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Les trois histoires majeures de Batman par le duo Snyder/Capullo « à petit prix »

Le scénariste Scott Snyder est particulièrement actif sur le personnage du Chevalier Noir. Principalement connu pour sa série de la période New 52 (Renaissance), disponible en France en neuf tomes et coïncidant avec les premières publications d’Urban Comics sur Batman, Scott Snyder est devenu un « incontournable » auteur qui a instauré certaines nouveautés au sein de la mythologie de l’homme chauve-souris, comme la célèbre Cour des Hiboux. On lui doit aussi Sombre Reflet, qui se déroule juste avant, l’excellente série Batman Eternal (qu’il co-signe), l’indigeste saga Metal, la série dérivée Le Batman Qui Rit (dont le premier tome peut être considéré comme une suite de Sombre Reflet justement) et enfin Last Knight on Earth, sorte de conclusion (plutôt ratée) de toutes ses histoires dans un futur hypothétique.

Ce qui nous intéresse dans cet article est son œuvre la plus accessible, la série sobrement nommée « Batman » qui se découpe en neuf volumes simples. Huit sont plutôt essentiels et six réellement importants. En sélectionnant diverses éditions, un lecteur peut découvrir pour 52€ seulement (!) le plus important du travail de Snyder accompagné par Greg Capullo aux dessins. Explications.

La série « classique » se compose ainsi (les liens dirigent vers les critiques du site).

Tome 1/9 : La Cour des Hiboux
Tome 2/9 : La Nuit des Hiboux
Tome 3/9 : Le Deuil de la Famille
Tome 4/9 : L’An Zéro – 1ère partie
Tome 5/9 : L’An Zéro – 2ème partie
Tome 6/9 : Passé, Présent, Futur
Tome 7/9 : Mascarade
Tome 8/9 : La Relève – 1ère partie
Tome 9/9 : La Relève – 2ème partie

Le sixième tome est une compilation de quelques chapitres indépendants qui ont peu d’intérêt dans le suivi du grand arc narratif de Snyder. Il convient plutôt de se concentrer sur les deux premiers tomes qui se suivent et forment l’histoire « La Cour des Hiboux », les tomes 03 et 07 consacrés au Joker ainsi que les tomes 04 et 05 qui revisitent les origines du super-héros. Les deux derniers volumes montrent Gordon en Batman dans une armure high-tech assez particulière. Même s’ils sont sympathiques dans une certaine mesure, il est néanmoins plus intéressant de se concentrer principalement sur les trois histoires précitées. Et ça tombe bien car on peut se les procurer à prix tout à fait correct et les lire dans l’ordre suivant pour une meilleure immersion.

I – L’An Zéro (parties 01 et 02)

Modernisant les célèbres origines du justicier, L’An Zéro a beau avoir été initialement publié après La Cour des Hiboux, il est intéressant de commencer sa lecture avec.

Ci-dessous, les couvertures des éditions « classiques » d’Urban Comics qui coûtent 17,50€ et 19€, soit 36,50€.
Il existe également une version en noir et blanc qui les compile tous les deux pour 39€.

 

Mais on peut aussi acheter les deux premiers tomes de la collection publiée par Eaglemoss « DC Comics – La Légende de Batman ».
Initialement vendus 2,99€ et 8,99€, cela revenait donc à 11,98€ les deux tomes. On ne les trouve plus sur le site de l’éditeur mais on peut toujours les trouver en occasion à prix correct.

Seul problème : il manque le chapitre zéro qui était consacré à Red Hood (le futur Joker ?) et au retour de Bruce Wayne à Gotham. Rien de grave dans la compréhension globale tout du moins. Ce chapitre spécial est bien inclus dans la version Urban Comics.

En commençant par L’An Zéro, le nouveau lecteur comprendra d’emblée la vision de l’auteur et sa réécriture sur Batman dans l’univers graphique atypique de Greg Capullo et son compère Fco Plascencia aux couleurs. Une plongée singulière, clivante chez certains mais néanmoins appréciable avec un mélange des genres bien équilibré (aventures, origin-story, thriller, action, légère science-fiction, un brin de fantastique, etc.).  Le tout se déroule en trois parties : Cité Secrète, Sombre Cité puis Cité Sauvage et met en avant trois ennemis : le gang de Red Hood, une créature inédite et le célèbre Sphinx/Riddler.

II – La Cour des Hiboux

Souvent considéré comme « le coup de maître » de Scott Snyder (qu’il ne réussira jamais à surpasser), porte d’entrée idéale pour découvrir Batman, on peut bien sûr se procurer les deux tomes dans leur version classique chez Urban Comics, à  15,50€ et 19,00€, soit 34,50€.

Là aussi il existe une version noir et blanc qui regroupe les deux pour 39€.

Mais une fois de plus, on peut se procurer l’entièreté de l’histoire pour nettement moins cher !

Soit en prenant la version à 4,90€ vendue depuis cet été par Urban Comics pour séduire un nouveau lectorat (qu’on trouve encore dans certaines libraires ou sur Internet, ou bien en occasion au prix similaire).

Soit en prenant une autre réédition d’Urban (datant de 2016) à petit prix mais tout de même plus onéreuse : le premier tome est à 9,90€ et le second… également. Soit 19,80€ (toujours moins cher que 34,50€).

