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DC Universe & Batman Rebirth / Batman #1 / Detective Comics #934

Comme expliqué dans l’article consacré au Relaunch Rebirth, plusieurs nouvelles séries voient le jour dans cette « relance » de l’univers DC Comics. Il y a tout d’abord le numéro unique DC Universe Rebirth, puis ensuite un numéro Rebirth #1 one-shot de plusieurs super-héros (Batman, Superman, Aquaman…) avant que chacun d’entre eux ne retrouve un rythme normal et une appellation classique.

Ici, ce sont DC Universe Rebirth, Batman Rebirth #1 puis Batman #01 et Detective Comics #934 qui sont brièvement chroniqués.

DC Rebirth

Attention ! Même si les résumés ci-dessous sont sommaires et les critiques courtes, il y a des révélations majeures. De plus, l’ensemble de ces séries se déroulent après La Guerre de Darkseid mais également après la fin de la série Superman des NEW52 (le chapitre #50 pour être plus précis).

Si vous voulez conserver les éléments de surprises intacts, il est fortement déconseillé de lire la suite (aussi bien les résumés que les critiques) !

NB : il est fort probable qu’Urban Comics publiera en français chacun des chapitres évoqués ci-après, mais très certainement pas avant début 2017.

DC Universe Rebirth

DC Universe Rebirth
Wally West, ancien Kid Flash puis Flash (après les évènements survenus à la fin de Crisis on Infinite Earth) qui avait « disparu » il y a quelques années (à la fin de Infinite Crisis) voyage plus ou moins dans le temps et requiert l’aide de Batman (pour l’avertir d’un danger imminent), sans succès car il est « aspiré » par la force véloce. Il fait de même avec d’autres personnes, en vain. De son côté, Ray Palmer, alias Captain Atom, est lui aussi « perdu » dans une dimension nanotechnologique dont il ne peut sortir.
Après avoir rendu de brèves visites et s’être remémoré des souvenirs avec d’anciens justiciers, Wally West réussit à revenir définitivement « dans le présent » grâce à Barry Allen, l’actuel Flash. Superman est porté disparu et un Clark Kent d’un autre monde mène une vie rangée avec sa femme et sa fille mais fait une rencontre inattendue. Au fond de la Batcave, le Chevalier Noir découvre un étrange badge. Ils sont observés depuis longtemps…

Après Flashpoint il y a cinq ans, ce Rebirth s’annonce beaucoup plus épique (et réfléchi) car il propose —pour l’instant en tout cas— une continuité claire et nette (aussi bien après le chronologie classique que celle des New 52), mais également une possibilité de jonction de quelques années perdues. L’ensemble est parfaitement compréhensible et a le culot monstre d’ajouter définitivement Watchmen comme œuvre incorporée dans l’univers des super-héros DC. Un gage à la fois salvateur puisque cela permet(rait) une cohérence plausible grâce au statut de « Dieu » et créateur de monde du Dr Manhattan. Mais cette surprenante raccroche en irritera plus d’un (à commencer par le créateur de l’œuvre mère, Alan Moore — qui n’a sans doute pas été consulté) : le comic culte, même si publié chez DC et usant de vieux personnages, prévalait par son statut « d’indépendant » et non rattaché à quoique ce soit (déjà polémique à l’époque de la sortie des préquelles — auxquelles le site Before Watchmen est consacré, créé par l’auteur de ces lignes) ; il n’y avait pas non plus d’obligation de le lire pour suivre la suite de DCVerse. Bref c’est à la fois ingénieux, osé et risqué. L’ensemble est donc très intrigant, réussi et bien écrit, à nouveau par Geoff Johns (déjà scénariste de Flashpoint puis de la série Justice League entre autres). Les dessins sont assurés par des artistes de valeur sûre : Gary Frank et Ivan Reis en tête, ainsi qu’Ethan Van Sciver et Phil Jimenez. Quatre chapitres (Lost, Legacy, Love, Life) et un épilogue composent le tout, pour près de soixante-dix pages de bandes dessinées.

