Archives de catégorie : Batman

Un Long Halloween

Principale source d’inspiration (avec Année Un) pour les films Batman Begins et The Dark Knight, Un Long Halloween est généralement le deuxième ouvrage à lire quand on commence les comics Batman. Celui-ci est considéré comme la suite d’Année Un, Frank Miller ayant donné son accord pour la réutilisation de ses personnages. Les auteurs d’Un Long Halloween partiront de ce principe pour développer leur fabuleuse histoire. Retour sur un récit incontournable.

Comics Batman 04 Un Long Halloween[Histoire]
Carmine « Le Romain » Falcone
règne en maître dans Gotham City. Son réseau, son influence et son pouvoir n’impressionnent pas Bruce Wayne, qui refuse de signer des accords d’entreprise avec lui, opération visant à blanchir l’argent sale de Falcone. Seul le neveu de celui-ci avait eu le courage de tout dénoncer devant un tribunal, avant de se raviser suite à une grosse somme d’argent déboursé par son oncle.

Harvey Dent, procureur ambitieux, souhaite arrêter Falcone mais ne peut franchir la ligne de la légalité. Épaulé par le lieutenant James Gordon, ils feront appel à Batman pour s’associer ensemble et coincer Falcone.

Mais le neveu de ce dernier est assassiné le soir d’Halloween… Pire encore : chaque mois, lors d’une fête, une personne en lien avec Falcone est tuée. Le meurtrier, surnommé Holiday, est introuvable. Bientôt, ce sont les fous d’Arkham qui feront aussi parler d’eux dans Gotham City : le Joker, Poison Ivy

Le Chevalier Noir, Gordon et Dent devront faire face à toutes ces menaces, en plus de leurs problèmes dans leurs vies privées, pour ramener la paix dans la ville et mettre fin aux agissement des clans mafieux et de Holiday.

Batman Long Halloween Batman Catwoman[Critique]
Un Long Halloween se lit, et relit, d’une seule traite (et rapidement). Énormément d’informations se succèdent dans cette histoire en treize chapitres, chacune s’axant sur un ou plusieurs protagonistes. Il y a tout d’abord, et c’était rarement vu jusqu’ici, les familles mafieuses. Falcone au centre du récit (dont la joue griffée par Catwoman dans Année Un rappelle la continuité directe — le personnage a d’ailleurs été inventé par Miller), avec ses enfants et sa sœur, mais aussi Maroni, le grand rival. Les références au livre et au film Le Parrain sont légions, du propre aveu du scénariste Jeph Loeb. Cette plongée au cœur de la mafia ayant la main mise sur la ville, à travers son réseau, l’argent sale et l’intimidation, surprend dans un univers qui était jusque là plutôt réservé aux fous d’Arkham, traditionnels ennemis du Chevalier Noir.

Batman Long Halloween FalconeC’est en effet la première fois que cet angle hyper réaliste est accentué dans un comic-book sur Batman, dans la droite lignée du travail qu’avait effectué Frank Miller auparavant. Mais la galerie de vilains du Dark Knight n’est pas en reste, puisque apparaîtront successivement Le Joker (pour une de ses premières fois), Poison Ivy, Le Sphinx, L’Épouvantail, Le Chapelier Fou, Calendar Man et même Solomon Grundy. Chacun a un rôle justifié et ne sert pas uniquement le récit pour de la figuration, bien au contraire. Double-Face n’est pas en reste, puisqu’Un Long Halloween est clairement l’équivalent de l’Année Un d’Harvey Dent. On suit le procureur assoiffé de justice dans sa croisade, aux côtés de Gordon et Batman, puis on découvre par petites touches sa schizophrénie potentielle, avant d’assister littéralement à sa naissance et son nouvel alias.

Harvey Dent est donc, lui aussi, au cœur du récit, mais ne vole pas la place à l’homme chauve-souris, qui alterne son rôle de vigilant et de playboy milliardaire avec un bon équilibre (là aussi un aspect pas forcément commun aux autres comics). Autour d’eux : Gordon tente de jongler entre son travail fastidieux et sa vie privée, dont le couple fragile (à voir dans Batman : Année Un) a vu l’arrivée de James Jr.. Couple qui trouvera un certain écho dans celui d’Harvey et Gilda. La femme du procureur se trouvant dans la même position que celle de Gordon à son arrivée dans Gotham City : de nombreuses menaces sur la famille, un mari souvent absent, etc. Ce sont ces petites touches de scènes quotidiennes, totalement transposables « dans notre monde et propre vie privée » qui assurent davantage d’immersion dans l’histoire. Tous les personnages génèrent de l’empathie ou de la sympathie.