Les deux restent de belles affaires si évidemment on n’est pas regardant sur l’homogénéité des formats et du dos du livre (appelé à tort « la tranche ») dans sa bibliothèque !

III – Le Deuil de la Famille + Mascarade
( = Joker Renaissance)

A nouveau, ces deux tomes peuvent être achetés dans leur version classique chez Urban Comics, pour 19€ le premier et… 19€ aussi le second, soit 38€ au total.

A l’instar des deux autres histoires pré-citées, celles-ci existent aussi en noir et blanc mais non compilées entre elles. Il faut débourser 29€ pour Le Deuil de la Famille et (étrangement) 19€ pour Mascarade (même prix que la version couleur donc).

Encore une fois, on peut se procurer ces deux tomes autrement : dans Joker Renaissance, édition qui rassemble donc les deux volumes (en couleur) pour 35€. L’économie est plus faible (4€ seulement) mais c’est toujours ça de gagné.

Ainsi, au plus bas coût en neuf, on peut lire les six volumes du run de Scott Snyer pour un peu moins de 52€ au lieu de 109€, soit plus de 50% d’économisé ! Bien sûr tout n’est pas parfait : recherche sur Internet pour ce qui n’est plus trouvable, formats différents pour les trois histoires (taille, qualité du papier…) et il manque « La Relève » qu’on peut toujours acheter ensuite mais clairement, ces trois arcs narratifs sont suffisants pour apprécier le voyage proposé par Snyder et Capullo, surtout quand on se plonge pour la première fois dans Batman ! Même si tout n’est pas de qualité constante, pour ce prix là ça les vaut largement. On peut aussi se procurer, comme on l’a vu, de beaux écrins luxueux en noir et blanc pour les mêmes arcs mais il faudra débourser 126€ pour cela. Au lecteur de voir en fonction de ses économies, ses exigences et si une version encrée (par Danny Miki) est plus séduisante qu’une colorisée.

Découverte du premier numéro de la collection Eaglemoss

Batman Eaglemoss 00

L’éditeur eaglemoss propose en partenariat avec Urban Comics une collection de comics entièrement dédiée aux aventures du Chevalier Noir. Celle-ci s’intitule d’ailleurs « DC Comics – La Légende de Batman ». Son intérêt s’adresse surtout aux non-connaisseurs puisque les fans en terrain connu risquent d’avoir déjà pas mal de livres de cette collection. De même, il a été confirmé que les cinquante premiers numéros ne seront pas des doublons de l’autre collection d’eaglemoss « DC Comics – Le meilleur des super-héros ». Par conséquent les récits cultes de Batman, les incontournables tels que Année Un, Un Long Halloween, Silence… ne seront pas forcément inclus dans cette collection, et s’ils le sont ce sera dans plus de deux ans. Toutes les informations complémentaires sont à découvrir sur la page créée sur ce site à cet effet.

Le premier numéro de cette collection est la première partie de L’An Zéro, un récit idéal pour commencer les aventures de Batman, au prix exceptionnel de 2,99€. À noter que la suite direct coûtera 8,99€, ce qui permet de lire (et posséder) un arc narratif sympathique pour 11,98€ (au lieu de 36,50€ pour les deux tomes publiés chez Urban Comics, ça vaut quand même clairement le coup si on ne les a pas !). Découverte.

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Sans surprise, l’énorme verso du carton qui contient le fascicule et le comic-book est une publicité géante pour la collection.

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La bande-dessinée est clairement un « bel objet » : couverture dure, brillante et soignée. La « tranche » (en vrai il faut le dire « le dos », cf. cette image explicative) ne contient pas de numérotation, juste le titre et le début de la fresque. On ignore donc encore, à ce stade, si les volumes suivants seront accolés à celui-ci pour former la fresque dans un ordre chronologique. À priori il faudra attendre le troisième numéro de la collection pour le savoir. Toutefois, la mention « Ordre chronologique : 1 » au verso semble confirmer que les volumes ne seront donc pas proposés dans l’ordre chronologique (de lecture et de la fresque).

Curieusement, et toujours au verso, on constate que les chapitres #21 à #26 de la série Batman sont dans ce tome. Il aurait été plus logique de proposer, à l’instar de la publication d’Urban Comics, les chapitres #0 puis #21 à #24 pour former un premier ensemble cohérent et avec une première fin, et les chapitres #25 à #33 (à l’exception du #28 qui n’avait rien à voir avec l’histoire) dans un second tome. Il est donc fort probable que le deuxième numéro contiennent uniquement les chapitres #27 puis #29 à #33 et peut-être le #0 (cet article sera mis à jours dès qu’on aura la réponse). Ceci n’est évidemment pas bien problématique mais une curiosité éditoriale intrigante (et un poil dommage).

Du reste, on constate que la couverture est comme prévu différente de celle déjà connue de l’édition d’Urban. Il n’y a pas de texte éditorial explicatif mais une introduction (non-inédite) du scénariste Scott Snyder.

 

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Le fascicule (qui ne sera pas avec les comics pour les abonnés mais uniquement dans les premiers numéros en kiosque) est totalement inutile, il présente sommairement la collection et s’ouvre sur quatre pages au milieu. On retrouve la plupart des visuels et informations sur le site d’eaglemoss.