BATMAN_REBIRTH

Batman Rebirth #1
Julian Day, alias Calendar Man, menace de déverser des spores dans la ville qui chamboulent le cycle des saisons et de la nature. Duke, nouvel allié de Batman mais pas un nouveau Robin (rencontré dans la série Batman puis mis en avant dans l’event We are Robin) est convié par Bruce Wayne à vivre au Manoir, afin justement d’être entraîné pour être « quelque-chose de nouveau »…
Un chapitre unique écrit par Scott Snyder, qui a opéré la précédente « renaissance » du Chevalier Noir avec sa longue série et Tom King, qui était sur la série Grayson, en compagnie du dessinateur Mikel Janin qui officie justement ici. C’est beau, très beau, mais clairement moyen sur l’histoire, très expéditive. Pas de réels enjeux dramatique ni le temps de s’attarder réellement sur un personnage en particulier. L’ennemi, rarement utilisé, n’est pas mis en avant sous un beau jour, même si on découvre qu’il « mue » et vieillit, telles la faune et la flore. Une belle réinvention esthétique du personnage toutefois, mais qu’on espère voir davantage. On nous promet d’ailleurs une suite, toujours par Tom King, dans Batman #1 (voir ci-après) et une autre dans All-Star Batman #1, par Scott Snyder (prévue en août 2016). Ce Batman Rebirth sonne volontairement comme une métaphore du renouveau, plus ou moins accentué par ce qu’on voit et qu’on lit, mais c’est clairement pas très pertinent et trop redondant pour donner un one-shot de qualité, au contraire c’est surtout une introduction à un nouvel univers, dont on attend la suite. En ce sens, le lecteur peut se sentir lésé, à raison.

Detective Comics 934

Detective Comics #934
Batman combat Azrael (Jean-Paul Valley) dans une église et découvre qu’un mini-drône, en forme de chauve-souris qui plus est, le surveille. Il rend visite à Batwoman (Kathy Kane) car elle était aussi espionnée par les mêmes gadgets. Le Chevalier Noir fait d’elle sa partenaire et tous deux sont chargés d’entraîner chaque justicier de Gotham qui était suivi par un drône : Red Robin (Tim Drake), Spoiler (Stephanie Brown), Orphelin (Cassandra Cain) et… Gueule d’Argile, à qui Batman souhaite donner une seconde chance.
Excellent début pour une série emblématique de l’éditeur. Joliment dessinée par Eddy Barrow (qui officiait sur les trois premiers tomes de Nightwing) et écrite par James Tynion IV, on sent l’influence de Batman Eternal, avec un fort concept d’entrée, plusieurs héros ou antagonistes et un gros potentiel derrière. Attention donc à la suite, mais cette entrée en matière est fortement agréable, élégante et convaincante !

batman-1

Batman #01
Batman tente de sauver le crash d’un avion en se posant carrément dessus !
Tom King qui avait co-écrit Batman Rebirth (et scénarisé Grayson) empile pour cette suite, plus aboutie, avec David Finch aux dessins (qui s’occupait de la série très mitigée Le Chevalier Noir et La Nouvelle Aube). Les planches sont sublimes, la scène principale fonctionne bien : beaucoup de tension, de suspense, une belle émotion sur la fin également (même si un peu surprenante et peu crédible, ça fonctionne quand même) et une surprise de taille. En effet, deux nouveaux personnages font leur apparition, chacun doué de force surhumaine pour l’instant, mais qui ne sont pas forcément dans le camp des ennemis : Gotham et Gotham Girl. Des noms certes risibles mais du changement, à suivre donc ! Une seule case sonne comme un léger rappel à DC Universe Rebirth, à chacun d’y faire sa petite théorie.

Si le DC Universe Rebirth chamboule « un peu » l’univers déjà connu de DC (au moins dans les dernières planches avec des révélations), les séries suivantes consacrées à Batman restent globalement dans la continuité de ce qu’il s’est fait durant la période New52 (excepté Alfred, qui n’est plus manchot, dommage, mais elles reprennent le personnage de Duke Thomas par exemple). Bref, même si ce Relaunch ne fait pas vraiment office de pétard mouillé (trop tôt pour juger par rapport aux autres séries et à la suite de la trame principale), pour Batman rien ne change vraiment, comme il y a cinq ans, ce fut quasiment la même chose, seul le Dark Knight n’avait pas vraiment été impacté par Flashpoint, les séries suivaient alors le travail de Morrison de l’époque et de la chronologie « classique » avec les mêmes alliés et ennemis. Ce n’est peut-être pas plus mal. Les deux nouvelles séries régulières sont de bons points d’entrée, même si forcément pas extrêmement limpides pour le pur débutant, et donnent envie de lire la suite, en plus d’être extrêmement bien dessiné. C’est là le principal.