Batman Long Halloween Dent Gordon GCPDCe n’est pas terminé : le tueur en série Holiday tient lui aussi le lecteur en haleine. À la première lecture, difficile de deviner qui est le meurtrier : Dent ? La sœur de Falcone ? Sa fille ? Catwoman ? Un inconnu ? Une inconnue ? Des inconnus ? À la seconde lecture, c’est l’évidence même et c’est là tout le génie de Loeb : il a écrit un polar pouvant être dévoré plusieurs fois avec chaque fois une nouvelle vision et tellement de sujets et de personnages que ce n’est pas forcément l’identité d’Holiday qui est au premier plan. C’est l’essence même d’un grand comic (et livre, d’une manière générale) : un parfait dosage de sujets personnels, intimes, mais également de suspens, d’action et de mystères. On notera que des années plus tard, le scénariste, associé cette fois au talentueux Jim Lee, publie Batman : Silence dont le schéma narratif est un peu identique. Tous les ennemis (et les alliés) interfèrent à chaque chapitre, Batman cherche l’identité de Silence, etc.

Un Long Halloween bénéficie du style atypique de Tim Sale. L’artiste croque ses personnages avec un petit côté « carré », rappelant parfois le travail de Frank Miller. Allant même, dans certaines planches, vers une approche à la Sin City, avec des cases noires et blanches monochromatiques. La quasi-permanence d’ombres procure une ambiance visuelle à nouveau dans la veine polar. À noter qu’Un Long Halloween est le fruit du travail effectué plus ou moins en amont par le duo d’artistes dans trois épisodes « Halloween Specials » quelques mois avant (et compilés dans Des Ombres dans la Nuit, avec le récit Catwoman à Rome, qui viendra clore la mini-série entamé avec Un Long Halloween et poursuivie avec Amère Victoire).

Batman Long Halloween JokerSi l’on cherche des défauts, on pourrait s’attarder sur Poison Ivy, dont la façon d’agir tranche un peu avec le réalisme observé dans le reste du récit, et la présence de Catwoman, indispensable évidemment, mais dont les finalités sont inabouties. Elle se contente d’être spectatrice sans qu’on comprenne réellement si elle a un but derrière tout cela. Peut-être qu’on en saura plus dans Amère Victoire, la suite directe, ou celle consacrée à son personnage : Catwoman à Rome. Certaines critiques pointent du doigt l’approche trop réaliste de l’ouvrage et le manque de « méchants fous » au détriment de membres de la mafia (sic). C’est évidemment une des qualités principales de l’œuvre, qui change un peu des autres ouvrages tout d’abord, et surtout qui est un peu fausse puisque la plupart des ennemis classiques apparaissent dans Un Long Halloween.

« Un Long Halloween est plus qu’un comic-book.
C’est une tragédie épique. »
Christopher Nolan, réalisateur de la trilogie The Dark Knight.

Le prix relativement élevé de l’ouvrage (35€) se justifie par son nombre de pages (416) et quantité de bonus mais reste tout de même trop onéreux (surtout par rapport à d’autres productions de l’éditeur). Beaucoup de compléments donc : une préface de Christopher Nolan et David S. Goyer, au moment de la sortie de Batman Begins et des prémices d’écriture de The Dark Knight (dont Un Long Halloween est clairement leur inspiration première pour ces deux films), des interviews de Jeph Loeb et Tim Sale, qui permettent de comprendre la matière créatrice de l’œuvre, des résumés, anecdotes et beaucoup de croquis, ainsi que les couvertures des treize numéros originaux.

Batman Long Halloween SphinxUne enquête-fleuve au sein de la mafia, un trio emblématique d’héros, la naissance de Double Face, une bonne partie des fous d’Arkham, un serial-killer mystérieux, etc. le tout servi par une fantastique ambiance visuelle avec des coups de théâtre et retournements de situations. Résolument culte et indispensable en seconde lecture des aventures du Chevalier Noir !