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À noter que cinq feuillets de propositions d’abonnement et diverses offres commerciales sont incluses. L’intérêt se situant évidemment dans la bande dessinée, tout le reste apparaît très secondaire (pour ceux qui veulent s’abonner, autant le faire sur le site pour gagner du temps).

En conclusion, une fois de plus c’est une aubaine pour le non-connaisseur, surtout avec un premier récit d’une certaine qualité (non sans défauts certes — (re)lire la critique pour les détails). Pour ceux ayant déjà ce volume, inutile de repasser à la caisse !

Étude de cas : Le Joker

Suite à mon interview dans le magazine Ciné Saga en début d’année 2016, leur rédaction m’a demandé d’écrire une étude de cas sur le Joker pour leur quatorzième numéro (1), sorti en août 2016. L’article devait s’étaler sur quatre pages avant de s’étendre à huit, tant il y a de choses à raconter. Retour sur la création du Clown du Crime, son évolution à travers les comics et son essor dans la culture populaire, grâce au cinéma, aux dessins animés et aux jeux vidéo. Avec des interviews de Yan Graf, éditeur chez Urban Comics, et Pierre Hatet, mémorable doubleur du Joker sur plusieurs supports artistiques.
(Rédigé en juin 2016, donc avant la sortie du film Suicide Squad. ///// Cliquez sur les couvertures pour accéder aux critiques.)

Joker Heath Ledger The Dark Knight

Qui rira le dernier ?

Des bandes dessinées américaines aux films en passant par les jeux vidéo et les séries d’animation, le Joker est partout, tout le temps. Il fascine, autant que Batman, depuis trois quarts de siècle. Retour sur sa création, son évolution et ses nombreuses apparitions.

Le 21 juillet 1866, Victor Hugo débute, à Bruxelles, l’écriture d’un nouvel ouvrage : L’Homme qui rit. Presque trois ans plus tard, le roman philosophique est publié en France. Le personnage principal, Gwynplaine, est un saltimbanque défiguré, mutilé au niveau de la bouche notamment, donnant l’illusion d’un sourire forcé en permanence. En 1928, le réalisateur d’origine allemande Paul Leni dévoile son adaptation cinématographique muette avec Conrad Veidt dans le rôle de Gwynplaine. Bill Finger, le co-créateur de Batman et son principal scénariste à ses débuts, donne en 1940 une photographie de l’acteur (en noir et blanc) à Bob Kane, le dessinateur désormais crédité comme concepteur du Chevalier Noir. L’encreur de l’époque, Jerry Robinson, propose une carte à jouer d’un Joker pour finaliser la création. L’ennemi le plus célèbre et iconique de Batman est né, la paternité étant attribué aux trois artistes. En extrapolant, on peut affirmer que d’une certaine façon, c’est le fruit de l’imagination d’un des écrivains français les plus célèbres et réputés qui a servi de base embryonnaire au désormais incontournable Joker.

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L’acteur Conrad Veidt et la première apparition du Joker
dans Batman #1 en 1940 (dessiné par Bob Kane & Jerry Robinson)

Bill Finger lui apporte des origines en 1951 (dans Detective Comics #168) en créant le fameux Masque Rouge, plus connu sous son nom originel : Red Hood (qui sera repris en 1989 dans Killing Joke et modernisé en 2014 par Scott Snyder dans Batman #0 puis dans l’arc L’An Zéro). Le mythe dit que l’inspiration du fameux heaume rouge, brillant et lisse est venue à nouveau d’un écrivain français réputé : Alexandre Dumas. C’est la dernière partie du livre Le Vicomte de Bragelonne, publié de 1847 à 1850, qui fermait la trilogie entamée avec Les Trois Mousquetaires, qui aurait fourni au scénariste de comics sa matière brute : il y est en effet question du fameux Homme au masque de fer.

Une absence totale de moralité

image-02Plus de 75 ans après sa création, le Clown du Crime est devenu un personnage à part entière de la culture populaire. Outre sa perpétuelle apparition dans les bandes dessinées Batman et Detective Comics, parmi les titres les plus emblématiques, durant plusieurs décennies, c’est à la fois l’écriture du personnage, sa psychologie atypique, son absence totale de moralité et son essor à travers d’autres supports artistiques qui ont contribué à sa renommée. Il fascine et séduit autant qu’il repousse et effraie. Miroir déformé d’un héros solitaire et sombre, il se veut fantasque et coloré. Certains le considèrent comme fou, d’autres l’estiment habile manipulateur, doué d’une rare intelligence.

Dès sa création pour le premier numéro de la série Batman en 1940 (le justicier est né un an avant dans le numéro #38 de Detective Comics), ses auteurs souhaitaient un ennemi « fort » et qui laisserait une trace pour cette nouvelle publication. Bien malin, l’éditeur, DC Comics, décida de ne pas tuer le Clown dès sa première apparition (chose très fréquente à l’époque pour les ennemis de Batman). Fou furieux, manipulateur, tueur sans remords : la première version du Joker, jusqu’en 1942, est, quelque part, assez proche de l’imaginaire collectif. Il « s’assagit » ensuite jusqu’en 1954, devenant un « simple » bouffon trouvant un attrait aux farces et attrapes, tout en restant cet ennemi flamboyant et unique.