Justice League – Tome 8 : La Ligue d’Injustice

Ligue Justice Tome 8 Ligue d'Injustice

[Histoire]
Après les évènements survenus durant Le Règne du Mal, la Ligue de Justice intègre Shazam dans ses rangs, qui se lie d’amitié avec Cyborg. Considéré comme le sauveur de la Terre, Lex Luthor, souhaite lui aussi rejoindre l’équipe mais ses membres sont réticents.

Luthor a déduit l’identité de Batman et se rend au Manoir Wayne pour en informer le principal intéressé. Il souhaite avoir l’avantage sur une proposition de partenariat économique avec les entreprises Wayne (quitte à faire du chantage). Le terrible homme d’affaires recrute également Captain Cold (ennemi de Flash normalement) pour assurer sa sécurité.

Par ailleurs, l’anneau de Power Ring a pris possession de l’esprit de Jessica, une « simple » citoyenne. Véritable entité maléfique, l’artefact contrôle directement la jeune femme qui commet des actes de destruction à son insu. Pour l’aider, c’est la Doom Patrol qui doit intervenir, petite équipe hétéroclite dont les membres sont rejetés par la société à cause de leurs « gueules cassées ».

Enfin, Superwoman, une des trois survivantes du Syndicat du Crima est emprisonnée et… enceinte !

Injustice League

[Critique]
Transition obligatoire, les chapitres de l’après Règne du Mal sont davantage contemplatifs et (un peu) moins portés vers l’action (surtout dans sa moitié initiale). Cela n’est pas une mauvaise chose, mais l’on y découvre un fourre-tout pas forcément très bien équilibré. Les membres de la Ligue de Justice se résument au trio emblématique (Superman, Batman et Wonder Woman) gravitant autour de Lex Luthor. Les autres (Flash, Aquaman…) font office de figuration. Cette façon de faire n’est pas forcément déplaisante mais on se sent un peu lésé par rapport aux autres protagonistes (un « défaut » par ailleurs récurrent sur l’ensemble de la série). Les quelques échanges entre Shazam et Cyborg fonctionnent bien et apportent une touche d’humour non négligeable.

Shazam à Cyborg :
– Qu’est-ce que vous faîtes pour vous amuser, par ici ? Parce que là, bonjour l’ambiance ! On doit bien pouvoir faire autre chose que de surveiller, non ? Il n’y avait pas de table de ping-pong dans l’ancienne tour de garde ?

– Non.
– Il vous en faut une. Sérieux. Et une piscine, aussi.
– Aquaman en voulait une.
– Tu as déjà remarqué qu’il dégageait comme un léger parfum de poissonnerie ? Ne lui dis pas que j’ai dit ça, hein ?
– T’inquiète.
– Bon. Vous avez au moins une XBox, quand même ?
– Moi, ouais. Dans mon épaule gauche.
– Sérieux ?! On se fait une partie ?

Bruce Wayne Luthor

L’ouvrage contient deux arcs : La Ligue d’Injustice (curieuse appellation) et Le Virus Amazo. Si la première est plutôt « originale » sur son histoire (centrée sur Luthor donc), elle oscille entre l’agréable et le moyen (qu’advient-il de la Doom Patrol, soudainement survenue ?). Constat surtout imputable à cause des planches de Doug Mahnke, qui manquent clairement de « style », c’est très banal, pas forcément esthétique ni extraordinaire. Les visages sonnent « faux ». La seconde est plus efficace grâce aux dessins de Jason Fabok. Ses traits sont somptueux, détaillés et léchés, se rapprochant de ceux de David Finch et de Jim Lee ; ces trois artistes ayant un style assez similaires et très efficaces. Les scènes d’action sont d’une fluidité exemplaire. Visuellement sublime.