[À propos]
Publiée en France chez Urban Comics le 4 janvier 2013.
Titre original : The Long Halloween
Scénario : Jeph Loeb
Dessin & encrage : Tim Sale
Couleur : Gregory Wright / Dave Stewart (pages complémentaires)
Lettrage : Laurence Hingray & Christophe Semal — Studio Myrtille
Traduction : Thomas Davier

Titres des chapitres :
1 – Crime
2 – Thanksgiving
3 – Noël
4 – Réveillon de la Saint-Sylvestre
5 – Saint-Valentin
6 – Saint-Patrick
7 – 1er Avril
8 – Fête des Mères
9 – Fête des Pères
10 – Jour de l’Indépendance
11 – Fête Romaine
12 – Fête du Travail
13 – Châtiment

Première publication originale en 1996-1997.
Publié en France en 1999 chez Semic dans quatre Batman hors-série. Réédité ensuite en intégrale version Absolute chez Panini Comics en 2009, puis deux ans après en version intégrale Deluxe (moins cher et moins épaisse que l’Absolute, qui avait énormément de bonus).

Batman Long Halloween CarmineAcheter sur amazon.fr :
Un Long Halloween
Amère Victoire (Dark Victory)
Des Ombres dans la Nuit (Halloween + Catwoman à Rome)

Batman Long Halloween HolidayBatman Long Halloween Not a Toy

Icare

Icare est le nom d’un arc de la série Detective Comics, publié dans Batman Saga #32 à #37 (janvier à juin 2015). Cette mini-série est abordable par tous car les deux auteurs derrière Icare sont de nouveaux venus dans l’univers du Chevalier Noir. En effet, Brian Buccellato et Francis Manapul travaillaient avant sur la série Flash. Le vingt-cinquième chapitre du Coureur Écarlate se déroulait d’ailleurs durant le black-out de L’An Zéro et dévoilait les prémices d’Icare. Explications.

Batman Saga 32 Icare[Histoire]
Une drogue nommée Icare refait surface dans Gotham City : elle tue ses consommateurs d’une combustion spontanée. Elena Aguila en meurt d’overdose sur le perron du Manoir Wayne, peu de temps après que cette dernière ait confirmé être en pourparler Wayne pour financer une entreprise sociale dans les quartiers défavorisés de la ville.

Batman enquête sur cette étrange mort en même temps qu’Harvey Bullock, qui a eu affaire à l’Icare des années auparavant.

Entre les trafics de drogue et d’enfants au sein des gangs de Gotham City, la suspicion de Bruce Wayne dans la mort d’Aguila, et un certain Calmar qui règnerait dans l’ombre, le Chevalier Noir se concentre comme il peut pour découvrir qui est derrière Icare et pourquoi.

Batman Detective Comics Icare Icarus Bullock[Critique]
Icare reprend les principaux axes de base de Batman : une enquête policière à l’ancienne, une ville nocturne corrompue, le Chevalier Noir agissant en solo, etc. Bref on retrouve une veine polar, devenue assez rare depuis l’extension de la Bat-Family et la succession d’auteurs cherchant une originalité à tout prix (même si c’est une bonne chose). On y retrouve un personnage (Le Calmar), créée en 1940 par Gerry Conway et Don Newton dans Detective Comics #497

Le gros point fort de cette mini-série est son aspect graphique, visuellement impeccable et offrant une ambiance atypique. Le duo d’auteurs travaille réellement à quatre mains pour cette partie : Francis Manapul dessine et Brian Buccellato colorie (les deux écrivent en binôme leur histoire). En plus des dessins plutôt réalistes, ce sont les couleurs qui apportent vraiment la signature des artistes : entre les nombreux jeux d’ombre et de lumière, les tons pastels, à l’aquarelle flirtant même avec une impression de crayons de couleur et les ambiances chaudes finement travaillées, le lecteur en prend plein les yeux ! Il suffit de voir les illustrations de cet article pour avoir un aperçu du travail effectué (les deux dessins d’ouverture de chapitres, ne comportent aucun texte dans la version française, ils sont donc plus jolis). Autre qualité : le découpage des planches, parfois s’étalant horizontalement sur deux pages et souvent sous forme de puzzle ou de construction un peu hors-norme.