Dès lors, le Comics Code Authority, organisme de censure, contraint indirectement à une disparition du Joker (mieux que d’avoir eu une version trop ringarde et aseptisée), remplacé par des monstres de science-fiction ou fantastiques, afin de coller avec le registre de genre du Batman de l’époque. Cela durera près de quinze ans. L’Arlequin de la Haine continue de défier le Goliath de Gotham à travers les planches et connaît un regain de popularité en 1966, grâce à la série télévisée  de ABC, où l’acteur Cesar Romero lui prête ses traits. Du pur nanar dans lequel le terrible ennemi paraît bien ridicule. Mais cela lui permet d’accroître son aura et de se faire connaître par davantage de personnes.

[Couverture de Detective Comics #69 par Jerry Robinson en 1942. L’’une des rares montrant le Joker tenant des armes à feu.]

La mort de Robin

C’est en 1989 que le Joker acquiert définitivement son statut de Némésis culte. Deux raisons à cela. La première se joue outre-Atlantique, au Pays de l’Oncle Sam, dans les chapitres #426 à #429 (décembre 1988 à janvier 89) de la série Batman : le Joker tue Robin. Il s’agit alors du deuxième Robin, alias Jason Todd, qui succéda à Dick Grayson (un nom un peu plus connu du « grand public » puisqu’il était le Robin originel devenu un super-héros à part entière sous l’alias Nightwing). Dans cette histoire, intitulée Un Deuil dans la Famille (publié pour la première fois en France en 2003 puis réédité en 2013 par Urban Comics, l’éditeur actuel des aventures du Dark Knight), ce sont les lecteurs eux-mêmes qui ont scellé le sort du second side-kick de Batman à travers un vote massif organisé par DC Comics ! Une drôle de façon de faire pour l’époque mais qui restera dans l’histoire de la bande dessinée américaine.

Comics Batman 10 Un Deuil dans la Famille Comics Batman 20 The Dark Knight Returns  Comics Batman 22 Arkham Asylum

Si cette mort, d’une violence inouïe, accentue le statut de méchant du Joker et marque à jamais la mythologie de Batman, l’histoire n’est paradoxalement pas la plus emblématique du Caped Crusader. Jim Starlin, son scénariste, met en scène un Batman au cœur de la politique et du Moyen-Orient. Il faut attendre 2002 pour entrevoir le retour de Jason Todd, dans l’excellent ouvrage Hush, écrit par Jeph Loeb, avant de le voir se concrétiser dans Under the Red Hood, sous la plume de Judd Winick, en 2005 (tous deux disponibles chez nous sous les titres Silence et L’Énigme de Red Hood, toujours chez Urban Comics). La mort de Robin survient après trois années de publications où le Joker a littéralement pris un tournant radical.

En effet, dans les comics, aux États-Unis tout du moins, le Joker est devenu une entité résolument sombre, violente et menaçante. Pire qu’à l’accoutumée. Il y a donc eu, en 1989, Un Deuil dans la Famille mais les prémices de cette version extrêmement dérangeante sont apparus en 1986, dans The Dark Knight Returns de Frank Miller (Sin City, 300…). On y découvrait, dans un futur hypothétique, un Joker incapable de vivre, totalement dépressif, depuis la disparition (volontaire) de Batman. Le Clown retrouve goût à la vie uniquement lorsque le Chevalier Noir refait son apparition. C’est dans ce comic book, que Miller suggère (en premier) la mort de Robin par la main du Joker. L’artiste polémique récidivera quinze ans après dans The Dark Knight Strikes Again, une suite nettement inférieure, où il fera carrément de Dick Grayson… le Joker !

Un Joker au sommet de la folie

batman killing jokeAprès The Dark Knight Returns, qui deviendra culte et constituera un pilier du monde des comics, sort en 1988 Killing Joke, de Brian Bolland et Alan Moore (Watchmen, V pour Vendetta…). Le Joker est alors au sommet de sa folie : il kidnappe Gordon, l’humilie, tire sur sa fille Barbara (Batgirl), et est ainsi responsable de son handicap (elle deviendra Oracle en étant condamnée à rester sur un fauteuil roulant). Cette version extrêmement noire (et désormais reniée par Moore) sous-entend même que le Joker aurait violé la fille du commissaire… Une adaptation animée sort ce mois-ci (MàJ : le 3 août 2016). Dans la foulée, Grant Morrison écrit son formidable Arkham Asylum, publié en 1989, qui vient accroître l’aura maléfique du Joker. Les méandres et errances de Batman dans le célèbre asile, où il a peur de céder à sa propre folie face à un Joker plus survolté que jamais.

Le même auteur laisse entendre dans Batman #663, à travers des bribes de la thèse d’Harleen Quinzel, que le Joker n’a pas de personnalité propre ni d’ego mais plutôt des « super-personnalités ». Cette plongée au cœur de la folie dans Arkham Asylum inspirera le jeu vidéo éponyme qui sera mis en vente pile vingt ans après.Comics Batman 28 Joker Anthologie Dans cet autre média, le Clown du Crime occupe une place prépondérante. S’inspirant des comics précités et récupérant les doubleurs des dessins animés (Mark Hamill en VO, Pierre Hatet pour la VF), la saga Arkham sera un succès critique et public.