Fabok Wonder Woman

Scénaristiquement plus faible (et très prévisible), l’aspect graphique prime quand même avant tout et relance l’intérêt de la série, qui avait tendance à se centrer beaucoup trop autour de Lex Luthor. Ce parti pris (discutable) s’avère toutefois payant puisqu’en un volume on assiste à l’ascension puis la chute de l’éternel ennemi de Superman ; bien que son sort (au sein de la Justice League) ne soit pas définitivement statué à la fin. Fin qui annonce d’ailleurs le retour de Green Lantern, dans l’apprentissage du Power Ring pour Jessica (à lire dans la série de Green Lantern à priori). L’ensemble du récit est toujours écrit par Geoff Johns (depuis le tout début de la série). L’auteur soigne son histoire et sait où il va, il est par contre dommage que certains passages lui échappent ou ne soient qu’éphémères (la Doom Patrol en est le parfait exemple, on pourrait en rajouter beaucoup d’autres, la plupart étant à suivre dans les séries d’autres super-héros, ce qui est parfois agaçant). Le fil rouge narratif principal est, en tout cas, toujours solide et passionnant, c’est l’essentiel.

« Ma Doom Patrol est un groupe de soutien pour méta-humains
incapables de devenir les dieux et les déesses qui constituent la ligue de justice. »
Niles Caulder, chef de la Doom Patrol

Le chef antipathique Niles Caulder de l’équipe des Doom Patrol n’aide pas à générer de la sympathie pour lui, voire pour ses membres, peu fouillés et débarquant un peu brusquement (Element Woman servant de lien avec les anciens chapitres puisqu’elle apparaissait en amont dans la série mais aussi dans Flashpoint et dans La Ligue de Justice d’Amérique).

Doom Patrol

Un chapitre un peu particulier vient clore ce huitième tome, il s’agit de Compte Rendu qui achevait Justice League of America, courte série conçue uniquement pour faire le lien avec la Guerre des Ligues. En quatorze chapitres (dont presque la moitié ont été publiés dans le tome 4 de Justice League pour une meilleure cohérence en France), cette ligue particulière n’a pas été bien exploitée (elle n’était qu’un prétexte à être une troisième équipe qui prendrait part à un event) et s’est terminée en se scindant en plusieurs mini-séries. Une de ses « suites » est Justice League United (inédite chez nous) se concentrant sur Le Limier Martien et Stargirl qui prennent la tête de leur nouvelle league.

Ces deux personnages sont justement au cœur de cet ultime chapitre, servant de conclusion à la fois au livre, mais aussi à la série éponyme (et qui fait donc suite au quatrième tome). Saluons le choix d’Urban de le placer ici. D’autant plus que cette « fin » n’est pas spécialement épique. Se succèdent ainsi bon nombre de dessinateurs pour dévoiler un Limier Martien bien trop impulsif et colérique qui rejoint une jolie et maline Stargirl, avant de devenir un duo s’éloignant de la Terre. Entre-temps, le lecteur découvre ce qu’il est advenu de chaque ancien membre (Katana, Green Arrow, Catwoman…).

Stargirl

La Ligue d’Injustice sonne donc comme une transition post-Forever Evil (ce qui est logique), beaucoup trop orienté sur Lex Luthor (cela peut déplaire), ne mettant pas assez en avant des membres de la Ligue de Justice et contenant trop d’annonces laissées en suspens : Owl Man, Superwoman, la Doom Patrol, les futurs métahumains (et quid de Metal Men et des autres ligues des volumes précédents ?)… Néanmoins, l’ensemble fonctionne et se lit très bien. Il devrait déboucher sur quelque-chose de plus grand, comme le prouve le dernier chapitre du Virus Amazo. Il tend vers une épopée plus cosmique (La Guerre de Darkseid — qui sera en effet le titre des deux derniers tomes de la série) et dirige vers Convergence, un nouvel évènement massif qui impactera toutes les séries (oui, encore) et pourrait même causer un relaunch (MàJ mai 2016 : c’est effectivement le cas avec Rebirth). Du côté de Batman : du mal à anticiper la suite puisque Luthor, clairement en mauvaise posture au sein de la Ligue, connaît son identité. Entre cette information et les nouvelles, découvertes dans l’œuvre, on espère que la suite et fin de la série les utilisera à bon escient.

