrioleurs dans un musée, ils découvrent à la télévision qu’un journaliste prévoit de dévoiler que Batman entraîne et recrute des enfants de seize qui meurent… On y apprend principalement que Timothy admire Batman tout en le trouvant effrayant et ne veut surtout pas lui ressembler. Le reste faisant office de « bande-annonce ».

[À propos]
Publiée en France chez Panini Comics dans Batman #19 (décembre 2006).

Titre original : War Crimes
Scénario et Dessin (se référer à l’index complet pour plus de détails)
Detective Comics : Andersen Gabrych et Pete Woods
Batman : Bill Willingham et Giuseppe Camuncoli

Chapitre 01 – Detective Comics #809 : Faux Semblant (To the Victor go the Spoils)
Chapitre 02 – Batman #643 : Divergences de Vues (Minor Discrepancies)
Chapitre 03 – Detective Comics #810 : Bataille Médiatique (A Consequence of Truth)
Chapitre 04 – Batman #644 : Terrible Verdict (Judgment at Gotham)

Traduction : Sophie Viévard

Première publication originale dans les magazines des séries respectives en octobre 2005.