Il faut attendre 2005 pour lire une nouvelle version de la première apparition du Joker, soixante-cinq ans après sa naissance. Elle est intitulée L’Homme qui rit (The Man Who Laugh en version originale), nom qui évoque clairement l’œuvre de Victor Hugo et le film de 1928 (qui bénéficia, pour l’anecdote, d’un passable remake français fin 2012, avec Marc-André Grondin dans le rôle-titre). Dans cette histoire, Gordon et Batman alternent les monologues intérieurs (de la même façon que Batman : Année Un, par Miller) et son auteur, Ed Brubaker, distribue la carte de la folie en modernisant à peine son socle d’inspiration : l’énigmatique Joker annonce des morts à la télévision, celles-ci ont lieu aux heures dites, comme dans Batman #1 de 1940. Les deux sont à (re)lire dans l’indispensable Joker Anthologie, toujours chez Urban Comics.

« Il incarne la peur des clowns maléfiques »

« Le Joker touche des publics différents, à des degrés divers et pour des raisons diverses. Pour le public plus jeune, il incarne la peur des clowns maléfiques : leur côté étrange, leur maquillage…, souligne l’éditeur Yan Graf qui a travaillé sur cet ouvrage. Mais le Joker est aussi un symbole d’anarchie, poursuit-il. Les personnages de méchants charismatiques sont légion dans la culture populaire et ces dernières années, les assassins insensibles ou psychopathes ont remporté les faveurs du public. Ils produisent une sorte de fascination/répulsion et depuis longtemps, on sait que le spectateur ou le lecteur aime se placer dans les pas d’un meurtrier. Le Joker est l’un de ces personnages flamboyants qui vivent sans repère moral, il est celui qui rejette toutes les règles ou toutes les valeurs sur lesquelles on bâtit une société civilisée. De plus, il ridiculise les autorités, à commencer par Batman. C’est le fou de la cour du roi mélangé à un artiste de la mort. Sa complexité en fait un personnage aux multiples facettes. »

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C’est donc avec quatre œuvres cultes publiées entre 1986 et 89, The Dark Knight Returns, Killing Joke, Arkham Asylum et Un Deuil dans la Famille, que le lectorat des aventures de l’homme chauve-souris découvre non pas un nouveau visage ou une nouvelle version du Joker mais un stade jamais atteint auparavant en termes de danger. L’ennemi emblématique, qui avait déjà tué auparavant, devient un miroir menaçant. Il s’en prend directement à l’entourage de Batman. On découvre une psyché le voulant proche de l’homme chauve-souris, voire indispensable. Sans Batman, il n’existerait pas. Mais sans le Joker, Batman n’existerait-il sans doute pas non plus ? À cette interrogation, Tim Burton viendra ajouter son grain de sel, ou plutôt son grain de folie.

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La seconde salve qui fait grimper le Joker sur les hautes marches de la culture populaire (après cet enchaînement de comics noirs) est bien entendu l’interprétation magistrale de Jack Nicholson dans le film réalisé par Tim Burton en 1989 et sobrement intitulé Batman. Ce n’est pas la première fois que le Joker apparaît à l’écran : Cesar Romero le jouait, comme évoqué plus haut, dans la célèbre série débutée en 1966 avec Adam West, qui s’acheva deux années après, au bout de trois saisons suivi d’un film nanar devenu culte par la force des choses, principalement par son côté kitch. Le Joker était donc déjà connu d’une partie de la population (en plus des lecteurs réguliers des bandes dessinées, bien sûr, sans oublier les quelques produits dérivés de l’époque) mais il n’avait jamais été montré aussi sombre et menaçant, hors productions papiers.

C’est d’ailleurs avec le long-métrage de Burton que la « Batmania » va réellement commencer, surtout en France. Pour surfer sur le succès, le film bénéficiera évidemment d’une suite (Batman Returns/Le Défi — davantage dramatique et à l’esthétique gothique très soignée, avec un style plus Burtonien que jamais, qui a déplu aux producteurs) et surtout la création d’un nouveau et formidable dessin animé. Le Joker y est particulièrement mis en avant et doublement accessible (aux enfants et aux adultes). Les jeux vidéo et l’arrivée des comics en France favorisent une fois de plus le développement du personnage.

Jack Nicholson campe un Joker mythique

jack_nicholson_the_jokerJack Nicholson, 52 ans à la sortie du film, n’a plus rien à prouver en tant qu’acteur. Il a reçu un Oscar pour son rôle dans Vol au-dessus d’un nid de coucou en 1975 et surtout, il a déjà offert une incarnation de la folie pure dans le célèbre film de Stanley Kubrick sorti en 1980 : Shining. Le quinquagénaire vole la vedette au Chevalier Noir, fadement interprété par Michael Keaton. Grand succès critique et public, avec 400 millions de dollars de recettes, cette nouvelle mouture de Batman au cinéma, résolument plus sombre (en adéquation, donc, avec les comics de l’époque), dévoile au monde entier le génie du Joker. Si le film a vieilli par bien des aspects, la performance de Nicholson, son terrible visage et ses inoubliables costumes, font encore mouche.