Malgré les défauts évoqués, la série, injustement qualifiée de mainstream et/ou « destinée au grand public » (pourquoi serait-ce un défaut ? pourquoi penser que, par conséquent, ce n’est « pas bien » ? la qualité peut être au rendez-vous également, c’est le cas depuis le début de toute façon), gagne en profondeur et assure une lecture divertissante et agréable.

Batman Superman Virus Amazo

« Vois-tu, chère sœur, les criminels méta-humains tuent des centaines de personnes, chaque année.
Aucune prison sur Terre n’est en mesure de les retenir bien longtemps.
Plus de 87% des méta-humains violents s’évadent moins de trois mois après leur incarcération.
En moins d’un mois à Arkham.
Après avoir rencontré les familles des victimes, je leur ai juré que je trouverais un meilleur moyen de neutraliser ces terribles criminels.
J’ai alors cherché comment bloquer les pouvoirs méta-humains.
Le Virus Amazo a été conçu pour les inhiber temporairement.
»
Lex Luthor

Luthor

 

[À propos]
Publié en France chez Urban Comics le 23 octobre 2015
Scénario : Geoff Johns + Matt Kindt (Compte Rendu)
Dessin : Doug Mahnke (La Ligue d’Injustice #1-4 + Le Virus Amazo Prologue), Ivan Reis (La Ligue d’Injustice #1 + Le Virus Amazo Prologue), Jason Fabok (Le Virus Amazo #1-5), Scott Kolins (épilogue La Ligue d’Injustice) et collectif (Compte Rendu)
Encrage : Scott Hanna (La Ligue d’Injustice), Christian Alamy (La Ligue d’Injustice + Le Virus Amazo Prologue) et Keith Champagne (La Ligue d’Injustice #2-4 + Le Virus Amazo Prologue) et collectif ( Le Virus Amazo Prologue et Compte Rendu)
Couleur : Rod Reis (La Ligue d’Injustice #1-2), Andrew Dalhouse (La Ligue d’Injustice #3-4-ép.), Brad Anderson ( Le Virus Amazo), Brian Miller (Hi-Fi) (pour Compte Rendu)
Lettrage : Stephan Boschat — Studio Makma
Traduction : Edmond Tourriol — Studio Makma

(Contient : JL #30-39 + JLA #14)
La Ligue d’Injustice (JL#30-34 + ép.) / Le Virus Amazo (prologue + JL#35-39) / Compte Rendu (JLA#14)

Power Ring Jessica

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Lex Luthor Alfred

Batman – Tome 08 : La Relève (1ère partie)

Avant-dernier tome de la série scénarisée par Scott Snyder, l’artiste va encore plus loin que d’habitude pour casser les codes de la mythologie du Chevalier Noir. Audacieux ou ridicule ? Dans les deux cas, c’est osé et ne laisse pas indifférent. Plongée dans la suite de Mascarade, qui dévoile un nouveau Batman, au sens littéral comme au figuré.

batman-tome-8-la-releve

[Histoire]
Cinq ans avant l’attaque du Joker sur Gotham City, un cadavre était retrouvé par Batman dans les marécages en amont de la ville. Ce dernier aurait un lien avec… Le Pingouin.

De nos jours, alors que Batman est considéré comme mort, c’est l’ancien commissaire Gordon qui est désigné par la puissante compagnie Powers International pour remplacer le Chevalier Noir ! Mais celui-ci travaillera avec la police et n’agira pas en totale indépendance. L’évolution du symbole du justicier s’illustre également à travers un costume radicalement modifié puisque « Batman » est aux commandes, la majeure partie du temps, d’une armure géante/combinaison robotique. Celle-ci ne sera pas de trop pour venir à bout d’ennemis composés d’énergie et aux super-pouvoirs divers.

De son côté, Bruce Wayne est sorti vivant de son combat contre le Joker mais est devenu amnésique. Il est en couple et s’occupe de jeunes enfants dans un refuge de Lucius Fox. Alfred lui a rappelé une partie de son passé mais lui a caché son ancienne identité secrète, afin que son maître continue de vivre heureux et apaisé.