Batman Detective Comics Icare Icarus ActionIl est suffisamment rare que la partie dessin soit aussi aboutie et prévaut presque sur le scénario pour être signalée en priorité. L’histoire, quant à elle, n’est pas la plus originale en soi, mais elle offre donc à Batman une aventure presque en solitaire, partiellement « épaulé » par Harvey Bullock, policier rarement mis en avant. Peu de gadgets hyper technologiques, beaucoup d’action pure et dure, Icare propose donc un divertissement de très bonne qualité. Cinq chapitres ne permettent pas, hélas, dans le cas présent, de générer plus d’empathie pour Elana Aguila et sa fille, idem pour le gang des motards, apparemment rencontré avant dans la série, ce qui n’empêche pas la compréhension du récit. Celui-ci se situe à priori pendant Batman : Eternal car Gordon est toujours arrêté (et Damian Wayne déjà mort) ; mais là aussi cette temporalité n’est pas un frein pour un lecteur novice. La conclusion, un peu confuse, donne envie de relire Icare en entier, ce qui est finalement une bonne chose.

Ces cinq chapitres auraient gagnés d’être étirés pour aborder plus de détails et de personnages. C’est quasi-chose faite avec l’introduction de la drogue Icare dans Flash #25 (à lire dans Justice League #10 et, sans doute, dans le quatrième tome de la série, quand il sortira) qui est une belle entrée en matière, même si le Dark Knight n’y est pas présent (ce chapitre mériterait d’être dans une éventuelle publication en librairie, voir ci-après). À Central City, Harvey Bullock y cotoyait Barry Allen, alors simple policier scientifique, et tous deux découvraient les premières victimes d’Icare. Pareillement, l’Annual qui clôt l’arc revient sur un ennemi de seconde zone, Julian Day, alias Calendar Man, et la relation entre Annie Aguila et son petit ami, avant la mort d’Elana, quand tous les deux étaient drogués. Ce bon complément souffre d’un manque de cohérence graphique car trois dessinateurs officient dessus au lieu du tandem habituel. Ce n’est pas gênant mais tranche trop avec la beauté des planches précédentes.

Batman Detective Comics Icare Icarus

Icare n’est pas le récit indispensable et inoubliable promis mais il a le mérite de lancer Batman dans un très bel univers visuel et avec une nouvelle approche. Espérons que les auteurs continuent sur cette lancée et trouvent une histoire pouvant rapidement devenir culte, ce qui est à leur portée.

► Vers une publication en librairie ?
Le récit a été salué par la critique et le public, les couvertures attirent immédiatement l’œil, l’histoire change un peu des éternels affrontements entre les ennemis classiques et la mise à feu et à sang de la ville, etc. bref les qualités ne manquent pas pour bénéficier d’une publication en volume unique en librairie. Celle-ci pourrait tout à fait inclure Flash #25, Detective Comics #32-37 et Detective Comics Annual #3 pour avoir l’intégralité d’Icare. Et pourquoi pas lancer carrément la série (donc avec un numéro #1) en librairie puisque le duo d’auteurs continue d’officier dessus ?
La question a été posée sur la page Facebook de l’éditeur. L’article sera actualisé en fonction de leur réponse.

Batman Detective Comics Icare Icarus New StartBatman Detective Comics Icare Icarus Part Three[À propos]
Publié en France dans Batman Saga (Urban Comics) #32 (janvier 2015) à #37 (juin 2015).

Scénario : Francis Manapul et Brian Buccellato
Dessin : Francis Manapul
Couleur : Brian Buccellato
Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Stephan Boschat (studio Makma)

Première publication originale dans Detective Comics #30 à #35 (juin à décembre 2014), sous le titre Icarus.

Detective Comics 33 Icare Icarus

Batman – Tome 07 : Mascarade

Cette histoire se déroule principalement après Batman – Tome 03 : Le Deuil de la Famille et la série Batman – Eternal (plus de détails dans le premier paragraphe de la critique — sans spoilers).

Batman Mascarade Endgame Fini de Jouer Tome 7


[Histoire]

Un affrontement titanesque a lieu au cœur de Gotham City entre Batman, équipé d’une armure high-tech, et… Wonder Woman ! D’autres membres de la Justice League vont venir en découdre avec le Dark Knight : Flash, Aquaman et même Superman.