Dans l’esprit des gens, le Joker EST Jack Nicholson. Il ne peut en être autrement. Un truand de base considéré comme fou, qui deviendra littéralement et physiquement le Joker après un jet de produit chimique reçu dans le visage, et évidemment sa célèbre chute dans une cuve d’acide, le tout causé par Batman lui-même. L’homme veut semer un certain chaos dans la ville, sans raison aucune. Il est plutôt « comique » avec des sautes d’humeur violentes, forcément. Il possède même une certaine élégance. Offense suprême : il a lui-même tué les parents de Bruce Wayne, lorsqu’il s’appelait Jack Napier et était âgé d’une vingtaine d’années (une « trahison » pour les fans des aventures sur papier puisqu’il a été maintes fois confirmé que Thomas et Martha Wayne succombent sous le feu de Joe Chill). C’est donc le (futur) Joker qui va créer Batman, avant que celui-ci ne contribue à la naissance du Joker. Ce dernier lance dans le film : « Je vous ai fait ! » Ce à quoi le célèbre justicier répond : « Tu m’as fait en premier. » L’existence de l’un va de pair avec l’autre, la boucle est bouclée.

Presque vingt ans plus tard, le regretté Heath Ledger personnifie le Clown du Crime dans une version se voulant très plausible, dans le second opus de la trilogie de Christopher Nolan. The Dark Knight, sorti en 2008, fait suite à Batman Begins dont la fin annonçait la venue à Gotham dudit Joker. Les fans hurlent et déchantent : personne d’autre que Nicholson ne peut jouer le Joker.

Mark Hamill (Luke Skywalker) est fan

image-14-pierre-hatetEntre-temps il y a eu l’excellente série animée de Bruce Timm et Paul Dini. Le Joker était doublé par Mark « Luke Skywalker » Hamill pour la version originale, un rôle qu’il a rempli dans bon nombre d’autres productions d’animations ou encore dans la célèbre saga de jeux vidéo Arkham (tout du moins, dans les trois du studio de Rocksteady : Arkham Asylum, Arkham City et Arkham Knight — en France c’est Pierre Hatet qui s’en est chargé sauf, comme le célèbre Jedi, pour Arkham Origins, où Stéphane Ronchewski, le doubleur de Heath Ledger a officié à sa place — dans chaque jeu le Joker est remarquablement mis en avant). Mark Hamill confiait : « Dans toute ma carrière, il est le personnage le plus stimulant, gratifiant et plaisant que j’ai eu à incarner. » En France, c’est donc la voix de Pierre Hatet qui s’impose en très peu de temps. Cet acteur de théâtre, connu pour être la voix française du Doc Brown de la trilogie Retour vers le Futur, juge « formidable ce qu’a fait Mark Hamill. Mais je ne m’en suis jamais inspiré et je l’ai peu écouté… »

Déclaration plus surprenante encore : « Je ne savais pas vraiment qui été le Joker quand j’ai commencé à le doubler. En revanche, je connaissais  »L’Homme qui rit » de Victor Hugo grâce au théâtre. C’est d’ailleurs grâce à mes performances de comédien sur scène que j’ai été choisi pour devenir la voix du Joker. » Une voix désormais indissociable du personnage dans l’imaginaire des petits et des grands. « Des enfants me reconnaissent et me demandent de faire un rire ou le célèbre ‘‘Mon Batounet’’ encore aujourd’hui,  confie Pierre Hatet dans sa résidence parisienne avec sourire. J’ai découvert le Joker sur papier il y a deux ans grâce à un ouvrage,  »Joker Anthologie ». Personne ne m’a guidé pour trouver LA voix et je n’ai pas non plus cherché à connaître le personnage dans les bandes dessinées. Quand j’aborde un doublage, je suis comme un acteur qui rentre dans un rôle. J’ai essayé de trouver une vérité dans le Joker, je l’ai ensuite imposée et tout s’est fait naturellement. »

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Le comédien n’a malheureusement pas été convié à doubler le Joker dans Suicide Squad (MàJ : c’est Paolo Domingo qui l’a fait) ni dans le dessin animé Killing Joke (MàJ : Marc Saez s’est attribué le rôle), tous deux sortant cet été. « Une pétition a circulé sur Internet (MàJ : à découvrir sur ce lien, et lire cet article —même s’il est approximatif par bien des aspects— pour mieux comprendre). On ne m’a pas appelé, j’attends que le téléphone sonne… J’ai bien conscience, en toute modestie bien sûr, d’avoir marqué plusieurs générations, alors je le redoublerai avec plaisir. Je suis très attaché au personnage. » Sur la folie du Joker, Pierre Hatet a son hypothèse : « À mon avis, il est intelligent et calculateur, c’est le Prince du Crime face au Prince de la Vertu. C’est un méchant jaloux. Par opposition à Batman, le Prince de la Justice, dont le Joker admire la pureté et l’honnêteté, le Clown deviendra le Prince du Mal. »

[Pierre Hatet, fière voix de la version française du Joker à son domicile © Thomas Suinot ]

Batman et le Joker, unis à jamais

Durant plusieurs décennies, du côté des comics, maints auteurs se sont interrogés  sur l’identité réelle du Joker. Pas son identité civile mais son vrai but, sa véritable interaction avec Batman. Pour certains artistes, il est tout simplement le double version maléfique de l’homme chauve-souris. L’un ne peut vivre sans l’autre. L’un est responsable du destin de l’autre. Ils sont le miroir d’une même personnalité, chacune correspondant à un extrême. Une vision particulièrement soulignée dans Killing Joke et dans le moins connu Batman : Secrets, de Sam Kieth.