Dans les ruelles de Gotham, un nouveau mal rôde : Mister Bloom, créature longiforme qui a l’air indestructible…

Batman Bunny

[Critique]
Voici une histoire atypique dans l’univers de Batman. Si le chapitre qui ouvre le comic-book (le #44, Un cas comme un autre, sorte de flash-back placé en début d’intrigue pour cette version reliée en librairie) est de facture classique, écrit par Scott Snyder et Brian Azzarello (Dark Knight III, La Cité Brisée), élégamment dessiné par Jock (Sombre Reflet) qui signe aussi la couverture choisie pour cette édition française, les suivants (du #41 au #43 puis le #45) du tandem Snyder-Capullo offrent un renouveau faussement polémique. Tout d’abord, Bruce Wayne écarté de son rôle de justicier a déjà été vu, aussi bien dans le run de Morrison (lorsque Batman était « mort » et remplacé par Dick Grayson) mais également dans la saga Knightfall, où Jean-Paul Valley lui succédait le temps que le milliardaire se remette de sa blessure. Ce fameux « Azraël » évoluait d’ailleurs vers un costume de plus en plus robotique, comme ici et à l’instar de l’armure qu’endosse Batman dans The Dark Knight Returns de Frank Miller (et dans une moindre mesure dans Kingdom Come). Bref, rien de réellement novateur sur ce plan là ; seule l’amnésie de Wayne est « originale ». Plus anecdotique : ce principe de relève (comme le titre du livre) se rapproche de la vision de Christopher Nolan dans son film The Dark Knight Rises, qui concluait sa trilogie.

Par ailleurs, l’idée que Batman soit financé (et « contrôlé ») par une organisation rappelle à nouveau Morrison avec Batman Incorporated (la notion de contrôle en moins, évidemment). Finalement, outre le look d’une armure tourné vers les « mechas » (issus des animes et mangas, donc de la culture japonaise) et plutôt calqué sur un lapin qu’une chauve-souris, c’est surtout que Gordon soit affilié à cette position qui est surprenant. C’est éventuellement réprobateur : le policier, quarante-six ans dans la série, suit un entraînement intensif, se rase le crâne, enchaîne les vannes et les punchlines… En somme, ce Gordon 2.0 devient « cool » et totalement différent du personnage classique. C’est ce parti pris, trahison suprême ou intéressante initiative, qui mérite un débat. Dans l’évolution du travail de Scott Snyder, ça ne choque pas tant que cela mais pour un respect de cohérence, il aurait été plus judicieux de choisir un autre protagoniste pour incarner cette mouture. Pourquoi pas Harper Row, alias Bluebird ? Une jeune fille démunie et un brin punk : une image totalement contrastée avec celle de Bruce Wayne. Introduite dès le début de la série et occupant une place de plus en plus importante (notamment dans Batman Eternal), cela aurait été un choix certainement plus judicieux (mais toujours délicat par rapport au reste).

Bruce Wayne Gordon New Batman

Scott Snyder, très lucide, a anticipé les critiques négatives (une fois de plus) en établissant plusieurs mises en abîme dans sa bande dessinée pour montrer à son lectorat qu’il a bien conscience du traitement totalement hors-norme qu’il fait subir à Batman. Ainsi, l’on découvre en dessin deux enfants qui tiennent chacun une figurine du Chevalier Noir : l’un a celle du Batman « classique », l’autre celle du nouveau (c’est à dire de l’armure/du robot).

« Tu peux raconter ce que tu veux, mais Batman, c’est celui-ci. C’est lui, le vrai.
Ton machin là ? Même s’il a toute une collec’ de jouets assortis, c’est pas Batman.
Et puis, sérieux, il a même pas de Batmobile ! »

Même chose plus loin, avec Gordon qui explique que sa combinaison hight-tech, ressemblant plus à un lapin qu’à une chauve-souris, n’est pas non plus ce qu’est censée représenter le Chevalier Noir. Sans parler de la Batmobile devenue un énorme camion blindé…

« Parce que pour moi, non, hein, c’est pas Batman, ça. […]
On dirait… Un Bat-Lapin. Un Robot-Bat-Lapin ? »
[Gordon lorsqu’il découvre sa future armure.]