Derrière cette attaque commune se cache en fait le Joker. En effet, celui-ci a conçu une toxine rendant les gens hilares et s’attaquant entre eux et, surtout, contre le Chevalier Noir.

Très vite, Batman, aidé d’Alfred et sa fille, Julia, doit trouver un remède et se confronter une ultime fois à son éternel rival.

Batman Mascarade Superman

[Critique]
Nouvel arc du duo Snyder et Capullo, Mascarade contient les qualités et les défauts de toutes les autres œuvres du scénariste. Tout d’abord, il est conseiller de lire ce tome après Batman – Eternal puisque des personnages (Julia Pennyworth et BlueBlird) y jouent un rôle plus ou moins important et que l’Asile d’Arkham est désormais au Manoir Wayne (un statu quo inédit), mais aussi, de façon plus anecdotique, après la série Nightwing (et par conséquent Forever Evil puis Grayson) ; enfin, cet arc s’inscrit naturellement dans la continuité de La Cour des Hiboux, Le Deuil de la Famille et L’An Zéro. Difficile donc pour un nouveau lecteur de prendre cette lecture en cours, même si le plaisir sera là, il n’est pas évidemment de s’y retrouver. Découpé en deux actes : Fini de jouer (le principal, reprenant les six chapitres du duo d’artistes, du #35 au #40) et L’homme pâle (les back-up accompagnant les chapitres). Mon Meilleur Ami, le Batman Annual #3, vient clore l’ouvrage et s’inscrit parfaitement en conclusion du second acte.

Comme toujours avec Scott Snyder, l’idée de départ est assez réjouissante : Batman seul contre la Justice League sans connaître les raisons de cet affrontement. Ce concept, passionnant de prime abord, s’essouffle très rapidement (en un chapitre et demi à peine, trop expéditif) pour dévoiler quelque chose de plus convenu : une attaque du Joker. À partir de là, l’histoire s’emmêle un peu : la création de la toxine (et toute la confusion qui va avec) avec une cellule biologique issue du Clown du Crime lui-même (!), ce dernier présent depuis des siècles dans Gotham City (une idée inachevée, ou plutôt facilement balayée dans l’acte principal, qui trouve un nouvel essor dans les back-up, autour d’une éventuelle immortalité de cet homme pâle), les incontournables Hiboux (qui ne servent finalement pas à grand-chose), etc. Mais d’autres éléments sont plus palpitants : une alliance avec les autres ennemis du Dark Knight, un petit retournement de situation peu prévisible, la confirmation que le Joker sait que Batman est Bruce Wayne —question laissée plus ou moins en suspens depuis Le Deuil dans la Famille, dont Mascarade propose parfois de jolis échos ici—, un duel final extrêmement violent, un Alfred désormais manchot (on sent que sa fille va le remplacer définitivement sous peu) et une fin à priori osée.

Batman Joker EndGame

Snyder devait normalement achever son travail sur le Chevalier Noir à la fin de cette histoire, mais il a entre-temps signé un nouveau contrat pour continuer à écrire la série. Cela se ressent tant ce volume aurait pu terminer son run. Il aurait donc officié depuis Sombre Reflet jusqu’à Mascarade, en remodelant Gotham City entre temps (à travers sa série Batman mais aussi ses autres travaux) et en perturbant l’alliance, fragile, entre les alliés du Dark Knight. Depuis quatre ans maintenant, son travail est à la fois acclamé et très décrié (y compris sur ce site) mais l’auteur ne laisse personne indifférent. C’est là la force de Snyder, de penser peut-être sur la durée, à défaut donc de proposer des récits « parfaits » s’ils ne s’inscrivent pas dans son run. Celui-ci aura le mérite d’être parfaitement cohérent tout du long, et d’apporter un nouveau jugement, après-coup. En ce sens, on pourrait presque considérer que Le Deuil de la Famille n’est finalement que l’équivalent de la première partie de Mascarade. Lire ces deux tomes (le troisième et le septième de la série Batman donc) à la suite permet d’apprécier davantage son premier jet sur le Joker, dont la fin était clairement décevante.