    Batman Secrets Batman le deuil de la famille Batman 4 L'An Zero 1ere partie Batman Mascarade Endgame Fini de Jouer Tome 7

Plus récemment, c’est Scott Snyder qui évoquera cette confrontation quasi fraternelle, à travers les tomes 3 à 5 puis 7 de la série Batman (chez Urban Comics à nouveau). Soit dans Le Deuil de la Famille, L’An Zéro puis Mascarade. Entre 2011 et 2015, le scénariste a livré une version moderne du Joker tout en gardant l’esprit d’origine. En mai et juin 2016, à la fin de la série Justice League, juste avant que l’éditeur DC Comics n’opère un nouveau relaunch, nommé Rebirth (une opération visant à repartir de zéro dans ses séries), on a appris qu’il n’y avait pas un mais trois Jokers différents depuis que Batman est devenu le justicier de Gotham City…

Le Dark Knight profite donc de sa nouvelle série (tout juste publiée aux États-Unis et qui arrivera très certainement début 2017 en France) pour enquêter sur cette révélation, plutôt cohérente et très excitante. L’éditeur Yan Graf la trouve amusante car « elle valide le découpage choisi dans Joker Anthologie, qui mettait en valeur l’évolution du personnage à travers différentes phases, de maitre chanteur assassin à tueur en série en passant par braqueur de banque déluré ! ».

Heath Ledger fait taire les « haters »

the-dark-knight-the-joker-heath-ledger-batmanRetour en 2008 : la performance d’Heath Ledger vient à bout des haters. Christopher Nolan avait d’ailleurs prévenu avant la sortie du film : son Joker serait finalement très sérieux. On revient à l’inévitable question qui hante les fans : le Joker est-il un fou doué d’une intelligence sans faille, ou bien d’un génie intelligent avec « quelques » accès de folie, une folie passagère ? Feint-il d’être fou ? A-t-il une logique ? Le mystère demeure dans chaque œuvre qui le met en avant. Son identité ? Comme dans la plupart des livres, il la modifie selon son bon vouloir.

On note toutefois qu’ici, le Joker se maquille lui-même et que son sourire provient de cicatrices (causées par son père ou lui-même, nul ne sait), tandis que chez Tim Burton et dans la majorité des comics, la peau du Joker est définitivement blanche et ses cheveux verts (après la plongée dans l’acide). Ledger sera oscarisé à titre posthume, éclipsant totalement le travail de ses collègues. Dans The Dark Knight, le Joker se rapproche d’un anarchiste terroriste, trouvant en Batman un défi à sa hauteur. Il va lui prouver que le monde peut basculer dans la folie, dans le chaos, du jour au lendemain, qu’on abrite en chacun de nous un fou et que l’unique intérêt de la vie et de le laisser s’échapper… Ce « style » et le look de cette version du Joker sont repris par  Lee Bermejo (scénariste et dessinateur) dans sa bande dessinée au titre simpliste : Joker.

Coup de tonnerre en avril 2015 : la première photo du Joker version Jared Leto pour Suicide Squad est mise en ligne. L’annonce de la présence du talentueux acteur dans le célèbre rôle avait moins décontenancée qu’à l’époque de Ledger, chacun ayant retenu la leçon. En revanche, la photo dévoilant un Joker couvert de tatouages et avec des dents argentées fait immédiatement rager les éternels haters. Les premières vidéos atténueront un peu ces critiques. Faut-il rappeler que dans certains comics le Joker est tatoué (comme dans All Star Batman : le jeune prodige, de Jim Lee et Frank Miller) ? Il ne paraît pas non plus illogique qu’il se soit fait refaire une mâchoire que Batman lui a cassée de nombreuses fois ?

Jared Leto proposera quelque chose de différent

Cette troisième version cinématographique (quatrième en comptant le nanar de 1966) développe le même schéma que dans les comics : le Joker est à l’unisson de la folie. Et il existe plusieurs formes de folie, la différence d’approche entre Nicholson et Ledger en étant la plus belle preuve. Nul doute que Leto, sous l’égide de David Ayer (Fury) pour son escadron de la mort, apportera quelque chose de novateur, qui se retrouvera cristallisé dans l’esprit commun. On murmure déjà qu’il apparaîtra dans les autres productions cinématographiques de DC Comics : le film The Batman porté par Affleck et peut-être même dans Justice League, prévu pour fin 2017.

Le mythe se réinvente sans cesse, comme dans toutes les bonnes variations d’un même thème occulté pendant des décennies. « À ce stade, il est comme Jésus, estime Jared Leto. Une icône. Un mythe. Il s’agit de se montrer à la hauteur. » L’acteur a envoyé en cadeau un rat à Margot Robbie durant le tournage. Elle y joue sa muse : Harley Quinn. Autre offrande, pour Will Smith (Deadshot) : des préservatifs usagés… Une rumeur démentie par le principal intéressé un an après la sortie du film ; on évoque plutôt un magazine pornographique à la place. Moins trash mais irrévérencieux quand même. Jared Leto a sa façon bien à lui de déstabiliser ses partenaires hors écran ! « Au départ je suis retourné à la source et j’ai lu autant de comics que je le pouvais. Mais je devais dépasser cela. Car, à chaque nouvelle incarnation, le personnage s’est redéfini. À chaque fois, l’essence du Joker est là mais elle change. Après avoir compris cela, il fallait passer à la transformation physique, expliquait plus sérieusement, le chanteur de Thirty Seconds to Mars. C’était un honneur de me voir proposer un tel rôle. Le Joker est dans la culture populaire depuis plus de 75 ans. Je suis le dernier en date à l’interpréter, avec de glorieux prédécesseurs. Il fallait que je prenne des libertés, que j’expérimente des choses. Le réalisateur m’a autorisé à lâcher prise, ça n’a pas de prix ! »