Batman La Releve Figurines

À côté de cette version plus ou moins novatrice de Batman, le lecteur découvre un ennemi végétal, créature hybride particulièrement menaçante, encore un peu mystérieuse. Poison Ivy aurait-elle été plus appropriée ? Très certainement. Elle aurait gagée aussi à parfaire un angle « réaliste » plausible qui était sensiblement instauré depuis le premier tome. Le Caped Crusader affronte en plus d’autre étrangetés, monstres organiques et/ou composés d’énergie (!). Ces combats ne transportent pas vraiment le lecteur (d’autant plus qu’on ne comprend pas spécialement leurs enjeux), ils servent surtout à se familiariser avec Gordon/Batman.

Les quatre chapitres de Snyder/Capullo sont encore trop « maigres » pour plonger avec fascination dans ce nouvel arc. Comme pour La Cour/Nuit des Hiboux et L’An Zéro, Snyder préfère étaler (à raison) son histoire sur l’équivalent de deux volumes. Ce n’est pas plus mal car ses « one-shot » (Le Deuil de la Famille et Mascarade) se lisent trop rapidement, confèrent un sentiment de bâclage voire de chapitres expéditifs. Il faudra donc attendre la suite (et fin) de cette relève pour construire un avis définitif, aussi bien sur ce segment que sur son travail global sur la série.

Comme toujours, côté graphique, le triptyque de choc excelle : Greg Capullo et son trait fin, détaillé et fluide, encré par Danny Miki puis colorisé avec brio par Fco Plascencia. Ce dernier procure, depuis L’An Zéro, un rendu visuel parfois « psychédélique », avec de nombreuses couleurs vives : en résultent d’agréables planches. Pour la partie scénaristique, cela devient une habitude : Snyder enchaîne bonnes et mauvaises idées et citent beaucoup ses anciennes et annexes productions (agréable pour le fin connaisseur, déstabilisant pour le néophyte). Par exemple le jeune Duke aperçu enfant dans L’An Zéro est ici adolescent et les connexions avec Batman Eternal et Mascarade sont nombreuses. Mais on navigue entre flashbacks et flashforwards avec une étonnante fluidité (les prémices du nouveau Batman, l’acceptation puis le changement de Gordon, ses affrontements, etc.).

Batman Gordon Suit Costume

Batman Annual #4, Maison de Fous, clôt l’ouvrage. Écrit par James Tynion IV (fidèle compagnon de plume de Snyder, comme le #3 publié dans Mascarade), on y suit Bruce Wayne (qui ignore toujours son ancienne double-identité), sa compagne Julie, mademoiselle Powers (à la tête de la compagnie éponyme qui a recruté Gordon en nouveau Batman) et Alfred dans le manoir familial (qui était devenu provisoirement le lieu d’hébergements des fous de l’asile d’Arkham, suite à son effondrement dans Batman Eternal). Le petit groupe sera confronté à l’Homme-Mystère, Mister Freeze et Gueule d’Argile. Un bon complément, dessiné par Roge Antonio, qui poursuit le statu quo inédit du lieu. La Relève est donc à découvrir, principalement pour son originalité (qui divisera, comme toujours), mais il est nécessaire de prévoir l’achat de la suite, faute de ne pas être totalement satisfait cette fois-ci.

Batman Releve

[À propos]
Publié en France chez Urban Comics le 27 mai 2016.
Scénario : Scott Snyder, Brian Azzarello (Un cas comme un autre) et James Tynion IV (Maison de fous)
Dessin : Greg Capullo, Jock (Un cas comme un autre) et Roge Antonio (Maison de fous)
Encrage : Danny Miki
Couleur : Fco Plascencia, Lee Loughridge (Un cas comme un autre) et Dave McCaig (Maison de fous)
Lettrage : Stephan Boschat — Studio Makma
Traduction : Jérôme Wicky

Contient : Batman #41-45 and Free Comic Book Day 2015: DC Comics Divergence #1 + Batman Annual #4

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