Il y a donc du très bon dans le scénario de cette Mascarade, comme son introduction, sa conclusion et certains passages (cités ci-dessus), mais l’ensemble comporte aussi des scènes plus mitigées. Globalement, ça reste plus que convenable. Notamment grâce aux dessins de Greg Capullo, toujours encrés par Jonathan Glapion et colorisés par Fco Plascencia. Les planches sont superbes et les découpages aussi. À l’instar de L’An Zéro, quelques scènes prennent une tournure « psychédélique » (l’agression par Joe Chill, la parade du Joker), rendant à la fois hommage aux anciens comics mais offrant aussi un aspect visuel détonnant et très plaisant.

Ennemys Endgame

Le deuxième acte, L’homme pâle, s’attarde sur plusieurs patients fous et un de leur médecin, plus ou moins pris en otage. Chacun délivre son passif avec le Joker, prouvant que le Clown du Crime existe depuis des lustres. À moins que chaque histoire soit fausse, exceptée une seule, que validera le Joker ? Plusieurs dessinateurs officient pour ce supplément plutôt pertinent : Kelley Jones, Graham Nolan (Knightfall), John McCrea, Sam Kieth (dont on retrouve la patte inimitable qui faisait le charme de Secrets) et Dustin Nguyen (Futures End : Batman & Robin #1 – Frères d’Armes et Le Vol du Corbeau). Roge Antonio s’occupe du troisième Annual de Batman : Mon Meilleur Ami, narrant l’improbable amitié entre le Joker et un journaliste. Tout est scénarisé par James Tynion IV, fidèle acolyte de Snyder, tête pensante numéro deux de son univers. Quelques couvertures alternatifs servent de bonus complémentaires.

Mascarade est donc un nouvel arc qui continuera de marquer Batman et ses alliés. Tout n’est pas parfait, Scott Snyder utilise encore le même schéma que sur ses précédentes réalisations (on se demande pourquoi il y a encore des habitants dans Gotham City !), son Batman est toujours immortel (un obus de char d’assaut et pas une égratignure) et des choses sont un peu tirées par les cheveux. Il faut fermer les yeux sur certains de ces éléments pour apprécier la série et cela commence à faire un peu beaucoup. Mais le divertissement est là, l’audace aussi, ainsi que la beauté graphique, ce qui permet à Mascarade d’être plutôt agréable à lire, malgré sa rapidité d’exécution (on a l’impression qu’il manque un ou deux chapitres pour comprendre tous les tenants et aboutissants de l’ensemble, en plus de la « fin » de certains combats bien trop rapide, notamment le premier contre la Justice League).

Batman Mascarade Joker Endgame

Comme précisé en début du livre par l’éditeur, « ce nouveau départ, multipliant les coups de théâtre et les rebondissements, n’est que la première étape d’une véritable révolution pour le héros, qui s’opérera dès le prochain album ». Album intitulé La Relève qui sera publié en deux parties en France, la première est prévu pour fin mai 2016. Une fois encore, Scott Snyder se réapproprie tout un univers et en casse les codes. La série arrive vers sa fin (elle est toujours publiée dans le magazine mensuel Batman Univers) mais Snyder prolongera (une ultime fois ?) sa plongée dans Gotham avec All-Star Batman, dont le premier chapitre devrait arriver pour le second semestre 2016 : après le nouveau relaunch de DC Comics : Rebirth.

NB : Un bandeau promotionnel, apposé sur la couverture du livre, informe que 150.000 exemplaires de la série ont été vendus. Il s’agit très certainement des premières éditions et réimpressions des six premiers tomes de la série Batman. Un très beau chiffre dont peut se féliciter Urban Comics.

Batman Joker Parade

[À propos]

Publié en France chez Urban Comics le 13 novembre 2015.
Scénario : Scott Snyder (Fini de Jouer) et James Tynion IV (L’Homme Pâle & Mon meilleur ami)
Dessin : Greg Capullo et collectif (voir article)
Encrage : Danny Miki (+ collectif)
Couleur : Fco Plascencia (+ collectif)
Lettrage : Stephan Boschat — Studio Makma
Traduction : Jérôme Wicky

BatFamily Endgame

► Acheter sur amazon.fr :
Batman – Tome 07 : Mascarade
Batman – Tome 03 : Le Deuil de la Famille

Batman Ergot Hiboux Batman Joker Capullo