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« Sans Batman, le crime n’est plus amusant ! », clame le Joker dans un épisode de la série d’animation, sous la plume de Paul Dini. Une citation qui ouvre l’excellent beau livre « Tout l’art du Joker » (encore et toujours chez Urban Comics). Un crime peut-il être amusant sans Batman ? Selon la série télé Gotham (Fox), oui. Une version brouillonne du Joker est apparue dans la deuxième saison, donc à l’époque où Batman n’existait pas (le feuilleton met en avant les débuts de Gordon à Gotham City). Un certain Jérôme a tout pour être le futur Joker (outre le look et d’autres éléments, il annonce ses morts à la télévision, comme dans le tout premier comic book) mais, sans en dévoiler trop, il ne participera finalement qu’à l’ébauche de celui-ci. « La création du Joker est une histoire beaucoup plus large et épique que ne le réalisent les gens. À mesure que la série avancera, ils verront comment une mythologie est née, comment une sorte de comportement culturel a été créé, menant au Joker lui-même. Jérôme est la graine de ce dernier », soutenait Bruno Heller, le showrunner de la série.

Le Joker se réinvente à sa façon, sensiblement différent à chaque nouvelle apparition artistique, sous une forme ou une autre. Son identité reste un mystère. Son but ultime est-t-il de répandre la folie ou de défier encore et toujours Batman ? C’est fou, après plus de trois quarts de siècle, on ne sait toujours pas vraiment qui il est mais il continue — et continuera — de fasciner un bon bout de temps. Pierre Hatet n’hésite pas à citer Victor Hugo : « L’Homme qui rit est un homme mutilé, on lui a mis au cœur un cloaque de colère et de douleur, et sur la face un masque de contentement. » On s’en contentera encore des années avec plaisir.

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cine-saga-14Cet article est initialement paru dans Ciné Saga #14, en août 2016 (pages 32 à 39).
Couverture ci-contre ainsi qu’un aperçu ci-dessous de la mise en page de l’ensemble de l’article, qui a été légèrement modifiée pour la version imprimée .

Quelques mises à jour ( « MàJ ») ont été ajoutées pour la reprise sur le site en novembre 2016.
Deux brefs ajouts ont également été rédigés en plus (la mention de la BD Joker et la dernière phrase de conclusion — que j’aimais beaucoup et qui avait été enlevé dans le magazine).
Les images et photos d’illustration ne sont pas forcément les mêmes pour avoir, ici, une plus belle unité visuelle.

Un petit encadré « À savoir » indiquait ceci : Thomas Suinot est le fondateur et unique rédacteur du site www.comicsbatman.fr. La plupart des livres mentionnés dans cet article sont chroniqués sur ce site.

Un « Top 10 des plus grands méchants des comics » était avant cet article (pages 16 à 21). Le Joker y avait la première place avec ce petit texte, de Raphaël Nouet : Que serait Batman sans le terrible Joker ? La principale arme du plus grand des méchants est son cerveau, contaminé par une folie par moments contagieuse. Lui ne rêve pas de gouverner la Terre ou d’anéantir l’univers, simplement – et c’est déjà beaucoup ! – de faire souffrir son prochain. Le Mal dans toute son horreur, dont la carrière est décortiquée dans les pages 32 à 39 […] suivi d’une nouvelle mention de mon nom et du site.

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(1) — J’ai également rédigé, pour ce même numéro, un article sur Star Wars : Rogue One ainsi qu’une interrogation sur le renouvellement, possible ou non, de la Science-Fiction au cinéma.

Depuis juillet 2016, j’écris régulièrement pour le magazine Ciné Saga et sa déclinaison orientée série (Séries Saga). Niveau comics, j’ai évoqué Walking Dead dans un numéro thématique à la célèbre série télé avec des zombies. Le reste est à découvrir sur mon site personnel, avec les titres de mes contributions pour chaque magazine avec parfois la lecture des articles.

Je suis extrêmement fier de cette étude de cas. C’est une très belle « récompense » que m’a offert le travail effectué sur ce site depuis bientôt cinq ans. Grâce à mes articles, j’ai pu en écrire un sur ma passion, publié dans un magazine édité à 30.000 exemplaires et disponible partout en France ! Même si j’ai déjà eu de nombreuses publications « papier » par le passé, je ne peux que me réjouir de celle-ci, qui a évidemment une forte importance.

Un très très grand merci à Pierre Hatet et Geneviève, ainsi qu’à Clémentine et Yan Graf d’Urban Comics. Disponibles, chaleureux et réactifs, nul doute que cet article n’aurait pas eu la même « qualité » sans eux. Merci à Raphaël sans qui rien n’aurait été possible, et à Franck pour sa relecture et ses corrections.

Une version plus allégée de cette étude a été publiée sur Le Huffington Post le 18 décembre 2016.

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